1 décembre 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-16.831

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2021:CO10684

Texte de la décision

COMM.

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 1er décembre 2021




Rejet non spécialement motivé


Mme DARBOIS, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10684 F

Pourvoi n° N 19-16.831




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 1ER DÉCEMBRE 2021

La société TF Inter, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 19-16.831 contre l'arrêt rendu le 21 mars 2019 par la cour d'appel d'Orléans (chambre commerciale, économique et financière), dans le litige l'opposant à la société Sanizeo, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bessaud, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Zribi et Texier, avocat de la société TF Inter, de la SARL Corlay, avocat de la société Sanizeo, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 octobre 2021 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bessaud, conseiller référendaire rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.


1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société TF Inter aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société TF Inter et la condamne à payer à la société Sanizeo la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour la société TF inter.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

La société TF Inter fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué DE L'AVOIR déboutée de sa demande tendant à voir condamner la société Sanizeo à lui payer la somme de 1 102 799,50 € à titre de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE « TF Inter fait valoir qu'alors qu'ils étaient encore ses salariés, MM. [E], [M] et [B] se seraient rendus en juillet et septembre 2012, en Espagne et en Italie pour rencontrer des fabricants pour le compte de leur future société tandis que M. [B], également salarié de TF Inter, a procédé au dépôt de la marque Sanizeo ; qu'elle prétend également qu'alors qu'ils étaient ses salariés, MM. [M] et [E] auraient proposé ses clients des produits Poalgi ; que toutefois ces reproches, à les supposer fondés, ne sauraient caractériser une faute de Sanizeo - qui n'était pas encore créée - mais concernent uniquement ces trois salariés s'il est établi que ceux-ci ont développé une future activité concurrente pendant leurs heures de travail ; que c'est dès lors à raison, et non pour entretenir une confusion, que l'appelante relève que lui sont reprochés des faits auxquels elle n'a pu participer puisqu'elle n'était pas encore créée ; qu'à supposer que des actes déloyaux aient été commis par d'anciens salariés de TF Inter, ces agissements, antérieurs à la constitution de Sanizeo par ces mêmes salariés ne peuvent être reprochés à une personne morale qui, n'ayant aucune existence au moment où ils ont été commis, n'a pu s'en rendre coupable et ce, même si elle a pu ensuite en profiter (Com. 10/01/1978, n° 76-11.405) ; que les pièces relatives à l'exécution de leur contrat de travail par M. [E] et M. [M], voire par M. [B], ne peuvent être présentées que dans le cadre de la procédure prud'homale qui oppose TF Inter à MM. [E] et [M] mais ne peuvent fonder des demandes à l'encontre de sanizeo, société qui n'existait pas lors des agissements invoqués ; qu'il n'y a en conséquence pas lieu d'examiner le moyen de Sanizeo tiré d'une irrecevabilité des documents provenant des ordinateurs professionnels de MM. [E] et [M] puisque ces documents ne peuvent fonder les prétentions de TF Inter dans le cadre du présent litige ; que, pour ces motifs, l'ensemble de l'argumentation exposée par TF Inter au IV 1-2 de ses écritures récapitulatives ne peut qu'être écarté » ;

ALORS QUE constitue un acte de concurrence déloyale le fait pour une entreprise de profiter de manoeuvres tendant à détourner partie de la clientèle et des fournisseurs d'une entreprise concurrente, commises par les salariés de cette dernière, pour le compte de la première tandis qu'ils s'apprêtent à la constituer ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

