10 septembre 2014
Cour de cassation
Pourvoi n° 13-14.532

Première chambre civile

ECLI:FR:CCASS:2014:C101014

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Claude X...-Y..., agissant en qualité d'administrateur de la succession de l'artiste Pablo Y..., reprochant à la société Artprice. Com d'avoir, sans son autorisation, constitué une base de données par numérisation des oeuvres de Pablo Y..., et exploité cette base en communiquant au public les oeuvres reproduites, l'a assignée en contrefaçon de droits d'auteur ;

Sur le premier moyen, pris en ses sept branches, ci-après annexé :

Attendu que la société Artprice. Com fait grief à l'arrêt de la condamner à verser à M. Claude X...-Y..., ès qualités, les sommes de 300 000 euros en réparation du préjudice patrimonial résultant de la contrefaçon et de 30 000 euros en réparation du préjudice moral, et de lui interdire de reproduire, sans autorisation, des oeuvres de Pablo Y... sur le site qu'elle exploite ;

Mais attendu, d'une part, sur les six premières branches, que n'échappe aux droits exclusifs de l'auteur en application de l'article L. 122-5, 9°, du code de la propriété intellectuelle, que la reproduction ou la représentation d'une oeuvre d'art graphique ou plastique, par voie de presse écrite ou en ligne, dans un but exclusif d'information immédiate et en relation directe avec cette dernière ; que la cour d'appel ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que la société Artprice. Com qui donnait des informations générales sur le marché de l'art, sans lien exclusif avec l'actualité, s'était placée en situation d'offre permanente au public des reproductions litigieuses, en a déduit que celle-ci ne poursuivait pas un but exclusif d'information immédiate du public, justifiant ainsi, par ces seuls motifs, légalement sa décision ;

Et attendu, d'autre part, que le moyen pris en sa septième branche est nouveau, mélangé de fait et de droit, partant, irrecevable ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches, ci-après annexé :

Attendu que la société Artprice. Com fait encore le même grief à l'arrêt ;

Mais attendu que la société Artprice. Com n'ayant soutenu dans ses écritures devant la cour d'appel, ni que la diffusion qu'elle avait réalisée sur son site des oeuvres de l'artiste présentait un caractère accessoire, ni que le caractère disproportionné d'une condamnation pour contrefaçon accompagnée d'une mesure d'interdiction constituerait une ingérence dans l'exercice de sa liberté d'expression, le moyen, mélangé de fait et de droit en ses deux branches, est nouveau et, partant irrecevable ;

Sur le troisième moyen, pris en ses trois branches, ci-après annexé :

Attendu que la société Artprice. Com fait enfin le même grief à l'arrêt ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la succession Y... produisait aux débats des tableaux de synthèse et deux procès-verbaux de constats dressés les 9 janvier et 18 février 2008 établis par sondage, et ayant relevé que la société Artprice. Com ne contestait ni la nécessité de procéder par sondage en raison du nombre des occurrences litigieuses, ni que celles-ci correspondaient à celles stockées par ses soins dans sa base de données pour être mises en ligne, la cour d'appel, a, sans inverser la charge de la preuve, souverainement apprécié l'importance du préjudice dont elle a justifié l'existence par l'évaluation qu'elle en a fait ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses trois branches ;

Mais sur le quatrième moyen :

Vu l'article L. 121-1 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu que pour la condamner à verser à M. Claude X...-Y..., ès qualités, la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice né des conditions d'utilisation des oeuvres, l'arrêt retient que la société Artprice. Com avait fait coexister sur son site les oeuvres de l'artiste avec une importante quantité d'autres oeuvres, sans avoir sollicité l'accord préalable des ayants droit, et qu'elle s'était comportée en « société anti-droits » d'auteur « puisqu'elle confisque ceux-ci en se les appropriant à grande échelle, grâce aux nouvelles technologies, ceci à des fins capitalistiques » ;

Qu'en se déterminant ainsi par des motifs insuffisants à caractériser l'atteinte au droit moral de l'auteur qu'elle retenait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Artprice. com à verser à M. Claude X...-Y..., ès qualités, la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice moral né de la contrefaçon, l'arrêt rendu le 18 janvier 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix septembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils pour la société Artprice. Com

