27 mai 2014
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 13/08309

11e Chambre B

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 27 MAI 2014



N° 2014/294













Rôle N° 13/08309







SCI MARJEBES





C/



[Q] [K] [D]





















Grosse délivrée

le :

à :



SELARL BOULAN

ME RABANY













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance de MANOSQUE en date du 18 Mars 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 11.12.0233.





APPELANTE



SCI MARJEBES Société Civile Immobilière,

immatriculée au RCS de MANOSQUE sous le N° D 392 727 467

prise en la personne de son représentant légal en exercice

demeurant [Adresse 2]

représentée par la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Elsa FOURRIER-MOALLIC, avocat au barreau de MARSEILLE





INTIMEE



Madame [Q] [K] [D]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/007395 du 18/07/2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

née le [Date naissance 2] 1942 à ESPAGNE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Eric RABANY, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE PROVENCE









*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR





L'affaire a été débattue le 15 Avril 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Anne CAMUGLI, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.



La Cour était composée de :





Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre

Mme Anne CAMUGLI, Conseiller

M. Jean-Jacques BAUDINO, Conseiller







qui en ont délibéré.



Greffier lors des débats : Mme Anaïs ROMINGER.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2014







ARRÊT



Contradictoire,



Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Mai 2014,



Signé par Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre et Mme Anaïs ROMINGER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.




***



























































EXPOSÉ DU LITIGE



Mme [Q] [K] [D] est locataire d'un appartement de type 2 situé au troisième étage d'un immeuble [Adresse 1] selon bail verbal à effet du 9 décembre 1982. Elle est également locataire d'un appartement T3 situé au même étage et de l'autre côté du palier soumis à la loi du 6 juillet 989 selon bail écrit à effet du 1er décembre 1982.

Le tribunal d'instance de Manosque a , par jugement du 5 mars 2012 ,prononcé la nullité d'un congé pour vendre délivré par la SCI MARJEBES et portant sur l'appartement T2 loué par Mme [Q] [K] [D] , considérant que ce logement était soumis aux dispositions d'ordre public de la loi du 6 juillet 1989



La SCI MARJEBES a fait délivrer le 30 mai 2012 à Mme [Q] [K] [D] deux congés pour reprise des logements dont elle est locataire. Les congés ont été délivrés au bénéfice de M. [C] [H] [E] associé de la SCI MARJEBES.



Par acte du 2 novembre 2012, Mme [Q] [K] [D] a fait assigner la SCI MARJEBES devant le tribunal d'instance de Manosque en contestation dudit congé, invoquant principalement sa nullité et sollicitant la somme de 3000 EUR à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et celle de 1500 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutenait que le bailleur n'avait pas satisfait à son obligation de lui proposer un logement de remplacement alors qu'elle est âgée de plus de 70 ans et que ses ressources sont inférieures à une fois et demi le smic, le fait que la multiplication des congés irréguliers et infondés par le bailleur lui cause des inquiétudes permanentes.

La SCI MARJEBES concluait au rejet des demandes adverses et à la validation des congés, qu'il soit constaté que Mme [Q] [K] [D] est occupante sans droit ni titre de l'appartement T2 et depuis le 1er décembre 2012 de l'appartement T3, sollicitait par conséquent son expulsion et celle de tout occupant de son chef sous astreinte de 80 EUR par jour de retard avec suppression du délai de l'article L412-1 du code des procédures civiles d'exécution, le paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation égale au dernier loyer majoré des charges et la somme de 2000 EUR au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que le bénéfice de l'exécution de loi.

Elle affirmait la régularité des congés, l'impossibilité d'apprécier a priori la fraude alléguée par Mme [Q] [K] [D], l'insuffisante démonstration par celle-ci de ressources inférieures au seuil fixé par l'article 15-3de la loi du 6 juillet 1989, l'absence d'obligations de relogement des lors que le bénéficiaire de la reprise est lui-même âgé de plus de 60 ans.



Par jugement contradictoire du 18 mars 2013, le tribunal d'instance de Manosque a

prononcé la nullité des congés délivrés le 30 mai 2012 à Mme [D]

débouté en conséquence la SCI MARJEBES de ses demandes ainsi que Mme [D] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

condamné la SCI MARJEBES à payer à Mme [Q] [K] [D] la somme de 900EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a considéré que les conditions d'âge et de ressources de Mme [Q] [K] [D] faisaient obligation au bailleur d'offrir un logement de remplacement, peu important que l'un des associés de la SCI soit âgé de plus de 60 ans, les dispositions invoquées à cet égard par la SCI MARJEBES ne visant que le bailleur personne physique.



La SCI MARJEBES a relevé appel de la décision le 19 avril 2013.




Par conclusions déposées et notifiées le 19 juillet 2013, elle conclut à l'infirmation du jugement déféré et réitère sa demande initiale. Elle sollicite en outre la condamnation de Mme [Q] [K] [D] au paiement des sommes de 2000 EUR au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance et de 3000 EUR sur le même fondement en cause d'appel.

