6 février 2015
Cour d'appel de Paris
RG n° 14/05418

Pôle 5 - Chambre 2

Texte de la décision

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS







Pôle 5 - Chambre 2









ARRET DU 06 FEVRIER 2015



(n°19-1, 5 pages)









Numéro d'inscription au répertoire général : 14/05418





Décision déférée à la Cour : jugement du 30 janvier 2014 - Tribunal de grande instance de PARIS - 3ème chambre 4ème section - RG n°11/12369







APPELANTS AU PRINCIPAL et INTIMES INCIDENTS





Mme [Q] [Z]

Née le [Date naissance 3] 1947 à [Localité 8]

De nationalité française

Sans profession

Demeurant [Adresse 6]



M. [L] [V]

Né le [Date naissance 2] 1952 à [Localité 6]

De nationalité française

Exerçant la profession d'agent de surveillance et de magasinage

Demeurant [Adresse 7]



M. [R] [H]

Né le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 7]

De nationalité française

Exerçant la profession de cadre technique

Demeurant [Localité 2]



Représentés par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque K 0065

Assistés de Me Marc SABATIER plaidant pour le Cabinet MARC SABATIER, avocat au barreau de PARIS, toque D 1840, Me Valérie PROVOST-DUPONCHEL plaidant pour le Cabinet MARC SABATIER, avocat au barreau de PARIS, toque D 1840

























INTIMES AU PRINCIPAL et APPELANTS INCIDENTS





S.A.S. METROPOLITAN FILMEXPORT, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque L 0020

Assistée de Me Benoît GOULESQUE-MONAUX, avocat au barreau de PARIS, toque J 10





S.A.S. LE CINQUIEME RÊVE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représentée par Me Laurent KLEIN, avocat au barreau de PARIS, toque A 411





AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT, représentant l'Etat Français - Ministère de la Culture et de la Communication

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représenté par Me Bernard GRELON, avocat au barreau de PARIS, toque E 445

Assistée de Me Bernard GRELON plaidant pour l'AARPI LIBRA, avocat au barreau de PARIS, toque 445







INTIMEE AU PRINCIPAL, APPELANTE INCIDENTE et INTIMEE INCIDENTE





Société STREETCAR VISIONS LTD, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 5]



Représentée par Me François-Xavier KELIDJIAN de la SELASU FRANCOIS-XAVIER KELIDJIAN, avocat au barreau de PARIS, toque T 02

Assistée de Me Emilie LOZE plaidant pour la SELASU FRANCOIS-XAVIER KELIDJIAN et substituant Me François-Xavier KELIDJIAN, avocat au barreau de PARIS, toque T 02





















COMPOSITION DE LA COUR :





Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 18 décembre 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :



Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente

Mme Sylvie NEROT, Conseillère

Mme Véronique RENARD, Conseillère



qui en ont délibéré





Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT







ARRET :



Contradictoire

Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.















Vu l'assignation délivrée le 19 août 2011 à la requête de Madame [Q] [Z] et de Messieurs [L] [V] et [R] [H], se présentant en qualité d'inventeurs de la grotte découverte le 18 décembre 1994, dite grotte [V], à l'encontre des sociétés Streetcar Visions Ltd (producteur américain d'un documentaire réalisé par le cinéaste [Y] [E] en avril 2010) Le Cinquième Rêve SAS (co-producteur délégué puis producteur associé), Metropolitan Filmexport SAS (distributeur du film en France et dans les pays francophones), outre l'assignation de Monsieur l'Agent Judiciaire de l'Etat représentant l'Etat français - ministère de la Culture et de la Communication aux fins de garantie délivrée par la société Streetcar Visions Ltd et la décision ordonnant la jonction de ces deux procédures,



Vu le jugement rendu le 30 janvier 2014 qui a, pour l'essentiel, rejeté les prétentions respectives des parties,



Vu l'appel interjeté par Madame [Q] [Z] et Messieurs [L] [V] et [R] [H] le 10 mars 2014,



Vu l'ordonnance de clôture de l'instruction de l'affaire rendue le 11 décembre 2014, l'affaire étant fixée pour être plaidée à l'audience du 18 décembre 2014,











Vu les conclusions de procédure notifiées le 17 décembre 2014 par la société Streetcar Visions Ltd par lesquelles elle demande à la cour, au visa des articles 784 et 943 du code de procédure civile, que soit révoquée l'ordonnance de clôture précitée, qu'il soit ordonné à Monsieur [P] [X] la production du procès-verbal d'huissier de justice retraçant la narration de la découverte de la grotte dénommée grotte [V] et que la procédure soit renvoyée devant le conseiller de la mise en état afin de permettre aux parties de conclure sur les faits nouveaux révélés postérieurement à l'ordonnance de clôture, en réservant les dépens,



Vu les conclusions de procédure en réplique notifiées le 18 décembre 2014 par les appelants par lesquelles, au visa des articles 14, 16, 784 et 943 du code de procédure civile, ils demandent à la cour de rejeter les conclusions au fond et les pièces signifiées par la société Streetcar Visions Ltd le 17 décembre 2014 « dans la soirée », d'ordonner, sous astreinte, à Monsieur [P] [X] la production du procès-verbal d'huissier de justice retraçant la narration de la grotte dénommée [Adresse 5] et de renvoyer l'affaire devant le conseiller de la mise en état en vue de prononcer le rabat de l'ordonnance de clôture afin de leur permettre de conclure sur les nouveaux arguments de la société Streetcar Visions Ltd,




Vu les conclusions au fond notifiées par la société Streetcar Visions Ltd « signifiées par RPVA en date du 30 juillet 2014 et ressignifiées en date du 17 décembre 2014 » incluant dans leur dispositif les mêmes demandes que celles contenues dans les conclusions de procédure susvisées et ajoutant à la liste des pièces communiquées cinq nouveaux documents (pièces 16 à 20),



Les parties contradictoirement entendues avant l'ouverture des plaidoiries et la cour s'étant retirée pour délibérer de cet incident de procédure,






SUR CE,





Considérant, s'agissant de la demande aux fins de rabat de l'ordonnance de clôture et du renvoi de la procédure et des parties à la mise en état, que la société Streetcar Visions expose qu'à compter du 12 décembre 2014 ont été publiés dans divers organes de la presse nationale des articles au travers desquels d'autres spéléologues revendiquent la qualité d'inventeurs de cette grotte, parmi lesquels Monsieur [X] qui aurait fait consigner par huissier sa propre version de la découverte, mettant de la sorte en cause la qualité d'inventeurs des demandeurs à l'action ; qu'elle précise que, dans ce contexte, ont été interrompues des négociations en cours portant sur la signature d'un protocole financier tendant au reversement de royalties au profit des trois inventeurs en contrepartie des bénéfices issus de l'exploitation d'une réplique de la grotte qui doit être ouverte au public au printemps de l'année 2015 et que leurs interlocuteurs sont, à ce stade, perplexes ;



Que la société Streetcar Visions Ltd, se prévalant des dispositions de l'article 784 du code de procédure civile, tire en conséquence argument du doute sur les conditions de la découverte de cette grotte apparu postérieurement au prononcé de l'ordonnance de clôture et de la circonstance que la qualité d'inventeur est, à son sens, une « considération majeure » sur l'issue de la procédure ;



Que les appelants, soulignant l'extravagance des propos récemment publiés, destinés, selon eux, à les discréditer, rappelant en outre que la qualité d'inventeurs leur a été reconnue à l'issue d'une procédure pénale ayant donné lieu au jugement rendu par le tribunal correctionnel de Lyon le 18 juillet 1999 ainsi que par l'Etat, selon protocole d'accord du 15 février 2000, et évoquant enfin de vaines diligences pour obtenir le procès-verbal d'huissier dont il fait état dans la presse, s'associent toutefois à ce chef de demande ;







Mais considérant que de simples propos de tiers mettant pour la première fois en cause la qualité d'inventeurs des demandeurs à l'action vingt ans après la découverte de la grotte dont s'agit, ceci dans un contexte porteur de retombées financières profitables aux inventeurs mais étranger au présent litige, et qui ne font l'objet que de simples articles de presse n'engageant que leurs auteurs ou d'une narration unilatérale qui aurait été consignée par huissier, sans plus de précisions, ne peuvent être considérés comme une « cause grave », au sens de l'article 784 du code de procédure civile, justifiant que soit révoquée l'ordonnance de clôture ;



