19 janvier 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-23.272

Chambre sociale - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2022:SO00106

Titres et sommaires

SECURITE SOCIALE, REGIMES COMPLEMENTAIRES - Vieillesse - Régime supplémentaire - Engagement unilatéral de l'employeur - Modification - Modification par voie d'accord collectif - Modification d'un régime surcomplémentaire de retraite à prestations définies et garanties - Opposabilité aux anciens salariés - Conditions - Détermination - Portée

Il résulte des articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2006-344 du 23 mars 2006, L. 2141-2 du code du travail et 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, que seul un accord collectif conclu entre l'employeur et une ou plusieurs organisations syndicales représentatives dans l'entreprise qui ont vocation à négocier pour l'ensemble des salariés et anciens salariés peut apporter, de façon opposable aux anciens salariés, des modifications au régime de retraite surcomplémentaire à prestations définies et garanties

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Accords collectifs - Accord d'entreprise - Accord ayant le même objet qu'un usage d'entreprise - Accord conclu avec les organisations syndicales représentatives - Validité - Effets - Fin de l'usage - Opposabilité aux anciens salariés - Conditions - Détermination - Portée

Texte de la décision

SOC.

CDS



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 19 janvier 2022




Cassation partielle


M. CATHALA, président



Arrêt n° 106 FS-B

Pourvoi n° P 19-23.272




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 19 JANVIER 2022

L'association Réseau Valmy, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° P 19-23.272 contre l'arrêt rendu le 29 août 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 2), dans le litige l'opposant à la Société générale, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ott, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de l'association Réseau Valmy, de la SCP Spinosi, avocat de la Société générale, et l'avis de Mme Roques, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 24 novembre 2021 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Ott, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Pécaut-Rivolier, Sommé, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, M. Le Masne de Chermont, Mme Ollivier, conseillers référendaires, Mme Roques, avocat général référendaire, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 août 2019), la Société générale (la société), selon un engagement unilatéral de l'employeur, a fait bénéficier, à compter du 1er janvier 1986, ses cadres « hors classification », à savoir ceux exerçant des fonctions de direction d'agences bancaires ou d'entités plus importantes dont l'emploi ne figure pas dans la classification conventionnelle de branche, d'un régime de retraite surcomplémentaire formalisé dans un règlement du 28 octobre 1988. Ce régime de retraite surcomplémentaire, différentiel, à prestations définies sans condition d'achèvement de la carrière dans l'entreprise, garantit aux cadres retraités, à compter de la liquidation de leurs droits à pension, une pension globale de retraite de n/60èmes de leur « rémunération annuelle garantie » au moment de la liquidation de leurs droits, « n » correspondant au nombre d'annuités déterminé selon le règlement, la pension à la charge de l'employeur étant égale à la différence entre la pension globale ainsi déterminée, avec un mécanisme de revalorisation, et les différentes pensions des régimes légaux et complémentaires. Il est prévu une contribution supportée par les cadres bénéficiaires, fixée à un pourcentage de la « rémunération annuelle garantie » supérieure à un certain plafond.

2. A la suite de la fermeture du régime de retraite des banques et de son entrée dans le champ des régimes ARRCO et AGIRC, ce régime a été modifié le 1er janvier 1994, puis de nouvelles modifications sont intervenues les 31 décembre 2004 et 1er mars 2011 (dégradation des coefficients d'ajournement) à la suite des lois n° 2003-775 du 21 août 2003 modifiant les conditions de liquidation des retraites de base et n° 2010-1330 du 9 novembre 2010. Enfin, en juillet 2014, il a été décidé une adaptation des modalités de revalorisation des pensions et des futures réversions des rentes.

3. L'association Réseau Valmy (l'association) a été créée le 25 juin 2015. Ses membres sont des anciens cadres salariés du groupe Société générale ayant appartenu à la catégorie des cadres « hors classification ». Selon ses statuts, cette association a « pour but de maintenir et développer des liens entre les anciens cadres supérieurs salariés du groupe Société générale, afin de perpétuer l'esprit d'équipe qui les animait lorsqu'ils étaient en activité. Ces liens doivent leur permettre de partager, et le cas échéant de défendre, les intérêts spirituels, moraux et matériels qui peuvent être communs à tout ou partie d'entre eux. »

4. Contestant les modifications intervenues jusqu'à celle, comprise, de 2014 du régime initial et arguant d'une situation de « lésions » et de fortes réductions de l'engagement de retraite surcomplémentaire de 1986, l'association a fait assigner, le 29 décembre 2015, la société aux fins principalement de déclarer inopposables à ses membres les différentes modifications apportées à ce régime de retraite surcomplémentaire d'entreprise.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui est irrecevable en ses deux premières branches et n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation en ses deux autres branches.

Mais sur le moyen relevé d'office

6. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu les articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2006-344 du 23 mars 2006, l'article L. 2141-2 du code du travail et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

7. Aux termes de la jurisprudence constante de la Cour de cassation, lorsque l'instauration d'un régime de retraite surcomplémentaire résulte d'un engagement unilatéral de l'employeur, les seules modifications opposables au salarié sont celles régulièrement intervenues avant son départ de l'entreprise, les autres dispositions demeurant inchangées à son égard, faute d'une dénonciation régulière (Soc., 3 juin 1997, pourvoi n° 94-40.347, Bulletin 1997, V, n° 203 ; Soc., 6 juin 2007, pourvoi n° 06-40.521, Bull. 2007, V, n° 93).

