23 juin 2015
Cour de cassation
Pourvoi n° 14-22.111

Chambre commerciale financière et économique

ECLI:FR:CCASS:2015:CO00617

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :





Sur le moyen unique, pris en sa première branche :


Vu l'article 1134 du code civil ;


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 27 avril 2010, M. X..., agissant pour le compte de la société AGS Private Club, et la société D & O Management, représentant la société Golf Resort Terre Blanche (la société GRTB), propriétaire d'un tènement immobilier constituant le domaine de la Terre Blanche, ont signé une lettre d'accord portant sur la vente par la société GRTB d'une parcelle comprise dans ce domaine ; que l'accord était subordonné au respect de certaines conditions, et notamment à la souscription par l'acquéreur, lors de la mise en activité du programme AGS Private Club, et au plus tard le 1er janvier 2012, de deux « cartes société » émises par la société Terre Blanche Golf (la société TBG) et par la société Four Seasons Terre Blanche, aux droits de laquelle est venue la société Terre Blanche Management (la société TBM), pour un montant minimum de 100 000 euros par an ; que la société GRTB, vendeur, et M. X..., acquéreur, ont régularisé le 28 septembre 2010 une promesse synallagmatique de vente, réitérée par acte authentique du 17 août 2011, et reprenant les engagements stipulés dans la lettre du 27 avril 2010 ; que soutenant que M. X... n'avait pas réglé les appels de fonds au titre des deux « cartes société », les sociétés TBG et TBM, aux droits desquelles est venue la société D & O Management, l'ont assigné en paiement ;


Attendu que pour rejeter les demandes de la société D & O Management, l'arrêt constate que le point huit de la convention du 27 avril 2010 stipule qu'à la mise en activité du programme AGS Private Club, et au plus tard le 1er janvier 2012, devaient être souscrites deux « cartes société » ; qu'il relève que la date du 1er janvier 2012 est survenue sans que ce programme ait vu le jour ; qu'il retient que l'application de cet article huit suppose le début d'une activité, laquelle devait commencer au plus tard le 1er janvier 2012 ; qu'il ajoute que la somme de 100 000 euros pour chacune des deux « cartes société » correspond à deux provisions sur avantages fournis par les sociétés TBG et TBM, et que, l'activité d'AGS Private Club n'ayant pas commencé, M. X... n'avait pas à provisionner ces avantages ; qu'il en déduit que la convention n'a pas commencé à s'appliquer en son article huit et « que la date du 1er janvier 2012 est sans effet » ;


Qu'en statuant ainsi, alors que le point huit de la convention ne subordonnait pas la souscription des deux « cartes société » à la mise en place du programme AGS Private Club au plus tard le 1er janvier 2012, la cour d'appel, qui a dénaturé les stipulations claires et précises de cette convention, a violé le texte susvisé ;


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :


CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;


Condamne M. X... aux dépens ;


Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société D & O Management ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille quinze.





MOYEN ANNEXE au présent arrêt


Moyen produit par Me Ricard, avocat aux Conseils, pour les sociétés D & O Management, Terre blanche golf et Terre blanche Management.


Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société D&O Management de toutes ses demandes


AUX MOTIFS QU'


Il résulte des documents produits que M. Frédéric X... avait pour projet l'implantation d'un club privé dénommé "AGS Private Club" sur le secteur C. de l'assiette foncière Riou Blanc du domaine de Terre Blanche à Tourrettes (Var).


C'est dans ces conditions qu'un accord du 27 avril 2010 fut passé relatif à cette opération, suivi d'une promesse synallagmatique de vente du 28 septembre 2010 relative à 1'acquisition du terrain, et d'un acte authentique de vente signé le 17 août 2011, rappelant les termes de cet accord.


