15 novembre 2012
Cour d'appel de Paris
RG n° 11/20081

Pôle 1 - Chambre 2

Texte de la décision

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 15 NOVEMBRE 2012



(n° 630 , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/20081



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 24 Octobre 2011 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 11/01755





APPELANT



Monsieur [L] [T]

[Adresse 1]

[Localité 17]



Représenté par la SELARL HJYH Avocats à la cour (Me Nathalie HERSCOVICI avocat au barreau de PARIS, toque : L0056)

Ayant pour avocat Me Jean-Philippe MEUNIER





INTIMES



Madame [A] [T] épouse [X]

[Adresse 13]

[Localité 11]



Mademoiselle [G] [T]

[Adresse 10]

[Localité 8]



Monsieur [Y] [T]

[Adresse 10]

[Localité 8]



Madame [S] [J] VEUVE [T]

[Adresse 10]

[Localité 8]



Monsieur [W] [O]

[Adresse 7]

[Localité 9]



Monsieur [P] [O]

[Adresse 2]

[Localité 12]



Représentés et assistés de Me Nathalia GARCIA-PETRICH (avocat au barreau de PARIS, toque : G0111)







COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 03 Octobre 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Evelyne LOUYS, Présidente de chambre

Madame Michèle GRAFF-DAUDRET, Conseillère

Mme Maryse LESAULT, Conseillère

qui en ont délibéré



Greffier, lors des débats : Mme Sonia DAIRAIN



ARRET :



- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Evelyne LOUYS, président et par Mme Sonia DAIRAIN, greffier.






FAITS CONSTANTS :



Par acte du 16 décembre 2010, les consorts [T] ont consenti à M.[R] une promesse de lui vendre un studio situé à [Adresse 18], 4ème étage pour le prix de 185000€ et une indemnité d'immobilisation de 18500€. La promesse expirait le 28 février 2011 à 16 heures.



Par les procurations données étaient représentés à l'acte la totalité des co-indivisaires dont M.[L] [T].



A deux reprises, par télécopies des 22 février et 25 février 2011, le notaire de l'acheteur demandait la fixation de la date de signature.



Par télécopie du 25 février 2011 envoyée à 16 heures, M.[L] [T] qui n'avait formé aucune observation depuis la signature de la promesse, déclarait former opposition à la vente au motif du non respect par l'acquéreur du délai imparti pour l'obtention du prêt.



S'en est suivi un échange de courriers entre les notaires et une mise en demeure était adressée le 20 avril 2011 à [L] [T] de communiquer les «'motifs précis de son opposition, accompagnée de l'intégralité des pièces justificatives'», qui est restée sans réponse.



Une sommation de comparaître à la signature de l'acte était signifiée le 14 juin 2011 à [L] [T] par les acquéreurs, pour signature prévue le 22 juin 2011.



A défaut de comparution de l'intéressé a été engagée à son encontre la procédure en référé.



Par assignation délivrée le 2 septembre 2011 Mmes [A] [T] épouse [X], [G] [T], [V] [J] veuve [T] et MM. [Y] [M] [T], [W] [O] et [P] [O] ont fait assigner M.[L] [T] pour se voir autoriser à finaliser la vente de ce bien indivis au profit de M.[R] dans les termes de la promesse de vente, et de la voir condamner à leur payer à chacun la somme de 500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance entreprise, rendue contradictoirement le 24 octobre 2011, le juge des référés du tribunal de grande instance de BOBIGNY a fait droit à la demande d'autorisation et a condamné M.[L] [T] à verser aux demandeurs la somme de 1900€ en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.



M.[L] [T] a relevé appel de cette ordonnance le 9 novembre 2011.



La clôture a été prononcée le 4 juillet 2012.