8. La possibilité pour un employeur d'apporter, avant liquidation des droits à retraite des intéressés, une modification à un règlement unilatéral de retraite d'entreprise à la condition d'une dénonciation régulière supposant une information des instances représentatives du personnel, un délai de préavis suffisant pour permettre les négociations et une information individuelle des salariés concernés, n'a été reconnue qu'à l'égard de régimes de retraite à prestations définies et non garanties, dits à droits aléatoires, lorsque le bénéfice de la prestation de retraite est subordonné pour un salarié à la condition de sa présence dans l'entreprise au jour de son départ à la retraite. (Soc., 13 février 1996, pourvoi n° 93-42.309, Bull. 1996, V, n° 53 ; Soc., 13 octobre 2010, pourvoi n° 09-13.110, Bull. 2010, V, n° 234).

9. L'arrêt constate que le régime de retraite surcomplémentaire, mis en place unilatéralement par l'employeur à compter de 1986, est un régime de retraite surcomplémentaire à prestations définies et garanties, dit à droits certains, en ce que le bénéfice de la pension de retraite due par l'employeur n'est pas subordonné à une condition de présence du salarié dans l'entreprise au jour de son départ à la retraite.

10. Il s'ensuit que les modifications apportées unilatéralement par l'employeur à un tel régime sont susceptibles d'affecter d'anciens salariés n'ayant plus aucun lien de droit avec l'employeur, qu'il s'agisse de retraités ou de salariés qui, ayant quitté l'entreprise, sont désormais employés par d'autres employeurs.

11. L'arrêt relève que, selon les statuts, l'association regroupe des anciens cadres salariés du groupe Société générale ayant appartenu à la catégorie dite hors classification.

12. Par ailleurs, selon l'article L. 2141-2 du code du travail, les personnes qui ont cessé d'exercer leur activité professionnelle peuvent adhérer ou continuer à adhérer à un syndicat professionnel de leur choix.

13. La Cour de cassation a déduit de cette disposition, alors transcrite dans l'article L. 411-7 du code du travail, que les syndicats professionnels, qui ont qualité pour représenter les retraités, ont, dans la limite des pouvoirs qu'ils tiennent des textes du code du travail, valablement conclu des accords collectifs relatifs à la modification d'un régime complémentaire de retraite ou de prévoyance créé et modifié par voie d'accord collectif interprofessionnel, professionnel ou d'entreprise (Soc., 23 novembre 1999, pourvois n° 97-18.980, 97-19.055, 97-20.248, 97-21.053, 97-21.393, Bulletin civil 1999, V, n° 453 ; Soc., 31 mai 2001, pourvoi n° 98-22.510, Bull. 2001, V, n° 200).

14. Elle en a encore déduit que lorsqu'un accord collectif ayant le même objet qu'un usage d'entreprise est conclu entre l'employeur et une ou plusieurs organisations représentatives de l'entreprise qui ont vocation à négocier pour l'ensemble des salariés et anciens salariés, cet accord a pour effet de mettre fin à cet usage (Soc., 20 mai 2014, pourvoi n° 12-26.322, Bull. 2014, V, n° 124).

15. Pour déclarer opposable aux adhérents de l'association la modification unilatérale de juillet 2014, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que la société a consulté le comité d'entreprise sur la réforme de juillet 2014 et ses intentions de modification et d'évolution par la rédaction d'un nouveau règlement reprenant notamment les précédentes modifications intervenues et précisant une nouvelle rédaction des modalités d'attribution à compter du 1er janvier 2015, qu'il est justifié que le règlement modifié a fait l'objet de l'information légale due, que l'adoption du nouveau règlement a fait l'objet, avec un délai de prévenance de six mois, ce délai étant suffisant et ayant pu permettre une négociation, d'une information individuelle portant sur les modalités de l'indexation des pensions servies sur le point AGIRC et la pension de réversion auprès des bénéficiaires du régime accompagnée d'une copie du nouveau règlement, que ceux-ci sont, eu égard aux positions hiérarchiques qu'ils ont occupées dans l'entreprise et des connaissances et capacité qu'elles supposent, en mesure d'analyser la portée notamment, de l'abandon de la revalorisation antérieure que l'employeur qualifie d'abandon du calcul différentiel après liquidation, et de son impact sur la pension de réversion. L'arrêt ajoute, par motifs adoptés, pour déclarer opposable aux adhérents de l'association la modification de décembre 2011, que la régularité de la procédure de consultation et d'information effectuée en 2014 rend sans objet les allégations d'irrégularités de la précédente réforme de 2011.

