31 janvier 2013
Cour d'appel de Paris
RG n° 12/02656

Pôle 4 - Chambre 8

Texte de la décision

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 8



ARRET DU 31 JANVIER 2013



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/02656



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 17 Novembre 2009 -Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES - RG n° 09/04430

Arrêt du 04 Novembre 2010 - Cour d'Appel de VERSAILLES - RG n° 09/09137

Arrêt de la Cour de Cassation du 06 Janvier 2012 - 2 ème Chambre Civile - Pourvoi T11-10.916





APPELANT



Monsieur [P] [B]

[Adresse 7]

[Localité 4]



Représenté par Me Jean-Claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS (toque : D0945)



Assisté de la AARPI BDL en la personne de Me Françoise DUMONT, avocats au barreau de PARIS (toque : L0037)





INTIMEE



SA NOUVELLE VISION prise en la personne de son président domicilié en cette qualité audit siége

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par la SELARL HJYH Avocats à la cour en la personne de Me Nathalie HERSCOVICI, avocats au barreau de PARIS (toque : L0056)

Assistée de Me Alexandra AUMONT, avocat au barreau de PARIS (toque : A0195)





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Décembre 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Martine FOREST-HORNECKER, Conseillère et Madame Hélène SARBOURG, Conseillère, chargées d'instruire l'affaire.



Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Alain CHAUVET, président

Madame Martine FOREST-HORNECKER, conseiller

Madame Hélène SARBOURG, conseiller



Greffier, lors des débats : Madame Guylaine BOSSION





ARRÊT CONTRADICTOIRE



- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile



- signé par Monsieur Alain CHAUVET, président et par Madame Emilie GUICHARD, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


*****



FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES



Par jugement du 17 novembre 2009 auquel la cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de VERSAILLES a :



- débouté Monsieur [R] [B] de ses demandes,



- dit que le procès-verbal aux fins de saisie-vente dressé le 26 février 2009 produira tous ses effets,



- débouté les parties de leurs demandes d'indemnité de procédure,



- condamné Monsieur [B] aux dépens,



- ordonné la notification du jugement aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception et par lettre simple, ainsi qu'à l'huissier de justice par lettre simple.



Par arrêt du 04 novembre 2010 auquel la cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le juge de l'exécution de la cour d'appel de VERSAILLES a :



- confirmé en toutes ses dispositions le jugement entrepris,



Y ajoutant,



- condamné Monsieur [B] à payer la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux dépens.



Par arrêt du 06 janvier 2012, la Cour de cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 04 novembre 2010 par la cour d'appel de VERSAILLES aux motifs que 'pour déclarer la signification du jugement régulière et débouter Monsieur [B] de l'ensemble de ses demandes, l'arrêt énonce que les dispositions du jugement entrepris sur l'erreur matérielle affectant la date du procès-verbal de recherches infructueuses, qui ne sont pas critiquées en cause d'appel, ne peuvent qu'être confirmées ; Qu'en statuant ainsi, alors que dans ses conclusions Monsieur [B] soutenait qu'une divergence de date équivaut à une absence de date et qu'il s'agit d'une formalité substantielle dont l'omission doit être sanctionnée par la nullité sans qu'il soit nécessaire d'examiner si un grief a été causé, ce dont il suit qu'il contestait la qualification d'erreur matérielle retenue par le juge de l'exécution, la cour d'appel a violé le texte susvisé ' ;



Vu la déclaration de saisine de la cour d'appel de PARIS après renvoi par la Cour de cassation, reçue au greffe de la cour le 07 février 2012.




Vu les dernières conclusions du 1er août 2012 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments, par lesquelles Monsieur [B] demande à la cour de :



- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,



- dire que l'acte de signification du jugement du 1er février 1995 ne comporte pas de date,



- dire qu'il s'agit d'une formalité substantielle entraînant la nullité de l'acte,



En tant que de besoin,



- constater que l'absence de cette formalité substantielle a causé un grief à Monsieur [B],



Subsidiairement,



- constater nulle et de nul effet la signification délivrée le 09 mars 1995 par procès-verbal indiquant la date du 09 février 1995,



- déclarer nul et non avenu le jugement rendu le 1er février 1995 à défaut de signification dans les délais de six mois à compter de son prononcé,



- déclarer nul le commandement de saisie vente signifié le 26 février 2009,



- débouter la société NOUVELLE VISION en toutes ses demandes, fins et conclusions,



- la condamner au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.



