26 janvier 2012
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 09/22505

11e Chambre B

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 26 JANVIER 2012



N° 2012/57













Rôle N° 09/22505







[X] [S] épouse [H]





C/



SAEM ADOMA





















Grosse délivrée

le :

à : JAUFFRES

MAGNAN















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 08 Décembre 2009 enregistré au répertoire général sous le n° 08/94.





APPELANTE



Madame [X] [S] épouse [H], prise tant en sa qualité d'épouse de Mr [O] [H] décédé qu'en celle d'héritière de ce dernier

née le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 5] (ALGERIE),

demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Jean marie JAUFFRES, avoué à la Cour,

ayant Me Adam KRID, avocat au barreau de NICE





INTIMEE



S.A.E.M. ADOMA, nom commercial SONACOTRA, agissant poursuites et diligences de son représentant légal,

dont le siège social est sis [Adresse 4]

représentée par la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avoués à la Cour,

ayant Me Laurent DENIS-PERALDI, avocat au barreau de NICE













*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR





L'affaire a été débattue le 29 Novembre 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Mr JUNILLON, conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.



La Cour était composée de :





Madame Marie Chantal COUX, Président

Monsieur Michel JUNILLON, Conseiller

Madame Marie-Florence BRENGARD, Conseiller





qui en ont délibéré.





Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.



Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Janvier 2012.







ARRÊT



Contradictoire,



Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Janvier 2012,



Signé par Madame Marie Chantal COUX, Président et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.




***



























































Vu le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Nice le 8 décembre 2009 dans l'instance opposant Madame [X] [S] veuve [H] à la SAEM ADOMA;



Vu l'appel interjeté par Madame [S] à l'encontre de cette décision le 14 décembre 2009;




Vu les conclusions déposées par Madame [S] le 12 avril 2010;



Vu les conclusions déposées par la SAEM ADOMA le 28 novembre 2011;



Vu l'ordonnance du 29 novembre 2011 révoquant l'ordonnance de clôture rendue le 3 novembre 2011 et prononçant la clôture de l'instruction;



Suivant convention du 20 mai 1974 la Ville de [Localité 7] a chargé la société SONACOTRA devenue ADOMA de résorber un bidonville par la mise en place d'une cité modulaire provisoire [Adresse 3]. Dans ce cadre la société ADOMA gère une résidence pour travailleurs étrangers qui comprend de petites structures destinées à une activité commerciale de proximité.

Aux termes de conventions d'occupation précaire annuelles dont la dernière a été consentie le 1er janvier 2006 pour une durée de douze mois, elle a mis à disposition de Monsieur [O] [H] un local commercial N°3 à usage de boucherie halal.

Après l'expiration du terme du contrat, elle a appris le décès de Monsieur [H] survenu en Algérie le [Date décès 2] 2007 et une nouvelle convention a été passée avec un tiers, Monsieur [U], portant sur le local précédemment occupé par Monsieur [H].



Par acte d'huissier du 9 mars 2007 Madame [S], veuve de Monsieur [H], a assigné la société ADOMA devant le Tribunal de grande instance de Nice pour voir reconnaître l'existence d'un bail commercial soumis au statut sur le local auparavant loué à son mari et actuellement occupé par son beau-frère, Monsieur [D] [H].



Par jugement rendu le 8 décembre 2009, cette juridiction a déclaré ses demandes irrecevables pour défaut de qualité à agir et a débouté la société ADOMA de sa demande en expulsion au motif qu'il n'était pas établi que Madame [S] occupe le local.



Régulièrement appelante de cette décision dont elle poursuit l'infirmation, Madame [S] demande à la Cour de constater qu'elle agit en qualité d'ayant droit de son défunt époux (acte de succession établi le 4 mars 2007), requalifier la convention d'occupation précaire en bail commercial de 9 ans et débouter la société ADOMA de toutes ses prétentions.



Elle fait valoir que le contrat liant les parties ne peut être qualifié de convention d'occupation précaire compte tenu de la longue durée d'occupation des lieux (depuis 1994) et d'un dépôt de garantie d'un montant élevé (3.919,55 euros), qu'il n'existe pas de motif légitime en faveur d'une occupation précaire dans la mesure où le projet de démolition n'est plus d'actualité et qu'une nouvelle convention a été passée avec Monsieur [U].



La SAEM ADOMA conclut à la confirmation du jugement sur l'irrecevabilité des demandes, subsidiairement au déboutement de Madame [S] et à titre reconventionnel elle sollicite l'expulsion de Madame [S] et de tous occupants de son chef au besoin avec le concours de la force publique et sa condamnation au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation de 450 euros à compter du 1er janvier 2007 jusqu'à la libération effective des lieux et d'une somme de 6.000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance et procédure abusives.