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société ARTPRICE. COM à verser à Monsieur Claude X...-Y... ès qualités d'administrateur de la succession Y... la somme de 300. 000 euros en réparation du préjudice patrimonial résultant de la contrefaçon et la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice moral, et d'avoir, en tant que de besoin, interdit à la société ARTPRICE. COM de reproduire, sans autorisation, des oeuvres de Pablo Y... sur le site qu'elle exploite ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « la société ARTPRICE. COM qui ne conteste pas l'existence, sur son site internet, d'un petit nombre de reproductions de l'oeuvre de Pablo Y... relevées par l'huissier mais l'ampleur alléguée, soutient qu'elles s'inscrivent dans le cadre légitime d'information du public ; qu'elle permet aux internautes d'être informés en temps réel de l'actualité relative aux oeuvres d'art et d'acquérir ainsi des informations sur le marché de l'art de manière très précise ; mais que, s'il est vrai que l'article L. 122-5, 9°, soustrait au monopole de l'auteur l'utilisation d'oeuvres graphiques et plastiques, encore faut-il qu'en soient satisfaites les conditions, à savoir « par voie de presse » et « dans un but exclusif d'information et en relation directe avec cette dernière » ; qu'à cet égard c'est avec pertinence que Monsieur Claude X...-Y... ès qualités fait valoir que tel n'est pas le cas ; qu'en effet, la société ARTPRICE. COM se présente elle-même (en page 2 de ses dernières conclusions) comme exploitant des informations relatives à un marché de l'art mondial afin de les livrer à ses clients sur son site internet ; que celui-ci s'est ainsi constitué grâce aux fruits de son travail sur une base de données de plus de 27 millions d'indices et de résultats de ventes couvrant 500. 000 artistes du IVème siècle à nos jours ; que son site ne peut être assimilé à un organe de presse ayant pour seule vocation d'informer le public en lui rendant compte de l'actualité immédiate ; que l'utilisation des oeuvres n'est ni exceptionnelle, ni incidente et encore moins liée à la seule actualité ; qu'elle ne saurait par conséquent se prévaloir de cette exception » (arrêt, p. 7) ;

Et AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE « la société ARTPRICE. COM soutient que la reproduction des oeuvres de Pablo Y... ne constitue pas une contrefaçon en vertu de l'article L. 122-5, 9°, du code de la propriété intellectuelle qui dispose que l'auteur ne peut interdire, lorsque l'oeuvre a été divulguée, « La reproduction ou la représentation, intégrale ou partielle, d'une oeuvre d'art graphique, plastique ou architecturale, par voie de presse écrite, audiovisuelle ou en ligne, dans un but exclusif d'information immédiate et en relation directe avec cette dernière, sous réserve d'indiquer clairement le nom de l'auteur. (¿), (étant précisé à l'alinéa 3 du même texte que) Les reproductions ou représentations qui, notamment par leur nombre ou leur format, ne seraient pas en stricte proportion avec le but exclusif d'information immédiate poursuivi ou qui ne seraient pas en relation directe avec cette dernière donnent lieu à rémunération des auteurs sur la base des accords ou tarifs en vigueur dans les secteurs professionnels concernés. » ; que, comme le relève à juste titre le demandeur, la société ARTPRICE. COM ne peut se prévaloir de cette disposition dès lors qu'elle ne bénéficie pas du statut d'entreprise de presse, ni d'agence de presse ; que, par ailleurs, force est de constater qu'elle n'apporte pas la preuve que la reproduction des oeuvres de Pablo Y... qu'elle reconnaît dans ses écritures a pour but une information immédiate, alors que les informations sur les ventes aux enchères publiques n'ont pas de lien avec l'actualité, mais qu'il s'agit d'informations en général sur le marché de l'art ; qu'en conséquence la société ARTPRICE. COM ne peut se prévaloir de l'exception d'information »
(motifs éventuellement adoptés du jugement confirmé, p. 13) ;

