28 janvier 2010
Cour d'appel de Paris
RG n° 09/21979

Pôle 4 - Chambre 8

Texte de la décision

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 8



ARRÊT DU 28 JANVIER 2010



(n° ,6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 09/21979



Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Octobre 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 09/07468





APPELANTE



LA CAISSE DE GARANTIE DE L'IMMOBILIER venant aux droits de la CAISSE DE GARANTIE DE L'IMMOBILIER FNAIM par suite d'un changement de dénomination sociale

agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice



ayant son siège [Adresse 4]



représentée par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoués à la Cour

assistée de Maître Jean-Yves DAVEZAC, avocat plaidant pour Maître Jack BEAUJARD, avocats au barreau de PARIS, toque : E887





INTIMES



Monsieur LE TRESORIER DE PARIS 10EME- 2ÈME DIVISION



demeurant [Adresse 5]



défaillant



Madame [P] [R] épouse [C]

née le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 7]

de nationalité française



demeurant [Adresse 3]



représentée par la SCP MONIN - D'AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour

assistée de Maître Marie-Geneviève THENAUT, avocat au barreau de PARIS, toque : B 161



Monsieur [K] [C]

né le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 6]

de nationalité française



demeurant [Adresse 3]



représenté par Maître Louis-Charles HUYGHE, avoué à la Cour

assisté de Maître Guy PECHEU, avocat au barreau de PARIS, toque : E1365, plaidant pour Maître Stéphane BULTEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : C1120







COMPOSITION DE LA COUR :



Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 16 décembre 2009, en audience publique, devant la cour composée de :



Madame Annie BALAND, présidente,

Madame Alberte ROINÉ, conseillère

Madame Martine FOREST-HORNECKER, conseillère



qui en ont délibéré, en présence de Mlle Carole BAUCHET, élève avocate stagiaire





GREFFIÈRE :



lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Mademoiselle Sandra PEIGNIER





ARRÊT : RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE



- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.



- signé par Madame Annie BALAND, présidente, et par Mademoiselle Sandra PEIGNIER, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.






********



La Caisse de garantie de l'immobilier a interjeté appel d'un jugement, en date du 1er octobre 2009, par lequel le Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de Paris :

- se déclare compétent pour statuer,

- rejette la demande de validité de la procédure de saisie immobilière menée par la Caisse de garantie de l'immobilier contre Madame [P] [R] épouse [C] et Monsieur [K] [C],

- rejette les demandes fondées sur l'article 700 du Code de procédure civile,

- rejette la demande de dommages intérêts,

- condamne la Caisse de garantie de l'immobilier aux dépens.



Par assignation à jour fixe du 10 novembre 2009, déposée au greffe le 20 novembre 2009, et par réassignation à jour fixe du 20 novembre 2009, la société Caisse de garantie de l'immobilier demande à la Cour de :

- confirmer le jugement en ce que le Juge de l'exécution s'est déclaré compétent pour statuer,

- infirmer le jugement dont appel pour le surplus,

- dire et juger que les actes de cautionnement dont se prévaut la Caisse de garantie de l'immobilier constituent des titres exécutoires établissant sa créance et permettant d'en évaluer le montant au sens de la loi du 9 juillet 1991 et de l'article 2191 du Code civil,

- évaluer la créance de la Caisse de garantie de l'immobilier à l'encontre de Monsieur [K] [C] et de Madame [P] [R] épouse [C] à un montant de 548.916,46 euros représentant le montant total en principal et accessoires des trois actes de caution hypothécaire signés les 19 juin 1985, 13 janvier 1988, 15 et 25 février 1991 par Monsieur [K] [C] et de Madame [P] [R] épouse [C] au profit de la Caisse de garantie de l'immobilier,









- subsidiairement, évaluer la créance de la Caisse de garantie de l'immobilier à l'encontre de Monsieur [K] [C] et de Madame [P] [R] épouse [C] à la somme de 216.860,64 euros en principal représentant les règlements effectués par la Caisse de garantie de l'immobilier aux mandants de la société 'Cabinet [K] [C]' pour la période ayant couru du 24 mars 1993 au 21 novembre 1995,

- débouter Monsieur [K] [C] et de Madame [P] [R] épouse [C] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- dire que les conditions préalables à la saisie immobilière sont réunies,

- ordonner la vente forcée de l'immeuble appartenant à Monsieur [K] [C] et de Madame [P] [R] épouse [C] sur la mise à prix de 50.000 euros,

- renvoyer pour le surplus la procédure devant le Juge de l'exécution,

- condamner solidairement Monsieur [K] [C] et de Madame [P] [R] épouse [C] à payer à la Caisse de garantie de l'immobilier la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, pour les frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

- dire que les dépens seront pris en frais privilégiés de vente.