Elle soutient que l'appelante ne justifie pas de sa qualité pour agir. Au fond elle estime que la précarité de la situation résultant du projet de démolition et du caractère provisoire des cellules commerciales justifie la signature de conventions d'occupation précaires prévoyant des redevances modiques (333,72 euros par mois). Elle ajoute que n'étant pas propriétaire des lieux, elle ne pouvait en disposer autrement que par des conventions temporaires et révocables à tout moment.




MOTIFS DE LA DÉCISION



SUR LA RECEVABILITÉ DE L'ACTION DE MADAME [S]



Attendu que l'appelante produit aux débats un acte de succession établi le 4 mars 2007 par Maître [P] [K], notaire à [Localité 5] (Algérie) établissant que [O] [H] décédé en Algérie le [Date décès 2] 2007 a laissé pour lui succéder sa mère, son épouse, ainsi que ses sept enfants et qu'il revient à Madame [S] 30/240 èmes de la succession;



Attendu que Madame [S] ne justifie pas, par les pièces produites, avoir pouvoir pour agir au nom de l'indivision successorale;



Attendu qu'en application de l'article 815-3 du code civil, elle n'a pas qualité pour agir seule en requalification de la convention d'occupation précaire précédemment consenti à son époux en bail commercial;



Que c'est à bon droit que le premier juge a déclaré ses demandes irrecevables;



SUR LES DEMANDES RECONVENTIONNELLES



Attendu que la recevabilité des demandes reconventionnelles en expulsion et en condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation n'est pas discutée;



Attendu qu'il ressort du constat d'huissier du 21 mars 2007 que la personne présente sur place à cette date, Monsieur [Z] [F], a déclaré être employé par le frère du défunt, Monsieur [D] [H], lequel n'est pas partie à l'instance;



Attendu cependant que dans le cadre de la procédure de référé engagée à son encontre, Monsieur [D] [H] a fait valoir que la veuve de [O] [H] lui a demandé de tenir provisoirement le commerce et lui a ainsi donné mandat de gestion;



Attendu qu'aux termes de ses écritures d'appel, Madame [S] reconnaît elle-même expressément avoir donné procuration à son beau-frère afin de gérer le commerce;



Attendu que le bail précaire consenti à [O] [H] pour une durée d'un an à compter du 1er janvier 2006 ayant pris fin, Madame [S] ne peut prétendre faire occuper le local par un tiers sans l'agrément de la société ADOMA;



Attendu en conséquence qu'il convient d'ordonner l'expulsion des lieux litigieux de Madame [S], laquelle se domicilie à l'adresse de la boucherie [H], et de tous occupants de son chef, avec au besoin avec le concours de la force publique, le jugement déféré étant sur ce point réformé;



Attendu que si la société ADOMA avait consenti à Monsieur [U] un bail précaire sur ces locaux à compter du 1er février 2007, il ressort des pièces produites que ce locataire s'est désisté de cette location en faveur de Monsieur [D] [H] par courrier du 29 mars 2007;



Attendu qu'il convient dès lors d'accueillir la demande en paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer fixé par le bail du 1er février 2007, soit 434,02 euros, à compter du 1er avril 2007 jusqu'à la libération effective des lieux;



SUR LES DOMMAGES INTÉRÊTS, L'APPLICATION DE L'ARTICLE 700 DU CPC ET LES DÉPENS



Attendu que ni la procédure engagée par Madame [S] ni l'appel interjeté à l'encontre du jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Nice le 8 décembre 2009 ne revêtent un caractère abusif; Qu'il n'y a pas lieu à condamnation à dommages-intérêts au profit de la SAEM ADOMA;



Attendu qu'il est équitable de laisser à la charge de chacune des parties ses frais irrépétibles de première instance et d'appel;



Attendu que ce qui est jugé commande de mettre les dépens à la charge de l'appelante qui succombe dans ses prétentions;





PAR CES MOTIFS



LA COUR



Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement



- Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté la société ADOMA de ses demandes reconventionnelles; Le réforme sur ce point



Et statuant à nouveau de ces chefs



- Ordonne l'expulsion de Madame [X] [S] veuve [H] et de tous occupants de son chef de la cellule commerciale n°[Adresse 3], au besoin avec le concours de la force publique



- Condamne Madame [X] [S] veuve [H] à payer à la SAEM ADOMA, à compter du 1er avril 2007 et jusqu'à la libération effective des lieux, une indemnité mensuelle d'occupation de 434,02 euros



Y ajoutant



- Rejette toutes autres demandes des parties



- Dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du CPC



- Condamne Madame [X] [S] veuve [H] aux dépens d'appel distraits au profit de la SCP MAGNANconformément à l'article 699 du CPC.





LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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