Cette lettre d'accord du 27 avril 2010 sous seing privé a été conclue entre M. Frédéric X... qui a déclaré s'engager pour la société en fondation AGS Private Club, ct de 1'autre côté « pour GRTB ci-avant désigné le vendeur représentée par sa présidente D&O Management elle-même représentée par son gérant M. François Z... »


Que la société AGS Private Club a été constituée sous forme de société par actions simplifiée à la suite de statuts du 25 septembre 2010 et a été immatriculée en 2010 au registre du commerce et des sociétés de Chambéry. Elle a été depuis radiée en 2012 de ce registre du commerce.


Cette société n'a pas repris les engagements pris pour son compte par M. Frédéric X.... En conséquence et en application de l'article 1843 du code civil M. Frédéric X... est tenu des engagements pris au titre de cette société en formation avant son immatriculation.


La lettre d'accord comprend onze points:
1- objet du programme:
2- surface SHON :
3- caractéristiques du projet AGS Private Club:
4- autres conditions particulières:
5- charges l'association syndicale libre Terre Blanche :
6- conditions de validité de la lettre d'accord :
7- prestations à charge GRTB :


8-adhprestacartes société :
9-utilisation logo, marque Terre Blanche, marque Four Seasons,
10- le prix de vente du terrain.


Le litige porte sur l'application du point n° 8 "adhésion carte société".


Cc point 8 dispose :
« -adhésion cartes société : A la mise en activité du programme AGS Private Club, et au plus tard le 01.01.12. souscription de deux cartes société au profit de :
a. TBG Pour un montant minimum de 100.000 ¿/an payable d'avance, permettant aux clients d'AGS Private Club de bénéficier des services et avantages suivants :
*mise à disposition gratuite :
- du restaurant du club house les Caroubiers (hors F&B) pour une soirée annuelle,
-de la salle de réunion du clubhouse (une fois par mois)
* possibilité:
-de réserver 60 jours à l'avance sur le parcours Le Château
- d'organiser des évènements privés ou aux couleurs d'AGS
*accès au parcours du Riou (fermé au public) sur accord de la direction *tarifs préférentiels de :-
- 10% au proshop
- 20% au restaurant du clubhouse Les Caroubiers
- 20% sur les tarifs green fees et practice en vigueur
b. FSTB Pour un montant minimum de 100.000 ¿/an payable d'avance, permettant aux membres d'AGS Private Club de bénéficier des services et avantages suivants :
* tarifs préférentiels de :
-10% à la boutique
-20% aux restaurants de l'hôtel : Tousco, Gaudina, Infusion et Faventia
-20 % sur les tarifs suites en vigueur
-20% sur les tarifs du Spa
*accès gratuits aux cours de tennis (réservation auprès du concierge)
*mise à disposition gratuite un week-end (une fois par an) de la villa Terre blanche *toutes ces prestations à tarif préférentiel seront débitées sur le montant provisionné.
Les conditions tarifaires et avantages accordés dans la présente lettre d'accord resteront valables durant toute la vie d'AGS Private Club. L'accessibilité aux prestations ci-dessus décrites ne sera jamais soumise à une tarification complémentaire de type droit d'entrée, droit membre ».


La société "TBG" est la société Terre Blanche Golf, cette société gère les équipements du golf proprement. La société FSTB est la société Four Seasons Terre Blanche, qui gère l'hôtel.


L'activité de cette dernière société a été reprise par la société Terre Blanche Management qui a repris les droits et obligations de FSTB. La convention en son point relatif aux cartes société ne correspond en aucun cas à une créance mais un engagement réciproque entre ces sociétés et M. X..., pour AGS Private Club en formation et du fait de l'absence de reprise des engagements par AGS Private Club entre ces sociétés et M. X....


Par traité de fusion absorption du 31 octobre 2013, la société D&O Management Sarl a absorbé les sociétés Terre Blanche Management Sas, Terre Blanche Golf Sas et Terre Blanche Maintenance et Service Sas.


La société D&O Management Sarl a donc absorbé la société Terre Blanche Golf TBM et la société Terre Blanche Management qui vient aux droits de Four Seasons Terre Blanche FSTB.


La société D&O Management est par ailleurs la présidente des sociétés TBG et TBM aux droits de FSTB.