Vu les dernières conclusions du 25 mai 2012 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments, par lesquelles la société NOUVELLE VISION demande à la cour de :



- débouter Monsieur [B] de son appel,



- confirmer le jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de VERSAILLES en toutes ses dispositions,



- condamner Monsieur [B] à la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entier dépens.






MOTIFS



Considérant que par jugement réputé contradictoire du 1er février 1995 le tribunal de grande instance de PARIS a condamné Monsieur [R] [B] à garantir la SA NOUVELLE VISION des condamnations financières prononcées contre elle au profit des époux [M]-[U] dans l'arrêt en date du 11 février 1993 de la cour d'appel de PARIS à hauteur de la somme de 1 135 000 francs TTC (173 029,63 euros) avec intérêts au taux légal à compter du 15 mars 1993 ;



Considérant qu'en exécution de ce jugement la société NOUVELLE VISION a fait signifier le 26 février 2009 à Monsieur [B] un commandement aux fins de saisie vente pour avoir paiement de la somme totale de 411 676,92 euros ; que cet acte a été délivré à l'adresse du [Adresse 7] ;



Considérant que le jugement du 1er février 1995 a été signifié à Monsieur [B] à sa dernière adresse déclarée [Adresse 2], selon procès verbal de recherches infructueuses de la SCP AMRAM GARNIER-MOUCHEL huissiers de justice associés, portant en son entête la date du 09 février 1995 et plus loin, littéralement, les dates suivantes : « LE PREMIER MARS pour la tentative et le NEUF MARS MIL NEUF CENT QUATRE VINGT QUINZE pour PV 659 NCPC » ; que l'acte mentionne que la lettre recommandée et la lettre simple ont été expédiées le 09 mars 1995 ;



Sur la demande de nullité de l'acte de signification pour absence ou erreur de date



Considérant selon l'article 649 du Code de Procédure Civile que la nullité des actes d'huissier de justice est régie par les dispositions qui gouvernent la nullité des actes de procédure ;



Considérant que la divergence de dates figurant sur le procès verbal de la SCP AMRAM GARNIER-MOUCHEL ne peut équivaloir à une absence de date dès lors qu'il résulte du dit procès verbal que l'huissier ou son clerc s'est rendu le 1er mars 1995 à l'adresse du [Adresse 2] pour tenter de signifier l'acte et que les diligences prévues par l'article 659 du Code de Procédure Civile ont été réalisées le 09 mars suivant ; que l'indication en tête de l'acte de la date du 09 février 1995 est une simple erreur matérielle constitutive d'une nullité de forme qui ne peut être prononcée qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause cette irrégularité ;



Considérant que l'incertitude sur le point de départ du délai d'appel telle qu'invoquée par l'appelant ne peut être constitutive d'un grief ; qu'en effet l'erreur matérielle affectant l'acte n'a pu empêcher Monsieur [B] de relever appel du jugement puisqu'il n'avait à l'époque aucun domicile connu ; que le moyen soulevé de ce chef doit être rejeté ;



Sur le défaut de diligences de l'huissier



Considérant selon l'article 659 du Code de Procédure Civile que « lorsque la personne à qui l'acte doit être signifié n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus l'huissier de justice dresse un procès verbal où il relate avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte ».



Considérant que le procès verbal de signification mentionne les diligences suivantes : « Où étant le 1ER MARS 1995, un clerc assermenté s'est présenté à la dite adresse où il lui a été répondu par la concierge que le susnommé était parti sans laisser d'adresse depuis un an environ ; mon correspondant interrogé m'indique ne pas connaître d'autre adresse que celle-ci-dessus mentionnée » ;



Considérant qu'il résulte d'une attestation régulière établie le 10 octobre 2009 par Madame [N] ex-épouse de Monsieur [B] dont elle est divorcée par jugement du 15 novembre 1994 du tribunal de grande instance de PARIS confirmé par arrêt de la cour de ce siège du 11 mars 1997, qu'elle a habité en tant que propriétaire un appartement situé [Adresse 2]) de 1974 à 2006, que l'immeuble dispose d'un poste de gardiens en permanence 24 H/ 24 et que « la boite aux lettres au nom de [B] a toujours figuré dans le hall de l'immeuble (pour moi-même, [R], [W] ou [G] » ;



