21 octobre 2015
Cour de cassation
Pourvoi n° 14-18.837

Première chambre civile

ECLI:FR:CCASS:2015:C101151

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :





Sur le moyen unique des pourvois principal et incident, rédigés en termes identiques, réunis et ci-après annexés :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 11 mars 2014), que Pierre X... est décédé le 5 janvier 2005, laissant pour lui succéder ses six enfants Lisiane, Gilles, Chantal, Christiane, Alain et Claude ; que des difficultés sont survenues au cours des opérations de liquidation et de partage de la succession ;


Attendu que M. Gilles X... et Mmes Lisiane et Chantal X... font grief à l'arrêt d'ordonner le partage sur la base du procès-verbal dressé le 11 mars 2010 par le notaire commis ;


Attendu que l'arrêt relève, hors toute dénaturation, qu'aux termes du procès-verbal du 11 mars 2010, les parties, parfaitement informées et en connaissance de l'aléa signalé au rapport d'expertise, sont convenues de l'attribution d'une parcelle à chacun des enfants, les lots étant équilibrés par des soultes ajustées au centime près et que tous les frais seront partagés en six parts égales ; que la cour d'appel, qui a caractérisé un partage définitif a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par les quatre premières branches du moyen ;


PAR CES MOTIFS :


REJETTE les pourvois principal et incident ;


Condamne M. Gilles X... et Mmes Lisiane et Chantal X... aux dépens ;


Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leurs demandes et les condamne à payer à MM. Alain et Claude X... et Mme Christiane X... la somme globale de 2 500 euros ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un octobre deux mille quinze.



MOYEN ANNEXE au présent arrêt


Moyen identique produit aux pourvois principal et incident par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. Gilles X... et Mmes Lisiane et Chantal X....


IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé que l'accord conclu par procès-verbal notarié du 11 mars 2010 vaut loi des parties, ordonné le partage sur la base de cet accord, renvoyé les parties devant le notaire liquidateur sur les bases de cet accord après que le géomètre aura procédé à la mission confiée par les parties dans l'acte du 11 mars 2010, et d'avoir condamné Mme Lisiane X... ainsi que M. Gilles X... à payer aux intimés la somme de 2000 euros chacun à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et matériel confondus ;


AUX MOTIFS QUE la Cour, étudiant le procès-verbal d'ouverture des opérations de liquidation et partage de la succession de Pierre X... du 11 mars 2010, constate que le notaire liquidateur a pris le soin de relater (page 3) que les trois enfants Alain, Christiane et Claude avaient assigné en février 2007 leurs trois frères et soeurs en partage et que la décision rendue le 21 mai 2007 avait organisé l'expertise confiée à M. Y... portant deux missions, d'une part rechercher s'il existe une possibilité de partage en nature et proposer des lots, d'autre part, fournir tous éléments en vue de fixer une mise à prix pour une vente par licitation en cas d'impossibilité de partage en nature ; que le notaire expose ensuite (pages 4 et 5) le résultat de l'expertise et donne les descriptions et évaluations de son rapport, puis (page 5 in fine), l'acte rappelle le litige opposant les héritiers « les parties sont restées longtemps en désaccord tant sur la répartition des lots¿que sur les évaluations¿considérant que ledit rapport ne tenait pas compte¿viabilisation des lots à provenir de¿ », mais l'acte continue en expliquant qu'un accord est intervenu sur la question « compte tenu du coût afférent à la viabilisation¿division parcelle¿les parties sont convenues d'évaluer chacune des parcelles¿à la somme de 50.154,20 euros » ; qu'ayant ainsi posé les termes du débat, rappelé le conflit et signalé l'accord, le notaire rédige « les parties sont convenues » ; que cet accord est longuement décrit (pages 6 et 7) ; qu'il attribue à chaque enfant une parcelle, les lots étant équilibrés par des soultes ajustées au centime près, par exemple Claude et Alain X... doivent chacun une soulte de 6569 euros ; qu'en sus de ces attributions personnelles il est créé une indivision portant sur 3 parcelles non affectées ; qu'ainsi la lecture de cet accord démontre sa recherche de l'équilibre des parts ; que par ailleurs il est décidé que les frais d'expertise, de bornage, arpentage, déclarations préalables et plus généralement tous les frais inhérents au partage seront partagés en 6 parts égales pour chaque héritier ; qu'enfin les 6 héritiers décident de charger le géomètre-expert M. Z... de procéder à l'établissement des documents d'arpentage, des plans de bornage de certaines parcelles et de fournir divers documents et l'accord prévoit que les parties se retrouveront devant le notaire rédacteur le 30 juin 2010 ; que la lecture du rapport de l'expert Y... démontre que les parties avaient pleine connaissance de ses travaux, d'une part elles avaient toutes, sauf Mme Chantal A..., excusée, personnellement assisté à l'expertise, leurs avocats s'y trouvant également présents ; que d'autre part, il avait déjà existé plusieurs projets de partage qui ont été présentés à l'expert et discutés avec lui ; qu'il en fait état dans son rapport et l'avocat des appelants a écrit le 10 août 2007 à l'expert pour lui faire part du choix de ses clients ; que dans son rapport à plusieurs reprises, l'expert signale la difficulté de procéder aux évaluations, par suite de diverses imprécisions notamment en l'absence de bornage ; que par exemple plusieurs contenances de terrains sont signalées comme « environ », plusieurs valeurs sont chiffrées en fonction de l'obtention d'un certificat d'urbanisme tandis que certaines dispositions d'urbanisme ont varié dans le temps ; que cela conduit l'expert à utiliser à plusieurs reprises le temps du conditionnel, par exemple (page 8) « les valeurs suivantes pourraient être retenues après obtention des certificats d'urbanisme positifs, ce qui semble être le cas selon les renseignements obtenus en mairie » ; qu'il existait donc dans le projet de partage, un aléa et les valeurs proposées étaient sujettes à variation, ce dont les parties étaient expressément informées par l'expertise ; que la Cour considère en conséquence que l'accord notarié du 11 mars 2010 constitue un échange de volonté formulé en toute connaissance de cause par des parties parfaitement informées et disposant de toute l'assistance juridique nécessaire relativement à un partage comportant un aléa signalé ; que par cet échange de volonté elles ont à la fois terminé la contestation qui était née, en se mettant d'accord sur des lots et des soultes et ont prévenu la contestation susceptible de naitre en désignant le géomètre expert chargé de répercuter leur accord en arpentage et bornage ; qu'ainsi que le soutiennent les intimés, cet accord de transaction valait loi des parties ; qu'en refusant de se présenter devant le notaire selon les modalités définies à l'acte du 11 mars 2010, et en envoyant par l'intermédiaire de leur avocat un courrier signalant ce refus de s'y rendre parce qu'ils n'étaient « plus d'accord » ils ont violé leur engagement ; qu'il est indifférent de prétendre à ce sujet qu'une nouvelle expertise aurait proposé des valeurs plus actuelles car l'accord doit être apprécié à sa date ; que sur la demande des consorts Alain, Christiane et Claude X... la Cour jugera que l'accord du 11 mars 2010 doit être exécuté ; que le refus d'exécuter la transaction constitue une faute qui a généré pour les héritiers lésés un préjudice moral et matériel résultant du retard à recevoir sa part de succession, de l'anxiété légitime devant l'aléa causé par toute action judiciaire, des soucis et contraintes dus à l'obligation de se justifier ; que ce préjudice sera indemnités par l'allocation d'une somme de 2000 euros pour chacun d'eux ;