MOYENS ET DEMANDES DE M.[L] [T] :



Par conclusions du 7 février 2012 auxquelles il convient de se reporter, M.[L] [T] fait valoir':

-que depuis des années il assume seul les charges du studio et il a aussi été amené à plusieurs reprises à soutenir financièrement certains de ses co-indivisaires et ceux-ci ont, en conséquence, accepté de lui céder leurs droits dans l'indivision, évalués à 200.000€,

-que la promesse de vente est intervenue dans ce contexte et prévoyait une condition suspensive d'obtention de prêt au plus tard le 31 janvier 2011 et le bénéficiaire devait porter à la connaissance des promettants les justificatifs de cette obtention ; que ce n'est que le 22 février 2011 que cette justification a été apportée, après que le notaire de l'indivision ait adressé le 7 février 2011 une mise en demeure de le faire, de sorte que la promesse de vente était devenue caduque,

-que, contrairement à ce qu'a jugé le premier juge, le juge des référés ne peut faire application des dispositions de l'article 815-6 du code civil la vente d'un immeuble indivis ne pouvant être considérée comme une mesure urgente requise par l'intérêt commun de l'indivision, que seules des mesures conservatoires pouvaient être autorisées,

-qu'en outre la procédure prévue par l'article 815-5-1 du code civil n'a pas été respectée de sorte que la demande des intimés n'est pas recevable en l'état,

-que son attitude ne peut être considérée contraire à l'intérêt de l'indivision puisqu'elle permet de conserver le montant de l'indemnité d'immobilisation,



Il demande à la Cour au visa des articles 815-5, 815-5-1 et 815-6 du code civil, 564 du code de procédure civile et de l'arrêt de la cour de cassation du 16 décembre 2009 (Civ 3 bull III n°285) de':

-déclarer recevable et bien fondé son appel,

-infirmer l'ordonnance entreprise,

Statuant à nouveau,

-déclarer irrecevable et subsidiairement mal fondée la demande des intimés sur le fondement de l'article 815-6 du code civil, le juge des référés n'étant pas compétent et les mesures sollicitées ne relevant pas de ce texte mais des articles 815-5 et 815-5-1 du code civil,

-déclarer irrecevable toute nouvelle demande formée par les intimés sur le fondement de ces articles 815-5 et 815-5-1,

-dire irrecevable et mal fondée toute demande formée sur le fondement de l'article 815-1 la procédure prévue par ce texte n'ayant pas été respectée par les intimés en l'espèce et seule une licitation peut être ordonnée,

-dire qu'il n'est pas justifié de la mise en péril de l'intérêt commun et débouter en conséquence les intimés de toute demande sur le fondement de l'article 815-5 du code civil,

-débouter en conséquence les intimés,

-les condamner à lui payer 1500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



MOYENS ET PRETENTIONS DES INTIMÉS :



Par dernières conclusions du 20 juin 2012 auxquelles il convient de se reporter les intimés font notamment valoir':

-que, comme l'a souligné le premier juge, [L] [T] est d'une particulière mauvaise foi car l'indivision n'a pas adressé au bénéficiaire de la promesse de mise en demeure d'avoir à justifier de l'obtention d'un prêt, que sa demande reconventionnelle tendant à voir contraindre les 6 autres indivisaires à signer un accord sur la base d'un courrier du 8 avril 2010 adressé par son conseil, au titre d'un pseudo accord successoral est toute aussi étonnante,

-que, sur les moyens procéduraux,

. concernant son adresse, l'extrait K bis de la SCI dont il est associé gérant mentionne celle qui est déclarée dans la déclaration d'appel, et les conclusions est [Adresse 1]. Or il est établi par des retours de courriers qu'il n'habite pas à cette adresse, que les autres adresses à son nom sur les pages jaunes sont [Adresse 4] cette dernière étant celle de son domicile , qu'une sommation de communiquer sur ce point lui a été délivrée le 22 février 2012, sans réponse,

.en application des article 901 et 58 du code de procédure civile la déclaration d'appel est donc nulle car elle se devait de mentionner son domicile réel personnel et effectif, cette inexactitude leur causant grief quant à l'exécution de la décision entreprise et les conclusions irrecevables pour même motif (901 code de procédure civile ),

