2 mars 2011
Cour de cassation
Pourvoi n° 10-82.250

Chambre criminelle

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2011:CR01461

Titres et sommaires

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION - appel des ordonnances du juge d'instruction - appel de la personne mise en examen - ordonnance de règlement - ordonnance renvoyant devant le tribunal correctionnel rejetant implicitement une demande d'irrecevabilité de constitution de partie civile - personnes mises en examen même non appelantes - saisine de la chambre de l'instruction - etendue - détermination - ordonnances - appel - ordonnance de renvoi - ordonnance à caractère complexe - recevabilité

Fait l'exacte application des articles 87, 186 et 206 du code de procédure pénale la chambre de l'instruction qui, après avoir déclaré recevable l'appel d'un des mis en examen formé contre une ordonnance de renvoi et de non-lieu partiel présentant un caractère complexe en ce qu'elle a implicitement admis la recevabilité d'une constitution de partie civile, annule ladite ordonnance et procède au règlement de l'entier dossier de la procédure d'information à l'égard de toutes les personnes mises en examen, même non appelantes, dès lors que les parties ont été mises en mesure de présenter leurs observations

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- L'association La Mouette, partie civile,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BORDEAUX, en date du 2 mars 2010, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre M. Henry Claude X..., Mmes Marie-Laure Y..., épouse Z..., et Stéphanie A..., épouse B..., a dit n'y avoir lieu à suivre contre les susnommés des chefs de diffusion de l'image d'un mineur présentant un caractère pornographique, diffusion de messages violents, pornographiques ou contraires à la dignité humaine susceptibles d'être vus par un mineur et dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef de corruption de mineurs ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 227-24, 227-23 et 227-22 du code pénal, 202, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a prononcé l'annulation de l'ordonnance de renvoi et de non-lieu partiel, en date du 19 juin 2009, et dit n'y avoir lieu à suivre à l'encontre de Mmes A... et Y... des chefs de diffusion de l'image d'un mineur présentant un caractère pornographique, diffusion de messages violents, pornographiques ou contraires à la dignité humaine susceptibles d'être vus par un mineur, et corruption de mineurs ;
"aux motifs qu'(…) il résulte de l'article 87 du code de procédure pénale que lorsqu'il est saisi par la personne mise en examen d'une contestation de la recevabilité d'une partie civile, le juge d'instruction est tenu de statuer par une décision soumise aux voies de recours ordinaires ; qu'en l'espèce, par ordonnance, en date du 19 juin 2009, M. X..., Mmes A...-B... et Y... ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel des chefs de diffusion de message violent, pornographique ou contraire à la dignité, accessible à un mineur et de diffusion de l'image d'un mineur présentant un caractère pornographique ; que les juges d'instruction ayant omis de statuer sur une requête en contestation de la recevabilité de la constitution de partie civile de l'association La Mouette, l'ordonnance de renvoi présente le caractère d'une décision complexe en ce qu'elle a admis implicitement une constitution de partie civile dont la recevabilité avait été expressément contestée ; qu'il convient de procéder à l'annulation de l'ordonnance déférée, en raison de cette omission de statuer ; que l'ordonnance de renvoi étant annulée, la chambre de l'instruction doit statuer sur le règlement de la procédure en application des articles 206 et 595 du code de procédure pénale, après avoir examiné la recevabilité de la constitution de partie civile de l'association La Mouette (…) ;
"alors que le pouvoir d'évocation de la chambre de l'instruction ne lui permet de statuer d'office qu'à l'égard des personnes mises en examen renvoyées devant elle ; qu'il est constant et ressort de l'arrêt attaqué, que par une ordonnance du 19 juin 2009, le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Bordeaux avait renvoyé M. X... et Mmes Z... et B... devant le tribunal correctionnel, des chefs de diffusion de message violent, pornographique ou contraire à la dignité, accessible à un mineur, et diffusion de l'image d'un mineur présentant un caractère pornographique ; que M. X... avait seul relevé appel de cette ordonnance ; que dans ces conditions, l'ordonnance susvisée du 19 juin 2009 était devenue définitive, en ce qu'elle avait renvoyé Mmes Z... et B... devant le tribunal correctionnel ; qu'en statuant néanmoins sur le cas de ces dernières et en disant n'y avoir lieu à suivre contre elles, la chambre de l'instruction a excédé ses pouvoirs" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, par ordonnance du 19 juin 2009, les juges d'instruction co-saisis ont renvoyé M. X... et Mmes Z... et B... devant le tribunal correctionnel des chefs de diffusion de l'image d'un mineur présentant un caractère pornographique et diffusion de messages violents, pornographiques ou contraires à la dignité humaine susceptibles d'être vus par un mineur et dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef de corruption de mineurs ; que M. X... a relevé appel de cette décision en soutenant que l'ordonnance de renvoi devait être qualifiée de complexe en ce qu'elle avait implicitement admis la constitution de partie civile de l'association La Mouette dont il avait contesté la recevabilité ;
