7 octobre 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-14.243

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2021:C201060

Texte de la décision

CIV. 2

COUR DE CASSATION



LM


______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________





Audience publique du 7 octobre 2021




NON-LIEU À RENVOI


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 1060 F-D

Pourvoi n° R 21-14.243




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 7 OCTOBRE 2021

Par mémoire spécial présenté le 21 juillet 2021, M. [S] [E], domicilié [Adresse 2], a formulé une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi n° R 21-14.243 qu'il a formé contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2021 par la cour d'appel d'Orléans (chambre des affaires de sécurité sociale), dans une instance l'opposant :

1°/ à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de [Localité 1], dont le siège est [Adresse 3], venant aux droits du RSI de [Localité 1],

2°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié au ministère des solidarités et de la santé, [Adresse 1].

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [E], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF de [Localité 1], et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, M. Gaillardot, premier avocat général, et Mme Aubagna, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. A la suite de mises en demeure, la caisse du régime social des indépendants de [Localité 1], aux droits de laquelle vient l'URSSAF de [Localité 1], a décerné, le 14 juin 2016, à M. [E] (le cotisant) une contrainte au titre des cotisations et majorations de retard afférentes aux mois de janvier 2013, avril, juin, juillet, août, septembre, octobre, novembre et décembre 2015, à laquelle il a formé opposition devant une juridiction de sécurité sociale.

Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

2. A l'occasion du pourvoi qu'il a formé contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2021 par la cour d'appel d'Orléans, qui a validé la contrainte, le cotisant a, par mémoire distinct et motivé transmis au greffe le 21 juillet 2021, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« Les articles L. 244-2 et L. 244-9 du code de la sécurité sociale, interprétés en tant que « la contrainte qui doit permettre au cotisant d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation, est suffisamment motivée dès lors qu'elle fait référence à la mise en demeure antérieure et que celle-ci précise la nature et le montant des cotisations et contributions réclamées et la période à laquelle celles-ci se rapportent » (not. Civ. 2, 18 février 2021, n° 19-23.649 Civ. 2, 18 février 2021, n° 19-23.650 Civ. 2, 22 octobre 2020, n° 19-17.557 Civ. 2, 24 septembre 2020, n° 19-18.631 Civ. 2, 24 septembre 2020, n° 19-17.805 Civ. 2, 13 février 2020, n° 18-25.735 Civ. 2, 20 juin 2013, n° 12-16.379, au Bull.) sont-ils contraires à l'article 6 de la Déclaration de 1789 et au principe d'égalité et à l'article 16 de la Déclaration de 1789, à la garantie des droits, au droit à un recours juridictionnel effectif, aux droits de la défense, en ce que la contrainte produit tous les effets d'un jugement et qu'un jugement doit se suffire à lui-même par une motivation qui lui est propre et non par référence à une autre décision survenue antérieurement (Civ. 3, 23 avril 1997, n° 95-11.446, Bull. n° 86 Civ. 2, 2 avril 1997, n° 95-17.937, Bull. n° 102 Com., 8 juin 1993, n° 90-16.634, Bull. n° 224 Civ. 1, 4 avril 1991, n° 90-04.005, Bull. n° 125 Civ. 3, 27 mars 1991, n° 89-20.149, Bull. n° 101 Soc., 27 février 1991, n° 88-42.705, Bull. n° 102 Com., 11 février 1986, n° 85-14.387, Bull. n° 6) ? »

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

3. Les dispositions législatives contestées sont applicables au litige, qui concerne une opposition à contrainte délivrée après mise en demeure demeurée infructueuse.

4. Elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

5. Cependant, d'une part, la question posée, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle, dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.

6. D'autre part, la question posée ne présente pas un caractère sérieux.

7. En effet, en premier lieu, le législateur peut conférer un effet exécutoire à certains titres délivrés par des personnes morales de droit privé chargées d'une mission de service public, au nombre desquelles figurent les organismes de sécurité sociale, et permettre ainsi la mise en œuvre de mesures d'exécution forcée, sous réserve de garantir le droit à un recours effectif. En deuxième lieu, la contrainte décernée, après mise en demeure demeurée infructueuse, peut être contestée par le cotisant devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale et ce n'est qu'à l'expiration du délai prévu pour former ce recours que la contrainte comporte les effets d'un jugement. En troisième lieu, l'assimilation de la contrainte au jugement en ce qui concerne ses effets ne confère pas à celle-ci la nature d'une décision juridictionnelle.

8. Il ne saurait, dès lors, être sérieusement soutenu que l'interprétation constante par la Cour de cassation des articles L. 244-2 et L. 244-9 du code de la sécurité sociale, selon laquelle la contrainte décernée par un organisme de sécurité sociale pour le recouvrement de cotisations et contributions, qui doit permettre au redevable d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation et préciser à cette fin, à peine de nullité, la nature et le montant des cotisations et contributions réclamées et la période à laquelle celles-ci se rapportent, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice, peut faire référence à une mise en demeure permettant au cotisant d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation, méconnaît les exigences du principe constitutionnel d'égalité devant la loi ni qu'elle porte atteinte aux droits garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789.

9. En conséquence, il n'y a pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept octobre deux mille vingt et un.

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