Cette convention du 27 avril 2010 concerne en son point huit ces deux sociétés TBG et TBM aux droits de FSTB.


La société D&O Management ayant absorbé ces deux sociétés est en droit de poursuivre l'action en leur nom.


Ce point huit dispose qu'à la mise en activité du programme AGS Private Club et au plus tard le 1er janvier 2012 devaient être souscrites deux cartes société.


Le programme AGS Private Club n'a pas vu le jour et la date du 1er janvier 2012 est survenue.


Cette somme de 100.000 ¿ pour chacune des deux cartes société correspond à deux provisions sur avantages fournis par les deux sociétés.


La convention précise que « toutes ces prestations à tarif préférentiel seront débitées sur le montant provisionné ».


En réalité le programme de la société AGS Private Club n'a jamais vu le jour alors que M. X... n'a pas mis en route le programme de construction qui le déterminait.


La convention n'a pas de sens sur ce point, si l'activité d'AGS Private Club ne fonctionne pas, M. X... n'a pas à provisionner des avantages destinés aux personnes passant par AGS Private Club pour bénéficier des avantages du golf et de l'hôtel de Terre Blanche.


Cette convention ne peut à ce propos recevoir application. Son objet suppose la mise en place du programme AGS Private Club.


La date du 1er janvier 2012 est survenue alors que rien n'avait commencé à fonctionner.


En tout état de cause aucune personne n'a demandé à bénéficier de ces avantages au travers d'AGS Private Club.


Cette convention est restée sur ce point lettre morte. La convention n'a pas commencé de s'appliquer en son point huit.


Cette date du 1er janvier 2012 est en conséquence sans effet. L'application de cet article huit suppose le début d'une activité, laquelle devait commencer avant le 1er janvier 2012, et au plus tard le 1er janvier 2012.


La société D&O Management est mal fondée à demander la condamnation de M. X... à payer des provisions 2012, 2013 et 2014 sur avantages non fournis ni à fournir.


Elle sera déboutée de ses demandes.


ALORS QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que la cour d'appel a constaté qu'il résulte des stipulations claires et précises de la convention, que l'article 8, relatif aux cartes société, ne correspond en aucun cas à une créance mais un engagement réciproque entre ces sociétés et M. X..., pour AGS Private Club en formation et du fait de l'absence de reprise des engagements par AGS Private Club, entre ces sociétés et M. X..., qu'ainsi M. X... s'est engagé à souscrire des cartes société « A la mise en activité du programme AGS Private Club, et au plus tard le 01.01.12 » ; qu'en soumettant l'exécution du point huit de la convention à la mise en oeuvre du programme AGS Private Club, la cour d'appel a modifié la convention, qu'elle a ainsi dénaturée, en violation de l'article 1134 du code civil ;


ALORS QUE l'objet est ce qui forme la matière de l'engagement, qu'il doit être certain, possible et licite ; que la cour d'appel n'a nullement constaté que les prestations promises au point huit de la convention étaient inexistantes et impossibles à fournir par la société D&O Management qui s'y était engagée à compter du 1er janvier 2012 ; qu'en retenant que l'objet de la convention suppose la mise en place du programme AGS Private Club, et qu'a défaut la convention est sans objet, la cour d'appel qui s'est déterminée par des motifs inopérants tenant à ce que personne ne pourrait demander à bénéficier des prestations promises, a violé les articles 1108, 1126 et suivants du code civil ;


ALORS QUE la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur obligé sous cette condition qui en a empêché l'accomplissement ; qu'à supposer que la cour d'appel en énonçant que l'application de l'article 8 « suppose » le début d'une activité, ait vu dans la mise en place du programme AGS Private Club une condition d'exigibilité du versement des cartes société, et ayant par ailleurs constaté que M. X... n'avait pas mis en route le programme de construction ainsi qu'il s'y était pourtant obligé, n'a pu sans violer l'article 1178 du code civil, libérer M X... de ses obligations.

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