Attendu qu'après avoir déclaré l'appel recevable et annulé l'ordonnance de renvoi et de non-lieu partiel, la chambre de l'instruction a statué sur la recevabilité de la constitution de partie civile de l'association susnommée et procédé au règlement de l'entier dossier de la procédure d'information à l'égard de toutes les personnes mises en examen ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, et dès lors que les parties ont été mises en mesure de présenter leurs observations, il a été fait l'exacte application des articles 87, 186 et 206 du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 227-23 du code pénal, 575, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à suivre à l'encontre de M. X..., Mmes A... et Y..., du chef de diffusion de l'image ou de la représentation d'un mineur présentant un caractère pornographique ;
" aux motifs que, (…) sur le délit de diffusion de l'image ou de la représentation d'un mineur présentant un caractère pornographique, sur l'ensemble du catalogue et de l'album, apparaissaient des photographies ou montages photographiques avec l'image de mineurs ou la représentation de mineurs :
- page 30 du catalogue, une photographie aux couleurs vives : bleu, rouge, vert, jaune, de Paul Maccarty (1994) présentant un mannequin nu à partir du nombril tenant une poupée à bout de bras, la tête revêtue d'un masque disproportionné avec un long nez, le corps étendu au sol, avec entre les jambes relevées et écartées une peluche, portant une tête de nain, les deux mains appuyées sur le ventre dénudé du mannequin ;
- page 54 du catalogue, une photographie de Elke Krystufek (1999) mettant en scène sur un lit deux jeunes filles nues, Tune qui pourrait être majeure, à genoux, tenant dans ses bras une poupée, l'autre mineure, en arrière-plan, les genoux repliés devant elle ;
- page 74 du catalogue, une peinture de Marlène Dumas (1998) avec une femme nue allongée sur un lit, les bras repliés sous la tête et les pieds reposant sur le sol, entourée d'enfants accroupis et la tête baissée ;
- page 83 du catalogue, deux photographies de Garry Gross (1975) d'une jeune adolescente nue dans une baignoire ;
- page 84 du catalogue, une photographie d'Inez Van Lamsweerde (1997) d'une adolescente habillée d'une robe rouge enserrant dans ses bras un homme vêtu d'un polo noir allongé le buste sur les genoux de la jeune fille ;
- page 129 du catalogue deux photographies de Cindy Sherman (1999) de pantins articulés, l'une mettant en scène une représentation de deux petites filles avec une poitrine développée dans une gestuelle sexuelle, l'autre un bébé allongé sur un drap avec un sexe disproportionné entouré de pilosité ;
- page 22 à 25 de l'album, des montages photographiques de Elke Krystufek (2000) présentant des corps nus de jeunes adultes et d'adolescents avec des foetus, des poupées et des corps adultes d'êtres humains en partie dépecés ;
- page 119 de l'album, une photographie de Nan Golding (1998) de deux enfants, l'une nue couchée sur le dos, les jambes repliées sous elle et écartées et la tête entre les jambes de l'autre qui se trouvait debout et en partie habillée ;
que l'association La Mouette relevait l'utilisation de mannequins, pantins ou peluches dans des scènes à connotation érotique ou sexuelle et de dénonçait l'utilisation de mineurs dans un contexte pouvant apparaître comme une incitation à la pédophilie ; que les personnes mises en examen contestaient l'infraction reprochée ; que, selon elles, les oeuvres critiquées étaient l'expression de la sensibilité d'artistes connus ; qu'elles participaient d'une recherche, et d'une réflexion et il relevait de leur responsabilité professionnelle et du rôle d'un musée d'art contemporain que de les faire connaître ; qu'elles ajoutaient que les délits reprochés relevaient d'une appréciation subjective de ce qu'une société considérait comme étant pornographique ou violent ce qui était naturellement fluctuant selon les époques, les cultures, les continents... ; que, sur la perception du caractère de ces photographies, dessins, peintures ou représentations, elles précisaient que l'exposition avait été vue par près de 25 000 personnes, qu'elle avait