Qu'au surplus, la demande paraît en réalité poursuivre d'autres fins, à savoir obtenir du magistrat chargé de la mise en état qu'il use de la faculté que lui offre l'article 943 du code de procédure civile d'ordonner la production d'un document détenu par un tiers ; que, dans le cadre de la présente procédure civile, il peut être considéré que ladite production et la contribution à la manifestation de la vérité apparaissent à tout le moins hypothétiques ;



Que cette demande doit, par conséquent, être rejetée ;



Considérant, s'agissant de la notification par la société Streetcar Visions Ltd, le 17 décembre 2014, des conclusions au fond et de la communication des pièces 16 à 20 (à savoir : l'ordonnance de clôture rendue le 11 décembre 2014 et quatre publications extraites des sites , , et entre le 12 et le 16 décembre 2014) telles qu'explicitées ci-avant, que force est de considérer qu'elles ont été notifiées et communiquées postérieurement au prononcé de ladite l'ordonnance de clôture ;



Qu'en raison de l'absence de révocation de cette décision, ces conclusions doivent être déclarées irrecevables et ces pièces doivent être écartées des débats ;



Qu'il y a lieu de réserver les dépens ;







PAR CES MOTIFS







Rejette la demande tendant à voir révoquer l'ordonnance de clôture rendue le 11 décembre 2014 par le conseiller de la mise en état ainsi que les demandes subséquentes tendant à voir renvoyer l'affaire et les parties devant le conseiller de la mise en état et à obtenir de ce dernier le prononcé d'une mesure d'instruction sur le fondement de l'article 943 du code de procédure civile ;



Déclare irrecevables les conclusions au fond « ressignifiées » le 17 décembre 2014 par la société Streetcar Visions Ltd et écarte des débats les pièces n° 16 à 20 par elle communiquées postérieurement au prononcé de l'ordonnance de clôture ;



Réserve les dépens.







La Greffière La Présidente



















REPUBLIQUE FRANCAISE



Grosses délivrées

aux parties le :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS







Pôle 5 - Chambre 2









ARRET DU 06 FEVRIER 2015



(n°19-2, 17 pages)









Numéro d'inscription au répertoire général : 14/05418





Décision déférée à la Cour : jugement du 30 janvier 2014 - Tribunal de grande instance de PARIS - 3ème chambre 4ème section - RG n°11/12369







APPELANTS AU PRINCIPAL et INTIMES INCIDENTS





Mme [Q] [Z]

Née le [Date naissance 3] 1947 à [Localité 8]

De nationalité française

Sans profession

Demeurant [Adresse 6]



M. [L] [V]

Né le [Date naissance 2] 1952 à [Localité 6]

De nationalité française

Exerçant la profession d'agent de surveillance et de magasinage

Demeurant [Adresse 7]



M. [R] [H]

Né le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 7]

De nationalité française

Exerçant la profession de cadre technique

Demeurant [Localité 2]



Représentés par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque K 0065

Assistés de Me Marc SABATIER plaidant pour le Cabinet MARC SABATIER, avocat au barreau de PARIS, toque D 1840, Me Valérie PROVOST-DUPONCHEL plaidant pour le Cabinet MARC SABATIER, avocat au barreau de PARIS, toque D 1840













INTIMES AU PRINCIPAL et APPELANTS INCIDENTS





S.A.S. METROPOLITAN FILMEXPORT, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque L 0020

Assistée de Me Benoît GOULESQUE-MONAUX, avocat au barreau de PARIS, toque J 10





S.A.S. LE CINQUIEME RÊVE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représentée par Me Laurent KLEIN, avocat au barreau de PARIS, toque A 411





AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT, représentant l'Etat Français - Ministère de la Culture et de la Communication

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représenté par Me Bernard GRELON, avocat au barreau de PARIS, toque E 445

Assisté de Me Bernard GRELON plaidant pour l'AARPI LIBRA, avocat au barreau de PARIS, toque 445







INTIMEE AU PRINCIPAL, APPELANTE INCIDENTE et INTIMEE INCIDENTE





Société STREETCAR VISIONS LTD, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 5]



Représentée par Me François-Xavier KELIDJIAN de la SELASU FRANCOIS-XAVIER KELIDJIAN, avocat au barreau de PARIS, toque T 02

Assistée de Me Emilie LOZE plaidant pour la SELASU FRANCOIS-XAVIER KELIDJIAN et substituant Me François-Xavier KELIDJIAN, avocat au barreau de PARIS, toque T 02















COMPOSITION DE LA COUR :





Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 18 décembre 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :



Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente

Mme Sylvie NEROT, Conseillère

Mme Véronique RENARD, Conseillère



qui en ont délibéré





Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT







ARRET :



Contradictoire

Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.











Madame [Q] [Z] et Messieurs [L] [V] et [R] [H] exposent que le 18 décembre 1994, sur le territoire de la commune de Vallon Pont d'Arc, en Ardèche, ils ont découvert une grotte contenant des vestiges paléolithiques de plus de 30.000 ans parmi lesquels des oeuvres pariétales, qu' inventeurs au sens de la loi du 27 septembre 1941, ils en ont révélé l'existence en lui donnant le nom de grotte [V] (laquelle a été inscrite à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques par arrêté préfectoral du 15 mai 1995) et qu'ils ont rapidement réalisé des films et photographies, publiant en juin 1995 un ouvrage, illustré de leurs photographies, relatif à leur découverte.



Ils indiquent également qu'à la suite de cette découverte, divers différends les ont opposés à l'Etat français, ce qui a conduit à la signature d'un protocole transactionnel le 15 février 2000 qui comprenait, outre le versement d'une somme forfaitaire de trois millions de francs à leur profit, divers engagements de l'Etat et notamment (pièce n° 1) ;

« La reconnaissance par l'Etat du rôle des inventeurs et les mesures qui en résultent. (') le droit d'exploiter paisiblement leurs photographies et les films réalisés à ce jour (') ainsi que l'engagement selon lequel « L'Etat, dans l'exercice de ses responsabilités, notamment avec le département de l'Ardèche, veillera à ce que les inventeurs soient convenablement associés à la valorisation du site et en particulier au futur espace de restitution » précisant qu'ils ont cependant dû initier diverses procédures postérieurement.



Estimant qu'à l'occasion du tournage, en avril 2010, d'un documentaire intitulé « Cave of forgotten dreams / la grotte des rêves perdus » par le cinéaste allemand [Y] [E], avec la nécessaire autorisation du Ministère de la Culture du fait de la fragilité du site (film qui sera exploité à l'étranger à la fin de l'année 2010 et diffusé en France le 31 août 2011) et dans le cadre duquel le producteur du film avait pris divers engagements à leur égard matérialisés dans un « contrat », selon leurs termes, daté du 19 avril 2010, il a été porté atteinte à leurs droits d'inventeurs ainsi qu'à leurs droits d'auteurs et droits sur les oeuvres posthumes et que n'ont pas été respectés lesdits engagements, les trois inventeurs précités ont assigné la société StreetCar Visions Ltd (producteur américain) la société Le Cinquième Rêve SAS (par eux désignée comme co-producteur délégué puis producteur associé), la société Metropolitan Filmexport (distributeur du film en France et dans les pays francophones), ceci selon exploit du 19 août 2011.



La société StreetCar Visions a assigné l'Etat français en intervention forcée aux fins de garantie et les deux procédures ont fait l'objet d'une jonction.



Par jugement contradictoire rendu le 30 janvier 2014, le tribunal de grande instance de Paris a, en substance :

prononcé la mise hors de cause de la société Le Cinquième Rêve,

écarté des débats les pièces rédigées en anglais non accompagnées de traduction,

rejeté l'ensemble des demandes des requérants,

rejeté les demandes indemnitaires reconventionnelles pour procédure abusive,

condamné in solidum les requérants à payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 10.000 euros au profit de la société SreetCar Visions ainsi que de l'Agent judiciaire de l' Etat, celle de 8.000 euros au profit de la société Le Cinquième Rêve ainsi que de la société Metropolitan Filmexport et à supporter les dépens.

