7 décembre 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-90.038

Chambre criminelle - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2021:CR01560

Texte de la décision

N° B 21-90.038 F-D

N° 01560




7 DÉCEMBRE 2021

SL2





RENVOI
RENVOI












M. SOULARD président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 7 DÉCEMBRE 2021



Le tribunal correctionnel de Nantes, par jugement en date du 9 septembre 2021, reçu le 17 septembre 2021 à la Cour de cassation, a transmis des questions prioritaires de constitutionnalité dans la procédure suivie contre M. [T] [K] du chef d'agression sexuelle.

Des observations ont été produites.

Sur le rapport de Mme Labrousse, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [T] [K], et les conclusions de Mme Philippe, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 23 novembre 2021 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Labrousse, conseiller rapporteur, M. Bonnal, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


1. La première question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« Les dispositions de l'article 706-112-2 du code de procédure pénale sont-elles contraires aux droits et libertés garantis par la Constitution et notamment l'effectivité des droits de la défense garantie par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, en ce qu'elles ne prévoient pas que le tuteur ou le curateur, lorsqu'il est informé que la majeur qu'il protège fait l'objet d'une audition libre, soit également informé de la possibilité qu'il a de désigner ou faire désigner par le Bâtonnier un avocat pour assister le majeur protégé qui n'aurait pas lui-même souhaité faire usage de ce droit ? ».

2. La seconde question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« Les dispositions de l'article 77-1 du code de procédure pénale sont-elles contraires aux droits et libertés garantis par la Constitution et notamment le droit de se taire consacré en vertu de l'article 9 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789, en ce qu'elles ne prévoient pas que lorsque les constatations ou les examens techniques ou scientifiques requis par le procureur de la République sur le fondement de ce texte entraînent l'audition de la personne faisant l'objet de l'enquête, celle-ci doit se voir rappelé avant le début de tout entretien ou expertise son droit de se taire ? ».

3. Les dispositions législatives contestées sont applicables à la procédure et n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

4. La première question posée présente un caractère sérieux.

5. En effet, si le majeur protégé est dans l'incapacité d'exercer son droit d'être assisté par un avocat en raison de l'altération de ses facultés mentales ou corporelles, le tuteur ou le curateur peut ne pas être en mesure de l'assister dans l'exercice de ce droit, faute qu'il ait été porté à sa connaissance que la loi lui permettait de désigner ou faire désigner un avocat pour assister le majeur protégé.

6. La seconde question présente également un caractère sérieux dès lors que dans le cas où la personne qualifiée requise entend, pour l'exécution de sa mission, une personne à l'encontre de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction, cette dernière peut être amenée, en réponse aux questions qui lui sont posées, à reconnaître les faits qui lui sont reprochés, ces déclarations recueillies étant susceptibles d'être portées à la connaissance de la juridiction de jugement à la suite de leur consignation dans le rapport dressé.

7. En outre, le fait même que la personne qualifiée requise puisse inviter la personne suspecte à répondre à ses questions peut être de nature à lui laisser croire qu'elle ne dispose pas du droit de se taire.

8. En conséquence, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel les deux questions prioritaires de constitutionnalité.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

RENVOIE au Conseil constitutionnel les deux questions prioritaires de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en audience publique du sept décembre deux mille vingt et un.

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