fait l'objet de cent onze articles, reportages ou annonces dans la presse écrite et audiovisuelle en France et à l'étranger (D 153) et que deux plaintes seulement avaient été déposées, l'une, par une personne physique, qui l'avait visitée et qui s'était désistée par la suite de sa plainte, l'autre, par une personne morale, l'association La Mouette qui s'était donnée pour objet de lutter au quotidien pour la protection de l'enfance bafouée ; que les officiers de police judiciaire agissant sur commission rogatoire avaient adressé aux différentes personnes, qui avaient encadré des groupes lors des visites de l'exposition, un questionnaire sur le contenu de celle-ci et sur les réactions qu'elle avait pu susciter ; que, sur quarante-sept personnes interrogées, seules deux d'entre elles, animatrices de centre social, qui avaient uniquement effectué une visite d'information, devaient manifester leur réprobation ; que les quarante-cinq autres, enseignants, témoignaient leur satisfaction, et, précisaient que l'ensemble des élèves qu'ils avaient accompagnés, avaient réagi avec surprise, intérêt, curiosité, amusement, et parfois étonnement ; que le représentant du rectorat, M. L..., qui avait pris l'attache des chefs d'établissements qui avaient organisé des visites, précisait qu'il n'avait eu en retour que des appréciations très positives sur la qualité de cette exposition ; que, de fait, les images ou représentations de mineurs présentées dans le catalogue et l'album et dénoncées par l'association La Mouette, participant d'une recherche et d'une oeuvre de l'esprit, pouvaient surprendre, interpeller ou choquer, mais elles ne pouvaient être perçues comme présentant uniquement un caractère pornographique au sens d'une représentation grossière de la sexualité blessant la délicatesse et tendant à exciter les sens ; que les personnes mises en examen étaient aussi interrogées sur les oeuvres d'Hugo Rondinone ne figurant ni dans le catalogue ni dans l'album, mais présentées dans l'exposition et décrites par des témoins ; qu'il s'agissait de dessins exposés dans une salle qui étaient décrits par certains témoins comme représentant des enfants et des animaux avec des sexes humains dans des situations équivoques et à forte connotation sexuelle ; que cette vision était en partie corroborée par Mme N..., employée par la mairie de Bordeaux au CAPC en tant que responsable du service éducatif, qui précisait que la salle consacrée à Hugo Rondidone comportait des dessins à caractère pornographique et ambigu ; que M. X... contestait la perception de ces témoins et précisait que l'humour et l'ironie, toujours présents dans l'oeuvre de Rondinone, excluaient toute pornographie ; que Mme Y... convenait du caractère ambigu de l'oeuvre de cet artiste qui pouvait conduire à une mauvaise interprétation de ses dessins ; que Mme A... ajoutait qu'Hugo Rondidone était un très grand artiste qui travaillait actuellement à la décoration d'une église à Venise; que, selon elle, il fallait beaucoup de maturité et d'humour pour accéder à l'oeuvre de cet artiste et c'était justement, parce que les enfants n'en avaient pas suffisamment, que l'accès à cette oeuvre leur avait été interdit ; qu'il a également été rappelé que le tableau de Courbet "l'origine du monde" qui a longtemps fait polémique, est désormais exposé au musée d'Orsay, sans le moindre avertissement ; qu'il est constant que certaines oeuvres critiquées ont déjà fait l'objet d'exposition ou se trouvent dans des musées réputés, tels que le Musée d'Art moderne de New York ; qu'en l'absence d'une détermination précise des oeuvres présentées, ni de la possibilité d'en apprécier le contenu, l'infraction ne saurait être établie (…) ;
"1°) alors que la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'en énonçant que des images ou représentations de mineurs figurant dans le catalogue et l'album de l'exposition litigieuse ne pouvaient être perçues comme présentant « uniquement » un caractère pornographique, la chambre de l'instruction a elle-même fait ressortir que ces oeuvres présentaient notamment un caractère pornographique ; qu'en estimant néanmoins que l'infraction de diffusion de l'image ou de la représentation d'un mineur présentant un caractère pornographique « ne saurait être établie », la chambre de l'instruction a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, de sorte que l'arrêt attaqué ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale ;
