22 septembre 2011
Cour d'appel de Grenoble
RG n° 07/03655

Chambre Commerciale

Texte de la décision

RG N° 07/03655

JLB

N° Minute :







































































Copie exécutoire

délivrée le :



S.C.P. CALAS



S.C.P. GRIMAUD



Me RAMILLON



S.C.P. POUGNAND



S.E.LA.R.L. DAUPHIN

& MIHAJLOVIC









AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE COMMERCIALE



ARRET DU JEUDI 22 SEPTEMBRE 2011







Appel d'une décision (N° RG 2006J130)

rendue par le Tribunal de Commerce de VIENNE

en date du 25 septembre 2007

suivant déclaration d'appel du 10 Octobre 2007





APPELANTE :



S.A. COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES IMMOBILIERES - C.E.G.I. -, prise en la personne de son représentant légal en exercice demeurant en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représentée par la SELARL DAUPHIN & MIHAJLOVIC, avoués à la Cour

assistée de Me Pierre LACOEUILHE, substitué par Me DIGIURO, avocats au barreau de PARIS





INTIME :



Monsieur [M] [K]

né le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 4] (PORTUGAL)

de nationalité Portugaise

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]



représenté par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour

assisté de Me Sophie DELON, avocat au barreau de VIENNE









COMPOSITION DE LA COUR :



LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :



Monsieur Daniel MULLER, Président de Chambre,

Monsieur Jean-Louis BERNAUD, Conseiller,

Mme Fabienne PAGES, Conseiller,



Assistés lors des débats de Mme Nadine LEICKNER, Greffier.



















DEBATS :



A l'audience publique du 16 Juin 2011, Monsieur MULLER, Président a été entendu en son rapport



Les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,



Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu ce jour,



------0------





La société AL CONSTRUCTION a pour objet une activité d'étude, réalisation, financement de villas, bâtiments ou locaux, marchand de biens, fabrication et négoce de tous produits de loisirs ou bien-être concernant la maison individuelle ou toute autre construction.



Elle a conclu avec la société CEGI une convention en date du 15 juillet 1993 définissant les conditions générales et particulières d'octroi et d'application de la garantie destinée à répondre à l'obligation instituée par la loi n° 90-1129 du 19 décembre 1990 relative au contrat de construction de MAISONS INDIVIDUELLES ou celle instituée par l'article R 261-21 b du code de la construction et de l'habitation relative à la vente en l'état futur d'achèvement.



Début 2002, Monsieur [K] est entré au capital de la société et en a pris la gérance.



Le 14 octobre 2002, il a souscrit un engagement de caution solidaire au profit de la société CEGI.



La société AL CONSTRUCTION a par ailleurs fourni à la société CEGI une garantie bancaire de 76.225 € ainsi qu'un séquestre dans ses livres de 45.000 €.



Par courrier recommandé en date du 3 juin 2003 (AR signé le 20 juin 2003), la société CEGI a informé la société AL CONSTRUCTION de la résiliation de la convention n°789, et ce à effet immédiat.



Par jugement en date du 8 mars 2004, le Tribunal de Grande Instance de Bourgoin-Jallieu a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société AL CONSTRUCTION.



Antérieurement à ce jugement, cette société avait introduit une procédure en rupture brutale des relations commerciales établies qui n'a pas abouti, le liquidateur judiciaire n'ayant pas relevé appel du jugement.



Par acte du 24 mai 2006, la société CEGI a saisi le Tribunal de Commerce de Vienne d'une demande en paiement de la somme de 356.003,56 € en principal et intérêts à l'encontre de Monsieur [K] en sa qualité de caution solidaire.







Par jugement en date du 25 septembre 2007, le Tribunal de Commerce de Vienne a débouté la société CEGI de ses demandes, l'a condamnée à payer à Monsieur [K] la somme de 1.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, et l'a condamnée aux dépens.



Le Tribunal a retenu des faits constitutifs d'un dol de la part de la société CEGI.



La société CEGI a relevé appel de ce jugement par déclaration de son avoué au greffe de la Cour en date du 10 octobre 2007.