1/ ALORS QUE ne peut être interdite par l'auteur, lorsque l'oeuvre a été divulguée, « la reproduction, intégrale ou partielle, d'une oeuvre d'art graphique, par voie de presse (¿) en ligne, dans un but exclusif d'information immédiate et en relation directe avec cette dernière, sous réserve d'indiquer clairement le nom de l'auteur » ; que peut prétendre bénéficier de cette exception toute personne qui reproduit des oeuvres pour illustrer une information d'actualité immédiate mise à la disposition du public, peu important que le vecteur de cette information permette également la diffusion d'autres contenus, plus éloignés de l'actualité ; qu'en excluant la possibilité pour la société ARTPRICE. COM, leader mondial de l'information en ligne sur la marché de l'art, de se prévaloir de l'exception prévue à l'article L. 122-5 9° en retenant que son site n'aurait pas « pour seule vocation d'informer le public en lui rendant compte de l'actualité immédiate », la Cour d'appel a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, en violation de l'article L. 122-5, 9°, alinéa 1er, du code de la propriété intellectuelle, tel qu'il doit être interprété à la lumière de l'article 5, 3°, c, de la directive (CE) n° 2001/ 29 du 22 mai 2001 ;

2/ ALORS QUE ne peut être interdite par l'auteur, lorsque l'oeuvre a été divulguée, « la reproduction, intégrale ou partielle, d'une oeuvre d'art graphique, par voie de presse (¿) en ligne, dans un but exclusif d'information immédiate et en relation directe avec cette dernière, sous réserve d'indiquer clairement le nom de l'auteur » ; que les ventes aux enchères passées de fraîche date et à venir constituent des événements d'actualité qui intéressent l'ensemble du public du marché de l'art ; qu'en retenant, en des termes généraux, que la société ARTPRICE. COM ferait une utilisation des oeuvres qui ne serait pas « liée à la seule actualité », sans constater que les reproductions litigieuses n'avaient pas été publiées seulement pour illustrer l'actualité immédiate des ventes aux enchères publiques des oeuvres d'art graphique (notamment ventes « à venir » et ventes passées de fraîche date), ce qui justifiait leur reproduction accessoire, intégrale ou partielle, pour en permettre l'identification, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-5, 9°, alinéa 1er, du code de la propriété intellectuelle, tel qu'il doit être interprété à la lumière de l'article 5, 3°, c, de la directive (CE) n° 2001/ 29 du 22 mai 2001 ;

3/ ALORS QUE dès lors que les oeuvres reproduites visent à illustrer une actualité immédiate, l'article L. 122-5 9° n'exige nullement que l'utilisation des oeuvres soit « exceptionnelle » ou « incidente » ; qu'en retenant que la société ARTPRICE. COM n'aurait pas rempli ces deux conditions, la Cour d'appel a, une nouvelle fois, ajouté à la loi des conditions qu'elle ne comporte pas, en violation de l'article L. 122-5, 9°, alinéa 1er, du code de la propriété intellectuelle, tel qu'il doit être interprété à la lumière de l'article 5, 3°, c, de la directive (CE) n° 2001/ 29 du 22 mai 2001 ;

4/ ALORS QUE peut prétendre bénéficier de l'exception posée par l'article L. 122-5 9° du Code de la propriété intellectuelle toute personne qui reproduit une oeuvre par voie de presse, sans que cette exception ne soit limitée aux entreprises ayant pour seul objet social l'exploitation d'un organe de presse ; que la société ARTPRICE. COM, leader mondial de l'information en ligne sur le marché de l'art, diffuse une information immédiate sur l'actualité des ventes aux enchères publiques des oeuvres d'art graphique (notamment ventes « à venir » et ventes passées de fraîche date) ; qu'en lui déniant le droit d'invoquer l'exception précitée en retenant qu'elle ne bénéficierait pas du statut d'« entreprise de presse » ou d'« agence de presse », la Cour d'appel a une fois encore ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, en violation de l'article L. 122-5, 9°, alinéa 1er, du code de la propriété intellectuelle, tel qu'il doit être interprété à la lumière de l'article 5, 3°, c, de la directive (CE) n° 2001/ 29 du 22 mai 2001 ;

5/ ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'est une entreprise de presse l'entreprise qui exploite un service de presse en ligne ; qu'un tel service se définit comme un service de communication au public en ligne édité à titre professionnel par une personne physique ou morale qui met à disposition du public un contenu original d'intérêt général, renouvelé régulièrement et composé d'informations présentant un lien avec l'actualité ; qu'en retenant que la société ARTPRICE. COM ne bénéficierait pas du statut d'entreprise de presse, sans s'expliquer sur le fait que son activité consiste précisément dans la mise en ligne en temps réel de toutes les informations sur les ventes aux enchères publiques d'oeuvres d'art, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1er de la loi n° 86-897 du 1er août 1986 ;