16. En statuant ainsi, alors que seul un accord collectif conclu entre l'employeur et une ou plusieurs organisations syndicales représentatives dans l'entreprise qui ont vocation à négocier pour l'ensemble des salariés et anciens salariés pouvait apporter, de façon opposable aux anciens cadres salariés adhérents de l'association, des modifications au régime de retraite surcomplémentaire à prestations définies et garanties, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième, troisième et quatrième moyens du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare opposables aux adhérents de l'association Réseau Valmy les modifications du régime de retraite surcomplémentaire de 1986 décidées unilatéralement par l'employeur en décembre 2011 et juillet 2014 et en ce qu'il déboute l'association Réseau Valmy de ses demandes subséquentes, l'arrêt rendu le 29 août 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la Société générale aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la Société générale et la condamne à payer à l'association Réseau Valmy la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour l'association Réseau Valmy

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevables comme prescrites toutes les demandes formées par l'association Réseau Valmy à l'encontre de la Société Générale à l'exception de celles « concernant la nature du régime de retraite surcomplémentaire de 1986 et ses modifications à partir de la réforme de ce régime de retraite en 2011 et 2014 » ;

AUX MOTIFS propres QUE « les parties acquiescent au jugement en ce qu'il a déclaré recevable l'ensemble des demandes formées par l'association Réseau Valmy à l'encontre de la Société Générale concernant la nature du régime de retraite surcomplémentaire de 1986 et ses modifications à partir de la réforme de ce régime de retraite en 2011 et 2014, la cour devant confirmer de ce chef la décision entreprise ;

QUE l'association Réseau Valmy critique le jugement déféré en ce qu'il a retenu la prescription de son action relative à l'évolution de la situation des cadres hors classification en 1986 consécutive à la suppression de la référence au point bancaire ainsi qu'aux évolutions du régime de retraite surcomplémentaire de 1986 antérieures à 2011, soit sa substitution en 1991 par un nouveau régime applicable aux cadres embauchés ou promus à compter du 1er janvier 1991, les conséquences de l'intégration des régimes complémentaires des banques au régime ARCOSS AGIRC, et en ce qu'il a déclaré prescrites les demandes de réévaluations couvrant la période 2000 à 2003 ;
Qu'elle prétend agir par voie d'exception, ajoutant que si l'action peut se prescrire, l'exception est perpétuelle ; qu'elle conteste que le point de départ de la prescription soit la date des décisions contestées, disant que ses adhérents sont fondés à solliciter que les décisions irrégulières de la banque ne leur soient pas déclarées opposables et donc, que pour les échéances de pension non prescrites, le montant de leur retraite soit recalculé ; qu'elle en déduit que pour ce qui est, non de l'inopposabilité des modifications, mais de la prescription des termes de pension, il doit être fait application des articles 2224 et 2233 du code civil ; qu'elle ajoute que la nature contractuelle ou d'avantage unilatéralement concédé du régime influe sur l'appréciation de la prescription, la Société générale devant dans la première hypothèse, prouver que le salarié a accepté les modifications contestées et dans la seconde, la régularité de la dénonciation des usages ou avantages antérieurs ;
Que la Société générale analyse l'action engagée et relève que l'action ne tend pas à la régularisation des prestations, eu égard à une mauvaise évaluation arithmétique des rentes, mais à une déclaration préalable d'inopposabilité des modifications du règlement adoptées entre 1988 et 2011, ce qui est manifestement prescrit en application de l'article 2224 du code civil invoquant, en sus, le délai butoir de l'article 2232 du code civil, s'agissant des situations juridiques résultant de décisions de 1986, 1991 et 1994 ;

QU'il convient de relever que, si la Société générale prétend, dans le corps de ses écritures que la référence à l'article 2233 du code civil serait une demande nouvelle en cause d'appel, leur dispositif qui fixe les limites du litige dont est saisie la cour en application de l'article 954 du code de procédure civile, ne contient aucune demande en ce sens ;
que l'association Réseau Valmy agit en justice, non pour la défense des intérêts individuels de ses adhérents, mais pour la défense de leurs intérêts (matériels et moraux) collectifs, afin de leur voir déclarer inopposables des modifications du régime de retraite surcomplémentaire et en conséquence, les voir rétablis dans leurs droits ;
Que l'inopposabilité revendiquée constitue une prétention que l'association Réseau Valmy soumet au juge et dès lors, cette partie agit par voie d'action et non par voie d'exception, ce qui prive de toute pertinence son allégation quant au caractère perpétuel de l'exception ;

QU'ainsi que l'a retenu le tribunal, les dispositions de l'article 2224 du code civil, suivant lesquelles les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer n'établissent aucune distinction suivant que la prescription extinctive porte sur l'applicabilité d'un acte juridique, l'exigibilité d'une créance ou l'irrégularité visant à faire prononcer la nullité ou l'inopposabilité d'un acte, dès lors que le titulaire du droit revendiqué a eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance des faits lui permettant d'exercer ce droit ;