Elle considère que Mme [Q] [K] [D] n'apporte nullement la preuve que ses ressources sont inférieures à une fois et demi le SMIC, considère que le jugement déféré a violé le principe du contradictoire des lors que les pièces produites par son adversaire ne lui ont pas été communiquées.

Elle invoque l'absence de justificatifs des ressources de Mme [Q] [K] [D] et répète que l'obligation de relogement invoquée n'est nullement opposable au bailleur puisque ce dernier est âgé de plus de 60 ans . Elle se prévaut d'une d'un statut comparable à celui de bailleurs co indivisaires, dispensés de l'obligation de reloger le locataire des lors que l'un d'entre eux est âgé de plus de 60 ans à la date d'échéance du contrat. Elle rappelle qu'elle est une société civile immobilière de famille pour laquelle le législateur a réservé un sort différent des autres personnes morales. Elle considère que la locataire a d'ores et déjà bénéficié de larges délais de fait et demande la suppression du délai légal de l'article L412-1 du code des procédures civiles d'exécution ainsi que le bénéfice d'une astreinte.



Par conclusions responsives en appel numéro 1 signifiées le 18 septembre 2013, Mme [Q] [K] [D] conclut à la confirmation pure et simple du jugement déféré et sollicite la somme de 3000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle estime justifier percevoir 742 EUR par mois par sa déclaration de revenus de l'année 2012.

Elle rappelle que le congé a été délivré le 30 mai 2012 au bénéfice de M. [C] [H] [E] né le [Date naissance 3] 1976, âgé par conséquent de moins de 60 ans et non de M. [M] [E].

Elle maintient que le congé du 30 mai 2012 devait lui proposer un domicile conforme aux prescriptions de la loi et que ceci devait être notifié tout au moins au cours du délai de préavis.



L'ordonnance de clôture est intervenue le 20 mars2014.




MOTIFS DE LA DÉCISION



Sur le fond:

Les articles 15 I et II et 13 de la loi du 6 juillet 1989, permettent au bailleur, société civile familiale, de donner congé à son locataire pour vente ou reprise dans les conditions de fond et de forme rappelées par leurs dispositions .

Le bailleur, quoi qu'il soit une société civile familiale est en revanche tenu par l'article 15III de la même loi, de reloger son locataire âgé de plus de 65 ans et dont les ressources annuelles sont inférieures au SMIC.

Pour autant, le même article dispense de cette obligation le bailleur, personne physique âgée de plus de soixante-cinq ans ou dont les ressources annuelles sont inférieures au plafond de ressources mentionné au premier alinéa.

La SCI MARJEBES , bailleur personne morale, ne peut , ainsi que l'a justement rappelé la décision déférée, se prévaloir de ces dispositions au profit de l'un de ses membres des lors que ces dernières ne peuvent bénéficier qu'à un bailleur personne physique.



La SCI MARJEBES se prévaut au surplus des dispositions précitées de l'article 15-III de la loi du 6 juillet 1989 à raison de l'âge de M. [M] [E], né le [Date naissance 1] 1948, âgé par conséquent de 64 ans à la date d'échéance du contrat pour s'estimer dispensée de l'obligation de relogement précédemment rappelée.

Or, le congé du 30 mai 2012 pour reprise a été délivré au profit de M. [C] [H] [E], né le [Date naissance 3] 1976, âgé par conséquent de 35 ans à la date de délivrance du congé.

La SCI MARJEBES ne peut par conséquent et sauf à détourner les dispositions légales précitées, se prévaloir désormais de ce que le bénéficiaire de la reprise serait M. [M] [E] pour prétendre bénéficier de la dispense précédemment rappelée.

Le jugement déféré a rappelé que Mme [Q] [K] [D] était âgée de plus de 70 ans et qu'elle percevait , ainsi que le démontraient ses bulletins de pension et avis d'imposition, des ressources inférieures à une fois et demie le montant annuel du salaire minimum de croissance.


La nullité des congés signifiés le 30 mai 2012 a donc été justement retenue par la décision critiquée en l'absence d'offre de logement de remplacement conforme aux prescriptions de l'article 15-III de la loi du 6 juillet 1989 et le contrat de bail de Mme [Q] [K] [D] venant à échéance le 8 décembre 2012 sera des lors jugé renouvelé conformément aux dispositions légales.



Le premier juge a justement rappelé que l'abus du droit d'agir invoqué par Mme [Q] [K] [D] à l'appui de sa demande indemnitaire étaient insuffisamment caractérisé.

Sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement déféré sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles de première instance.

Il n'apparaît pas équitable de laisser à la charge de Mme [Q] [K] [D] l'intégralité des frais exposés par elle en cause d'elle et non compris dans les dépens.

La somme de 2.000 EUR lui sera allouée en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Dit par conséquent que le contrat de bail dont bénéficie Mme [Q] [K] [D] et venant à échéance le 8 décembre 2012 sera renouvelé conformément aux dispositions légales.

Condamne la SCI MARJEBES à payer à Mme [Q] [K] [D], en cause d'appel, la somme de 2.000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Rejette toute autre demande.

Condamne la SCI MARJEBES aux dépens, ceux d'appel distrait au profit de Me Rabany, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

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