16 septembre 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-17.625

Troisième chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:C300625

Titres et sommaires

PRESCRIPTION CIVILE - Prescription décennale - Article 2270-1 du code civil - Domaine d'application - Action en responsabilité extracontractuelle - Délai - Point de départ - Détermination - Application de la loi nouvelle - Effet

Le point de départ du délai de prescription d'une action en responsabilité extra-contractuelle demeure déterminé en application des dispositions de l'article 2270-1 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, lorsque le délai a commencé à courir avant l'entrée en vigueur de ce texte et la durée de la prescription résultant du nouvel article 2224 s'applique aux prescriptions en cours à compter du 19 juin 2008, sans que la durée totale puisse excéder la durée de dix ans prévue par l'article 2270-1 du code civil. Dès lors, viole l'article 26, II, de la loi 2008-561 du 17 juin 2008 et l'article 2 du code civil, la cour d'appel qui détermine le point de départ du délai de prescription en application de l'article 2224 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi 2008-561 du 17 juin 2008, alors qu'elle avait relevé que l'action en responsabilité extra-contractuelle prenait sa source dans un contrat conclu antérieurement à l'entrée en vigueur de cette loi

Texte de la décision

CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 septembre 2021




Cassation


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 625 FS-B+C

Pourvoi n° W 20-17.625




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 SEPTEMBRE 2021

1°/ M. [R] [M],

2°/ M. [E] [M],

3°/ Mme [D] [C], épouse [M],

4°/ Mme [P] [M],

5°/ M. [J] [M],

tous cinq domiciliés [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° W 20-17.625 contre l'arrêt rendu le 4 mars 2020 par la cour d'appel d'Agen (chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [F] [V], domicilié [Adresse 3], Notaire, 2°/ à M. [I] [B], domicilié [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Abgrall, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat des consorts [M], de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [V], de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de M. [B], et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 22 juin 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Abgrall, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mme Farrenq-Nési, MM. Jacques, Boyer, conseillers, Mmes Georget, Renard, Djikpa, M. Zedda, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Agen, 4 mars 2020), par acte du 2 août 2007 dressé par M. [V], notaire, MM. [R] [M], [J] [M], [E] [M] et Mme [P] [M] (les consorts [M]) ont vendu à Mme [S], épouse de M. [B], agent immobilier, une maison d'habitation, appelée « maison de [Localité 3] », située au lieudit « [Localité 2] » à [Localité 1], au prix de 120 000 euros.

2. Par arrêt définitif du 4 juin 2013, M. [L] a été condamné à dix ans d'emprisonnement pour s'être rendu l'auteur, entre le 1er janvier 1999 et le 21 octobre 2009, au préjudice des consorts [M], d'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de la situation de faiblesse des victimes en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l'exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer leur jugement pour les conduire à des actes gravement préjudiciables pour elles, en l'espèce, le détournement de leur épargne et la cession de leurs actifs immobiliers.

3. Invoquant le fait que le notaire avait connaissance de l'état de faiblesse de la famille [M] et que M. [B] ne pouvait se porter acquéreur de l'immeuble, même par l'intermédiaire de son épouse, les consorts [M] ont, par acte du 9 décembre 2014, assigné M. [V] et M. [B] en paiement de dommages-intérêts, sur le fondement de leur responsabilité délictuelle.

Examen du moyen

Sur le moyen relevé d'office

4. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des dispositions de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu l'article 26, II, de la loi du 17 juin 2008 et l'article 2 du code civil :

5. Il résulte de ces textes que les dispositions de la loi du 17 juin 2008 qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de son entrée en vigueur, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

6. En revanche, les dispositions qui modifient le point de départ de la prescription extinctive ou qui déterminent les causes de report du point de départ ou de suspension de la prescription ne sont pas concernées par ces dispositions transitoires et ne peuvent disposer que pour l'avenir.

7. Il est jugé en conséquence que le point de départ du délai de prescription d'une action en responsabilité extra-contractuelle demeure déterminé en application des dispositions de l'article 2270-1 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 lorsque le délai a commencé à courir avant l'entrée en vigueur de ce texte (3e Civ., 24 janvier 2019, pourvoi n° 17-25.793, publié) et que la durée de la prescription résultant du nouvel article 2224 s'applique aux prescriptions en cours à compter du 19 juin 2008, sans que la durée totale puisse excéder la durée de dix ans prévue par l'article 2270-1 du code civil (3e Civ., 13 février 2020, pourvoi n° 18-23.723).