Que l'article 2232 précise que le report du point de départ, la suspension ou l'interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit, ce qui vient interdire au titulaire du droit revendiqué […] de prétendre à une impossibilité d'agir, cause du report de la prescription, du fait de la méconnaissance de son droit ;
Qu'il s'ensuit, eu égard à une assignation délivrée le 29 décembre 2015, une prescription acquise s'agissant des demandes au titre de l'inopposabilité de la suppression de la référence au point bancaire et des modifications intervenues de 1986 au 29 décembre 1995, tant au visa de l'article 2224, et, ce pour les motifs retenus par le tribunal que la cour adopte, les cadres hors classification concernés ayant été informés en temps réel des actes querellés, qu'au visa de l'article 2232 du code civil, et des autres modifications intervenues jusqu'au 29 décembre 2011 [sic : lire 2010], au visa du seul article 2224 du code civil ; que la prescription atteint tant la demande de voir constater l'inopposabilité d'actes juridiques, qui ne peuvent plus être remis en cause, que celles qui en sont la conséquence, l'association Réseau Valmy ne pouvant, au surplus, alors qu'elle n'exerce nullement l'action en paiement de ses adhérents, se prévaloir des dispositions de l'article 2233 du code civil relatif à la prescription des échéances au fur et à mesure de leur exigibilité ;
Que s'agissant des demandes de réévaluations au titre des années 2000, 2001, 2002 et 2003, l'action de l'association Réseau Valmy est éteinte par la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil et des dispositions transitoires de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, l'assignation ayant été délivrée après le 18 juin 2013, date extrême de prorogation du délai de prescription des actions soumises à un délai réduit par la loi et qui n'étaient pas prescrites à la date de sa promulgation ; qu'en effet, la méconnaissance par ses adhérents des faits nécessaires à l'exercice de son action n'est étayée par aucune pièce et la cour doit relever que ceux-ci pouvaient constater, à réception des prestations, une évolution moindre que celle attendue, comme l'ont fait, ainsi qu'il ressort de la note du 27 juillet 2004, communiquée en pièce 25, certains bénéficiaires qui ont protesté et formulé des réclamations écrites ;
Qu'enfin, l'association Réseau Valmy ne reprend pas à hauteur d'appel, sa demande formulée en première instance tendant, en tout état de cause, à ce que la Société générale soit enjointe d'appliquer à toutes les pensions de retraite surcomplémentaires postérieures au 23 juillet 2002 les dispositions de sa note du 23 juillet 2002, prétention déclarée irrecevable comme prescrite par le tribunal (pages 12 et 15 du jugement) ;
Que, par conséquent, la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle déclare prescrites toutes les demandes principales et celles formulées en tout état de cause par l'association Réseau Valmy, autres que celles concernant la nature du régime de retraite surcomplémentaire de 1986 et ses modifications à partir de la réforme de ce régime de retraite en 2011 (…) » ;

ET AUX MOTIFS adoptés QUE « La Société Générale considère que les demandes du Réseau Valmy relatives à l'évolution de la situation des cadres « hors classification » du régime litigieux de retraite de 1986 antérieurement à la réforme de 2014 sont toutes actuellement prescrites, en application des dispositions de l'article 2224 du Code civil suivant lesquelles « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. ».
Ces dispositions législatives n'établissent aucune distinction d'application suivant que la prescription extinctive porte sur l'applicabilité d'un acte juridique ou sur l'exigibilité d'une créance ou que l'irrégularité alléguée vise à faire prononcer la nullité ou l'inopposabilité d'un acte, sous réserve d'une dénonciation régulière de celui-ci. Par ailleurs, les actions personnelles qui s'y rapportent entraînent une sanction d'irrecevabilité dès lors que le titulaire du droit revendiqué a eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance des faits lui permettant d'exercer ce droit. L'opposabilité d'un acte est donc prescriptible dès lors que celui-ci a été régulièrement dénoncé à la partie à laquelle il peut être opposé.
Il convient en l'occurrence de constater que les personnels concernés ont été dûment et suffisamment informés en temps réel :
– par un courrier du 12 mars 1986, de la suppression progressive de la référence au point bancaire quant aux modes de calcul de leurs retraites ;
– de la totale disparition de ce mécanisme du point bancaire en 2002 ;
– de la succession du régime de 1991 à celui de 1986, le nouveau régime de 1991 ayant été communiqué à l'ensemble des personnes intéressées ;
– des modifications de 1988 et de l'intégration en 1994 de ces régimes de retraite dans les régimes interprofessionnels ARRCO et AGIRC, suivant un accord professionnel du 13 septembre 1993 suivi d'un accord d'entreprise du 16 décembre 1993 dont la publicité a été au demeurant amplifiée à l'époque par des actions judiciaires et prolongée par les mentions obligatoires figurant sur les bulletins de paie.
Il y a lieu dans ces conditions de déclarer irrecevable pour cause de prescription quinquennale à la date du 29 décembre 2015 d'introduction de l'instance l'ensemble de ces chefs interprétatifs de demandes de mobilisation de retraite complémentaire depuis 1986 et 1988, à compter du 1er janvier 1991, depuis les modifications réglementaires de 1994, au titre des réévaluations de 2000, 2001, 2002 et 2003 et au titre de la note du 23 juillet 2002 » ;

1°) ALORS QUE la prescription de l'action exercée par une association dans l'intérêt collectif de ses membres est dépendante de celle applicable à chacun d'entre eux ; qu'en déclarant prescrites les demandes de l'association Réseau Valmy autres que celles « concernant la nature du régime de retraite surcomplémentaire de 1986 et ses modifications à partir de la réforme de ce régime de retraite en 2011 et 2014 » aux termes de motifs dont ne résulte pas la prescription de ces demandes pour l'ensemble de ses adhérents, la cour d'appel a violé l'article 2219 du code civil, ensemble l'article 31 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE le délai de prescription de l'action fondée sur l'obligation pour l'employeur d'affilier son personnel à un régime de retraite supplémentaire et de régler les cotisations qui en découlent ne court qu'à compter de la liquidation par le salarié de ses droits à la retraite, jour où le salarié titulaire de la créance à ce titre a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son action, sans que puissent y faire obstacle les dispositions de l'article 2232 du code civil ; qu'en fixant le point de départ de l'action intentée par l'association Réseau Valmy en inopposabilité de modifications unilatérales, par la Société Générale, du régime de retraite supplémentaire bénéficiant à ses membres, à la date à laquelle les "cadres hors-classification concernés avaient été informés des modifications successives" et, indépendamment de cette connaissance, pour toutes les modifications antérieures à 1995, la cour d'appel a violé les articles 2224 et 2232 du code civil interprété à la lumière de l'article 6 §. 1er de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3°) ALORS subsidiairement QUE le point de départ du délai à l'expiration duquel ne peut plus s'exercer une action se situe nécessairement à la date d'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance ; qu'à l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance ; qu'en déclarant prescrite l'action de l'association en inopposabilité des modifications du régime de retraite supplémentaire subsidiairement exercée au titre des cinq dernières échéances de retraite précédant l'introduction de son action, la cour d'appel a violé l'article 2233 du code civil.

