25 novembre 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-15.908

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:C201085

Titres et sommaires

SECURITE SOCIALE - Assujettissement - Généralités - Changement d'affiliation - Immatriculation au régime spécial de la fonction publique - Effets

Il résulte des articles L. 712-1 et R. 712-1 du code de la sécurité sociale que si le statut social d'une personne est d'ordre public et s'impose de plein droit dès lors que sont réunies les conditions de son application, la décision administrative individuelle d'affiliation qui résulte de l'adhésion au régime général s'oppose à ce qu'une immatriculation au régime spécial de la fonction publique puisse mettre rétroactivement à néant les droits et obligations nés de l'affiliation antérieure

Texte de la décision

CIV. 2

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 25 novembre 2021




Cassation


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 1085 F-B

Pourvoi n° X 16-15.908




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 NOVEMBRE 2021

L'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) d'Île-de-France, dont le siège est [Adresse 4], a formé le pourvoi n° X 16-15.908 contre l'arrêt rendu le 11 février 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 12), dans le litige l'opposant :

1°/ au Centre hospitalier de [Localité 3], dont le siège est [Adresse 2],

2°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rovinski, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) d'Île-de-France, et après débats en l'audience publique du 6 octobre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Rovinski, conseiller rapporteur, Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et Mme Aubagna, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à l'URSSAF d'Île-de-France du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 février 2016), par un décret du 19 décembre 2011, des salariés du Centre hospitalier de [Localité 3] (le centre hospitalier) ont été titularisés dans la fonction publique hospitalière avec effet rétroactif au 1er janvier 2011. Le centre hospitalier a demandé le remboursement des cotisations versées au titre du régime général durant la période du 1er janvier 2011 au 31 octobre 2012.

3. Le centre hospitalier a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. L'URSSAF fait grief à l'arrêt de faire droit à la demande de remboursement, alors « que la titularisation rétroactive dans la fonction publique hospitalière d'un salarié de droit privé régulièrement affilié au régime général de la sécurité sociale ne peut entraîner l'anéantissement rétroactif de cette affiliation qui a produit tous ses effets ; qu'en effet, le régime général de sécurité sociale a versé des prestations aux agents antérieurement à leur titularisation en raison précisément de leur affiliation audit régime auquel ils ont versé des cotisations ; qu'une rétroactivité dans l'affiliation au régime de sécurité sociale dont relèvent désormais les agents du fait de leur titularisation rétroactive aboutirait à admettre le remboursement des cotisations versées en privant de cause le versement des prestations effectué en contrepartie au mépris du principe de réalité et de sécurité juridique ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 712-1 et D. 712-1 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 712-1 et R. 712-1 du code de la sécurité sociale :

5. Il résulte de ces textes que si le statut social d'une personne est d'ordre public et s'impose de plein droit dès lors que sont réunies les conditions de son application, la décision administrative individuelle d'affiliation qui résulte de l'adhésion au régime général s'oppose à ce qu'une immatriculation au régime spécial de la fonction publique puisse mettre rétroactivement à néant les droits et obligations nés de l'affiliation antérieure.

6. Pour faire droit à la demande du centre hospitalier, l'arrêt énonce qu'en cas de titularisation prononcée avec effet rétroactif, les personnes concernées sont rattachées au régime spécial de sécurité sociale résultant de cette titularisation avec la même date d'effet. Il retient que la règle de non-rétroactivité de l'affiliation à un régime de sécurité sociale ne s'applique cependant qu'en cas d'affiliation à un régime de sécurité sociale au lieu d'un autre et non lorsque la nouvelle affiliation résulte d'un changement de statut prononcé lui-même à titre rétroactif. Il ajoute que la circonstance que les salariés en question aient pu percevoir, durant la période considérée, les prestations du régime auquel ils appartenaient antérieurement à leur titularisation ne fait pas non plus obstacle à la régularisation de cotisations demandée par leur employeur et qu'il n'existe aucun droit acquis à l'URSSAF de conserver les sommes versées selon des taux et des modalités différentes de celles prévues par le régime spécial de la sécurité sociale applicable aux fonctionnaires titulaires en activité.

7. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 février 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne le Centre hospitalier de [Localité 3] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne le Centre hospitalier de [Localité 3] à payer à l'URSSAF d'Ile-de-France la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales d'Île-de-France

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit que l'URSSAF d'Ile de France devra régulariser les cotisations versées pour les personnes concernées en fonction du régime de sécurité sociale des fonctionnaires qui leur est applicable durant la période du 1er janvier 2011 au 31 octobre 2012 et fera bénéficier le centre hospitalier de [Localité 3] du crédit de cotisations en résultant ;

AUX MOTIFS QU'il résulte des articles L 712-1 et D 712-1 du code de la sécurité sociale que les fonctionnaires en activité bénéficient du régime spécial de sécurité sociale dès leur entrée en fonction en qualité de titulaire ; qu'en cas de titularisation prononcée avec effet rétroactif, les personnes concernées sont rattachées au régime spécial de sécurité sociale résultant de cette titularisation avec la même date d'effet ; qu'en cause d'appel, il n'est plus fait état de l'instruction du 1er août 1956 dépourvue de caractère normatif ; que pour s'opposer à la régularisation demandée, l'URSSAF invoque la non-rétroactivité de l'affiliation au régime de sécurité sociale dont relèvent en réalité les assurés rattachés par erreur et sans fraude à un autre régime ; que cependant cette règle s'applique en cas d'affiliation à un régime de sécurité sociale au lieu d'un autre et non lorsque la nouvelle affiliation résulte d'un changement de statut prononcé lui-même à titre rétroactif ; que la circonstance que les salariés en question aient pu percevoir, durant la période considérée, les prestations du régime auquel ils appartenaient antérieurement à leur titularisation ne fait pas non plus obstacle à la régularisation de cotisations demandée par leur employeur ; qu'il n'existe aucun droit acquis à l'URSSAF de conserver les sommes versées selon des taux et des modalités différentes de celles prévues par le régime spécial de la sécurité sociale applicable aux fonctionnaires titulaires en activité ; que de même le principe de sécurité juridique ne s'oppose pas à la régularisation demandée conformément aux règles juridiques applicables aux fonctionnaires ; qu'en réalité l'effet rétroactif volontairement attachée à titularisation dans la fonction publique hospitalière implique un nouveau calcul des cotisations durant la période litigieuse et le centre hospitalier est bien fondé à demander la régularisation de son compte auprès de l'URSSAF ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement ayant décidé le contraire et d'ordonner à l'URSSAF de procéder à cette régularisation ;

ALORS QUE la titularisation rétroactive dans la fonction publique hospitalière d'un salarié de droit privé régulièrement affilié au régime général de la sécurité sociale ne peut entraîner l'anéantissement rétroactif de cette affiliation qui a produit tous ses effets ; qu'en effet, le régime général de sécurité sociale a versé des prestations aux agents antérieurement à leur titularisation en raison précisément de leur affiliation audit régime auquel ils ont versé des cotisations ; qu'une rétroactivité dans l'affiliation au régime de sécurité sociale dont relèvent désormais les agents du fait de leur titularisation rétroactive aboutirait à admettre le remboursement des cotisations versées en privant de cause le versement des prestations effectué en contrepartie au mépris du principe de réalité et de sécurité juridique ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L 712-1 et D 712-1 du code de la sécurité sociale.

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