Considérant que la procédure de l'article 659 ne peut valablement être mise en 'uvre que dans les cas où les diligences nécessaires n'ont permis de découvrir ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail de la personne à qui l'acte doit être signifié ; qu'il en est tout particulièrement ainsi lors de la signification d'un jugement réputé contradictoire prononcé sans que le défendeur ait été entendu en ses moyens de défense, qui fait courir le délai d'appel et conditionne ainsi le droit au juge de la partie non comparante condamnée en première instance ;



Considérant que les diligences effectuées par l'huissier, sont manifestement insuffisantes dès lors que celui-ci s'est contenté d'interroger un des gardiens de l'immeuble et n'a pas procédé à la simple vérification des noms figurant sur les boites aux lettres de l'immeuble, ce qui lui aurait permis d'interroger l'épouse de l'intéressé qui demeurait sur place ou en tous cas de tenter d'obtenir d'autres renseignements ; qu'en outre l'huissier n'a effectué aucune recherche dans l'annuaire téléphonique des particuliers alors qu'il s'agit également d'une diligence particulièrement simple à accomplir ; qu'il n'a pas recherché non plus le lieu éventuel de travail de l'intéressé qui exerçait la profession d'architecte et qui comme tel dépendait de l'Ordre des Architectes ;



Considérant que le fait que Monsieur [B] n'ait pas fait connaître son changement d'adresse et qu'il ait cessé d'exercer la profession d'architecte depuis mars 1993 est inopérant et sans influence sur la validité de l'acte lui-même dans la mesure où l'huissier qui signifie un acte ne peut préjuger de l'utilité de recherches qu'il n'a pas faites ou qu'il ne déclare pas avoir faites ;



Considérant que l'insuffisance de diligences de l'huissier est manifestement constitutive d'un grief pour Monsieur [B] puisque celui-ci a été privé de la possibilité d'interjeter appel du jugement du 1er février 1995 ; que l'acte de signification doit donc être déclaré nul et de nul effet ;



Considérant selon l'article 478 du Code de Procédure Civile que le jugement réputé contradictoire au seul motif qu'il est susceptible d'appel est non avenu s'il n'a pas été notifié dans les six mois de sa date ;



Considérant qu'il résulte du dit jugement rendu à l'encontre de Monsieur [B] et de la SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DES ARCHITECTES D'INTERIEUR que Monsieur [B] mentionné comme non comparant a fait l'objet d'un procès verbal de recherches infructueuses ; qu'il s'en infère, par application de l'article 474 du Code de Procédure Civile, que le jugement a été qualifié de réputé contradictoire au seul motif qu'il est susceptible d'appel ; qu'il est donc non avenu ;



Considérant que le jugement étant non avenu, le commandement aux fins de saisie vente signifié le 26 février 2009 doit être également déclaré nul et de nul effet ;



Considérant que le jugement sera infirmé ; que la société NOUVELLE VISION qui succombe sera condamnée aux dépens de l'instance ;



Considérant que pour des motifs d'équité il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile en la cause 





PAR CES MOTIFS



La Cour statuant publiquement et contradictoirement



INFIRME le jugement déféré,



Statuant à nouveau,



DECLARE nul et de nul effet l'acte de signification délivré à la requête de la SA NOUVELLE VISION les 1er et 09 mars 1995 à Monsieur [R] [B] suivant procès verbal de recherches infructueuses de la SCP AMRAM GARNIER-MOUCHEL huissiers de justice associés à PARIS ;



DECLARE non avenu le jugement rendu le 1er février 1995 par le tribunal de grande instance de PARIS entre la SA NOUVELLE VISION, Monsieur [R] [B] et la SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DES ARCHITECTES D'INTERIEUR ;



DECLARE nul et de nul effet le commandement aux fins de saisie vente signifié le 26 février 2009 ;



DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;



CONDAMNE la SA NOUVELLE VISION aux dépens de l'instance qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.



LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,

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