9 septembre 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-11.995

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2021:CO00730

Texte de la décision

COMM.

COUR DE CASSATION



FB


______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________





Audience publique du 9 septembre 2021




RENVOI


Mme MOUILLARD, président



Arrêt n° 730 F-D

Pourvoi n° X 21-11.995







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 SEPTEMBRE 2021

Par mémoire spécial présenté le 11 juin 2021, la société Pétroles de la Côte Basque, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formulé une question prioritaire de constitutionnalité (n° 989) à l'occasion du pourvoi n° X 21-11.995 qu'elle a formé contre l'arrêt rendu le 2 novembre 2020 par la cour d'appel de Paris (N° RG 19/05505) (pôle 5, chambre 10), dans une instance l'opposant :

1°/ à l'administration des douanes et droits indirects,

2°/ à la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières

3°/ à la receveuse régionale de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, toutes trois domiciliées [Adresse 1].

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Daubigney, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Pétroles de la Côte Basque, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de l'administration des douanes et droits indirects, la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières et la receveuse régionale de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 septembre 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Daubigney, conseiller rapporteur, M. Guérin, conseiller doyen, M. Lecaroz, avocat général, et Mme Mamou, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

1. A l'occasion du pourvoi qu'elle a formé contre l'arrêt rendu le 2 novembre 2020 par la cour d'appel de Paris, la société Pétroles de la Côte Basque (la société PCB) a, par mémoire distinct et motivé, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« L'article 266 quindecies, III. 2° du code des douanes, dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013, aux termes duquel la part d'énergie renouvelable pouvant être prise en compte pour la minoration du taux de la taxe générale sur les activités polluantes applicable à la filière gazole ne peut être supérieure à 7 % pour les biocarburants produits à partir de plantes oléagineuses, et à 0,7 % pour les biocarburants produits à partir de matières premières d'origine animale ou végétale énumérées à l'article 21 de la directive 2009/28/ CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009, est-il conforme au principe constitutionnel d'égalité devant l'impôt et au principe constitutionnel pollueur-payeur ? »

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

2. L'article 266 quindecies du code des douanes, issu de l'article 34 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013, alors applicable, dispose :

I. - Les personnes qui mettent à la consommation en France des essences reprises aux indices 11 et 11 bis et 11 ter du tableau B du 1 de l'article 265, du gazole repris à l'indice 22 et du superéthanol E85 repris à l'indice 55 de ce même tableau sont redevables d'un prélèvement supplémentaire de la taxe générale sur les activités polluantes.

II. - Son assiette est déterminée conformément aux dispositions du 1° du 2 de l'article 298 du code général des impôts, pour chaque carburant concerné.

III. - Son taux est fixé à 7 % dans la filière essence et à 7,7 % dans la filière gazole.

Il est diminué à proportion de la quantité de biocarburants incorporée aux carburants mis à la consommation en France, sous réserve que ces biocarburants respectent les critères de durabilité prévus aux articles L. 661-3 à L. 661-6 du code de l'énergie.

Pour la filière essence, le taux est diminué de la part d'énergie renouvelable résultant du rapport entre les quantités de biocarburants incorporées dans les produits repris aux indices d'identification 11, 11 bis, 11 ter et 55 du tableau B du 1 de l'article 265 du présent code mis à la consommation en France à usage de carburants et les quantités de ces mêmes carburants soumises au prélèvement, exprimées en pouvoir calorifique inférieur.

Pour la filière gazole, le taux est diminué de la part d'énergie renouvelable résultant du rapport entre les quantités de biocarburants incorporées dans les produits repris aux indices d'identification 20 et 22 du même tableau B mis à la consommation en France à usage de carburants et les quantités de carburant routier, soumises au prélèvement, exprimées en pouvoir calorifique inférieur.

La part d'énergie renouvelable, prise en compte pour cette minoration, ne peut être supérieure aux valeurs suivantes :

1° Dans la filière essence, la part d'énergie renouvelable maximale des biocarburants produits à partir de céréales et d'autres plantes riches en amidon ou sucrières, et des biocarburants produits à partir de matières premières d'origine animale ou végétale, énumérées à l'article 21 de la directive 2009/28/ CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables, et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/ CE et 2003/30/ CE, est de 7 % ;

2° Dans la filière gazole, la part d'énergie renouvelable maximale des biocarburants produits à partir de plantes oléagineuses est de 7 %. Cette part est de 0,7 % lorsque les biocarburants sont produits à partir de matières premières d'origine animale ou végétale énumérées à l'article 21 de la directive 2009/28/ CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 précitée.

La liste des biocarburants éligibles à cette minoration de taux est définie par arrêté conjoint des ministres chargés des douanes, de l'écologie, de l'énergie et de l'agriculture.

Lors de la mise à la consommation des carburants repris aux indices d'identification 11, 11 bis, 11 ter, 20, 22 et 55 du tableau B du 1 de l'article 265, les redevables émettent des certificats représentatifs des quantités de biocarburants que ces carburants incorporent, exprimées en pouvoir calorifique inférieur. Les modalités d'émission et de cession éventuelle des certificats sont précisées par décret (...).

3. La disposition contestée est applicable au litige, qui concerne la contestation, par la société PCB, de l'avis de mise en recouvrement d'un redressement portant sur la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) due au titre des années 2013, 2014 et 2015 prévue par l'article 266 quindecies du code des douanes dans sa version alors applicable.

4. Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

5. La question posée présente un caractère sérieux en ce que les calculs de l'exonération de la TGAP « carburant » dont bénéficient les entreprises qui incorporent une certaine quantité de biocarburants au gazole qu'elles commercialisent favorisent les biocarburants les plus polluants, introduisant ainsi une rupture d'égalité en matière de fiscalité des biocarburants qui peut apparaitre sans rapport avec les objectifs environnementaux que le législateur a déclaré poursuivre lorsqu'il a modifié, par la loi contestée, les modalités de la comptabilisation de ces biocarburants, traditionnels et avancés.

6. En conséquence, il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf septembre deux mille vingt et un.

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