La société TF Inter fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué

DE L'AVOIR déboutée de sa demande tendant à voir condamner la société Sanizeo à lui payer la somme de 1 102 799,50 € à titre de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE « l'intimée fait ensuite valoir que l'huissier de justice, diligenté dans les locaux de Sanizeo pour procéder à la mesure d'instruction autorisée par le président du tribunal de commerce, y a découvert plusieurs grilles tarifaires TEKA, deux contrats de mise en exposition des produits TEKA par des cuisinistes, un power point de présentation des produits Poalgi en date du 8 juin 2012, et une carte des cinq zones confiées par TF Inter à ses commerciaux ; qu'il est cependant constant que Sanizeo n'a jamais vendu des produits TEKA ; que ces documents ne pouvaient donc lui servir à concurrencer de manière déloyale TF Inter lors de la vente des produits TEKA dont elle était distributeur exclusif ; que le power point Poalgi ne peut démontrer un acte de concurrence déloyale puisque cette société n'est pas fournisseur de TF Inter ; qu'il n'est pas sérieux, pour cette dernière, de soutenir que le procès-verbal de constat est un élément de preuve très important sur la matérialité "du détournement de futurs fournisseurs" ; que sous peine d'interdire toute concurrence, une entreprise ne peut reprocher à une autre de conclure des contrats avec d'autres fournisseurs que les siens ; que la cour n'a pas à examiner le contrat de fourniture exclusive entre TEKA et TF Inter pour rechercher si cette dernière avait la possibilité juridique de conclure un contrat de fourniture avec Poalgi puisque, d'une part il est soutenu que ce fabricant aurait été démarché par MM. [M] et [E] alors qu'ils étaient salariés de TF Inter et qu'un tel démarchage, s'il a été déloyal, incomberait exclusivement à faute à ces salariés qui n'étaient pas alors gérants de Sanizeo, d'autre part il n'est pas soutenu que Sanizeo, qui n'est pas fournisseur exclusif de Poalgi, aurait pu exiger de cette société qu'elle ne travaille pas avec TF Inter ; que l'intimée ne s'est jamais fournie auprès de Poalgi et ne produit aucune pièce démontrant qu'elle aurait envisagé de travailler avec cette société ou aurait entretenu avec elle des pourparlers qui n'auraient pas abouti du fait de Sanizeo ; que rien ne lui permet donc d'affirmer comme elle le fait que Poalgi "aurait dû devenir fournisseur de la société TF Inter" ; que l'argumentation de ce que les fournisseurs Genebre, Nayes, Max-Fire et Simeco n'ont pas pu travailler avec TF Inter "et que c'est bien ce qui est reproché à Sanizeo" repose elle aussi sur le fait que TF Inter a retrouvé, sur les ordinateurs de ses anciens salariés, des contacts pris par MM. [E] et [M] avec ces sociétés, ce qui ne saurait, ainsi qu'il a déjà été jugé, caractériser une déloyauté de Sanizeo après sa création ; qu'il ne peut qu'être relevé que les contacts pris avec Simeco n'ont pas abouti et que les trois autres fournisseurs qui ont conclu un contrat de distribution avec Sanizeo n'ont jamais été en relations contractuelles avec TF Inter qui ne justifie aucunement et n'allègue même pas qu'elle aurait tenté d'entrer en relations avec eux ; que TF Inter, qui n'a pas développé la gamme des produits qu'elle offrait pour des raisons qui lui sont propres ne saurait en conséquence reprocher à Sanizeo d'avoir distribué des produits qu'elle-même n'offrait pas ; que ne peut dès lors être retenu, à l'encontre de Sanizeo, que la conservation, dans ses locaux, de grilles tarifaires de TEKA et de contrat de mise en exposition ainsi que de la carte de découpage des zones des ventes de TF Inter ; qu'en ce qui concerne ces deux derniers documents, l'intimée ne soutient pas qu'ils ont pu être utilisés par l'appelante pour lui permettre d'effectuer une concurrence déloyale ; qu'en ce qui concerne les grilles tarifaires de TEKA, il ne suffit pas pour TF Inter de prétendre que ces documents permettaient à Sanizeo de connaître les détails de la gamme des produits, référencements, fiches techniques, fiches produits, contrats TEKA, ce qui est certain, mais qu'il lui appartient, puisque Sanizeo n'a jamais travaillé avec TEKA, de démontrer que cette connaissance lui permettait de la concurrencer de manière déloyale et de se positionner mieux qu'elle sur le marché ; or attendu que TF Inter se contente de produire les grilles tarifaires des produits distribués par Sanizeo sans procéder à une quelconque comparaison avec ses propres grilles TEKA, notamment en ce qui concerne les produits offerts, leurs tarifs et les délais de livraison offerts par Sanizeo pour justifier que celle-ci a établi des grilles tarifaires se situant juste au-dessous de ses propres tarifs ou offrant des prestations systématiquement en concurrence avec les siennes ; qu'elle se contente de faire valoir, que TEKA "produit également des hottes haut de gamme", ce qui ne caractérise qu'un unique point de concurrence entre les deux sociétés puisque la société Max-Fire produit aussi des hottes haut de gamme mais ne dément pas les affirmations de l'appelante des différences notables entre les produits TEKA qu'elle distribue et les produis Poalgi, Genebre, Nayes et Max-Fire distribués par Sanizeo ; que TF Inter ne dément pas, par exemple, que TEKA ne produit que des éviers blancs, gris ou noirs alors que Poalgi produit des éviers de couleurs ou que les matériaux utilisés par TEKA ne sont pas les mêmes que ceux utilisés par les autres marques de plus haut de gamme que celle qu'elle distribuait à titre principal ; qu'elle n'apporte donc pas la preuve qui lui incombe de ce que la possession des grilles tarifaires TEIKA a permis à Sanizeo de la concurrencer de manière déloyale ; qu'enfin, en ce qui concerne le détournement de clientèle reproché par TF Inter à Sanizeo, celui-ci ne peut être démontré par la liste des commandes confiées à l'appelante par Ubaldi et Etrouvetout et Oska à compter du début de l'année 2013 étant au surplus relevé que ces trois clients sont des sites marchands de e-commerce qui mettent en concurrence de nombreux produits et de nombreux fournisseurs ; qu'il n'y a rien de curieux à ce que certains de ses clients aient fait partie du portefeuille de M. [E] lorsqu'il était salarié de TF Inter, le démarchage de la clientèle par un ancien salarié passé au service d'une autre société étant libre et autorisé s'il est pas accompagné de manoeuvres déloyales (Com. 26 octobre 2010 n° 09-71313), lesquelles ne sont en l'espèce pas même exposées et encore moins justifiées ; que les arrêts de la Cour de cassation produit par TF Inter ne peuvent appuyer son argumentation puisque la Haute cour caractérise à chaque fois les manoeuvres employées par un ancien salarié pour détourner la clientèle (cf sur chacun des arrêts produits comparaison faite devant les clients des tarifs de l'ancien employeur et de ceux offerts par une nouvelle compagnie d'assurance/ conservation du fichier client et du répertoire des artistes par un ancien salarié d'une société de spectacles/même matériel provenant des mêmes fournisseurs de matériel agricole présenté à son ancienne clientèle par un ancien salarié passé à la concurrence) ; qu'en l'espèce aucune manoeuvre déloyale de l'un de ses anciens salariés après la création de Sanizeo n'est caractérisée par TF Inter » ;