.

Par dernières conclusions notifiées le 02 décembre 2014, Madame [Q] [Z], Monsieur [L] [V] et Monsieur [R] [H], appelants, demandent pour l'essentiel à la cour, au visa de la loi du 27 septembre 1941 relative aux fouilles archéologiques, de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques, de la loi du 17 janvier 2001 relative à l'archéologie préventive, des articles L 531-14 à L 531-16 et L 541-1 du code du patrimoine, des articles 716 et 516, 2, 2048 et 2049, 1382 et 1383, 1101, 1134, 1147, 1184 et suivants, 1103 et 1142 du code civil, des articles L 111-3, L 112-1, L 112-2, L 112-4, L 123-4, L 331-1-4 du code de la propriété intellectuelle, de l'article 254 du Traité de Rome, de la directive 93/98/CEE du Conseil du 29 octobre 1993 relative à l'harmonisation de la durée de protection du droit d'auteur et de certains droits voisins et des articles 10, 143 et 144 du code de procédure civile :

d'infirmer le jugement sauf en ce qu'il a écarté des débats les pièces non traduites et rejeté les demandes indemnitaires reconventionnelles,

à titre principal de considérer que, par écrit et de manière non équivoque, les trois sociétés intimées leur ont reconnu la qualité d'inventeurs et les droits qui en découlent ainsi que leur qualité de débitrices de rémunérations, fixe (de 5.000 $ soit environ 3.830 euros chacun) et proportionnelle (soit 10 % sur les recettes nettes de l'exploitation mondiale du film), qu'en ne respectant pas leurs engagements, elles se sont rendues coupables d'atteintes à leurs droits d'inventeurs, d'une part, d'atteinte aux droits d'auteur dont ils sont titulaires sur les oeuvres posthumes se trouvant dans la grotte [V] ainsi que sur les photographies et films et, enfin, que la société SreetCar Visions a manqué à ses obligations contractuelles prévues au contrat du 19 avril 2010,

subsidiairement, de considérer que la société StreetCar Visions a révoqué de manière abusive l'engagement pris aux termes du contrat du 19 avril 2010 à leur préjudice,

en conséquence, avant dire droit, d'ordonner sous astreinte la communication de divers documents relatifs aux financements, à la marge sur les coûts de production et d'exploitation du film et des images tirées du film, compte tenu des droits des contractants sur le film «Cave of forgotten dreams / la grotte des rêves perdus» (documents précisément explicités dans le dispositif de leurs conclusions auquel il est renvoyé),

d'ordonner l'exécution forcée du contrat du 19 avril 2010,

d'ordonner, sous astreinte définitive, aux sociétés intimées de faire figurer au générique de ce film, dans la bande-annonce, sur les jaquettes des DVD et sur tout matériel publicitaire du film, la mention suivante : « la découverte d'une grotte dans la Combe d'Arc, dénommée grotte [V], a été effectuée le 18 décembre 1994 par trois spéléologues, Madame [Z], Monsieur [V] et Monsieur [H] à l'occasion d'une exploration entreprise par eux dans le cadre de leurs activités spéléologiques privées »,

de condamner in solidum les intimés au paiement :



* de la somme provisionnelle de 20.000 euros, sauf à parfaire, en réparation du préjudice subi du fait de l'atteinte à leur droit moral d'inventeurs depuis 2010,

* de la somme fixe de 5.000 $ (soit environ 3.830 euros) au profit de chacun et de la somme fixe de 10 % des recettes tirées de l'exploitation mondiale du film, passée et à venir, de toutes images fixes ou animées, de tous produits dérivés, sous peine d'ordonner l'interdiction définitive du film et des images tirées du film, ceci sous astreinte définitive,

* de la somme provisionnelle de 400.000 euros, sauf à parfaire, en réparation du préjudice subi du fait de l'atteinte à leurs droits d'exploitation,

* de la somme fixe de 5.000 $ (soit environ 3.830 euros) au profit de chacun et de la somme de 433.000 euros, sauf à parfaire au jour de la décision à intervenir, en réparation du préjudice subi du fait du non-respect des engagements pris en reconnaissance de leurs droits d'inventeurs,

* de la somme indemnitaire de 100.000 euros sanctionnant leur résistance abusive,

* de la somme de 10.000 euros au profit de chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter tous les dépens,

d'ordonner une mesure de publication dans 10 journaux ou publications professionnelles.



Par dernières conclusions notifiées le 30 juillet 2014, la société de droit américain Streetcar Visions Ltd prie, en substance, la cour, au visa des articles 367 et suivants du code de procédure civile, 1134 du code civil et L 123-4 du code de la propriété intellectuelle ainsi que du contrat de partenariat qu'elle a signé avec le Ministère de la Culture et de la Communication le 13 avril 2010, de confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté sa demande indemnitaire pour procédure abusive, de condamner « solidairement » les appelants à lui verser la somme de 50.000 euros pour procédure abusive ; subsidiairement, sur les appels en garantie, de débouter les sociétés Metropolitan Filmexport et Cinquième Rêve de leur appel en garantie à son encontre et de condamner l'Agent judiciaire du Trésor à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre ; de condamner, enfin, les appelants à lui verser la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.



Par dernières conclusions notifiées le 22 août 2014, la société par actions simplifiée Le Cinquième Rêve demande pour l'essentiel à la cour en visant, notamment, les articles 9, 32-1 du code de procédure civile, de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé sa mise hors de cause et rejeté l'ensemble des demandes des requérants ; subsidiairement, si sa mise hors de cause ne devait pas être confirmée, de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'ensemble des demandes des requérants et, plus subsidiairement, de condamner la société StreetCar Visions Ltd à la relever et garantir de toutes sommes mises à sa charge du fait des réclamations des appelants ; en toute hypothèse, d'infirmer le jugement qui l'a déboutée de sa demande indemnitaire pour procédure abusive, de condamner in solidum les appelants à lui verser la somme de 15.000 euros à ce titre ainsi qu'à celle de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.



Par dernières conclusions notifiées le 28 juillet 2014, la société par actions simplifiée Metropolitan Filmexport demande en substance la cour, au visa de l'article 32-1 précité, 1166 du code civil, L 123-4 du code de la propriété intellectuelle, de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que sa responsabilité ne saurait être engagée et débouté les requérants de l'ensemble de leurs demandes ; subsidiairement, si la cour devait entrer en voie de condamnation, de condamner la société StreetCar Visions, en sa qualité de producteur du film, à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre et de dire qu'en cas de condamnation de l'Agent judiciaire de l'Etat à garantir la société StreetCar Visions, elle-même pourra exercer une action oblique contre l'Agent Judiciaire de l'Etat afin de recouvrer les sommes qu'elle-même aurait versées au titre des condamnations mises à sa charge ; reconventionnellement, d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande indemnitaire pour procédure abusive et de condamner « solidairement » les appelants à lui verser la somme de 20.000 euros à ce titre ; en tout état de cause de condamner les appelants à lui verser la somme de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 04 décembre 2014, l'Agent Judiciaire de l'Etat prie en substance la cour, au visa de l'article 1134 du code civil, des articles L 113-2, L 112-2, L 122-4, L 123-4 et 335-2 du code de la propriété intellectuelle, du protocole transactionnel du 15 février 2000 de la convention de partenariat du 13 avril 2010 et de différentes décisions de justice, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris ; subsidiairement, sur l'appel en garantie présenté par la société StreetCar Visions Ltd, de considérer que l'Etat n'a commis aucune faute et n'a porté atteinte aux droits d'auteur et voisin de quiconque, et notamment des appelants, en octroyant les droits qu'il détenait sur la grotte à la société StreetCar Visions Ltd, de dire que les éventuels manquements aux engagements que cette société a pu prendre à l'égard des inventeurs ne peuvent engager la responsabilité de l'Etat et de la débouter en conséquence de son appel en garantie ; en toute hypothèse, de condamner les appelants à lui verser la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.