"2°) alors que la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'il ressort de l'arrêt attaqué que les « oeuvres » de Hugo Rondinone, qui ne figuraient ni dans le catalogue ni dans l'album de l'exposition, avaient été décrites par des témoins comme « représentant des enfants et des animaux avec des sexes humains dans des situations équivoques et à forte connotation sexuelle » ; que cette vision avait été corroborée par Mme N..., employée de la mairie de Bordeaux au CAPC en tant que responsable du service éducatif, qui avait précisé que la salle consacrée à Hugo Rondinone comportait des dessins « à caractère pornographique » ; qu'en affirmant, cependant, ensuite, qu'il n'était pas possible d'apprécier le contenu de ces oeuvres, quand celles-ci avaient été décrites par des témoignages concordants, la chambre de l'instruction a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, de sorte que l'arrêt attaqué ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale" ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 227-24 du code pénal, 575, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à suivre à l'encontre de M. X..., Mmes A... et Y..., du chef de diffusion de messages violents, pornographiques ou contraire à la dignité humaine susceptible d'être vus par un mineur ;
"aux motifs que, (…) sur le délit de diffusion aux mineurs d'un message violent ou pornographique, il était reproché aux personnes en examen d'avoir, au travers de l'exposition et des ouvrages édités dans son prolongement, diffusé des dessins, peintures, photographies, des textes ou des représentations d'objets susceptibles d'être vus par des mineurs présentant un caractère violent ou dégradant pour la personne humaine ou présentant un caractère pornographique ; que cette infraction se fondait sur les différentes oeuvres précédemment évoquées, sur d'autres photographies publiées dans le catalogue et dans l'album et sur l'oeuvre d'Elke Krystufek ne figurant ni dans le catalogue ni dans l'album, mais présentées dans l'exposition et décrites par des témoins ;
qu'en ce qui concernait l'oeuvre d'Elke Krystufek, il s'agissait d'un film projeté dans un tunnel étroit qui comportait, selon des témoins, l'image d'une jeune femme en train de se masturber avec un légume, d'uriner dans un verre et d'en boire le contenu et, de se mutiler le sexe en en cousant les lèvres ; que M. X... déclarait ne pas se souvenir de telles scènes ; que Mme Y... reconnaissait que cette oeuvre pouvait heurter la sensibilité d'un jeune public auquel l'accès avait été interdit ou fortement déconseillé ; que, dans le même temps, elle prétendait que l'artiste, qui se mettait elle-même en scène avait voulu représenter un univers à l'échelle de celui dans lequel elle se trouvait enfant et que ce qu'elle faisait de son corps n'était pas pornographique ; que Mme A... contestait les descriptions faites par les témoins qui correspondaient, selon elle, à une lecture aberrante ; que cette oeuvre complexe nécessitait pour sa compréhension une certaine maturité et elle pouvait être choquante lorsqu'elle était mal comprise ; qu'Elke Krystufek, entendue en Autriche, sur commission rogatoire, expliquait qu'elle avait exposé à Bordeaux des dessins, photographies, vidéos et peintures consistant presque exclusivement en autoportrait ; qu'elle contestait tout caractère pornographique à son oeuvre en précisant que le film projeté à Bordeaux ainsi que toutes les copies avaient été détruites et qu'elle était dans l'incapacité de préciser si les photographies qui lui étaient présentées (scellés3) étaient ou non issues des oeuvres qu'elle avait exposées ; qu'au surplus, il est établi par les éléments du dossier que l'accès à certaines oeuvres était interdit aux enfants ; qu'à défaut de déterminer précisément l'oeuvre présentée et de pouvoir en apprécier le contenu, aucune infraction ne saurait être établie ; qu'en ce qui concernait les photographies publiées dans l'album et le catalogue, l'infraction se fondait sur les photographies d'oeuvres précédemment évoquées et sur les reproductions suivantes :
- page 25 du catalogue , une photographie de Carsten Holler (1993) d'un véhicule tout terrain équipé de filets et de cordes avec ce commentaire: « ...j'ai créé beaucoup d'objets qui, avec de l'imagination, pourraient servir pour torturer les enfants, pour les attraper ou pour les mettre en cage.. » ;
- page 43 du catalogue, une photographie de Robert Mapplethorpe (1982) représentant Louise Bourgeois portant sous son bras droit un godemiché géant ;
- page 47 du catalogue, une photographie d'Eric Fischl (1981) montrant une femme nue, offerte, étendue sur un lit avec face à elle un adolescent qui la regarde ;
- page 49 du catalogue une photographie de Mike Kelley (1990) montrant un homme et une femme nus se livrant à des simulations de sodomie avec des peluches ;
- page 77 du catalogue une photographie de Mat Collishaw (1997) une jeune fille assise dans un fourré, les vêtements désordonnés, entourée de détritus ;
- page 92 du catalogue, une photographie de Christian Boltanski (1975) présentant 24 visages d'enfants accolés avec ce commentaire: « j'avais fait mettre les enfants en rang et je les prenais au flash les uns après les autres...c'était comme si je les fusillais... » ;