8. Pour rejeter la demande des consorts [M], l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, qu'en application de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, que l'article 2234 du même code dispose toutefois que la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure et qu'en l'espèce, le point de départ de la prescription prévu à l'article 2224 du code civil est le 2 août 2007, de sorte que le délai expirait le 2 août 2012.

9. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a déterminé le point de départ du délai de prescription en application de l'article 2224 du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008, alors qu'elle avait relevé que l'action en responsabilité extra-contractuelle engagée par les consorts [M] prenait sa source dans un contrat conclu le 2 août 2007, soit antérieurement à l'entrée en vigueur de cette loi, a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 mars 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne M. [V] et M. [B] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [V] et M. [B] et les condamne à payer aux consorts [M] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille vingt et un.







MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour les consorts [M]

Les consorts [M] font grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable comme prescrite leur action en justice dirigée à l'encontre de Monsieur [V] et Monsieur [B] ;

Alors, d'une part, que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; qu'en retenant que « le point de départ de la prescription prévue à l'article 2224 du code civil est donc le 2 août 2007, comme jugé par des motifs pertinents par le Tribunal que la Cour fait siens, pour se terminer le 2 août 2012 » et, par motifs réputés adoptés du Tribunal, que les consorts [M] « avaient connaissance de la réalisation du dommage à compter de la réitération de l'acte authentique de vente de l'immeuble, soit le 2 août 2007 », sans indiquer comment les consorts [M], qui étaient alors sous l'emprise psychologique de Monsieur [L], ainsi qu'il résulte des énonciations tant de l'arrêt attaqué que du jugement entrepris, qui rappelle en particulier que « tirant toutes les conséquences des faits retenus par le juge pénal, le Tribunal de céans a déjà jugé que l'état de sujétion psychologique dans lequel se trouvaient les consorts [M] confinait à l'insanité d'esprit. Toutefois, cette situation de sujétion psychologique totale, qui caractérisent l'impossibilité d'agir des consorts [M], ne saurait s'étendre au-delà de la période de la prévention, soit du 14 juin 2001 au 21 octobre 2009 », auraient, le 2 août 2007, pu avoir conscience de cette situation de sujétion psychologique et, partant, connaissance des faits leur permettant d'exercer leur droit d'engager une action en responsabilité contre le notaire ayant établi l'acte de vente et l'agent immobilier dont l'épouse, marchand de biens, avait acquis l'immeuble ainsi vendu, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ;

Alors, d'autre part, que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; qu'en retenant que « le point de départ de la prescription prévue à l'article 2224 du code civil est donc le 2 août 2007, comme jugé par des motifs pertinents par le Tribunal que la Cour fait siens, pour se terminer le 2 août 2012 » et, par motifs réputés adoptés du Tribunal, que les consorts [M] « avaient connaissance de la réalisation du dommage à compter de la réitération de l'acte authentique de vente de l'immeuble, soit le 2 août 2007 » puisque trois des quatre vendeurs étaient physiquement présents et que Monsieur [R] [M] y était régulièrement représenté et ne démontrait pas que la vente lui ait été dissimulée, sans indiquer comment les consorts [M], qui étaient alors sous l'emprise psychologique de Monsieur [L], ainsi qu'il résulte des énonciations tant de l'arrêt attaqué que du jugement entrepris, qui rappelle en particulier que « tirant toutes les conséquences des faits retenus par le juge pénal, le Tribunal de céans a déjà jugé que l'état de sujétion psychologique dans lequel se trouvaient les consorts [M] confinait à l'insanité d'esprit. Toutefois, cette situation de sujétion psychologique totale, qui caractérisent l'impossibilité d'agir des consorts [M], ne saurait s'étendre au-delà de la période de la prévention, soit du 14 juin 2001 au 21 octobre 2009 », auraient, le 2 août 2007, se trouvant dans cette situation de sujétion psychologique, pu avoir la révélation de leur dommage, résultant d'une vente à laquelle, dans ces conditions, ils n'avaient pas librement consenti, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ;