SUR CE,





Sur les pièces écartées des débats par le tribunal





Considérant que les appelants sollicitent l'infirmation du jugement sauf en ce qu'il a écarté des débats les pièces rédigées en langue anglaise et non traduites ;



Que, toutefois, force est de constater que le jugement accueillant leur demande sur ce point (page 4/16) ne précise ni dans ses motifs, ni dans son dispositif (pages 9 et 15/16) de quelles pièces il s'agit et que les appelants, évoquant « toutes les pièces produites en langue étrangère non accompagnées d'une traduction en français », ne les individualisent pas davantage dans leurs dernières écritures à l'exception de la pièce n° 14 produite par la société StreetCar Visions et n° 2 produite par la société Metropolitan ;



Que s'il ressort des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile que « la partie qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs » et si le défaut de traduction peut être considéré comme un motif, les pièces adverses précisément concernées par cette demande étaient indéterminées devant les premiers juges et le demeurent en cause d'appel, hormis les deux pièces précitées ;



Qu'en conséquence et s'agissant de « toutes les pièces en langue étrangère » évoquées, faute par les appelants de présenter une demande déterminée ou qui ne serait déterminable qu'au mépris, par la cour, du principe du contradictoire, il ne peut être fait droit à une prétention ainsi formulée privant d'efficacité le dispositif ;



Que la pièce n° 14 se présente comme la retranscription écrite du crédit du film « Cave of Forgotten Dreams » dans sa version US/UK ; qu'elle est certes rédigée en langue anglaise mais ne comporte que la liste des noms des différentes personnes morales et physiques ayant participé à la réalisation de l'oeuvre et leurs titres, parfaitement compréhensibles à l'instar de la mention « this film is dedicated to the discoveres of the cave : [L] [V], [Q] [Z] and [R] [H] » que les appelants traduisent d'ailleurs eux-mêmes en page 32/81 de leurs dernières écritures ;



Que la pièce n° 2 est constituée par le mandat de distribution du film consenti par la société StreetCar Visions à la société Metropolitan Filmexport et daté du 29 juin 2011 ; qu'outre le fait qu'il est accompagné d'une pièce 2bis comportant la traduction certifiée conforme des trois clauses invoquées par la société Metropolitan Filmexport au soutien de sa demande de garantie à l'encontre de la société StreetCar Visions, il y a lieu de s'interroger sur la pertinence de la revendication des appelants qui en voudraient une traduction intégrale alors qu'ils poursuivent la condamnation in solidum des sociétés intimées et que la société StreetCar à qui ce mandat est opposé ne la réclame pas ;

Qu'il n'y a donc pas lieu d'écarter des débats « toutes pièces en langue étrangère » non identifées, pas plus que les pièces n° 14 produite par la société StreetCar Visions et n° 2 produite par la société Metropolitan Filmexport ;





Sur la mise hors de cause de la société Le Cinquième Rêve





Considérant que les appelants poursuivent la réformation du jugement qui a prononcé la mise hors de cause de la société Le Cinquième Rêve aux motifs qu' « il ressort des débats qu' (elle) a été engagée par la société StreetCar comme producteur exécutif, notamment pour assurer la coordination avec les interlocuteurs français mais qu'elle n'a aucun droit sur le film et ne participe pas aux risques financiers » ;



Qu'ils font valoir que le tribunal a pourtant retenu que cette société était intervenue dans la négociation entre la société StreetCar Visions et les inventeurs ainsi qu'auprès du Ministre de la culture, et estiment qu'elle tente de minimiser sa responsabilité en se prévalant de « définitions académiques » des notions fluctuantes de producteur et de producteur exécutif en omettant en cause d'appel de faire état de sa qualité de mandataire, pourtant reconnue en première instance, alors qu'ils peuvent revendiquer les effets juridiques résultant de l'apparence de la situation, évoquant les indices qui ont forgé leur croyance légitime et qui tiennent au fait que c'est cette société qui a sollicité du Ministère l'autorisation de tournage, qu'elle s'est présentée à eux comme co-producteur délégué puis producteur associé puis producteur (selon courriel du 17 septembre 2010), qu'elle a coordonné les négociations avec la société StreetCar Visions et que le « contrat » du 19 avril 2010 était rédigé sur un papier à son en-tête ;



Qu'en outre, la responsabilité civile personnelle de la société Le Cinquième Rêve est, à leur sens, incontestable dès lors qu'elle connaissait les intentions véritables de la société Streetcar Visions de tromper les inventeurs, que son représentant légal apparaît au générique du film comme producteur associé, qu'à l'instar du producteur elle était informée des négociations et s'est abstenue d'émettre des réserves et que la demande de garantie qu'elle forme subsidiairement s'analyse en une reconnaissance de son lien avec la société Streetcar Visions ;



Mais considérant que la société Le Cinquième Rêve rappelle justement que le producteur exécutif est, dans ce domaine, chargé par le producteur délégué et sous sa surveillance de la prise en charge de l'aspect matériel et technique du tournage sans être détenteur des droits de production, à la différence du producteur qui, selon la définition légale, prend l'initiative et la responsabilité de la réalisation de l'oeuvre ; qu'en l'espèce, si le faisceau d'indices invoqué par les appelants prouve que la société Le Cinquième Rêve a agi en qualité de coordinateur, il ne permet pas d'établir que cette société a pris l'initiative et la responsabilité du tournage de l'oeuvre ou encore qu'elle détient des droits sur le film litigieux et dispose d'une rémunération calculée sur les recettes de son exploitation ;



Que pour voir maintenir en la cause la société Le Cinquième Rêve, les appelants ne peuvent, par ailleurs, valablement tirer argument d'un mandat apparent - lequel n'est au demeurant que prétendu, faute de documents probants et en raison des multiples courriers que leur oppose cette société (pièces 2 à 6) excluant qu'ils aient légitimement pu croire qu'elle agissait en qualité de mandataire du producteur - dès lors que la théorie de l'apparence a pour effet de contraindre le mandant à respecter les engagements pris en son nom, sauf pour ce dernier à exercer un recours contre le mandataire apparent ;



Que force est enfin de considérer que les agissements imputés à faute à la société et qui seraient de nature à engager sa responsabilité personnelle ne résultent que des assertions des appelants, aucune pièce ne venant les étayer ;

Qu'il s'en induit que le jugement qui a mis hors de cause la société Le Cinquième Rêve mérite confirmation ;

Sur l'atteinte au droit moral d'inventeurs et le non-respect du droit à rémunération des inventeurs invoqués par les consorts [Z]-[V]-[H]



Sur le fondement légal de leur action



Considérant que les appelants, se prévalant de la qualité d'inventeurs « incontestable et incontestée » et, précisant qu'il n'est ici débattu que du contenu des droits d'inventeurs, font d'abord valoir que le tribunal a fait une lecture erronée des textes qui fondent leur action et plus précisément de l'article 16 de la loi du 27 septembre 1941 valorisant, selon eux, la découverte par un droit de propriété ou tout autre droit réel existant avant 1994 ; que les droits et prérogatives attachés à la qualité d'inventeurs sont communs aux découvertes de caractère mobilier et immobilier dès lors que rien ne justifie que le régime des « trésors » visés à l'article 776 du code civil auquel renvoie cet article de la loi de 1941 et qui se caractérisent uniquement par la valeur économique qui leur est attachée soit interprété comme s'appliquant uniquement aux vestiges mobiliers ; qu'en décider ainsi porte atteinte, ajoutent-ils, de manière grave, disproportionnée et injustifiée au droit d'inventeur ;



Qu'ils critiquent subsidiairement le tribunal en son raisonnement relatif à l'application du principe de non-rétroactivité de la loi qui, du fait d'une confusion entre une situation et ses effets, l'a conduit à priver d'effet immédiat la loi nouvelle, interprétative selon eux de la loi de 1941 et en tout cas plus favorable, entrée en vigueur le 17 janvier 2001 (loi relative à l'archéologie préventive devenue l'article L 554-1 du code du patrimoine) et qui avait pourtant vocation à s'appliquer aux effets futurs des situations juridiques nées antérieurement à son entrée en vigueur, cette situation juridique étant en l'espèce la qualité d'inventeur et les effets futurs de cette qualité étant les atteintes et exploitations postérieures à cette loi de 2001 ;



Considérant, ceci rappelé, que l'article 16 de la loi de 1941 « relative à la réglementation des fouilles archéologiques » dispose :

« Le ministre des affaires culturelles statue sur les mesures définitives à l'égard des découvertes à caractère immobilier faites fortuitement. Il peut, à cet effet, ouvrir pour ces vestiges une instance de classement conformément aux dispositions du paragraphe 3 de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1913.

