22 mai 2014
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 13/08300

11e Chambre B

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 22 MAI 2014



N°2014/282













Rôle N° 13/08300







SARL CREATION ET CONCEPTION

SCP [V]





C/



SCI MAURALI





































Grosse délivrée

le :

à :



ME CHARAMNAC

SCP ERMENEUX





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 24 Janvier 2013 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 09/07092.





APPELANTES



SARL CREATION ET CONCEPTION Agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié audit siège,

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Yann CHARAMNAC, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Deborah SAMAK, avocat au barreau de NICE,



SCP [V] Es qualité de « Commissaire à l'éxécution du plan » de la « SARL CREATION ET CONCEPTION » par jugement du Tribunal de Commerce de NICE du 15 juin 2011 (RG n° 2011L00419), demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Yann CHARAMNAC, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Deborah SAMAK, avocat au barreau de NICE,



INTIMEE



SCI MAURALI prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège social sis

demeurant [Adresse 2]

représentée par la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par la SCP MARTIN-VERGER-DEPO-GAYETTI, avocat au barreau de NICE,









*-*-*-*-*





























COMPOSITION DE LA COUR



En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 08 Avril 2014 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Jean-Jacques BAUDINO, Conseiller, et Mme Anne CAMUGLI, Conseiller, chargés du rapport.







Mme Anne CAMUGLI, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.













Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :



Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre

Mme Anne CAMUGLI, Conseiller

M. Jean-Jacques BAUDINO, Conseiller







Greffier lors des débats : Mme Anaïs ROMINGER.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Mai 2014.







ARRÊT



Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Mai 2014.



Signé par Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre et Mme Anaïs ROMINGER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
















































EXPOSÉ DU LITIGE



Par acte du 21 décembre 2009, la SCI MAURALI a fait assigner la SARL CRÉATION ET CONCEPTION devant le tribunal de grande instance de Nice aux fins d'obtenir la résiliation avec toute conséquence de droit du bail commercial qu'elle avait conclu avec le preneur le 5 septembre 2000 , en raison des manquements répétés de celui-ci à ses obligations notamment celle de payer des loyers et charges à leur date d'échéance et à différentes reprises ainsi que celle de justifier être assuré.

La SARL CRÉATION ET CONCEPTION représentée par Me [G] désigné en qualité de mandataire judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Nice du 14 janvier 2010 ayant prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, concluait au rejet des demandes adverses, soutenant être parfaitement assuré et contestant les créances alléguées.



Par jugement du 24 janvier 2013, le tribunal de grande instance de Nice a :

prononcé la résiliation du bail liant les parties

ordonné l'expulsion du preneur, au besoin avec le concours de la force publique

condamné la SARL CRÉATION ET CONCEPTION , représentée par Me [G] es qualités, à une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du dernier loyer indexé au 5 septembre 2012 sur la somme de 1.406,83 euros augmentée de la provision sur charges de 108,33 euros et sous réserve de la régularisation annuelle des charges et indexée annuellement selon les stipulations contractuelles à compter de la résiliation

fixé au passif de la SARL CRÉATION ET CONCEPTION la créance de la SCI MAURALI arrêtée à la date d'ouverture de la procédure collective à la somme de 479,88 euros à titre privilégié comme déclarée entre les mains de maître [G] en date du 8 février 2010

condamné la SARL CRÉATION ET CONCEPTION à payer à la SCI MAURALI la somme de 1.000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance

ordonné l'exécution provisoire.



Le tribunal a retenu les manquements répétés du preneur notamment à l'obligation contractuelle de justifier d'une assurance pour la période du 1er septembre 2009 au 1er septembre 2010 ainsi qu'à celle de payer ses loyers à leur date d'échéance soit au premier de chaque trimestre.



La SARL CRÉATION ET CONCEPTION a relevé appel de la décision le 19 avril 2013.




Par conclusions additionnelles récapitulatives déposées et notifiées le 4 mars 2014, elle conclut:

à titre principal que l'arrêt des poursuites individuelles interdit à la SCI MAURALI d'invoquer des défauts ou retards de paiement antérieurs à l'ouverture de la procédure à l'appui de son action résolutoire

que s'agissant d'un bail en cours à l'ouverture de la procédure, la SCI MAURALI est irrecevable à invoquer tout manquement antérieur quel qu'en soit la nature qui n'ouvre droit à son profit qu'à déclaration au passif.