4°) ALORS en toute hypothèse QUE que l'association Réseau Valmy faisait valoir, dans ses écritures, que le régime de retraite surcomplémentaire institué par l'engagement unilatéral du 12 mars 1986 et le règlement des retraites du 3 octobre 1988 n'avait jamais fait l'objet d'une dénonciation par l'employeur et que les cadres hors-classification promus ou recrutés après le 1er janvier 1991, soumis d'autorité au régime nouveau institué dans l'entreprise n'avaient pu avoir connaissance ni de l'existence du régime antérieur, ni du refus de l'employeur de les en faire bénéficier, de sorte que leur action en revendiquant le bénéfice n'était pas prescrite ; qu'en déclarant prescrites les demandes de l'association Réseau Valmy autres que celles « concernant la nature du régime de retraite surcomplémentaire de 1986 et ses modifications à partir de la réforme de ce régime de retraite en 2011 et 2014 » sans répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré opposable aux adhérents de l'association Réseau Valmy l'ensemble des modifications du régime de retraite surcomplémentaire de 1986 telles que décidées en juillet 2014 par la Société Générale et d'AVOIR débouté cette association de l'ensemble de ses demandes fondées sur ce règlement dans sa version issue de l'engagement du 12 mars 1986 et du "règlement de la retraite surcomplémentaire des cadres hors-classification" du 3 octobre 1988 ;

AUX MOTIFS QUE « sur la nature du règlement de retraite surcomplémentaire de 1986, l'association Réseau Valmy prétend que celui-ci a été incorporé aux contrats de travail de ses membres, disant établir la volonté de contractualisation de la Société générale, à l'occasion de la création de ce régime et d'interventions de responsables de la banque, dans l'information qui en a été donnée aux cadres concernés lors de l'institution de ce régime, puis lors de leur promotion, embauche ou expatriation, invoquant en dernier lieu, la reconnaissance de ce caractère contractuel dans les conclusions de la Société générale ; qu'elle ajoute que cette contractualisation résulte également du caractère bilatéral de l'attribution de la surcomplémentaire en contrepartie de l'abandon de la référence au point bancaire, faisant en dernier lieu valoir que les droits à retraite, dont les droits à réévaluation et les droits à réversion constitués au titre des services passés, ont une nature contractuelle en tant que rémunération différée ;
Que la Société générale retient, eu égard au caractère collectif de l'avantage concédé unilatéralement, ainsi qu'il ressort du règlement du régime de retraite et du caractère impersonnel de l'information donnée aux cadres concernés, que le régime de retraite ne constitue nullement un avantage s'intégrant au contrat de travail, dont les modifications devaient être acceptées par les salariés pour leur être considérées comme opposables ;

QUE le régime de retraite surcomplémentaire de 1986 a été institué unilatéralement par la Société générale, selon un règlement -c'est à dire un acte juridique à caractère général et impersonnel- pris au bénéfice d'une catégorie de salariés de l'entreprise ;
Que l'association Réseau Valmy ne peut pas prétendre trouver la commune volonté des parties d'intégrer au contrat de travail, cet avantage social dans :
- la lettre d'information du 12 mars 1986, à caractère général qui informe les salariés concernés de l'évolution positive du statut des cadres hors classification, tant au regard de la rémunération que de divers avantages sociaux dont leur régime de retraite, au motif qu'il y est indiqué, l'ensemble de ces aménagements représente globalement une amélioration sensible ;
- l'exposé de M. [H], au conseil d'administration du 19 février 1986, de ces aménagements qui, tout au contraire, vient conforter le caractère collectif de la refonte du régime de rémunération des cadres hors classification et des avantages qui y sont, directement ou indirectement rattachés, sauf à dénaturer la phrase selon laquelle le régime de retraite intégrera la rémunération dans sa nouvelle définition qui fait référence au paragraphe précédent, venant préciser que le régime antérieur ne concernait qu'une part modeste de la rémunération au-delà du plafond ;
- la lettre d'embauche (pièce 13 de l'appelante) qui vient informer la personne recrutée, de son statut dans l'entreprise, qu'il soit contractuel (salaire convenu, reprise d'ancienneté, délai de préavis) ou collectif (dispositions de la convention collective des banques applicables et régime de retraite) ;
- l'avenant au contrat de travail adressé à un salarié détaché (pièce 27 de l'appelante) qui concerne ce seul salarié et qui vise le maintien de son adhésion à la caisse de retraite de la Société générale, pendant la durée de son détachement ;
- la position prise par M. [N], l'adjoint du directeur des ressources humaines de l'entreprise dans un mail du 6 avril 1999 reprenant l'analyse faite pour l'entreprise par M. [G] dans une note du 23 mai 1990, afin de dénier au règlement de 1986 la qualification de régime de retraite au sens du code de la Sécurité sociale et qui ne s'impose nullement au juge ;
- les écritures de la Société générale, dont elle dénature la portée, dès lors que le caractère indissociable de la suppression de la référence au point bancaire et des aménagements du statut des cadres hors classification de 1986, sont évoqués pour écarter le caractère individuel des avantages concédés en contrepartie de la disparition de cet autre avantage collectif ;