- page 125 du catalogue trois photographies de Cameron Jamie (1999-2000) présentant un jeune garçon frappant une poupée ;
- page 74-75 de l'album la photographie de Joseph Bourban (1999) d'un adolescent étendu sur un trottoir couvert de sang à côté d'une moto couchée dans les buissons ;
- page 138 de l'album la photographie de Wolfang Tillmans (1995) d'une femme adulte en soutien-gorge et petite culotte avec, à ses côtés, un petit garçon habillé d'un jean et d'un polo devant un meuble supportant des disques et une chaîne stéréo et au-dessus duquel apparaissait une photographie collée au mur représentant quatre hommes nus et debout se livrant à des actes sexuels ;
que, pour que l'infraction puisse être établie, à supposer que le caractère violent ou dégradant pour la personne humaine ou pornographique des oeuvres présentées ait été démontré, encore faudrait-il s'assurer que celles-ci aient été susceptibles d'être vues ou perçues par un mineur ; que les personnes mises en examen reconnaissaient que les oeuvres présentées n'étaient pas adaptées à tous les publics, mais elles précisaient que pour ce motif, soit une signalétique particulière avait été mise en place pour certaines oeuvres, soit des surveillants avaient été postés à proximité de certaines d'entre elles pour rappeler aux adultes qui se présentaient qu'elles pouvaient être choquantes pour des enfants, voire même pour leur en interdire l'accès ; que M. C..., responsable de l'équipe de surveillance au CAPC précisait que les consignes avaient toujours été respectées et qu'à sa connaissance aucun mineur n'avait eu accès à certaines des oeuvres et notamment à celle d'Elke Krystufek ; que Mme N..., employée par la mairie de Bordeaux au CAPC en tant que responsable du service éducatif, expliquait qu'elle avait participé à l'élaboration de l'exposition dans sa dimension éducative et qu'elle avait organisé des visites adaptées au niveau des élèves sur un parcours balisé avec un encadrement ; qu'en ce qui concerne le catalogue et l'album dont respectivement 1 500 et 500 exemplaires avaient été commercialisés en dehors du CAPC, aucun écho négatif n'était remonté auprès des diffuseurs ; que le représentant qualifié des éditions O fr. et la directrice d'édition de la Réunion des musées nationaux précisaient que ces ouvrages, vendus sous blister dans les rayons art, n'intéressaient qu'une clientèle avertie, ce qui excluait les mineurs ; que le catalogue et l'album étaient aussi en vente à la librairie du CAPC ; que Mme D..., responsable au CAPC du service des publications et de la diffusion, expliquait que le catalogue et l'album étaient vendus sous blister à la librairie, mais, que dans le temps de l'exposition, ces ouvrages pouvaient être consultés librement à l'entrée du musée ; que ces déclarations étaient contredites par M. X... et par Mme Y... qui prétendaient que seul un exemplaire du catalogue pouvait être consulté librement mais uniquement sous le contrôle du libraire qui avait reçu des recommandations strictes ; que Mme Y... ajoutait, qu'au musée, les mineurs étaient toujours encadrés par leurs parents ou par une équipe éducative et que le catalogue, au prix de 200 francs à l'époque, ne leur étaient manifestement pas destiné ; que l'information ne permettait pas de démontrer que les oeuvres critiquées publiées dans l'album et dans le catalogue aient été susceptibles d'être vues ou perçues par un mineur ; qu'en conséquence, les infractions de diffusion de l'image ou de la représentation d'un mineur présentant un caractère pornographique et de diffusion aux mineurs d'un message violent ou pornographique n'étant pas établies, la recherche des personnes responsables en application des articles 227-24, 2°alinéa, et 227-28 du code pénal se trouvait dénuée de tout objet (…) ;
"1°) alors que, la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'il ressort de l'arrêt attaqué que « des témoins » avaient précisément décrit l'« oeuvre » d'Elke Krystufek, comme « un film projeté dans un tunnel étroit qui comportait (…) l'image d'une jeune femme en train de se masturber avec un légume, d'uriner dans un verre et d'en boire le contenu et de se mutiler le sexe en en cousant les lèvres » ; qu'en affirmant, cependant, ensuite que cette oeuvre n'aurait pas été « précisément déterminée » et qu'il aurait été impossible d'« en apprécier le contenu », quand sa description avait été précisément rapportée par des témoins, la chambre de l'instruction a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, de sorte que l'arrêt attaqué ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale ;
"2°) alors que, l'insuffisance des motifs équivaut à leur absence ; qu'en estimant que l'information n'aurait pas permis de démontrer que les oeuvres critiquées aient été susceptibles d'être vues ou perçues par un mineur, au motif qu'une « signalétique particulière » aurait été mise en place pour « certaines oeuvres », sans expliquer en quoi cette « signalétique particulière » aurait empêché un mineur visitant l'exposition d'être confronté à ces oeuvres, la chambre de l'instruction a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs, de sorte que l'arrêt attaqué ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale ;