La propriété des trouvailles de caractère mobilier faites fortuitement demeure régie par l'article 716 du code civil, mais l'Etat peut revendiquer ces trouvailles moyennant une indemnité fixée à l'amiable ou à dire d'expert. Le montant de l'indemnité est réparti entre l'inventeur et le propriétaire, suivant les règles du droit commun, les frais d'expertise étant imputés sur elle. (...) » ;



Que l'article 716 auquel il est renvoyé, inséré dans un chapitre du code civil relatif aux « différentes manières dont on acquiert la propriété », dispose, quant à lui :

« La propriété d'un trésor appartient à celui qui le trouve dans son propre fonds : si le trésor est trouvé dans le fonds d'autrui, il appartient pour moitié à celui qui l'a découvert et pour l'autre moitié au propriétaire du fonds.

Le trésor est toute chose cachée ou enfouie sur laquelle personne ne peut justifier sa propriété et qui est découverte par le pur effet du hasard » ;



Que si les appelants tentent d'argumenter sur le premier alinéa de l'article 16 précité en affirmant qu'il concerne les vestiges immobiliers et en faisant valoir que les mesures à prendre concernant ces vestiges ne permettent pas à l'Etat de les spolier, ils n'en tirent aucune conséquence juridique sur la consécration par le législateur des droits d'inventeurs qu'ils revendiquent précisément, se bornant à dire que « les droits d'inventeurs sur les vestiges immobiliers ne sont pas encadrés » et à se référer au protocole d'accord signé avec l'Etat en 2000 ;







Que, sur l'application des dispositions combinées de l'article 16 alinéa 2 et 716 précités, les appelants ne peuvent être suivis lorsqu'ils affirment qu'aucun élément textuel ne permet une discrimination entre meubles et immeubles et surtout pas les découvertes fortuites de la loi de 1941 ;



Qu'en effet, l'article 16 alinéa 2 porte exclusivement sur « les trouvailles de caractère mobilier » ; qu'en outre, selon l'article 716, la découverte d'un « trésor », entendu de manière constante par la jurisprudence comme un bien meuble, présuppose l'existence d'un fonds (« dans son propre fonds », « dans le fonds d'autrui ») de sorte que la formulation générale de son second alinéa, « toute chose », mise en exergue par les appelants pour étayer leur argumentation, laquelle se caractérise par la circonstance qu'elle est « cachée ou enfouie », ne saurait être assimilée au fonds ou, par application de l'article 552 du code civil, au tréfonds ;



Considérant, par ailleurs, que si les appelants entendent bénéficier des dispositions de l'article 18-1 de la loi de 2001 dépourvue de dispositions transitoires (article codifié à l'article L 541-1 du code du patrimoine) selon lequel « lorsque le vestige est découvert fortuitement et qu'il donne lieu à une exploitation, la personne qui assure cette exploitation verse à l'inventeur une indemnité forfaitaire ou, à défaut, intéresse ce dernier au résultat de l'exploitation du vestige », ils échouent en leur démonstration relative à l'effet immédiat de cette loi nouvelle ;



Qu'en effet, selon la lettre du texte, la situation juridique visée est la découverte fortuite d'un vestige et non point la qualité d'inventeurs, comme ils le prétendent à tort dès lors que la qualité d'inventeur et les droits et prérogatives qui peuvent y attachés n'en sont que la conséquence, étant incidemment relevé que, débattant par ailleurs de l'objet du protocole (en page 22/81) les appelants souscrivent à l'analyse de la cour puisqu'ils écrivent que « la reconnaissance du caractère privé et fortuit de la découverte, dont découle le bénéfice des droits d'inventeurs prévus par les lois et règlements » ;



Que c'est, par conséquent, par motifs pertinents que la cour fait siens que le tribunal a statué dans ce sens et énoncé que la situation juridique est constituée lorsqu'elle est définitivement fixée avant l'intervention de la loi nouvelle, que, selon l'article 2 du code civil, la loi nouvelle a vocation à s'appliquer immédiatement aux effets à venir des situations juridiques en cours mais que le principe de non-rétroactivité fait obstacle à ce qu'elle remette en cause des situations juridiques déjà constituées sous l'empire des anciennes règles ; que le fait générateur des droits éventuels ayant eu lieu, au cas particulier, avant l'entrée en vigueur de la loi de 2001, le bénéfice de ladite loi ne peut être revendiqué par les consorts [Z]-[V] et [H] ;



Qu'il résulte de tout ce qui précède que les appelants ne peuvent fonder leurs demandes à ce titre sur les dispositions légales qu'ils invoquent ;



Sur le fondement conventionnel de leur action



Considérant que les inventeurs font encore valoir que, dans le contexte du protocole d'accord transactionnel signé avec l'Etat le 15 février 2000 et des mesures qu'il a prises en ce sens, leurs droits d'inventeurs ont été reconnus de manière expresse et écrite par la société Streetcar Visions, à qui ce protocole est opposable, aux termes d'un « contrat du 19 avril 2010 » ainsi que par l'Etat au cours de l'année 2010 ;



Qu'ils soutiennent, s'agissant du protocole, qu'il est intervenu à la suite de différends avec l'Etat devenus contentieux et avait pour objectif, pour le passé, de reconnaître le caractère privé et fortuit de la découverte dont découlait le bénéfice des droits d'inventeurs prévus par les lois et règlements et, pour l'avenir, de leur garantir l'exploitation paisible de leurs photographies et films ; que celui-ci leur reconnaissait un droit moral, un droit d'accès, de jouissance paisible, d'association au fonctionnement des instances s'intéressant à la grotte ainsi qu' un droit à rémunération pour les actes d'exploitation à la grotte ; qu'ils reprochent sur ce dernier point au tribunal d'avoir considéré que l'engagement de l'Etat selon lequel les inventeurs seront « convenablement associés à la valorisation du site » ne constituait pas la reconnaissance d'un droit patrimonial alors qu'il en est une incontestable composante ;



Qu'ils ajoutent que l'Etat leur a, par la suite, reconnu les droits d'inventeurs revendiqués ; qu'ils évoquent le courrier du Ministère de la culture au Conseil Général de l'Ardèche du 27 septembre 2001 relatif au projet d'espace de restitution en cours, celui du 16 avril 210 à la société Le Cinquième Rêve par lequel le Ministre remercie [Y] [E] et la société Streetcar Visions d'avoir fait une proposition financière aux inventeurs et les prie de prévoir une mention relative à la découverte de la grotte au générique, une note du 16 juin 2010 du Ministre de la culture au médiateur chargé d'intervenir sur les opérations de valorisation pendantes ou encore les déclarations des collectivités locales afférentes au projet d'espace de restitution, un protocole de partenariat du 19 juillet 2001 prévoyant une rémunération financière à leur profit ;



Qu'à tort, estiment-ils, le tribunal a considéré que ce protocole n'était pas opposable à la société Streetcar Visions alors que cette société qui ne peut prétendre l'avoir ignoré a repris à son compte les obligations qui y étaient contenues dans le « contrat » du 19 avril 2010 ainsi rédigé : « Conformément au protocole signé en 2000 entre le Ministère de la Culture et de la communication et vous-mêmes (..) » ; que les engagements repris sont tout à fait précis, qu'ils portent tant sur le droit moral des inventeurs que sur leur droit à rémunération (au titre des droits d'inventeurs et éventuellement au titre d'une intervention filmée) et que par la suite, selon courriers des 17 septembre et 19 octobre 2010, la société Le Cinquième Rêve leur a rappelé qu'elle leur reconnaissait ces droits ;



Que, s'agissant de leurs demandes à l'encontre des sociétés intimées et ce qu'ils désignent comme « le contrat du 19 avril 2010 », les appelants reprochent au tribunal d'avoir fait fi de sa force obligatoire, de la bonne foi et de la loyauté requises, ainsi que du principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui ;