Par conclusions en réplique du 8 décembre 2009, Monsieur [K] [C] demande à la Cour de :

- dire et constater que les trois actes notariés signés entre 1985 et 1991 ne comportent pas intrinsèquement les éléments établissant l'existence ni permettant l'évaluation d'une prétendue créance de la Caisse de garantie de l'immobilier qui serait née entre 1992 et 1995, postérieurement à ces titres,

- dire et constater que ces trois titres ne sont pas, par eux-mêmes, conformes aux exigences des articles 2 et suivants de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures d'exécution, ni à l'article 2191 du Code civil,

- dire et constater que Monsieur [K] [C], Président Directeur Général du Cabinet [K] [C] avait en tant que tel, un 'intérêt personnel patrimonial à la dette' du Cabinet dont il s'était porté caution,

- dire et constater que le cautionnement allégué présente un caractère commercial,

- constatant l'absence de titre exécutoire, renvoyer la Caisse de garantie de l'immobilier à mieux se pourvoir devant le Tribunal de commerce de Paris,

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de la Caisse de garantie de l'immobilier,

- subsidiairement, constater l'autorité de chose jugée par la Cour d'appel de Paris le 13 octobre 2005 énonçant que les actes notariés n'ont pas le caractère de 'titres exécutoires',

- dire nulle la procédure de saisie,

- dire et constater que la Caisse de garantie de l'immobilier ne justifie d'aucun acte interruptif de la prescription décennale et constater que son action en paiement est prescrite,

- constater la prescription des intérêts en application de l'article 2277 du Code civil,

- très subsidiairement, constater que l'acte notarié des 15 et 25 février 1991 comporte en page 3 des mentions raturées et renvois sur les chiffres de 6.000.000 et 8.000.000 qui ne sont pas les seuls et uniques renvois approuvés et signés en fin d'actes,

- dire et constater que les paiements effectués par la Caisse de garantie de l'immobilier au-delà de la somme garantie sont inopposables à Monsieur [K] [C],

- constater, à la supposer établie à son origine, l'extinction totale de la créance alléguée,

- constater l'absence de cause du commandement aux fins de saisie immobilière du 24 octobre 2007,

- dire et juger que la créance alléguée de la Caisse de garantie de l'immobilier n'était à la date du commandement ni certaine, ni liquide, ni exigible et qu'elle ne l'est pas davantage dans le cadre de la présente procédure,

- dire et juger lesdits commandements nuls et de nuls effets ainsi que l'ensemble de la procédure de saisie immobilière subséquente,









- dans tous les cas, condamner la Caisse de garantie de l'immobilier à payer à Monsieur [K] [C] la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens.

Il fait valoir principalement que:

- l'acte authentique de caution est rédigé pour permettre l'inscription de la sûreté hypothécaire mais il n'établit pas une créance exigible, laquelle n'existe que virtuellement à la date de l'acte litigieux.



Par conclusions du 14 décembre 2009, Madame [P] [R] épouse [C], demande de :

- dire le juge de l'exécution incompétent pour statuer sur le caractère exécutoire des trois actes notariés invoqués par la Caisse de garantie de l'Immobilier,

- lui donner acte de ce qu'elle déclare que le tribunal de commerce de Paris est compétent pour en connaître,

- subsidiairement, dire que la prescription décennale prévue par l'article L 110-4 du code de commerce est applicable et la prétendue créance de la Caisse de garantie de l'Immobilier prescrite,

- dire le commandement de payer valant saisie immobilière du 24 octobre 2007 irrecevable conformément à l'article 124 du code de procédure civile, faute de créance liquide et exigible,

- condamner la Caisse de garantie de l'Immobilier à lui payer la somme de 60.000 euros pour procédure abusive et celle de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir principalement que :

- le juge de l'exécution n'est pas compétent pour apprécier si les engagements de caution hypothécaire dont se prévaut la Caisse de garantie de l'Immobilier sont des titres exécutoires, car il ne peut remettre en cause les titres exécutoires eux-mêmes,

- elle s'est engagé comme caution hypothécaire d'un passif éventuel et futur, et les actes ne consacrent pas une créance certaine, liquide et exigible, qu'ils ne constatent aucune remise de fonds,

- un arrêt de la cour d'appel de Paris du 13 octobre 2005, qui a force de chose jugée même dans ses motifs, a retenu que les actes notariés ne constituaient pas des titres exécutoires,

- la créance est de nature commerciale, et en vertu de la prescription applicable en la matière, prescrite,

- le commandement du 2 mars 2003, annulé, n'a pas interrompu la prescription, par application de l'article 2243 du Code civil.



Monsieur le Trésorier de Paris 10ème 2ème division, créancier inscrit, assigné par acte du 10 novembre 2009 délivré à personne morale, n'a pas constitué avoué.



L'arrêt sera réputé contradictoire en application de l'article 923 du code de procédure civile.