Elle conclut en conséquence à la réformation du jugement en ce qu'il a déclaré recevable l'action résolutoire de la SCI MAURALI et entend voir au contraire juger celle-ci irrecevable.

Elle entend voir juger recevable la demande de fixation de la créance au passif et la confirmation du jugement en ce qu'il a fixé la créance de la SCI MAURALI à la somme de 479,88 euros à titre privilégié.



Subsidiairement au fond,

elle conclut à l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail liant les parties et ordonné de ce chef son expulsion.

Elle entend voir de nouveau

juger qu'elle est parfaitement assurée par contrat d'assurance multirisques professionnels

constater qu'elle a depuis la prise à bail réglé ses loyers par deux ou trois chèques, que la bailleresse n'a jamais opposé la moindre contestation quant à ce mode de paiement, démontrant ainsi sa parfaite acceptation tacite mais également par écrit en avril 2008

juger qu'il n'y a aucun retard dans le paiement des loyers, qu'elle ne s'est en aucun cas livrée à quelques manquements graves et répétés dans le paiement des loyers

que la bailleresse fait preuve d'une particulière mauvaise foi en affirmant le contraire.

Elle entend voir en conséquence:

juger qu'il ne peut y avoir acquisition de la clause résolutoire avec toutes les conséquences de droit y afférent

condamner la SCI MAURALI au paiement de la somme de 5.000 EUR à titre de dommages et intérêts à son profit et de la somme de 5.000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



Par conclusions en répliques déposées et notifiées le 20 mars 2014, la SCI MAURALI entend voir

rejeter la fin de non-recevoir tirée de l'arrêt des poursuites individuelles, qu'elle estime soulevée tardivement en cause d'appel pour la première fois par la SARL CRÉATION ET CONCEPTION,

en conséquence déclarer recevable son action en résiliation judiciaire du bail

rejeter l'appel interjeté par la SCP Taddei Ferrari Funel en qualité de commissaire à l'exécution du plan et la SARL CRÉATION ET CONCEPTION

confirmer le jugement déféré sauf à corriger l'erreur matérielle qu'il contient

prononcer la résiliation du bail liant les parties aux torts exclusifs de la SARL CRÉATION ET CONCEPTION

ordonner l'expulsion de celle-ci ainsi que celle de tous occupants de son chef des locaux pris à bail si nécessaire par recours à la force publique

condamner la SARL CRÉATION ET CONCEPTION au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du dernier loyer indexé au 5 septembre 2013 soit la somme de 1.407,69 euros augmentée de la provisions sur charges de 108,33 euros, sous réserve de la régularisation annuelle des charges et indexées annuellement selon les stipulations contractuelles à compter de la résiliation

fixer au passif de la SARL CRÉATION ET CONCEPTION la créance de la bailleresse arrêtée à la date de l'ouverture de la procédure collective soit à la somme de 479,88 euros à titre privilégié comme déclaré entre les mains de maître en date du 8 février 2010

condamner la SARL CRÉATION ET CONCEPTION au paiement de la somme de 1.000 EUR au titre de l'article 700 du code de procédure civile allouée en première instance

débouter en toute hypothèse la SARL CRÉATION ET CONCEPTION de toutes ses demandes

condamner la SARL CRÉATION ET CONCEPTION au paiement de la somme de 4.000 EUR en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



Elle soutient qu'à la date de l'ouverture de la procédure collective, les manquements visés dans l'assignation du 21 décembre 2009 étaient avérés et caractérisés, que la SARL CRÉATION ET CONCEPTION fait état de manière volontairement tronquée et réductrice d'un seul grief concernant le retard de paiement alors qu'étaient visés des retards répétés et préjudiciables, le défaut d'assurance nonobstant sommation et l'exécution de mauvaise foi par le preneur de ses obligations.. Elle maintient, que le bailleur est recevable à engager une action en résiliation judiciaire pour des fautes réitérées au bail autres que celle tirée d'un défaut de paiement antérieur à l'ouverture de la procédure collective, que les manquements multiples de sa locataire sont selon elle avérés.



L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 mars 2014.






MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la fin de non recevoir tirée de l'arrêt des poursuites individuelles.

Aux termes de l'article 123 du code de procédure civile, les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.

