19 janvier 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-17.184

Première chambre civile - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:C110062

Texte de la décision

CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 19 janvier 2022




Rejet non spécialement motivé


M. CHAUVIN, président



Décision n° 10062 F

Pourvoi n° S 20-17.184




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 19 JANVIER 2022

M. [S] [K], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 20-17.184 contre l'arrêt rendu le 9 avril 2020 par la cour d'appel de Chambéry (2e chambre), dans le litige l'opposant à la société HBC, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la société CBC, défenderesse à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations écrites de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. [K], de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société HBC, après débats en l'audience publique du 23 novembre 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.


1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [K] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [K] et le condamne à payer à la société HBC la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille vingt-deux.

Le conseiller rapporteur le president






Le greffier de chambre MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour M. [K].

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif D'AVOIR condamné M. [K] à régler à la société HBC, venant aux droits de la société CBC, la somme de 90 000 € en remboursement de la somme de 100 000 € versée à titre de prêt suivant chèque du 17 décembre 2015, et ce avec intérêts à taux légal à compter du 19 avril 2017 et D'AVOIR condamné M. [S] [K] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

AUX MOTIFS PROPRES QUE « conformément à l'article 1326 du code civil dans sa rédaction en vigueur jusqu'au 1er octobre 2016, et recodifié à droit constant à l'article 1376, l'acte juridique par lequel une seule personne s'engage envers une autre à lui payer une somme d'argent ou à lui livrer un bien fongible doit être constaté dans un titre qui comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, l'acte sous seing privé vaut pour la somme écrite en toutes lettres. En l'espèce, la société HBC se prétend créancière de M. [K] et produit, pour justifier sa demande, une reconnaissance de dette non datée pour un montant de 100 000 €. Il n'est pas contesté par cette dernière que M. [K] n'a pas personnellement rédigé le document litigieux pas davantage qu'il n'est pas contesté par M. [K] que la signature apposée au pied de page l'a été par lui-même. Il en résulte que l'acte sous seing privé passé entre les parties ne peut valoir reconnaissance de dette en l'absence de mention manuscrite personnelle, de la part de M. [K], relative au montant de l'engagement. Pour autant, le document peut constituer un commencement de preuve par écrit susceptible d'être corroboré par des éléments extérieurs. En ce sens la société HBC produit aux débats une copie du chèque de 100 000 €, en date du 17 décembre 2015, libellé au nom de M. [K] ainsi qu'un relevé de compte du même mois établissant la matérialité du débit au 18 décembre suivant. M. [K], qui ne conteste pas avoir perçu les fonds, ne produit aucun élément probant permettant de démontrer que le versement de cette somme aurait pour objet le paiement d'une quelconque prestation ou l'exécution d'un quelconque engagement de cette société à son profit. Il apparaît bien au contraire, aux termes de conclusions prises dans l'intérêt de ce dernier dans le cadre d'une instance de référé antérieure, que M. [K] reconnaît qu'il s'est engagé à rembourser les fonds selon l'échéancier suivant : - 20 000 € avant le 31 décembre 2016, – 30 000 € courant juin 2017, - le solde, soit 40 000 € avant la fin de l'année 2017. En conséquence, la cour retient que le tribunal de première instance a, à bon droit, jugé que la preuve du versement de la somme de 100 000 € à titre de prêt était acquise et condamné M. [K] à rembourser à la société créancière la somme résiduelle de 90 000 €, conformément à sa demande ».