Par arrêt du 28 mai 2009 la présente cour a statué en ces termes :


Rappelle que lors de l'audience du 2 avril 2009, la Cour a rejeté le bordereau de communication de pièces signifié le même jour et donc postérieurement à l'ordonnance de clôture en date du 25 février 2009, ce qui implique rejet des pièces mentionnées sur ce bordereau qui ne figuraient pas sur le dernier bordereau antérieur à l'ordonnance de clôture, qui est celui annexé aux dernières conclusions signifiées le 5 septembre 2008, de sorte qu'ont étéécartées des débats les pièces dites communiquées en première instance 1 à 48 du bordereau du 2 avril 2008,




Avant dire droit,



Tous droits et moyens des parties réservées,




Ordonne la réouverture des débats, la révocation de l'ordonnance de clôture et le renvoi de la cause et des parties à la conférence de mise en état du :




Mercredi 9 Septembre 2009 à 9 H 30



afin qu'elles fournissent leurs observations :



- sur la qualification des actes signés par la société CEGI et intitulés 'acte de cautionnement - garantie de livraisons à prix et délais convenus' et donc des engagements de celle-ci qui paraissent devoir s'analyser comme des garanties autonomes créant à sa charge une obligation personnelle et non comme des actes de cautionnement,



- sur la possibilité d'un recours du garant, en l'espèce la société CEGI, à l'encontre du donneur d'ordre, la société AL CONSTRUCTIONS,



- en l'absence de recours de la société CEGI à l'encontre de la société AL CONSTRUCTIONS, sur la possibilité et donc la recevabilité d'un recours de la société CEGI à l'encontre de Monsieur [M] [K] dès lors que celui-ci s'est porté caution solidaire de la société AL CONSTRUCTIONS envers la société CEGI et que son cautionnement qui a un caractère accessoire suppose l'existence d'une obligation principale et donc d'une possibilité de recours de la société CEGI à l'encontre de la société AL CONSTRUCTIONS,



- et d'une façon générale, toutes observations qu'elles estimeront utiles ;







Réserve les dépens.






Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 27 avril 2011 par la SA COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIE IMMOBILIERES qui sollicite, par voie d'infirmation du jugement, la condamnation de M. [M] [K] à lui payer la somme de 247 968 € avec intérêts contractuels (taux légal majoré de quatre points) à compter de la mise en demeure du 17 août 2004, outre une indemnité de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile aux motifs que l'article L. 313 ' 22 '1 du code monétaire et financier, issu de la loi du 1er juillet 2010, prive de toute pertinence la jurisprudence invoquée de la Cour de Cassation, selon laquelle la dette du garant serait personnelle et donc insusceptible de recours contre le constructeur défaillant ou sa caution, qu'aux termes de l'acte de cautionnement du 14 octobre 2002 Monsieur [M] [K] a contracté une obligation de couverture pour toutes les garanties de livraison en vigueur au 14 octobre 2002 et pour toutes celles délivrées jusqu'au 14 avril 2003, que le cautionnement du dirigeant a été spécialement prévu dans la convention du 15 juillet 1993 conclue entre le constructeur et le garant de livraison, que le cautionnement litigieux trouve sa cause dans la dette du constructeur envers le garant et son objet dans la garantie de paiement de cette dette, que sa créance sur le constructeur a été régulièrement déclarée au passif de la liquidation judiciaire, peu important que le passif chirographaire n'ait pas été vérifié, qu'il a été définitivement jugé qu'elle n'avait commis aucune faute dans ses rapports avec la société AL CONSTRUCTION et que la délivrance des garanties s'était normalement poursuivie après le cautionnement souscrit par le dirigeant, que celui-ci, qui était mieux placé que quiconque pour apprécier la situation de l'entreprise, n'a pas pu être abusé sur les risques pris, étant observé qu'il n'existait pas de situation irrémédiablement compromise à la date du 14 octobre 2002.





Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 3 mai 2011 par M. [M] [K] qui demande à la cour de déclarer irrecevable et subsidiairement infondée l'action de la société COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIE IMMOBILIERES , plus subsidiairement encore de dire et juger que la société appelante a manqué à ses obligations de loyauté et de bonne foi lors de la formation du contrat et de la condamner au paiement de dommages et intérêts d'un montant équivalent aux sommes réclamées avec compensation entre les créances réciproques, en tout état de cause de condamner la société COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIE IMMOBILIERES à lui payer une indemnité de 4500 € pour frais irrépétibles aux motifs qu'il résulte d'une jurisprudence constante qu'en exécutant sa dette de garantie le garant de livraison s'acquitte d'une obligation personnelle lui interdisant d'exercer un recours subrogatoire à l'encontre du constructeur et par voie de conséquence de sa caution, que les dispositions invoquées de l'article L. 313 ' 22 '1 du code monétaire et financier, issues de la loi du 1er juillet 2010, ne sont pas applicables au cautionnement litigieux souscrit le 14 octobre 2002, qu'il n'est pas justifié d'une admission de la créance au passif de la société AL CONSTRUCTION, qu'en l'absence de décompte actualisé la créance n'est pas justifiée







dans son quantum, que la société COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIE IMMOBILIERES a eu un comportement dolosif à son égard alors qu'après avoir obtenu son cautionnement personnel elle a très rapidement mis fin à sa garantie avec effet rétroactif, ce qui a conduit au dépôt de bilan, étant observé que la décision du tribunal de commerce de Paris intervenue dans les seuls rapports entre les sociétés COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIE IMMOBILIERES et AL CONSTRUCTION n'a pas l'autorité de la chose jugée s'agissant de la faute qui a été commise à son préjudice.






MOTIFS DE L'ARRET





Aux termes de l'article L. 313 ' 22 '1 du code monétaire et financier les établissements de crédit ayant fourni un cautionnement, un aval ou une garantie, que ces derniers soient d'origine légale, réglementaire ou conventionnelle, disposent de plein droit et dans tous les cas d'un recours contre le client donneur d'ordre de l'engagement, ses coobligés et les personnes qui se sont portées caution et, pour les paiements effectués au titre de leur engagement, de la subrogation dans les droits du créancier prévue au 3° de l'article 1251 du code civil.



Ces dispositions issues de la loi 2010 ' 737 du 1er juillet 2010 , entrée en vigueur le 1er juin 2011, ne sont pas applicables à la convention de garantie conclue le 15 juillet 1993 au profit de la société AL CONSTRUCTION, ainsi qu'en décide l'article 61 '1 de cette loi, selon lequel l'article L. 313 ' 22 '1 susvisé ne s'applique qu'aux contrats dont l'offre a été émise après la date d'entrée en vigueur de la loi.



La société COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIE IMMOBILIERES ne peut donc se fonder sur ce texte pour soutenir qu'elle est légalement autorisée à exercer un recours à l'encontre de la caution du donneur d'ordre.



Il est de jurisprudence constante qu'un garant de livraison qui remplit une obligation qui lui est personnelle est tenu, dans ses rapports avec le constructeur, de la charge définitive de la dette qu'il a acquittée à la suite de la défaillance de celui-ci et qu'il ne dispose pas à l'encontre du maître de l'ouvrage ou de sa caution du recours subrogatoire légal de l'article 1251-3e du code civil.



Ainsi en application des dispositions d'ordre public de l'article L 231-6 du code de la construction et de l'habitation, telles qu'interprétées par une jurisprudence constante, la garantie de livraison à prix et délais convenus souscrite par la société CEGI doit s'analyser,indépendamment de la qualification retenue par les parties, comme une garantie autonome créant à sa charge une obligation personnelle, et non comme un acte de cautionnement .



Il en résulte qu'ayant acquitté une dette, qui lui était propre, la société COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIE IMMOBILIERES ne dispose pas d'un recours subrogatoire à l'encontre de la société













AL CONSTRUCTION, ni par voie de conséquence d'une action à l'encontre de M. [M] [K], dont le cautionnement qui a un caractère accessoire suppose l'existence d'une obligation principale.



Par voie de confirmation du jugement, mais par motifs substitués, la société COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIE IMMOBILIERES sera par conséquent déboutée de l'ensemble de ses demandes.



L'équité ne commande pas toutefois de faire application en cause d'appel de l'article 700 du code de procédure civileau profit de l'intimé.





PAR CES MOTIFS





LA COUR





Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,



Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,



Y ajoutant :



Dit n'y avoir lieu en cause d'appel à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties,



Condamne la société COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIE IMMOBILIERES aux entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP d'avoués GRIMAUD.





SIGNE pour le Président empêché, par Monsieur BERNAUD, Conseiller faisant fonction de Président, et par Madame LEICKNER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.





Le Greffier Le Président

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