Qu'à titre principal et sur le fondement de l'article 1184 du code civil, ils poursuivent l'exécution forcée des engagements pris en reconnaissance de leurs droits à rémunération, dans un contrat daté, paraphé et signé par le producteur rédigé, dans leur intérêt exclusif, sans conditions ni délais, et qui est présumé, de ce fait, avoir été accepté ; que, selon eux, en prouvant le contenu de l'offre, on prouve l'acceptation et par conséquent le contrat ; que c'est par dénaturation des faits que le tribunal a considéré que les inventeurs l'ont refusé alors qu'ils se sont abstenus de répondre du fait d'une médiation en cours destinée à résoudre globalement les litiges entre l'Etat et eux-mêmes ; qu'ils estiment, enfin, en réplique aux intimées, que les trois propositions contenues dans ce contrat étaient indépendantes les unes des autres ;



Qu'à titre subsidiaire et si la cour venait à considérer qu'il ne s'agit que d'un simple engagement unilatéral, ils en demandent l'exécution forcée en se référant, notamment, à une jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle l'engagement unilatéral pris en connaissance de cause d'exécuter une obligation naturelle transforme celle-ci en obligation civile ; que, plus subsidiairement, ils se prévalent de la révocation abusive de l'engagement unilatéral, de la remise en cause également abusive de la reconnaissance de leurs droits d'inventeurs et du non respect des engagements souscrits, invoquant les articles 1103, 1142 et 1383 du code civil ;



Considérant, ceci étant rappelé et s'agissant des demandes formées à l'encontre de l'Etat au titre des droits d'inventeurs revendiqués, que si les appelants se défendent de tout amalgame entre le droit moral de l'auteur qui comprend le droit à la paternité et le droit moral d'inventeur dont ils prétendent qu'il a été bafoué et s'ils tirent, pour ce faire, argument de la circonstance que le grief porte sur la bande annonce d'une oeuvre audiovisuelle sur laquelle « aucun aménagement n'est admis du point de vue du droit moral à la paternité », ils n'en opèrent pas moins une transposition contestable ; qu'ils ne peuvent, en effet, se prévaloir d'une filiation entre eux-mêmes et les oeuvres pariétales, sujets de l 'oeuvre audiovisuelle en cause qu'ils n'ont pas créée, de laquelle découlerait leur droit au respect de leur nom et de leur qualité ; qu'ils peuvent, tout au plus, revendiquer la qualité de découvreurs de ce site ;



Que la lecture du protocole (§ 1.1) révèle qu'en conséquence de la reconnaissance de leur qualité d'inventeurs, l'Etat s'engageait à substituer à la mention figurant sur son site internet la mention « La découverte d'une grotte dans la Combe d'Arc, dénommée grotte [V], a été effectuée le 18 décembre 1994 par trois spéléologues, Madame [Z], Monsieur [V] et Monsieur [H], à l'occasion d'une exploration entreprise par eux dans le cadre de leurs activités spéléologiques privées », à faire apposer une plaque in situ la reprenant, étant ajouté que « toutes les publications sur le sujet émanant de l'Etat feront mention des conditions de cette découverte et l'Etat veillera à ce que les publications des autres collectivités publiques fassent de même » ;



Qu'ayant donné connaissance, par le truchement du Ministre de la culture, à Monsieur [Y] [E] puis à la société Streetcar des engagements par lui souscrits et reçu l'assurance qu'il serait fait mention des circonstances de cette découverte ainsi que de leurs inventeurs dans le film en préparation, comme cela résulte des pièces produites, l'Etat est fondé à se prévaloir de la bonne exécution de son obligation qui ne consistait, aux termes du protocole, qu'à veiller à ce qu'il soit fait mention des conditions de la découverte, quels qu'en soient les termes ;



Que, par ailleurs et s'agissant du droit à rémunération dont les inventeurs prétendent qu'il a été violé et entendent voir juger, en poursuivant la condamnation in solidum de l'Etat à ce titre, que celui-ci a engagé sa responsabilité, il était stipulé dans le protocole, comme il a été dit, que « L'Etat, dans l'exercice de ses responsabilités, notamment avec le département de l'Ardèche, veillera à ce que les inventeurs soient convenablement associés à la valorisation du site et en particulier au futur espace de restitution » ;



Que si « la valorisation du site » peut être comprise comme englobant des faits d'exploitation commerciale et si la perception d'une rémunération à l'occasion d'une telle exploitation peut se déduire du fait que les inventeurs devaient être « convenablement associés à la valorisation du site », la seule obligation de l'Etat était d'y « veiller », ce qu'il a fait en donnant connaissance au réalisateur et au producteur de la teneur du protocole, recevant, de surcroît, l'assurance qu'une rémunération serait versée aux inventeurs ; qu'il ne peut être tenu pour responsable du fait que l'offre de contracter rédigée par le producteur le 19 avril 2010 est restée sans lendemain ;



Qu'il suit que le jugement doit être confirmé en ce qu'il conclut que l'Etat n'a pas manqué à ses obligations envers les inventeurs ;



Considérant, par ailleurs et s'agissant des demandes des appelants formées à l 'encontre des sociétés intimées au titre de leur droit à rémunération fondée sur la lettre datée du 19 avril 2010 que leur a adressée le producteur, que celle-ci était rédigée comme suit (pièce 17) :

« Conformément au protocole signé en 2000 entre le Ministère de la culture et de la communication et vous-mêmes, et dans le cadre de la production du documentaire cité en objet, nous vous proposons :

1 ' Pour la rémunération de vos droits d'inventeurs :

Une rémunération de $ 5.000 par inventeur, soit $ 15.000 en tout.

Cette somme sera versée 10 jours après la réception de cette lettre d'agrément signée par vous.

Sous réserve de cet accord, en complément, vous recevrez aussi une participation de 10 % sur les recettes nettes de Streetcar Visions sur l'exploitation mondiale du film, après amortissement complet de celui-ci (')

2 ' Parallèlement à cela nous vous proposons pour votre intervention filmée :

Une rémunération supplémentaire de $ 5.000 par inventeur filmé. Chaque inventeur peut choisir d'être ou de ne pas être filmé et sera en conséquence rémunéré ou non en fonction de son choix, entre le 18 et le 25 avril 2010.

La décharge ci-jointe en annexe (à savoir une cession de droits à l'image) décrit les droits que vous cédez à Streetcar Visions et à ses ayants-droit, au regard de votre apparition dans le film (')

3 ' Un avis consultatif sur ce film :

[Y] [E] souhaitant vous rencontrer pour vous exposer sa vision du film et de votre participation, il sera à votre écoute sur les avis que vous auriez à formuler sur le film et sur son exploitation.

Cette lettre contient l'ensemble des accords des parties jusqu'à ce jour, et ne peut être modifiée qu'avec l'accord écrit des parties.

Nous espérons que cette nouvelle version de notre proposition vous semblera acceptable et attendons de vos nouvelles via nos producteurs en Ardèche. »



Que cette lettre, dont il ressort qu'elle intervient à la suite de contacts entre les parties ( « ... jusqu'à ce jour »), s'analyse en une offre de contracter ayant vocation à donner naissance à un contrat dès qu'elle aura été acceptée et qu'il est constant que l'offre ne lie pas le pollicitant qui peut la rétracter tant qu'elle n'a pas été acceptée ;



Qu'il est tout aussi constant qu'en dépit, en particulier, de l'exigence de la signature de la lettre d'agrément (§ 1), ou de la limitation dans le temps de la proposition de participation filmée (§ 2) ou encore de la demande de « nouvelles » dont il est dit qu'elles étaient attendues, les inventeurs se sont abstenus d'exprimer, d'une manière ou d'une autre, leur volonté d'accepter l'offre qui leur était faite dans cette « nouvelle version » de la proposition du producteur, comme le révèle cette lettre in fine ;



Que s'il est vrai qu'il a pu être jugé que le silence vaut acceptation quand l'offre a été présentée dans le seul intérêt de son destinataire et qu'il est alors présumé l'avoir acceptée, les inventeurs ne peuvent se prévaloir de cette solution au cas d'espèce en considération, en particulier, du contenu des lettres du 14 septembre 2010 et 14 février 2011 (pièces 3 et 5 de la société Streetcar Visions) qu'ils ont adressées au réalisateur et aux producteurs ainsi formulées :

« En avril 2010, vous avez pris soin de nous contacter pour nous présenter une proposition de rémunération de nos droits d'inventeurs de la grotte [V] conformément au protocole signé entre nous et l'Etat français.