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « en l'espèce en premier lieu M. [K] ne conteste pas avoir perçu de la part de la SARL CBC, dont M. [Y] [E] est gérant, une somme de 100 000 € suivant chèque du 17 décembre 2005 versé au dossier. En second lieu, au soutient de sa demande de remboursement du prêt, la société CBC produit aux débats une reconnaissance de dette manuscrite en date du 17 décembre 2015, qui mentionne en entête le nom et les coordonnées de M. [S] [K], adressée à « M. [Y] [E], CBC », suivi de l'adresse du siège social de la société CBC, soit le [Adresse 3], conformément à l'adresse de la société inscrite dans l'extrait Kbis de la société fourni au dossier. Par ailleurs, cette reconnaissance de dette, signée par M. [S] [K], indique : « [Y], je te remercie de l'avance de ce jour de 100 000 € (cent mille euros). Je soussigné [K] [S], déclare devoir à la société CBC la somme de 100 000 € (cent mille euros), que je remboursera à compter d'avril 2016. Ceci est une reconnaissance de dette et pour faire valoir ce que de droit, ce courrier ». Il y a lieu d'observer, que le document, comme souligné par le juge des référés, comporte bien mention de la somme en chiffres et en lettres comme requis par l'article 1376 du code civil. Toutefois, M. [K], qui ne remet absolument pas en cause la signature qu'il a apposé en bas de ce document, conteste néanmoins en avoir été le rédacteur, point sur lequel la société demanderesse est taisante. Or, il ressort de cet acte que l'écriture est parfaitement homogène et ressemble, comme l'a remarqué le juge des référés, à celle utilisée pour rédiger le chèque de la Sarl CBC portant versement de la somme de 100 000 € au profit de M. [K]. Dès lors il peut effectivement être considéré que le document du 17 décembre 2015, faute d'avoir été rédigé par le débiteur, est imparfait et ne suffit pas en lui-même pour fonder la demande de remboursement de prêt par la Sarl CBC. Cependant, force est de constater que l'existence de la dette de M. [K] à l'égard de la société CBC n'est en réalité pas contestable. D'une part, M. [K] afforme que cette somme constitue en réalité une avance faite à titre personnel par M. [E] dans la perspective d'une opération immobilière commune relativement au rachat d'un hôtel. M. [K] produit en ce sens un dossier prévisionnel de création d'activités s'agissant de la reprise d'un hôtel dénommé « la villa tranquille » ainsi qu'une attestation du 17 juillet 2017 émanant de M. [C], expert comptable du cabinet Eurex qui indique « avoir rencontré MM. [K] et M. [E] dans le cadre du projet de financement destiné au rachat de la villa tranquille à Talloires ». Toutefois, le défendeur indique bien, aux termes de ses dernières écritures, que M. [E] s'est retiré de ce projet, comme en justifie d'ailleurs l'ordonnance du tribunal de commerce d'Annecy du 28 juin 2017 qui ne mentionne pas le demandeur en qualité d'acquéreur de l'hôtel susvisé aux côtés de M. [K], de sorte que même dans cette hypothèse, sur laquelle la demanderesse ne faut aucune observation, il est cohérent que cette avance doive désormais donner lieu à remboursement au profit du prêteur. D'autre part, M. [K] n'apporte aucun élément descriptif, ni aucune facture ou évaluation du temps et de la nature des activités fournies, outre aucun autre témoignage, qui confirment que le montant de cette somme doit venir en fait compenser les différentes démarches qu'il a effectuées dans la perspective de ce projet commun de rachat de l'hôtel. Ainsi cette somme ne peut être considérée comme valant rémunération d'une quelconque activité déployée par le défendeur au profit de M. [E] ou de la société CBC. Enfin il n'est pas contestable que cette somme versée l'a bien été par la société CBC suivant chèque de la société CBC du 17 décembre 2015, somme dont il est justifié qu'elle a été débitée du compte de la société CBC le 18 décembre 2015. En outre, le défendeur, pour contester tout remboursement à la société CBC, indique qu'il s'agit forcément d'un prêt à titre personnel par M. [E] qui ne pouvait pas octroyer un prêt au nom de sa société. Il s'agit néanmoins de noter qu'aucun élément n'est rapporté par le défendeur pour étayer le fait que M. [E] ne pouvait pas engager valablement la société CBC au titre d'un prêt, étant rappelé en tout état de cause qu'un acte accompli par le gérant, même au mépris de son objet social ou d'une clause statutaire limitant ses pouvoirs, engage tout de même la Sarl. Par ailleurs suivant courrier du 16 décembre 2016, la société CBC, qui confirme avoir été remboursée le 19 octobre 2016 de la somme de 10 000 €, élément que ne conteste pas M. [K], a proposé à ce dernier un nouvel échéancier de remboursement de la dette de 100 000 €, proposant le paiement de la somme de 20 000 € avant le 31 décembre 2016, puis 30 000 € courant juin 2017, et le solde de 40 000 € avant fin 2017. Or, M. [K] n'a pas respecté cet échéancier de sorte que par courrier recommandé en date du 19 avril 2017, le conseil de la société CBC a mis en demeure le défendeur en remboursement de la somme de 90 000 €. A titre surabondant, il s'agit de remarquer que M. [K] a d'ailleurs proposé à titre subsidiaire du dispositif de ses conclusions devant le juge du référé, de rembourser à la société CBC ladite somme à raison de 1 000 € par mois pendant 90 mois afin de solder sa créance. Par conséquent, il y a lieu de considérer que la créance de la société CBC est certaine, liquide et exigible, et de condamner M. [K] à verser à la société CBC la somme de 90 000 €, outre intérêts à compter du 19 avril 2017 ».