"3°) alors que, l'insuffisance de motifs équivaut à leur absence ; qu'en estimant que l'information n'aurait pas permis de démontrer que les oeuvres critiquées aient été susceptibles d'être vues ou perçues par un mineur, aux motifs que des surveillants auraient été postés à proximité de « certaines d'entre elles » pour rappeler aux adultes qui se présentaient qu'elles pouvaient être choquantes pour des enfants voire pour leur en interdire l'accès, sans mieux s'expliquer sur les oeuvres concernées par ce prétendu dispositif de surveillance et sans permettre ainsi de s'assurer qu'aucune des oeuvres critiquées ne pouvait être vue par un mineur visitant l'exposition, la chambre de l'instruction a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs, de sorte que l'arrêt attaqué ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale ;
"4°) alors que, la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que le catalogue et l'album de l'exposition avaient été banalement commercialisés « dans les rayons art » de magasins ; qu'en affirmant que l'information n'aurait pas permis de démontrer que les oeuvres publiées dans l'album et dans le catalogue aient été susceptibles d'être vues ou perçues par un mineur, quand des mineurs peuvent accéder aux « rayons art » des magasins et y acheter les catalogues et albums présentés comme des ouvrages d'« art », la chambre de l'instruction a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, de sorte que l'arrêt attaqué ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale ;
"5°) alors que, la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué, que Mme D..., responsable au CAPC du service des publications et de la diffusion, avait reconnu que, « dans le temps de l'exposition », le catalogue et l'album pouvaient être « consultés librement à l'entrée du musée » ; qu'en affirmant, cependant, ensuite que l'information n'aurait pas permis de démontrer que les oeuvres publiées dans l'album et dans le catalogue aient été susceptibles d'être vues ou perçues par un mineur, la chambre de l'instruction a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, de sorte que l'arrêt attaqué ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale" ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 227-22 du code pénal, 86, 575, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef de corruption de mineurs ;
"aux motifs que, (…) sur le délit de corruption de mineurs,
cette infraction serait, selon la plainte déposée, caractérisée à l'encontre des artistes qui s'étaient servis de mineurs pour réaliser des images à caractère pornographique ; que, toutefois, ce délit suppose que l'auteur ait voulu pervertir un mineur et, à défaut d'identifier la victime et de connaître le contexte dans lequel les faits se sont déroulés, les éléments constitutifs de l'infraction ne peuvent être démontrés ; qu'il ne résulte pas de l'information de charges suffisantes contre quiconque de s'être rendu coupable du délit de corruption de mineurs (…) ;
"alors que la juridiction d'instruction régulièrement saisie d'une plainte avec constitution de partie civile a le devoir d'instruire ; qu'en disant n'y avoir lieu à suivre du chef de corruption de mineurs, par le seul examen abstrait de la plainte avec constitution de partie civile, sans vérifier par une information préalable la réalité des faits dénoncés, la chambre de l'instruction a méconnu son obligation d'informer" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que pour dire n'y avoir lieu à suivre contre M. X... et Mmes Z... et B... des chefs de diffusion de l'image d'un mineur présentant un caractère pornographique et diffusion de messages violents pornographiques ou contraires à la dignité humaine susceptibles d'être vus par un mineur et contre quiconque du chef de corruption de mineurs, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile, a exposé sans insuffisance ni contradiction, les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre les personnes mises en examen et contre quiconque d'avoir commis les délits objet de l'information ;
D'où il suit que les moyens, qui reviennent à remettre en question cette appréciation des charges, qui relève du pouvoir souverain de la chambre de l'instruction, ne sauraient être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
DIT n'y avoir lieu à application, au profit de Mmes Stéphanie B... et Marie-Laure Z..., de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Ponroy conseiller rapporteur, Mme Chanet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

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