1°) ALORS QUE constitue un acte de concurrence déloyale l'appropriation, par des procédés déloyaux, d'informations confidentielles relatives à l'activité d'un concurrent, peu important qu'il en ait fait usage ou non ; qu'après avoir relevé que la société Sanizeo conservait, dans ses locaux, des grilles tarifaires de TEKA, des contrat de mise en exposition ainsi que la carte de découpage des zones de vente de la société TF Inter, la cour d'appel ne pouvait, sauf à violer l'article 1382, devenu 1240, du code civil, retenir que l'usage que la société Sanizeo a fait de ces documents n'est pas établi ;

2°) ALORS, à tout le moins, QU'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée (concl. pp. 28 et 29), si la société Sanizeo ne s'était pas appropriée, par des procédés déloyaux commis par les anciens salariés de la société TF Inter, des informations confidentielles relatives à l'activité de celle-ci, commettant ainsi un acte de concurrence déloyale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

3°) ALORS QU'en s'abstenant d'examiner l'annexe 9 du procès-verbal de constat d'huissier dont il résultait que M. [M] avait personnellement procédé à des achats auprès du fournisseur Poalgi dès le mois de juin 2012, afin de dissimuler à la société TF Inter le démarchage qu'il effectuait pour le compte de la société Sanizeo auprès ce fournisseur, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

La société TF Inter fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué

DE L'AVOIR déboutée de sa demande tendant à voir condamner la société Sanizeo à lui payer la somme de 1 102 799,50 € à titre de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE « ne peuvent pas plus être caractérisés des faits de parasitisme puisque TF Inter ne fait état d'aucun savoir-faire particulier, l'établissement de grilles tarifaires ne pouvant être considéré comme tel, et ne fait état d'aucun investissement capté par Sanizeo ; qu'elle ne soutient pas que celle-ci a usurpé sa notoriété, utilisé sa réputation, ses efforts intellectuels ou ses investissements financiers ; qu'elle n'expose pas quelle utilisation de ses grilles tarifaires aurait permis à Sanizeo de bénéficier de l'économie d'un effort financier important qu'elle aurait dû accomplir si elle avait dû créer ex nihilo son activité ; qu'enfin elle ne peut comparer son mode de gestion, basée sur le démarchage de clients et la détention de stocks avec celui de l'appelante qui pratique exclusivement le commerce par Internet sans aucun stock ; qu'il convient dès lors, par infirmation de la décision déférée, de débouter TF Inter de l'ensemble de ses prétentions » ;

1°) ALORS QUE les juges sont tenus par les termes du litige tels qu'ils sont fixés par les conclusions des parties ; qu'en affirmant que la société TF Inter ne fait état d'aucun investissement capté par la société Sanizeo, quand la société TF Inter faisait valoir que la société Sanizeo a bénéficié de ses investissements en utilisant ses fichiers clients, ses tarifs, ses fiches techniques, ses fiches produits, ses référencements et ses contrats pour démarrer son activité sans rien dépenser (p. 29), la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, à tout le moins, QU'en ne recherchant pas, malgré l'invitation qui lui était faite (concl., p. 29), si la société Sanizeo n'avait pas bénéficié des investissements de la société TF Inter en utilisant ses fichiers clients, ses tarifs, ses fiches techniques, ses fiches produits, ses référencements et ses contrats pour démarrer son activité sans rien dépenser, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.