Alors, de troisième part, que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; qu'en retenant que « le point de départ de la prescription prévue à l'article 2224 du code civil est donc le 2 août 2007, comme jugé par des motifs pertinents par le Tribunal que la Cour fait siens, pour se terminer le 2 août 2012 » et, par motifs réputés adoptés du Tribunal, que les consorts [M] « avaient connaissance de la réalisation du dommage à compter de la réitération de l'acte authentique de vente de l'immeuble, soit le 2 août 2007 », tout en considérant que les consorts [M] étaient alors sous l'emprise psychologique de Monsieur [L], le jugement entrepris rappelant en particulier que « tirant toutes les conséquences des faits retenus par le juge pénal, le Tribunal de céans a déjà jugé que l'état de sujétion psychologique dans lequel se trouvaient les consorts [M] confinait à l'insanité d'esprit. Toutefois, cette situation de sujétion psychologique totale, qui caractérisent l'impossibilité d'agir des consorts [M], ne saurait s'étendre au-delà de la période de la prévention, soit du 14 juin 2001 au 21 octobre 2009 », sans rechercher, comme le lui demandaient les consorts [M], si, lors de la vente, leur discernement n'était pas aboli, de sorte qu'ils ne connaissaient pas et ne pouvaient pas connaître les faits leur permettant d'agir en justice, puisqu'ils n'avaient pas eu et ne pouvaient avoir eu, en particulier, la révélation de leur dommage, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ;

Alors, de quatrième part, que la prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant soit de la loi, de la convention ou de la force majeure ; que son point de départ est reporté jusqu'à ce qu'il puisse agir ; qu'en retenant que « le point de départ de la prescription prévue à l'article 2224 du code civil est donc le 2 août 2007, comme jugé par des motifs pertinents par le Tribunal que la Cour fait siens, pour se terminer le 2 août 2012 » et, par motifs réputés adoptés du Tribunal, que les consorts [M] « avaient connaissance de la réalisation du dommage à compter de la réitération de l'acte authentique de vente de l'immeuble, soit le 2 août 2007 », tout en considérant que les consorts [M] étaient alors sous l'emprise psychologique de Monsieur [L], le jugement entrepris rappelant en particulier que « tirant toutes les conséquences des faits retenus par le juge pénal, le Tribunal de céans a déjà jugé que l'état de sujétion psychologique dans lequel se trouvaient les consorts [M] confinait à l'insanité d'esprit. Toutefois, cette situation de sujétion psychologique totale, qui caractérisent l'impossibilité d'agir des consorts [M], ne saurait s'étendre au-delà de la période de la prévention, soit du 14 juin 2001 au 21 octobre 2009 » et l'arrêt considérant qu'« à compter de cette date (12 décembre 2009), ils ne peuvent plus soutenir l'existence d'un évènement insurmontable caractérisant une situation de force majeure telle que requise par l'article 2234 du code civil », sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si, en cet état, les consorts [M] ne se trouvaient pas, lors de la vente, empêchés d'agir, de sorte que la prescription n'avait pas pu commencer à courir, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2234 du code civil ;

Alors, de cinquième part que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; qu'en retenant que « le point de départ de la prescription prévue à l'article 2224 du code civil est donc le 2 août 2007, comme jugé par des motifs pertinents par le Tribunal que la Cour fait siens, pour se terminer le 2 août 2012 », tout en considérant qu'« à compter de cette date (12 décembre 2009), ils ne peuvent plus soutenir l'existence d'un évènement insurmontable caractérisant une situation de force majeure telle que requise par l'article 2234 du code civil », sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si ce n'était pas au 12 décembre 2009 que les consorts [M] avaient pu avoir conscience de ce que la vente avait été conclue alors qu'ils se trouvaient sous l'emprise psychologique de Monsieur [L], et que c'était donc à ce moment, seulement, qu'ils avaient pu avoir la révélation de leur dommage et, plus largement, connaître les faits leur permettant d'agir en justice, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ;

Alors, de sixième part que la prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant soit de la loi, de la convention ou de la force majeure ; que son point de départ est reporté jusqu'à ce qu'il puisse agir ; qu'en retenant que « le point de départ de la prescription prévue à l'article 2224 du code civil est donc le 2 août 2007, comme jugé par des motifs pertinents par le Tribunal que la Cour fait siens, pour se terminer le 2 août 2012 », tout en considérant qu'« à compter de cette date (12 décembre 2009), ils ne peuvent plus soutenir l'existence d'un évènement insurmontable caractérisant une situation de force majeure telle que requise par l'article 2234 du code civil », sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si ce n'était pas au 12 décembre 2009, seulement, que l'empêchement d'agir des consorts [M] avait pris fin, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2234 du code civil ;