Si aucun accord n'est intervenu, notamment du fait de l'étendue des droits à vous céder selon vos projets, il reste que la diffusion du film ne peut intervenir sans respecter nos droits.

Au titre du droit moral, nous aurions apprécié de connaître le contenu de ce film, qui doit nécessairement comporter des mentions et des développements nous concernant, et des vues correspondant à celles qui nous appartiennent. (...) »

« (') Du fait que le Ministère de la culture avait annoncé une médiation, nous avions sursis à revenir vers vous, dans l'attente de son déroulement . Cette médiation est restée lettre morte (').

A ce jour, vous n'avez ni répondu à nos demandes au titre de nos droits moraux, de façon à permettre d'en apprécier le complet respect, ni réglé le cas de nos droits patrimoniaux dont vous aviez pourtant reconnu le principe.

Notre intervention dans le film, que vous subordonniez à une cession de droits, ne pouvait être acceptable, et était rendue impossible compte tenu de l'attitude contentieuse du Ministère. (') »



Qu'il résulte de leur teneur que les appelants ne peuvent valablement se prévaloir de la présomption d'acceptation qu'ils invoquent ; qu'il en ressort, en effet, que, contrairement à ce qu'ils affirment dans leurs écritures, les trois volets de la proposition de contracter étaient, pour eux, liés (« Si aucun accord n'est intervenu, notamment du fait de l'étendue des droits à vous céder ») et que cette offre n'était donc pas présentée dans leur seul intérêt, étant de plus rappelé que le deuxième volet spécifiait une limitation dans le temps de la proposition en lien avec les contraintes particulières du tournage en ce lieu fragile ; qu'en outre, ils considéraient, à la date de leurs envois, que l'offre ainsi présentée ne respectait pas leur droit moral ni ne réglait le cas de leurs droits patrimoniaux et que, par ces écrits, ils ont exprimé leur volonté de ne pas souscrire aux propositions qui leur avaient été faites ( « Notre intervention dans le film, que vous subordonniez à une cession de droits, ne pouvait être acceptable ») ;



Qu'il convient par conséquent de considérer que le producteur qui admis le principe selon lequel il convenait d'associer les inventeurs à la valorisation du site a fait ses meilleurs efforts pour ce faire et qu'en l'absence d'acceptation de l'offre qui leur a été faite, les appelants ne peuvent se prévaloir de l'existence d'un contrat et en poursuivre l'exécution ;



Qu'ils ne peuvent pas davantage soutenir subsidiairement que cette lettre s'analyse en un engagement unilatéral et se prévaloir d'une rétractation abusive en demandant à la cour de faire produire des effets à cette lettre du 19 avril 2000 dans la mesure où il est de principe qu'un tel engagement, purement moral et qui ne peut être assimilé en l'espèce, comme le voudraient les appelants, en une obligation naturelle, n'est pas susceptible d'exécution forcée et que le manquement invoqué, qui a pour cause le comportement sus-évoqué des inventeurs et non point l'inconstance fautive du producteur, ne peut engager la responsabilité de la société Streetcar Visions ;



Que sur cet autre point, le jugement sera donc confirmé ;



Qu'enfin s'agissant du grief tiré du non-respect de leur droit moral par les sociétés intimées, il convient de s'en référer à ce qui précède sur l'étendue du droit que les inventeurs peuvent revendiquer à ce titre et qu'à cet égard, il résulte de la pièce 14 produite par la société Streetcar Visions que le nom des appelants présentés comme les découvreurs de cette grotte figurait dans la version anglaise du film, qu'en outre, le visionnage du DVD produit par les appelants (pièce 72) auquel la cour s'est livrée permet de constater qu'il en est de même sur ce support, que leur découverte est même évoquée au cours du film et que celui-ci leur est dédié ;



Que pour voir condamner les sociétés intimées à ce titre, les appelants ne peuvent raisonnablement tirer argument de fait qu'il n'est fait mention de leur découverte au générique qu'après une liste de noms et que « les spectateurs finissent par partir », ou que si un ajout a été apporté au générique rien ne prouve que cette omission a été réparée pour l'ensemble des copies du film diffusées dans les pays d'exploitation, ceci sans plus d'éléments alors qu'ils ont la charge de la preuve, ou que « le film présente la grotte comme une découverte des scientifiques missionnés pour l'étudier comme s'ils étaient les découvreurs de son contenu », ou encore que leurs noms et leur qualité d'inventeurs ne figurent pas sur la jaquette du DVD ;



Que force est, en effet, de considérer qu'aucun texte n'impose un formalisme particulier pour faire mention de la découverte d'un vestige, que les diverses références sus-évoquées suffisent à informer le public sur celle-ci et sur l'identité de ses inventeurs, que la présentation du générique est sous la dépendance du nombre de participants et des usages, que l'attitude des spectateurs ne peut être imputée à faute aux sociétés intimées et qu'il a été donné aux inventeurs la possibilité de s'exprimer sur les circonstances de leur découverte de spéléologues comme ont pu le faire les scientifiques appelés à s'exprimer sur le contenu du site et les réflexions qu'il suscite, offre qu'ils ont déclinée ;



Qu'il s'en déduit que, comme en première instance, les appelants seront déboutés de leur demande fondée sur l'atteinte à leur droit moral en tant que dirigée contre les sociétés intimées et que sera rejetée leur demande subséquente tendant à voir inclure dans le générique du film une mention particulière ;













Sur le monopole d'exploitation revendiqué par les consorts [Z]-[V]-[H] sur l'ensemble des oeuvres posthumes contenues dans la grotte





Considérant que les appelants font valoir, sans être contestés, que les oeuvres et gravures pariétales comprenant près de 1.000 représentations dont un bestiaire de plus de 425 sujets sont des oeuvres de l'esprit ;



Qu'ils se prévalent de la qualité de premiers publicateurs de l'oeuvre, conséquence de leur qualité d'inventeurs, et qu'il n'est pas rapporté la preuve d'une publication antérieure si ce n'est en s'appuyant, comme l'a fait le tribunal, sur des hypothèses scientifiques dont la pertinence est, selon eux, plus que contestable ; qu'à cet égard et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal la « non-accessibilité » d'une oeuvre n'est pas une condition d'application du régime juridique des oeuvres posthumes, que c'est leur diffusion et qu'il n'est pas vraisemblable qu'une publication ait eu lieu du vivant de l'auteur ;



Qu'à leur sens, les premiers juges ont, à tort, adopté l'argumentation de l'Etat et de la société Streetcar Visions et se sont mépris sur le régime juridique des oeuvres posthumes bénéficiant, durant 25 ans, au premier publicateur, selon l'article L 123-4 du code de la propriété intellectuelle, puisque la question de la propriété immobilière, relevant de la compétence de la juridiction territorialement compétente, n'est pas tranchée, que seuls les inventeurs peuvent revendiquer la propriété du support de l'oeuvre posthume ; que, de plus, il ne s'agit pas d'une condition d'application de ce régime juridique, ainsi qu'en dispose l'article 4 de la directive 93/98/CEE du Conseil relative à l'harmonisation de la durée de protection du droit d'auteur et de certains droits voisins qui porte sur « la protection des oeuvres non publiées antérieurement » et se réfère à « toute personne qui, après l'extinction de la protection du droit d'auteur, publie licitement ou communique licitement au public pour la première fois une oeuvre non publiée auparavant (..)» ; qu'ils ajoutent, pour finir et répondre à la société Metropolitan Filmexport, que cette dernière ne rapporte pas la preuve de l'illicéité de la première publication des inventeurs qu'elle leur oppose ;



Considérant, ceci étant rappelé, que l'article L 123-4 du code de la propriété intellectuelle, transposant la directive du 23 octobre 1993 et qui ne diffère, pour l'essentiel, de sa rédaction antérieure qu'en sa détermination de la durée du droit de publication posthume, s'applique, quelle que soit la date de création de l'oeuvre ; qu'il confère, en son alinéa 3, « aux propriétaires, par succession ou par d'autres titres, de l'oeuvre, qui effectuent ou font effectuer la publication » un monopole d'exploitation de vingt cinq ans lorsque la divulgation intervient après l'expiration des droits patrimoniaux d'auteur ;



