4 novembre 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-16.393

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:C201019

Titres et sommaires

SAISIE IMMOBILIERE - Procédure - Audience d'orientation - Contestations et demandes incidentes - Nullité - Conditions - Conclusions non signées par l'avocat constitué - Preuve d'un grief

Il résulte des articles 114 et 766 du code de procédure civile que l'absence de signature des conclusions, déposées au greffe conformément à l'article R. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution, constitue une irrégularité de forme, qui ne peut entraîner la nullité de l'acte que s'il est justifié d'un grief

PROCEDURE CIVILE - Acte de procédure - Nullité - Vice de forme - Conditions - Existence d'un grief - Preuve - Nécessité - Cas - Article R. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution

Texte de la décision

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 4 novembre 2021




Cassation partielle


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 1019 F-B

Pourvoi n° H 20-16.393




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 NOVEMBRE 2021

La caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Paris et d'Ile-de-France, société coopérative à capital et personnel variables, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° H 20-16.393 contre l'arrêt rendu le 16 mars 2020 par la cour d'appel d'Agen (chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [C] [T],

2°/ à Mme [Z] [I], épouse [T],

domiciliés tous deux [Adresse 4],

3°/ à la société Banque CIC Sud-Ouest, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Jollec, conseiller référendaire, les observations de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Paris et d'Ile-de-France, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [T] et de Mme [I], et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 22 septembre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Jollec, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Agen, 16 mars 2020), sur des poursuites à fin de saisie immobilière exercées par la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Paris et d'Ile-de-France (la banque) à l'encontre de M. [T] et de Mme [I], l'adjudication du bien immobilier de ces derniers a été fixée à une audience.

2. Par jugement du 15 mars 2019, dont M. [T] et Mme [I] ont interjeté appel, un juge de l'exécution a reporté la date de vente forcée à la demande de la banque.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La banque fait grief à l‘arrêt infirmant le jugement qui avait reporté, à sa demande, la date de l'adjudication de l'immeuble que celle-ci a saisi, de dire que la demande de report de l'adjudication est une demande incidente, de constater que ses conclusions déposées en première instance ne sont pas signées, de dire que le premier juge, statuant en matière de saisie immobilière, n'était saisi d'aucune demande, de constater la caducité du commandement de payer valant saisie, alors « que les demandes incidentes sont la demande reconventionnelle, la demande additionnelle et l'intervention ; que le créancier poursuivant, en demandant comme le prévoit l'article R. 322-19 du code des procédures civiles d'exécution, le report de l'audience d'adjudication, ne formule pas une demande distincte de sa demande initiale, savoir : la vente aux enchères publiques de l'immeuble qu'il a saisi, mais, au contraire, persiste dans cette demande initiale et la réitère formellement, pour éviter la caducité que prévoit l'article 322-27 du même code et l'éventuelle extinction de la créance dont il est porteur ; qu'en décidant le contraire pour juger que les conclusions dont la CRCAM de Paris et d'Île-de-France a saisi le premier juge sont nulles et que, mécaniquement, la caducité du commandement valant saisie doit être constatée, la cour d'appel a violé l'article 63 du code de procédure civile, ensemble les articles R. 322-19 et 322-27 du code des procédures civiles d'exécution. »

Réponse de la Cour

4. La demande de report de l'audience d'adjudication, qui constitue une demande incidente, soumise aux formes prescrites à l'article R. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution, doit être formée par voie de conclusions.

5. Le moyen, qui postule le contraire, n'est pas fondé.

Mais sur le moyen relevé d'office

6. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu les articles 114 et 766 du code de procédure civile :

7. L'absence de signature des conclusions, déposées au greffe conformément à l'article R. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution, constitue une irrégularité de forme, qui ne peut entraîner la nullité de l'acte que s'il est justifié d'un grief.

8. Pour dire que le premier juge, statuant en matière de saisie immobilière, n'était saisi d'aucune demande, et constater la caducité du commandement de payer valant saisie, l'arrêt retient que le dépôt d'écritures qui ne comportent pas la signature de l'avocat sont affectées d'une nullité de fond, et qu'il convient de dire nulles les conclusions déposées au greffe le 12 février 2019 en vue de l'audience du 15 février 2019, de sorte que le juge de l'exécution qui n'était saisi d'aucun moyen n'a pu valablement reporter la date d'audience.

9. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit que la demande de report de l'audience d'adjudication est une demande incidente, l'arrêt rendu le 16 mars 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne M. [T] et Mme [I] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [T] et Mme [I] et les condamne in solidum à payer à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Paris et d'Ile-de-France la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille vingt et un.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Yves et Blaise Capron, avocat aux Conseils, pour la caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) de Paris et d'Ile-de-France

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué, infirmant le jugement entrepris qui a reporté, à la demande la Crcam de Paris et d'Île-de-France, créancier poursuivant, la date de l'adjudication de l'immeuble que celle-ci a saisi, D'AVOIR :

. dit que la demande de report de l'adjudication est une demande incidente,

. constaté que les conclusions déposées en première instance par la Crcam de Paris et d'Île-de-France ne sont pas signées,

. dit que le premier juge, statuant en matière de saisie immobilière, n'était saisi d'aucune demande,

. constaté la caducité du commandement de payer valant saisie ;

AUX MOTIFS QU'« il est constant que la demande de report de l'audience d'adjudication constitue une demande incidente soumise aux formes prescrites à l'article R. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution » (cf. arrêt attaqué, p. 4, 5e alinéa) ; que « la Crcam ne répond pas au moyen tiré de l'absence de signature des conclusions [; que,] si elle peut justifier la transmission de ses écritures au greffe le 12 février 2019, pour autant l'exemplaire en copie au dossier n'est pas signé, la pièce n° 19 de la Crcam ne concerne que la preuve de l'envoi au greffe, mais ne contient pas de copie des conclusions [; que] le dépôt d'écritures qui ne comportent pas la signature de l'avocat sont [est] affectées [affecté] d'une nullité de fond » (cf. arrêt attaqué, , p. 4, 6e alinéa) ; que, « par suite, sans qu'il y ait à examiner les autres moyens subséquents, il convient de dire nulles les conclusions déposées au greffe le 12 février 2019 en vue de l'audience du 15 février 2019, de sorte que le juge de l'exécution qui n'était saisi d'aucun moyen n'a pu valablement reporter la date d'audience » (cf. arrêt attaqué, p. 4, 7e alinéa) ; que, « faute d'avoir été valablement saisi, il convient de constater [par application de l'article R. 322-27 du code des procédures civiles d'exécution] la caducité du commandement de payer valant saisie » (cf. arrêt attaqué, p. 5, 1er alinéa) ;

. ALORS QUE les demandes incidentes sont la demande reconventionnelle, la demande additionnelle et l'intervention ; que le créancier poursuivant, en demandant comme le prévoit l'article R. 322-19 du code des procédures civiles d'exécution, le report de l'audience d'adjudication, ne formule pas une demande distincte de sa demande initiale, savoir : la vente aux enchères publiques de l'immeuble qu'il a saisi, mais, au contraire, persiste dans cette demande initiale et la réitère formellement, pour éviter la caducité que prévoit l'article 322-27 du même code et l'éventuelle extinction de la créance dont il est porteur ; qu'en décidant le contraire pour juger que les conclusions dont la Crcam de Paris et d'Île-de-France a saisi le premier juge sont nulles et que, mécaniquement, la caducité du commandement valant saisie doit être constatée, la cour d'appel a violé l'article 63 du code de procédure civile, ensemble les articles R. 322-19 et 322-27 du code des procédures civiles d'exécution.

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