10 novembre 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-13.513

Deuxième chambre civile - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2021:C210588

Texte de la décision

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 10 novembre 2021




Rejet non spécialement motivé


Mme LEROY-GISSINGER, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10588 F

Pourvoi n° B 20-13.513







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 NOVEMBRE 2021

La société Château Moulin Saint Georges, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 4], a formé le pourvoi n° B 20-13.513 contre l'arrêt rendu le 7 janvier 2020 par la cour d'appel de Bordeaux (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [N] [K], domicilié [Adresse 1],

2°/ à la société Generali IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Besson, conseiller, les observations écrites de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de la société Château Moulin Saint Georges, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Generali IARD, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [K], et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 septembre 2021 où étaient présents Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Besson, conseiller rapporteur, Mme Bouvier, conseiller, et M. Carrasco, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.


1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Château Moulin Saint Georges aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Château Moulin Saint Georges et la condamne à payer à M. [N] [K] et à la société Generali IARD, chacun, la somme de 1 500 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour la société Château Moulin Saint Georges

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevables car prescrites les demandes de la SCI Moulin de Saint Georges dirigées à l'encontre de Monsieur [K] et de son assureur la compagnie Generali Iard,

AUX MOTIFS QUE sur la recevabilité : l'article 6-3 de la loi n°71-498 du 29 juin 1971 relative au régime des experts dispose que « l'action en responsabilité dirigée contre un expert pour des faits se rapportant à l'exercice de ses fonctions se prescrivent par dix ans à compter de la fin de sa mission » ; que Monsieur [N] [K] a déposé son rapport d'expertise le 3 mars 2000 ; que par ailleurs, l'article 26-2 de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 ayant réduit à cinq ans le délai de prescription des actions personnelles et mobilières, dispose que les dispositions de cette loi s'appliquent aux prescriptions du jour de l'entrée en vigueur de la loi, mais sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; qu'au cas d'espèce, la prescription de l'action en responsabilité formée par la SCI Château Moulin Saint-Georges était en cours à la date de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi dont l'application immédiate n'a pu avoir pour effet de prolonger le délai de prescription au-delà du 3 mars 2010, date à laquelle était acquise la prescription en vertu de l'ancienne loi ; que la SCI Château Moulin Saint-Georges a assigné M. [N] [K] et la SARL [J] et [S] par actes des 23 et 29 janvier 2013 ; que c'est donc à bon droit et par une juste appréciation des faits que les premiers juges ont déclaré irrecevables car prescrites les demandes de la SCI Moulin Saint-Georges dirigées à l'encontre de M. [N] [K] et de son assureur la compagnie Generali Iard ainsi que contre son agent général, le cabinet [J]-[S] ; que le jugement sera sur ce point confirmé ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE sur la fin de non-recevoir tirée de l'acquisition de la prescription : que l'article 122 du code de procédure civile dispose que : « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée » ; que la loi n°71-498 du 29 juin 1971 fixe le régime juridique applicable aux experts judiciaires et comportait notamment l'article 6-3 libellé en ces termes : « L'action en responsabilité dirigée contre un expert pour des faits se rapportant à l'exercice de ses fonctions se prescrit par dix ans à compter de la fin de sa mission » ; qu'ainsi, c'est la fin de la mission de l'expert, c'est-à-dire le dépôt de son rapport qui met un terme à sa mission, et marque le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité, et marque le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité dirigée à l'encontre d'un expert judiciaire, et non point les décisions de justice ultérieures se référant à ce rapport ; que cet article a été abrogé par la loi n°2008-561 du 17 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile en réduisant le délai à 5 ans ; que l'article 26 (II) de la loi relatif aux dispositions transitoires décidait que ce nouveau délai s'applique dès son entrée en vigueur de la loi, « sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure » ; qu'en l'espèce, le Juge des Référés près le Tribunal de Grande Instance de Libourne a, par une ordonnance de référé en date du 24 décembre 1998, désigné Monsieur [K] en qualité d'expert judiciaire ; qu'il n'est pas contesté que Monsieur [K] a déposé son rapport d'expertise judiciaire le 3 mars 2000 ; que le dépôt du rapport d'expertise marque la fin de la mission de l'expert et également le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité qui peut lui être intentée ; qu'en conséquence, conformément aux dispositions de l'article 6-3 de la loi n°71-498 du 29 juin 1971, la SCI Moulin de Saint Georges, disposait d'un délai de 10 ans à compter du 3 mars 2000 pour engager une action en responsabilité à l'encontre de Monsieur [K], en qualité d'expert judiciaire, soit jusqu'au 3 mars 2010 à minuit ; que force est de constater que la SCI Moulin de Saint Georges, n'a jamais interrompu les délais de prescription à l'encontre de Monsieur [K] et ou de son assureur de responsabilité, avant les deux assignations délivrées les 23 et 29 janvier 2013, soit près de 3 ans après l'acquisition de la prescription ; qu'il en résulte que les demandes de la SCI Moulin de Saint-Georges sont irrecevables ;

ALORS QUE 1°) lorsque la loi réduit la durée d'une prescription, la prescription réduite commence à courir du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle ; que la loi du 11 février 2004 ayant introduit un article 6-3 dans la loi du 29 juin 1971 a réduit la durée du délai de prescription de l'action en responsabilité dirigée contre un expert en fixant le point de départ de la prescription à la fin de la mission de l'expert, et non plus à la manifestation du dommage ou son aggravation laquelle peut être postérieure à la fin de la mission de l'expert ; qu'en fixant le point de départ de la prescription de l'action de la SCI Château Moulin Saint Georges à l'encontre de M. [K] à la date de la fin de la mission de ce dernier, correspondant au dépôt de son rapport le 3 mars 2000, cependant que la prescription réduite résultant de l'application de l'article 6-3 de la loi du 29 juin 1971 ne pouvait commencer à courir que du jour de l'entrée en vigueur de la loi du 11 février 2004, soit le 13 février 2004, la cour d'appel a violé l'article 2222 du code civil et l'article 6-3 de la loi n°71-498 du 29 juin 1971, dans sa rédaction issue de la loi du 11 février 2004,

ALORS QUE 2°) la loi ne dispose que pour l'avenir et n'a point d'effet rétroactif ; que la loi du 11 février 2014 a introduit un article 6-3 dans la loi du 29 juin 1971 aux termes duquel toute action en responsabilité dirigée contre un expert se prescrit par dix ans à compter de la fin de sa mission ; qu'en retenant que le point de départ de la prescription de l'action engagée par la SCI Château moulin Saint Georges à l'égard de M. [N] [K] devait être fixé à la fin de la mission de ce dernier, correspondant au jour du dépôt de son rapport, le 3 mars 2000 (arrêt p.8, dernier alinéa), et en faisant ainsi une application rétroactive du nouvel article 6-3 de la loi du 29 juin 1971, la cour d'appel a violé l'article 2 du code civil, ensemble l'article 6-3 de la loi n°71-498 du 29 juin 1971, dans sa rédaction issue de la loi du 11 février 2004.

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