Que si le terme employé à l'alinéa 3, à savoir : « publication », diffère de celui employé en son alinéa 2 qui vise les ayants-droit de l'auteur, à savoir : « divulgue », les appelants ne peuvent tirer argument de l'un des sens qui peut être donné au terme « publication » en affirmant qu'ils sont les premiers à y avoir procédé dès lors qu'il est communément admis que sont synonymes les deux termes employés dans ce même article octroyant un droit de même nature et qu'au surplus la directive précitée dont se prévalent les appelants évoque, quant à elle, la «communication » au public ;



Qu'il appartient, par conséquent, aux demandeurs à l'action d'établir, conformément à l'article L 123-4 précité - qu'il n'y a pas lieu d'interpréter à la lumière de la directive 93/98 CEE puisque ce texte en est la transposition et que le législateur français avait la faculté de poser, comme il l'a fait, une condition supplémentaire à l'octroi de la protection particulière qu'il accordait à ce bénéficiaire du droit d'exploitation - de démontrer, afin de satisfaire aux conditions posées par ce texte, qu'ils sont propriétaires par succession ou par d'autres titres des oeuvres pariétales en cause et qu'ils ont été les premiers à les divulguer ;



Que force est de considérer que les inventeurs échouent en leur démonstration ; qu'il ne saurait être contesté que l'Etat a initié une procédure qui a conduit à l'expropriation des terrains afférents à la grotte et à ses environs, qu'en application des dispositions de l'article 552 du code civil « La propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous » et que, par conséquent, les inventeurs ne peuvent revendiquer la qualité de propriétaires du support matériel des oeuvres pariétales dont s'agit ;



Qu'en outre, quand bien même cette grotte aurait été définitivement obstruée il y a 21.500 ans par des dépôts d'écroulement et quand bien même elle n'aurait pas servi de lieu d'habitation mais, en sa partie reculée où se concentrent les oeuvres, de lieu d'accomplissement de rites, il n'en demeure pas moins que des traces humaines ou des silex ou encore des traces de mouchage de torches propres à l'activité humaine y ont été retrouvés et que des datations aux carbone 14 attestent de productions s'étendant sur plusieurs milliers d'années ; qu'il y a donc déjà eu communication au public de sorte que les inventeurs ne peuvent être suivis lorsqu'ils se prévalent de la première divulgation de ces oeuvres ;



Que, par voie de conséquence, le jugement qui a rejeté la demande des inventeurs de ce chef mérite confirmation ;





Sur la contrefaçon des droits d'auteur des consorts [Z]-[V]-[H] sur leurs films et photographies





Considérant qu'alors que le tribunal les a déboutés de leur demande à ce titre aux motifs, notamment, qu'ils se contentaient de déclarations générales sur l'originalité de leurs oeuvres, qu'il s'agissait d'une revendication collective permettant difficilement de reconnaître l'empreinte d'une personnalité particulière et que les contraintes imposées par le site excluaient l'interprétation personnelle et l'effort créatif, les appelants poursuivent l'infirmation du jugement en demandant à la cour de constater que l'Etat leur a reconnu des droits d'auteur sur les premiers films et photographies de la grotte jamais réalisés, que ces oeuvres à la réalisation desquelles ils ont tous trois contribué sont originales, comme en attestent les « exemples concrets et les anecdotes » dont ils faisaient déjà état en première instance et qu'il existe une infinité de façons de représenter ces oeuvres pariétales ;



Que rappelant que la contrefaçon s'apprécie par les ressemblances et non par les différences, ils estiment qu'entre leurs photographies et « celles contestées » (sans individualisation si ce n'est par la sélection de quelques exemples) « se dégage une même impression d'ensemble qui caractérise la contrefaçon » ; que, selon eux, les images fixes prises pendant le tournage et tirées du film, au mépris de la garantie d'exploitation paisible donnée aux inventeurs dans le protocole de 2000, sont la copie de leurs oeuvres ;



Considérant, ceci rappelé, que pour donner prise au droit d'auteur et bénéficier de la protection instaurée par les Livres I et III du code de la propriété intellectuelle, une oeuvre doit présenter une combinaison de caractéristiques portant l'empreinte de la personnalité de son auteur, appréciation de son originalité qui ne relève pas de la compétence de l'Etat signataire du protocole du 15 février 2000 ;



Qu'il convient de constater qu'en dépit des motifs du tribunal, les appelants n'individualisent pas précisément les oeuvres (photographies ou film) revendiquées et s'abstiennent de préciser, oeuvre par oeuvre, les caractéristiques qui permettraient de rendre chacune éligible à la protection du droit d'auteur ; que persistant à dire qu'il ont tous trois contribué à leur réalisation, ils ne peuvent que se voir opposer le pertinent motif de rejet du tribunal selon lequel l'empreinte personnelle d'un auteur se révèle de ce fait difficilement décelable et qu'ils ne peuvent se contenter d'affirmer que leurs choix ont été guidés par leurs émotions au fur et à mesure de la découverte des oeuvres et qu'ils marquent la personnalité de leurs auteurs ou que différentes options de prises de vue étaient imaginables ;

Qu'il s'en induit que leurs prétentions à ce titre doivent être rejetées, comme en première instance ;



Considérant qu'il résulte, en outre, de la solution donnée au présent litige qu'il n'y a pas lieu d'accueillir la demande de communication de pièces destinées à permettre la fixation définitive du montant des préjudices invoqués par les appelants, à l'instar de leur demande indemnitaire fondée sur la résistance abusive des intimés, qui ne peut être considérée que comme prétendue ; qu'il en va de même de leur demande de publication de la présente décision ;



Que force est, par ailleurs, de considérer que les demandes en garantie formées par les sociétés intimées deviennent sans objet ;





Sur les demandes indemnitaires reconventionnelles





Considérant que, formant appel incident, les sociétés Streetcar Visions, Metropolitan Filmexport et Le Cinquième Rêve sollicitent la condamnation des appelants au versement de dommages-intérêts en faisant, en particulier, valoir que leur mauvaise foi et le caractère totalement infondé de leurs conclusions d'appel qui ne reposent que sur une série d'assertions, outre la disproportion de leurs demandes en paiement caractérisent un abus de procédure ;



Mais considérant qu'en dépit de la solution donnée au présent litige, il ne peut être considéré que les appelants ont fautivement fait dégénérer en abus leur droit d'ester en justice ou celui d'exercer les voies de recours qui leur étaient offertes afin de se voir reconnaître des droits dont ils ont pu, sans faute, se croire investis ;



Que le jugement qui en décide ainsi doit être confirmé sur cet autre point ;





Sur les autres demandes





Considérant que l'équité commande de condamner les appelants, tenus in solidum, à verser à la société Le Cinquième Rêve la somme complémentaire de 5.000 euros et à chacune des autres parties intimées, la somme complémentaire de 8.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;



Que les consorts [Z], [V] et [H] qui succombent seront déboutés de ce dernier chef de prétentions et condamnés à supporter les dépens d'appel ;







PAR CES MOTIFS







Confirme le jugement sauf en sa disposition portant sur la mise à l'écart « des pièces rédigées en anglais non accompagnées de traduction » et, statuant à nouveau dans cette limite en y ajoutant ;



Dit n'y avoir lieu d'écarter des débats « toutes pièces en langue étrangère » non identifiées, pas plus que les pièces n° 14, produite par la société Streetcar Visions Ltd, et n° 2, produite par la société Metropolitan Filmexport ;



Déboute Madame [Q] [Z], Monsieur [L] [V] et Monsieur [R] [H] de leurs entières demandes ;







Condamne Madame [Q] [Z], Monsieur [L] [V] et Monsieur [R] [H], tenus in soidum, à verser aux sociétés Streetcar Visions Ltd, Metropolitan Filmexport SAS et à Monsieur l'Agent Judiciaire de l'Etat une somme complémentaire de 8.000 euros, ceci au profit de chacun, et à la société Le Cinquième Rêve celle de 5.000 euros, ceci par application de l'article 700 du code de procédure civile, et à supporter les entiers dépens d'appel avec faculté de recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.





La Greffière La Présidente

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.