QU'il ne peut pas plus être fait grief à la Société générale de soutenir des positions contradictoires ; qu'en effet, la référence au fait que le règlement de retraite serait indissociable de la suppression de la référence au point bancaire, le constat que l'avantage collectif que constitue un régime de retraite surcomplémentaire soit attribué en contrepartie de la suppression de la référence au point bancaire annuellement révisé et que la Société générale estime que la première mesure est indissociable de la seconde, puisqu'elle en constitue la cause, ne contient nullement l'aveu d'une contractualisation des engagements pris en 1986 ;
Que cette notion de contrepartie ne vient pas plus conférer à l'avantage accordé un caractère contractuel, dans la mesure où l'allégation que les modalités de rémunération et d'attribution des avantages sociaux révisées en 1986 ne seraient pas une libéralité de la banque et par conséquent, ne seraient pas favorables aux salariés concernés, ne repose sur aucune argumentation pertinente ;

QU'enfin, contrairement aux allégations de l'association Réseau Valmy, le droit à pension des cadres bénéficiaires du régime de retraite, comme en l'espèce, à prestations définies, n'est nullement acquis année par année, mais est acquis au jour de sa liquidation, selon les modalités prévues aux dispositions du règlement alors applicable ; qu'il convient, au surplus, de relever que les modifications critiquées ne portent pas atteinte à la nature de la pension, ne concernent pas les droits acquis que constituent les rentes déjà liquidées, l'indexation de celle-ci comme le droit de réversion du conjoint qui n'est qu'éventuel, étant par nature des avantages futurs, exclusifs de toute notion de droits acquis ;

QUE le régime de retraite surcomplémentaire de 1986 constituant un engagement unilatéral de l'employeur, l'association Réseau Valmy ne peut pas revendiquer l'intangibilité des engagements contractuels à durée déterminée, consacrée par la jurisprudence qu'elle cite ;

QUE la Société générale a consulté le comité d'entreprise sur la réforme de juillet 2014, sur la dénonciation par la Société générale du régime de pension de retraite et de ses intentions de modification et d'évolution pour la rédaction d'un nouveau règlement, reprenant notamment les précédentes modifications intervenues, étant relevé qu'une éventuelle irrégularité affectant le déroulement de la procédure de consultation permet seulement aux institutions représentatives du personnel d'obtenir la suspension de la procédure, si elle n'est pas terminée, ou à défaut, la réparation du préjudice subi à ce titre ; qu'elle ne saurait, en conséquence, fonder une demande d'inopposabilité du règlement modifié dont il est justifié (pièces 22-1, 22-2, 23 et 24 de l'intimée) qu'il a fait l'objet de l'information légale due ; que l'adoption du nouveau règlement a fait l'objet, avec un délai de prévenance de six mois, suffisant, d'une information individuelle portant sur les modalités de l'indexation des pensions servies sur le point AGIRC et la pension de réversion auprès des bénéficiaires du régime accompagnée, qui plus est, avec copie du nouveau règlement ; que ceux-ci sont, eu égard aux positions hiérarchiques qu'ils ont occupées dans l'entreprise et des connaissances et capacité qu'elles supposent, en mesure d'analyser la portée notamment, de l'abandon de la revalorisation antérieure que l'appelante qualifie d'abandon du calcul différentiel après liquidation, et de son impact sur la pension de réversion ;
Qu'enfin, la notification du nouveau règlement emporte dénonciation des nouveaux coefficients d'ajournement, ce qui rend inopérant la revendication de l'association Réseau Valmy de voir appliquer à ses membres les coefficients instaurés en 2004 (…) » ;