-que, sur le fond, l'argumentation de l'appelant est inopérante le président du tribunal de grande instance saisi en application de l'article 815-6 du code civil statuant «'en la forme des référés'» et non en référé, et contrairement à ce qu'il soutient le pouvoir du président sur ce fondement ne distingue pas entre les actes d'administration et les actes de disposition,

-que l'opposition à la vente est infondée, son «'opposition'» étant tardive et inefficace (pas de mise en demeure comme relevé par le premier juge), dès lors que l'indivision avait déjà donné son accord à la vente et que par la réalisation de la condition de prêt, la vente était devenue définitive, qu'en outre seule une mise en demeure préalable, lorsqu'elle est prévue à l'acte peut remettre en cause la promesse pour caducité à condition d'être adressée directement au bénéficiaire,

-que la notion d'intérêt commun de l'indivision est laissée à l'appréciation du juge, qu'en l'espèce en exposant l'indivision à une condamnation à dommages-intérêts dans le cadre d'une procédure de vente forcée, [L] [T] n'a pas agi dans le sens de cet intérêt commun,

-que la motivation de [L] [T] est bien étrangère à cet intérêt puisqu'elle évoque la possibilité de conserver ainsi l'indemnité d'immobilisation et qu'il cherche en réalité à obtenir à son profit une cession de parts de l'indivision à hauteur de 200.000€ pour une valeur globale de 340.000€ (2 biens dont celui promis à la vente), cela avec création d'une personne morale se substituant à lui-même,

-que par son attitude [L] [T] prive l'indivision de tout revenu locatif ou de vente provenant du bien, alors que la succession est ouverte depuis 6 ans,

-que contrairement à ce qu'il soutient rien n'exclut la possibilité d'agir sur le fondement de l'article 815-6 du code civil, les conditions de l'espèce et l'urgence le justifiant au contraire pleinement, et que la loi permet la vente d'un bien indivis à condition qu'il ne soit pas porté une atteinte excessive aux droits des autres co-indivisaires,

-qu'aucune action en licitation en application de l'article 815-5-1 du code civil ne peut intervenir car elle léserait les tiers acquéreurs,

-que l'attitude de [L] [T] consiste en réalité à bloquer la vente,



Ils demandent en conséquence à la Cour de':

A titre principal, vu les articles 901 et 58 du code de procédure civile constater que [L] [T] n'indique pas son domicile réel aux termes de sa déclaration d'appel, et que l'inexactitude de la mention de son domicile est de nature à leur faire grief,

En conséquence, déclarer la déclaration d'appel nulle,

Vu les articles 960, 961 et 915 du code de procédure civile, constater que [L] [T] n'indique pas son domicile réel dans ses conclusions signifiées le 7 février 2012,

En conséquence de déclarer l'appel non soutenu et de confirmer l'ordonnance entreprise

A titre subsidiaire, 'sur le fond, vu les articles 815-6 du code civil et suivants, la promesse de vente signée le 16 décembre 2011 ainsi que la jurisprudence visée,

-débouter l'appelant de toutes ses demandes

-confirmer partiellement l'ordonnance entreprise quant à la qualification de l'ordonnance entreprise,

Statuant à nouveau,

-dire que cette ordonnance est rendue en la forme des référés et confirmer pour le surplus l'ordonnance entreprise

Y ajoutant,

-dire que les 6 co-indivisaires sont ainsi autorisés à signer l'acte de vente définitif devant notaire et ce sans la présence ni l'accord de [L] [T]

En tout état de cause,

-juger que l'appel interjeté par [L] [T] est abusif,

-en conséquence condamner [L] [T] à leur payer à chacun 500€ soit une somme globale de 6000€

-condamner [L] [T] à leur payer à chacun 500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens avec recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.