SUR CE, LA COUR :



qui se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, à leurs écritures et à la décision déférée,



Sur la compétence du juge de l'exécution :



Considérant que l'article L 213-6 du code de l'organisation judiciaire, modifié par l'ordonnance du 21 avril 2006, dispose que le juge de l'exécution connaît de la procédure











de saisie immobilière, des contestations qui s'élèvent à l'occasion de celle-ci, à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, et des demandes nées de cette procédure ou s'y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit ainsi que de la procédure de distribution qui en découle ;



Considérant que le juge de l'exécution est compétent pour connaître de toutes les contestations élevées et notamment pour apprécier le caractère exécutoire des titres invoqués par la Caisse de garantie de l'Immobilier, créancier saisissant dans la procédure de saisie immobilière qu'elle a entreprise ;



Sur l'autorité de chose jugée de l'arrêt du 13 octobre 2005 :



Considérant qu'en vertu de l'article 1351 du Code civil, l'autorité de la chose jugée qui est attachée au seul dispositif du jugement, n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet de celui-ci et il faut que la chose demandée soit la même ; que l'arrêt du 13 octobre 2005, qui a statué sur la validité du commandement de payer valant saisie immobilière délivré par la Caisse de garantie de l'Immobilier le 20 mars 2003, ne saurait avoir d'autorité de chose jugée au sujet de la présente contestation élevée sur le commandement de payer valant saisie immobilière du 24 octobre 2007, encore moins ses motifs ;



Sur le caractère exécutoire des titres :



Considérant que la Caisse de garantie de l'Immobilier fonde la saisie immobilière sur trois actes authentiques dans lesquels Monsieur [K] [C] et Madame [P] [R] épouse [C] se constituent cautions simplement hypothécaires de la société Cabinet [K] [C] envers la Caisse de garantie de l'Immobilier pour un montant fixé, 800.000 francs soit 121.959,21 euros, en principal, tous intérêts légaux et accessoires évalués à 20 %, 600.000 francs, soit 91.469,41 euros, et 1.600.000 francs, soit 243.918,43 euros, en principal et tous intérêts légaux, frais, indemnités et autres accessoires, à raison de toutes les sommes que la société Cabinet [K] [C] pourrait devoir à la Caisse de garantie de l'Immobilier par suite des paiements que celle-ci pourrait être amenée à faire en son acquit de garantie ; qu'une copie exécutoire nominative a été délivrée pour servir de titre exécutoire ;



Considérant qu'au regard de l'article 3 4° de la loi du 9 juillet 1991, ces actes notariés revêtus de la formule exécutoire sont des titres exécutoires permettant d'entreprendre une exécution forcée ; qu'au regard de l'article 4 de cette loi, la créance invoquée par la Caisse de garantie de l'Immobilier est liquide, dès lors que ces titres comportent les éléments permettant son évaluation, tels que le montant maximal des dettes cautionnées, celles-ci résultant expressément des paiement effectués par la Caisse de garantie de l'Immobilier, le taux légal de l'intérêt ; qu'il incombe à la Caisse de garantie de l'Immobilier d'établir les sommes dues en vertu de ces actes, ce qu'elle fait par la production de quittances subrogatives pour les sommes qu'elles a réglées en garantie ; que ces actes sont des titres exécutoires qui fondent la saisie immobilière entreprise ;





Sur la prescription :



Considérant que l'engagement de caution hypothécaire de Monsieur [K] [C] et Madame [P] [R] épouse [C], pris pour la société Cabinet [K] [C], société commerciale, par le gérant de celle-ci, en faveur d'une autre société commerciale, la Caisse de garantie de l'Immobilier, leur permet d'opposer à cette













dernière la prescription qu'aurait pu lui opposer la débitrice principale pour une dette de nature commerciale  ; que cet engagement ait été pris en la forme authentique ne modifie pas la nature de la dette  ; qu'en vertu de 26 de la loi du 17 juin 2008, la nouvelle durée de la prescription prévue par l'article L 110-4 du code de commerce modifié par cette loi, ne s'applique pas antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi ; qu'en conséquence, la prescription de 10 ans, prévue par cet article avant sa modification et l'ancien article 189 bis du code de commerce, doit être appliquée à la créance dont la Caisse de garantie de l'Immobilier poursuit le recouvrement ;



Considérant qu'en application de l'article 2244 du Code civil, le délai de la prescription extinctive est interrompu par un acte d'exécution forcée mais, que le commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 20 mars 2003 n'a pu avoir un effet interruptif de la prescription du fait de son annulation par le jugement du 27 mai 2004 confirmé par l'arrêt de la cour d'appel de PARIS du 13 octobre 2005 ;



Considérant qu'à défaut d'interruption de la prescription, la Caisse de garantie de l'Immobilier n'est plus recevable à poursuivre le paiement des sommes qu'elle a réglées jusqu'au 21 novembre 1995 ; que le commandement valant saisie-immobilière du 24 octobre 2007 est tardif ;



Considérant que le jugement doit être confirmé ;



Considérant que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile ;





PAR CES MOTIFS :





Confirme le jugement entrepris,



Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,



Condamne la Caisse de garantie de l'Immobilier aux dépens d'appel pour lesquels il pourra être fait application de l'article 699 du code de procédure civile.





LA GREFFIÈRE,LA PRÉSIDENTE,

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