Alors, de septième part, qu'en retenant que « le point de départ de la prescription prévue à l'article 2224 du code civil est donc le 2 août 2007, comme jugé par des motifs pertinents par le Tribunal que la Cour fait siens, pour se terminer le 2 août 2012 » et, par motifs réputés adoptés du Tribunal, que les consorts [M] « avaient connaissance de la réalisation du dommage à compter de la réitération de l'acte authentique de vente de l'immeuble, soit le 2 août 2007 », sans répondre aux conclusions d'appel des consorts [M] dans lesquelles ceux-ci faisait valoir que « le Docteur [Z] [T], médecin expert près la Cour d'appel de BORDEAUX, certifie ainsi avoir pris connaissance du "cas [M]" et confirme que ces derniers ont été mentalement dans l'incapacité de gérer leurs affaires, et de prendre quelques dispositions juridiques adéquates jusqu'en juin 2011 », la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

Alors, de huitième part, que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'en se bornant à énoncer, pour se prononcer, plus avant, sur la suspension de la prescription, que « même en considérant le fait que [R] [M] prétend que ce n'est que le 2 décembre 2010, par le courrier de Maître [X], notaire chargé de la succession de sa mère, qu'il a appris que la vente était bien intervenue au bénéfice de Madame [S] suivant acte reçu par Maître [F] [V] le 2 août 2007 pour un montant de 120.000 euros, il disposait là encore du temps nécessaire pour agir », sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, pour se prononcer, en premier lieu, sur le point de départ du délai de prescription, si Monsieur [R] [M] n'avait pas effectivement appris l'identité de l'acquéreur que le 2 décembre 2010, de sorte que la prescription de son action engagée de ce chef n'avait pas pu commencer à courir avant cette date, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 12 du code de procédure civile ;

Alors, de neuvième part, subsidiairement, que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en retenant, d'office, et sans provoquer préalablement les explications des parties à cet égard, qu'« il est constant que la suspension du délai de prescription pour impossibilité d'agir ne s'applique pas lorsque le titulaire de l'action disposait encore, au moment où cet empêchement a pris fin, du temps nécessaire pour agir avant l'expiration du délai de prescription » et que « les appelants invoquent la suspension du délai de prescription au-delà de la période de prévention, soit le 21 octobre 2009, de sorte que selon eux leur action introduite le 9 décembre 2014 ne serait pas prescrite comme l'a jugé le Tribunal. Mais il résulte des pièces de la procédure pénale versées aux débats et de leurs propres écritures que les consorts [M] se sont constitués partie civile dans le cadre de la procédure d'instruction par courrier du 12 décembre 2009, de sorte qu'à compter de cette date ils ne peuvent plus soutenir l'existence d'un événement insurmontable caractérisant une situation de force majeure telle que requise par l'article 2234 du code civil, les ayant empêché d'introduire dans le délai de cinq ans, qui n'expirait que le 2 août 2012 en application du principe ci-dessus rappelé, l'action en responsabilité objet de la présente instance. Même en considérant le fait que [R] [M] prétend que ce n'est que le 2 décembre 2010, par le courrier de Maître [X], notaire chargé de la succession de sa mère, qu'il a appris que la vente était bien intervenue au bénéfice de Madame [S] suivant acte reçu par Maître [F] [V] le 2 août 2007 pour un montant de 120.000 euros, il disposait là encore du temps nécessaire pour agir », la Cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction, violant ainsi l'article 16 du code de procédure civile ;

Alors, de dixième part, toujours subsidiairement, qu'en faisant application de la solution jurisprudentielle selon laquelle « la suspension du délai de prescription pour impossibilité d'agir ne s'applique pas lorsque le titulaire de l'action disposait encore, au moment où cet empêchement a pris fin, du temps nécessaire pour agir avant l'expiration du délai de prescription », cependant que celle-ci ne concerne que l'empêchement né au cours de la période de suspension de la prescription, qu'elle est inapplicable quand l'empêchement est né dès l'origine, ce qui était le cas en l'espèce, aux termes mêmes de l'arrêt et du jugement, situation dans laquelle cet empêchement est cause non de suspension de la prescription mais de report du point de départ du délai de prescription, la Cour d'appel a violé l'article 2234 du code civil ;

Et alors, enfin, et en toute hypothèse, qu'en faisant application de la solution jurisprudentielle selon laquelle « la suspension du délai de prescription pour impossibilité d'agir ne s'applique pas lorsque le titulaire de l'action disposait encore, au moment où cet empêchement a pris fin, du temps nécessaire pour agir avant l'expiration du délai de prescription », quand celle-ci ne peut plus trouver application sous l'empire de l'article 2234 du code civil, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, la Cour d'appel a violé l'article 2234 du code civil.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.