SUR QUOI, LA COUR,



Sur la recevabilité de l'appel et des conclusions de M.[L] [T]



Considérant que selon les dispositions de l'article 901 du code de procédure civile la déclaration d'appel est faite par acte contenant notamment les mentions prescrites par l'article 58 du code de procédure civile celles-ci comprenant, à peine de nullité, et pour les personnes physiques': l'indication des nom, prénom, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance du demandeur'; que l'acte d'appel contenant une adresse inexacte de son auteur est nul';



Considérant que l'acte d'appel mentionne pour adresse de M.[L] [T] [Adresse 1]'; que les intimés, qui sont ses co-indivisaires font valoir que son adresse véritable est [Adresse 3]';



Considérant que la véracité de l'adresse mentionné dans l'acte d'appel est contredite par les pièces versées aux débats et notamment':

-LRAR adressée le 20 avril 2011 par Me GARCIA-PETRICH à Mr [L] [T] [Adresse 4] régulièrement réceptionnée par l'intéressé (AR signé)

-Extrait Kbis de la société 3F SCI dont le siège est [Adresse 6], dont Mr [L] [T] est mentionné être le gérant avoir comme adresse «'[Adresse 1]'»

- Extrait de l'annuaire internet des «' pages jaunes'» mentionnant cependant d'une part au nom de «'[L] [T]'» pour la France entière, 3 adresses dont celle du [Adresse 4], une autre dans le [Localité 5] et une troisième à [Localité 14] dans le Var, et, d'autre part au nom de «'[T]'» à [Localité 17]) une seule réponse, au nom de «'[C] [T]'» au [Adresse 1], n'étant pas contesté qu'il s'agisse du fils de Mr [L] [T],



Considérant que Mr [L] [T] qui n'a pas été représenté à l'audience de plaidoirie du 3 octobre 2012, et n'a pas déposé le moindre dossier, n'a pas fait état de sa véritable adresse dans l'acte d'appel'; qu'en conséquence cet appel est irrecevable en application des dispositions précitées';



Qu'il en résulte que la Cour , qui n'est pas valablement saisie ne peut que confirmer l'ordonnance entreprise';



Sur les demandes reconventionnelles



Considérant que les intimés établissent avec l'évidence requise en référé que l'appel interjeté par Mr [L] [T] l'a été à seules fins dilatoires, afin de faire obstacle à la réalisation d'une promesse de vente valablement engagée par les procurations notariées données par tous les co-indivisaires, et cela pour faire pression sur ceux-ci dans l'obtention de leur accord sur une prétendue créance qu'il allègue contre la succession';



Que par cette attitude délibérée, il viole les dispositions de l'article 1134 du code civil faisant obligation d'exécuter de bonne foi les conventions légalement formées, ce qui constitue un détournement de procédure abusif, caractérisé par l'intention de nuire, puisqu'il prive la succession de tout revenu locatif et de vente qu'elle pouvait légitimement espérer de ce bien, rendu indisponible par la promesse signée et créé un préjudice réel et certain à chacun de ses co-indivisaires';



Considérant qu'il convient en conséquence de faire droit à la demande d'indemnisation provisionnelle et d'allouer à chacun des intimés la somme de 500 € à titre de dommages-intérêts';



Considérant qu'il serait contraire à l'équité de laisser à la charge des intimés les frais irrépétibles ; qu'il lui sera alloué à chacun la somme visée au dispositif ;



Considérant que les dépens seront à la charge de Mr [L] [T] avec recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS





DÉCLARE irrecevable l'appel formé par Mr [L] [T] contre l'ordonnance entreprise,



CONFIRME en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise,



Y ajoutant,



CONSTATE le caractère abusif de l'appel,



CONDAMNE Mr [L] [T] à payer à titre de provision à valoir sur dommages-intérêts, la somme de 500€ chacun à': Mme [A] [T] épouse [X], Mlle [G] [T], M.[Y] [T], Mme [S] [J] veuve de M.[E] [T], MM. [W] et [P] [O],



CONDAMNE Mr [L] [T] à 'payer à : Mme [A] [T] épouse [X], Mlle [G] [T], M.[Y] [T], Mme [S] [J] veuve de M.[E] [T], MM. [W] et [P] [O], la somme de 500 € chacun, en application de l'article 700 du code de procédure civile.



CONDAMNE [L] [T] aux dépens et en autorise le recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.







LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,

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