La règle de l'arrêt des poursuites individuelles, consécutive à l'ouverture d'une procédure collective, constitue une fin de non-recevoir pouvant être proposée en tout état de cause et dont le caractère d'ordre public impose au juge de la relever d'office.

La SARL CREA&CONCEPTION est de lors recevable quoi qu'ayant anormalement tardé à invoquer la fin de non recevoir tirée de l'arrêt des poursuites individuelles, à l'invoquer en cause d'appel.

Sur la recevabilité de la demande de résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et pour défaut d'assurance.

Aux termes de l'article L 621-40 du code de commerce, le jugement d'ouverture suspend ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement audit jugement et tendant : A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent , A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent....

La SARL CREA&CONCEPTION invoque des lors à juste titre l'irrecevabilité de l'action résolutoire entreprise par la SCI MAURALI à raison du retard dans le paiement des loyers antérieurs à l'ouverture de sa procédure de redressement judiciaire le 14 janvier 2010.

Le jugement déféré sera des lors réformé en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail pour ce motif.

La demande de résiliation du bail pour manquement du preneur à son obligation d'assurer le bien loué, faute autre que celle tirée d'un défaut de paiement, sera en revanche jugée recevable.



Sur l'obligation d'assurance

Le jugement déféré dont la SCI MAURALI sollicite confirmation a retenu que la SARL CREA&CONCEPTION ne rapportait pas la preuve qu'elle ait effectivement assuré tous les locaux pris à bail pour la période du 1er septembre 2009 au 1er septembre 2010.

Or, la SARL CREA&CONCEPTION produit aux débats une attestation de la compagnie d'assurances AXA certifiant que « la SARL CREA&CONCEPTION, [Adresse 1] est titulaire d'un contrat d'assurance multirisques professionnels numéro 136 685 4704 couvrant l'ensemble des garanties immobilières locatives pour la période du 1er septembre 2009 au 1er septembre 2010 ». Cette attestation est complétée par une attestation AXA du 7 octobre 2013 confirmant que la SARL CREA&CONCEPTION est titulaire du contrat précité pour la période du 5 septembre 2000 au 1er septembre 2010 sans aucune interruption de garantie ainsi que par les quittances correspondantes.

La SARL CREA&CONCEPTION dont l'enseigne est MP21 produit encore une attestation également établie par la compagnie axa assurances le 15 octobre 2013 confirmant que « la société MP21 [Adresse 1] est assurées depuis le 1er septembre 2010 sans aucune interruption de garantie ainsi que les quittances correspondantes ».

Il sera des lors considéré par voie d'infirmation que la SARL CREA&CONCEPTION a rapporté la preuve de ce qu'elle avait satisfait à son obligation d'assurance sur les périodes litigieuses.

La SCI MAURALI ne rapportant pas la preuve des manquements qu'elle impute à la SARL CREA&CONCEPTION à ce titre verra par conséquent ses demandes de résiliation rejetées.



Sur la demande de fixation de la créance au passif

Les deux parties s'accordent a solliciter la confirmation de la décision déférée en ce qu'il a fixé au passif de la SARL CREA&CONCEPTION la créance de la SCI MAURALI arrêtée à la date de l'ouverture de la procédure collective soit à la somme de 479,88 euros à titre privilégié.

Le jugement déféré sera des lors confirmé à ce titre.



Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il n'apparaît pas équitable de faire application en l'espèce de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCI MAURALI qui succombe supportera la charge des dépens.



PAR CES MOTIFS



LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement,



Confirme le jugement déféré en ce qu'il a fixé au passif de la SARL CREA&CONCEPTION la créance de la SCI MAURALI arrêtée à la date de l'ouverture de la procédure collective soit à la somme de 479,88 euros à titre privilégié.

Le réformant sur le surplus

Déclare recevable la fin de non recevoir soulevée par la SARL CREA&CONCEPTION et tirée de l'arrêt des poursuites individuelles.

Déclare la SCI MAURALI irrecevable en sa demande de résiliation du bail liant les parties pour loyers impayés.

Déclare en revanche recevable mais infondée la demande de la SCI MAURALI en résiliation du bail pour défaut d'assurance et rejette la demande de la SCI MAURALI à ce titre

Rejette toute autre demande.

Condamne la SCI MAURALI aux dépens.



LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

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