1°/ ALORS QUE le commencement de preuve par écrit d'un prêt doit être complété par des éléments extérieurs, lesquels ne peuvent résulter de la seule preuve de la remise des fonds qui ne permet pas de justifier l'obligation de les restituer ; qu'en l'espèce, il était constant que la reconnaissance de dette produite par la société CBC, devenue HBC, était irrégulière pour n'avoir pas été rédigée par M. [K], de sorte qu'elle pouvait tout au plus constituer un commencement de preuve par écrit qui devait être complété par des éléments extrinsèques rendant vraisemblables l'existence du prêt allégué ; qu'en jugeant, par motifs propres et adoptés, que la preuve de la remise des fonds, dont il était soutenu qu'ils constituaient une avance dans le cadre du projet commun, pouvait utilement compléter la reconnaissance de dette irrégulière pour caractériser le prêt, la cour d'appel, qui a statué par motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1341 et 1347 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

2°/ ALORS QUE c'est à celui qui se prétend créancier d'établir la réalité de l'obligation dont il se prévaut et que la seule preuve de la remise des fonds à une personne ne suffit pas à justifier l'obligation pour celle-ci de les restituer ; qu'en l'espèce, M. [K] contestait être tenu de rembourser les 100 000 € qui lui avaient été remis par la société CBC, devenue HBC, de sorte que c'est à cette dernière qu'il appartenait d'établir que les fonds avaient été remis à titre de prêt ; qu'en relevant, par motifs propres et adoptés, pour condamner M. [K] à restituer les sommes considérées, qu'il admettait que les fonds avaient été remis à titre d'avance dans le cadre du projet commun et qu'il ne démontrait pas que le versement reçu aurait eu pour contrepartie des démarches effectuées par ses soins dans la perspective de ce projet commun, ou tout autre engagement de la société CBC à son profit, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1315, devenu l'article 1353, du code civil.

3°/ ALORS QUE le juge ne peut dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que dans les conclusions produites dans l'instance en référé-provision l'opposant à la société CBC, devenue HBC, l'exposant soutenait que l'obligation de restitution était sérieusement contestable dès lors que la preuve de l'obligation au regard des prévisions de l'article 1326 du code civil n'était pas rapportée puis, « à titre surabondant », contestait encore la « validité juridique » de cet acte et, « en outre », « qu'aucun échéancier de paiement n'a été convenu dans le document signé par M. [K] » et que le « seul échéancier est en date du 16 décembre 2016 », au regard duquel il n'aurait donc en tout état de cause qu' « un retard de 40 000 € » ; qu'en jugeant qu'il résultait de ces conclusions que M. [K] « reconnaît qu'il s'est engagé à rembourser les fonds selon l'échéancier » (arrêt attaqué, p. 5), la cour d'appel a dénaturé ces conclusions, en violation du principe précité, ensemble de l'article 4 du code de procédure civile.

4°/ ALORS QUE le juge ne peut pas se fonder sur l'argumentation subsidiaire d'une partie pour écarter son argumentation principale ; qu'en l'espèce, devant le juge des référés, ce n'était qu'à titre subsidiaire que M. [K] avait invoqué l'existence d'un échéancier et proposé un paiement échelonné ; qu'en se fondant sur ces circonstances pour écarter son argumentation principale tirée de l'absence de prêt, la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile.

Le greffier de chambre

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