ET AUX MOTIFS supposés adoptés QUE « Le régime de retraite surcomplémentaire litigieux de 1986 n'ayant pas de caractère contractuel, individuel et à durée déterminée mais procédant d'un engagement unilatéral, collectif et à durée indéterminée de l'employeur, les contestations de l'association défenderesse suivant lesquelles aucune modification de contrat n'aurait été acceptée par les parties créancières de cette pension complémentaire sont infondées.
Faisant suite à de précédentes modifications intervenues en 2011 sur le dernier règlement de 1988, la Société Générale a engagé en juillet 2014 une dernière réforme de ce régime de retraite surcomplémentaire.
S'agissant d'un engagement unilatéral, ou le cas échéant d'un usage, Société Générale apporte la preuve de l'engagement d'une procédure d'information et de consultation de son comité central d'entreprise sur cette réforme de juillet 2014 concernant la dénonciation de ce régime de pension de retraite complémentaire et ses intentions de modifications et évolutions par une nouvelle rédaction de ses modalités d'attribution à compter du 1er janvier 2015 à l'égard des situations individuelles futures. Cette procédure d'information et de consultation a été menée conformément aux dispositions des articles L. 2323-4 et R. 2323-1-11 du code du travail. Le dialogue social afférent à ce projet de modifications pouvait indifféremment intervenir en amont de cette réunion ou être considéré comme tel pendant le cours de la réunion consécutive à cette procédure légale d'information et de consultation.
Il en résulte que les salariés et retraités concernés ont pu être normalement informé en temps réel de ces évolutions et modifications et que cette consultation d'une institution représentative du personnel a pu permettre une négociation. Ces modifications ne dérogent pas au champ d'application du régime initial de 1986, ne portent pas atteinte à la nature essentiellement différentielle de cette pension complémentaire et ne concernent pas des avantages acquis, dans la mesure où elles portent exclusivement pour l'avenir par rapport à des droits non encore constitués. Ces modifications s'appliquent en effet aux modalités de revalorisation des rentes après liquidations (par indexation simplifiée sur la valeur du point AGIRC à l'instar de la pension globale). Elles ne remettent donc pas en cause les montants des pensions déjà liquidées avant cette réforme, ni même des rentes à liquider pour l'avenir, s'agissant uniquement des modalités de revalorisation et de réversion des rentes d'ores et déjà liquidées.
Il convient effectivement ici de rappeler qu'en matière d'engagement unilatéral, la revalorisation d'une rente dans le cadre d'un régime collectif constitue par nature un avantage futur excluant toute notion d'avantage acquis. Il en est de même pour le droit à réversion du conjoint qui n'est qu'éventuel et qui est donc par nature non-acquis avant sa liquidation.
Concernant les modalités de revalorisation des rentes liquidées, le fait de substituer un mécanisme de revalorisation indexé sur l'évolution de la valeur du point AGIRC, à l'instar du mode de calcul de la rente de base, au mécanisme initial de recalcul annuel en fonction notamment de l'évolution de l'ensemble des rémunérations des cadres concernés n'apparaît pas illicite.
Concernant les modalités de calcul de la pension de réversion, la Société Générale conserve le droit de changer l'assiette du pourcentage de 60 % en substituant la base de la rente servie par elle-même à la base de la pension globale dès lors qu'il s'agit des réversions futures postérieures au 31 décembre 2014 et que les droits du conjoint réservataire dépendent par définition d'un événement futur et incertain.
Le financement d'une partie de ce régime par les personnels concernés est par ailleurs sans effet dès lors qu'il n'est pas contestable que le montant de ces pensions est très largement supérieur au montant des cotisations prélevées.
La régularité de la procédure de consultation et d'information effectuée en 2014 rend sans objet les allégations d'irrégularités sur la précédente réforme de 2011.
Dans ces conditions, cette réforme de 2014, qui ne produit des effets que pour des droits futurs, impersonnels, collectifs et non encore liquidés postérieurs au 31 décembre 2014 en termes de revalorisations ou de réversions et qui porte donc sur une durée indéterminée, apparaît normalement opposable à l'ensemble des bénéficiaires concernés, tant vis-à-vis des salariés en activité qu'à l'égard des retraités allocataires adhérents de cette association.
En conséquence des motifs qui précèdent sur la dénonciation régulière de cet engagement unilatéral, les demandes subséquemment formulées par l'association Réseau Valmy aux fins de rehaussement des salaires et de recalcul des retraites de ses adhérents seront rejetées » ;

1°) ALORS QUE l'employeur ne peut priver rétroactivement ses salariés des droits acquis qu'ils tiennent d'un régime de retraite supplémentaire dont les prestations sont définies et garanties, ces droits étant immédiatement acquis à chaque versement de cotisations, peu important que ce régime ait été créé par décision unilatérale ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de la cour d'appel que le règlement des retraites du 28 octobre 1988 avait, à effet rétroactif au 1er janvier 1986, institué au sein de la Société Générale "un régime de retraite à cotisations obligatoires des cadres hors classification, financé principalement par l'entreprise, sans condition d'achèvement de la carrière dans l'entreprise et avec une assiette de calcul des droits élargie à la totalité de la rémunération fixe excédant le plafond de la caisse de retraite de la Société générale. Ces cadres bénéficiaient d'une pension globale de n/60ème (n étant le nombre d'annuités) de leur rémunération annuelle garantie calculée au moment de la liquidation de leurs droits, outre un dispositif de revalorisation" ; que les droits des salariés issus de ce régime à prestations définies et garanties, indépendamment de toute condition de présence au moment de la liquidation, étaient définitivement constitués lors de chaque période de service et en fonction des termes du règlement en vigueur durant ladite période ; qu'ils étaient irrévocables ; qu'en déclarant cependant opposable aux bénéficiaires la modification unilatérale, par l'employeur, de ce régime à prestations définies et garanties intervenue avant la liquidation de leur retraite la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 911-1 du code de la sécurité sociale, L. 1221-1 du code du travail, 1134 devenu 1103 et 1193 du code civil et 1er du premier protocole additionnel de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°) ALORS subsidiairement QUE les engagements à durée déterminée sont irrévocables ; que la dénonciation de l'engagement unilatéral instituant un avantage de retraite, intervenue après la liquidation de cette retraite, ne remet pas en cause cet avantage ; qu'en écartant le moyen pris par l'association Réseau Valmy de l'impossible dénonciation par l'employeur de l'engagement unilatéral à durée déterminée que représentait le régime surcomplémentaire des cadres hors-classification en vigueur au moment de la liquidation de leur retraite, au motif que « le régime de retraite surcomplémentaire de 1986 constituant un engagement unilatéral de l'employeur, l'association Réseau Valmy ne peut pas revendiquer l'intangibilité des engagements contractuels à durée déterminée, consacrée par la jurisprudence qu'elle cite » la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1134 devenu 1193 du code civil, ensemble le principe d'irrévocabilité de l'engagement à durée déterminée.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré opposables aux adhérents de l'association Réseau Valmy les modifications du régime de retraite surcomplémentaire intervenues en décembre 2011 et juillet 2014 ;