1°- ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense ; qu'en qualifiant le procès-verbal d'ouverture des opérations de liquidation et partage de la succession de Pierre X... du 11 mars 2010 de transaction, quand cette qualification n'était pas invoquée par les consorts Alain, Christiane et Claude X..., la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;


2°- ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur des moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de la qualification du procès-verbal d'ouverture des opérations de liquidation et partage de la succession de Pierre X... du 11 mars 2010, de transaction, sans avoir au préalable invité les parties à s'expliquer sur cette qualification, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;


3°- ALORS QU'il ne peut y avoir de transaction sans concessions réciproques dont il appartient au juge de relever l'existence ; qu'en qualifiant le procès-verbal d'ouverture des opérations de liquidation et partage de la succession de Pierre X... du 11 mars 22010 de transaction, sans caractériser l'existence de concessions réciproques, la Cour d'appel a violé l'article 2044 du Code civil ;


4°- ALORS QUE l'acte du 11 mars 2010 ne comporte nullement la volonté des parties de mettre un terme à la contestation née ou encore leur volonté de prévenir une contestation à naitre ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cet acte en violation de l'article 1134 du Code civil ;


5°- ALORS QUE seul un acte manifestant sans équivoque la volonté des cohéritiers de procéder à un partage amiable mettant définitivement un terme au partage judiciaire en cours est de nature à s'imposer aux cohéritiers ainsi qu'au notaire dans le cadre de l'établissement de l'état liquidatif ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand l'acte du 11 mars 2010 établi selon ses propres constatations en connaissance de cause d'un aléa quant aux valeurs proposées lesquelles étaient sujettes à variation, l'expert ayant signalé la difficulté de procéder aux évaluations par suite de diverses imprécisions notamment en l'absence de bornage - était qualifié par le notaire rédacteur de « procès-verbal des opérations de compte, liquidation et partage », qu'il ne comportait aucune constatation quant à la volonté des parties de mettre un terme au partage judiciaire en cours ni de terminer la contestation née notamment sur l'évaluation des lots et après avoir constaté que les 6 héritiers avaient décidé de charger le géomètre-expert M. Z... de procéder à l'établissement des documents d'arpentage, des plans de bornage de certaines parcelles et de fournir divers documents, puis de se retrouver devant le notaire rédacteur le 30 juin 2010, ce dont il résulte que l'acte du 11 mars 2010 ne pouvait constituer un partage amiable mettant un terme au partage judiciaire en cours et faisant la loi des parties, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 842 du Code civil ;


6°- ALORS QUE l'acte de partage est celui par lequel les cohéritiers décident d'une répartition égalitaire des lots, chaque copartageant recevant des biens pour une valeur égale à ses droits dans l'indivision ; qu'en décidant que l'acte du 11 mars 2010 constituait un partage ayant force de loi entre les consorts X..., après avoir constaté que cet acte avait été établi en connaissance de cause de l'existence d'un aléa quant à la valeur des lots laquelle était, en l'absence de bornage, sujette à variation, ce dont il résulte que cet acte ne pouvait constituer qu'un projet de partage sous condition de la confirmation de la valeur des lots après réalisation des opérations de bornage, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard des articles 826 et 1134 du Code civil qu'elle a violé ;


7°- ALORS QUE si un acte de partage amiable est établi, le notaire en informe le juge qui constate la clôture de la procédure ; qu'en l'espèce, le tribunal a été saisi par voie d'assignation après un procès-verbal de difficultés ; qu'en retenant que l'acte du 11 mars 2010 valait partage amiable, la cour d'appel a violé les articles 842 du Code civil et 1372 du Code de procédure civile.

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