AUX MOTIFS QUE « que l'association Réseau Valmy prétend au visa de l'article 1er du protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que la modification du règlement de retraite de 2014 est inopposable à ses membres ;
Que ce texte énonce que toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ;
Que, si le droit de bénéficier d'une pension de retraite à jouissance immédiate constitue une créance qui, étant suffisamment établie pour être exigible par tout cadre remplissant les conditions posées par l'accord, a le caractère d'un bien au sens de l'alinéa 1 de l'article précité, l'intangibilité de cette créance, y compris après sa liquidation, n'est nullement consacrée par la Cour européenne des droits de l'homme ; que cette cour a, d'ailleurs, admis dans son arrêt Aizpurua Ortie/Espagne la substitution d'une pension viagère liquidée par une prestation équivalente à trois mensualités ; que la cour n'a pas plus consacré un droit à une valeur prédéterminée de pension, la valeur patrimoniale protégée correspondant à l'espérance légitime et raisonnable d'obtenir la jouissance effective d'un droit de propriété (CEDH Depalle/France) ;
Que les modifications apportées en 2011 et 2014 ne portent nullement atteinte au droit ainsi défini, le montant des pensions liquidées n'étant nullement remis en cause, ni le principe d'une réversion ; que l'association Réseau Valmy ne peut pas prétendre à l'intangibilité de l'évolution future de la rente ou des modalités de liquidation des futures rentes de réversion, étant relevé que l'évocation d'une discrimination est inopérante, les modifications ayant vocation à s'appliquer tant aux salariés retraités qu'à ceux en activité, la décision déférée devant être confirmée en ce qu'elle rejette les demandes principales (jugées non prescrites) de l'association Réseau Valmy (…) » ;

ALORS QUE toute personne a droit au respect de ses biens ; que si le droit à pension de retraite n'est pas garanti comme tel par la convention, constituent un bien protégé les droits, même non liquidés, nés de versements de cotisations sociales à un régime obligatoire de protection sociale ; que la minoration des droits à pension en résultant n'est alors justifiée que si l'atteinte au droit de propriété en résultant procède d'un motif d'intérêt général, et qu'elle est raisonnable, et proportionnée au but ainsi recherché ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de la cour d'appel que le règlement des retraites du 28 octobre 1988 avait, à effet rétroactif au 1er janvier 1986, institué au sein de la Société Générale "un régime de retraite à cotisations obligatoires des cadres hors classification, financé principalement par l'entreprise, sans condition d'achèvement de la carrière dans l'entreprise et avec une assiette de calcul des droits élargie à la totalité de la rémunération fixe excédant le plafond de la caisse de retraite de la Société générale. Ces cadres bénéficiaient d'une pension globale de n/60ème (n étant le nombre d'annuités) de leur rémunération annuelle garantie calculée au moment de la liquidation de leurs droits, outre un dispositif de revalorisation" ; que ce régime prévoyait (article 12) une contribution des cadres bénéficiaires de 8 % sur la partie de leur rémunération annuelle garantie supérieure au plafond de la Caisse de retraite de la Société Générale ; qu'en jugeant régulières et opposables aux bénéficiaires les modifications unilatérales de ce régime minorant les modalités de revalorisation des rentes et des pensions de réversion aux termes de motifs inopérants pris de l'absence de remise en cause des pensions liquidées, quand le droit à une pension de retraite supplémentaire instituée par ce régime d'entreprise obligatoire, pour lequel ils avaient versé des cotisations spéciales, représentait pour les cadres hors-classification de la société générale un bien auquel il ne pouvait être porté atteinte que pour des motifs d'intérêt général dont il lui appartenait de vérifier le caractère raisonnable et proportionné, la cour d'appel a violé l'article 1er du premier protocole additionnel de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATIO (subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré opposable aux adhérents de l'association Réseau Valmy nommés postérieurement au 31 décembre 1990 les modifications du régime de retraite surcomplémentaire intervenues en juillet 2014 ;

AUX MOTIFS rappelés aux deuxième et troisième moyens ;

ALORS QUE l'acte intitulé « règlement de la retraite surcomplémentaire des cadres hors classification de la Société Générale – mise à jour de 2014 » stipulait expressément en son article 1er intitulé « bénéficiaires » : « la présente mise à jour s'applique à compter du 1er janvier 2015 à tous les cadres hors-classification nommés avant le 1er janvier 1991, en activité ou en retraite le 1er janvier 2015 » ; que l'association Réseau Valmy en avait déduit que les modifications intervenues étaient inopposables aux cadres hors-classification nommés postérieurement au 31 décembre 1990 ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé le règlement des retraites mis à jour en 2014, ensemble l'article 1134 devenu 1103 du code civil.

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