6/ ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'une agence de presse se définit comme une organisation qui vend de l'information aux entreprises ; qu'en retenant que la société ARTPRICE n'aurait pas la qualité d'agence de presse, sans s'expliquer sur le fait qu'elle fournit 6 300 médias et agences de presse dans le monde en données économétriques, statistiques, traçabilité historique des oeuvres et rapports sur le marché de l'art mondial, qui permettent aux autres organes de presse de disposer d'informations en temps réel sur l'état du marché de l'art, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1er de la loi n° 86-897 du 1er août 1986 ;

7/ ALORS, A TITRE TRES SUBSIDIAIRE, QU'aux termes de l'article L. 122-5, 9°, alinéa 3, du code de la propriété intellectuelle : « les reproductions ou représentations qui (¿) ne seraient pas en relation directe avec une information immédiate, donnent exclusivement lieu à rémunération des auteurs sur la base des accords ou tarifs en vigueur dans les secteurs professionnels concernés » ; qu'à supposer que les reproductions accessoires à l'information donnée en ligne en temps réel par la société ARTPRICE. COM sur les ventes aux enchères publiques puissent être tenues pour ne pas avoir une relation directe avec une information immédiate au sens de ce texte, elles ne pourraient alors qu'exclusivement ouvrir droit à rémunération dans les conditions légales ; qu'à cet égard, la société ARTPRICE. COM précisait, à titre d'exemple, que la fondation Giacometti lui proposait un forfait annuel de 1 euro par image (conclusions d'appel de la société ARTPRICE. COM signifiées le 26 octobre 2012, p. 21 alinéa 9 et pièce n° 23) ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce point, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-5, 9°, alinéa 3, du code de la propriété intellectuelle ;

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société ARTPRICE. COM à verser à Monsieur Claude X...-Y... ès qualités d'administrateur de la succession Y... la somme de 300. 000 euros en réparation du préjudice patrimonial résultant de la contrefaçon et celle de 30 000 euros au titre du préjudice moral et d'avoir, en tant que de besoin, interdit à la société ARTPRICE. COM de reproduire, sans autorisation, des oeuvres de Pablo Y... sur le site qu'elle exploite ;

AUX MOTIFS QUE, « s'agissant des utilisations relevées par les constats d'huissier des 9 janvier et 18 février 2008, alors que Monsieur Claude X...-Y..., ès qualités, soutient que la société ARTPRICE. COM répertorie actuellement sur son site près de 29. 000 résultats d'adjudication concernant l'oeuvre de Pablo Y... listés dans ses bases de données et accompagnés des visuels correspondants, cette dernière objecte que les pièces versées aux débats par la partie adverse ne font état que de 22 oeuvres reproduites dans les rubriques Artprice Images et Artprice Catalog Library et de 13 oeuvres reproduites pour les rubriques Artprice Personal Research et Artpricing il y a quatre ans, ajoutant que les oeuvres de l'artiste incorporées dans des photographies ne sont pas identifiables et que les autres demandes, notamment celles relatives aux rubriques Petites annonces Artprice, Artprice Intelligence Links ou les applications iPhone ne résultent que d'allégations dénuées de fondement ; qu'il convient toutefois de relever que la société ARTPRICE. COM n'affirme pas que le nombre d'oeuvres figurant dans le constat dressé par l'huissier le 9 janvier 2008 ne correspond à aucune réalité et qu'à la date du constat les 22. 707 occurrences découvertes n'étaient pas stockées par ses soins dans sa base pour être mises en ligne ; qu'elle fait d'ailleurs état pour s'en prévaloir (¿) d'un article du journal Le Monde du 11 août 2012 (pièce 22) évoquant l'exploitation par l'appelant des 60. 000 oeuvres répertoriées de son père ; que l'examen du constat dressé le 9 janvier 2008 permet de constater que la méthode adoptée par l'huissier a consisté, après acquittement en ligne d'un abonnement annuel au montant annoncé de 329 euros, à sélectionner le nom « Pablo Y... » sur la page-sommaire afin d'accéder à une rubrique intitulée « ses résultats d'adjudication » dont le nombre était chiffré à 22. 707 (page 25/ 190 du constat) ; que cette rubrique était décomposée en sous-rubriques, à savoir :

- dessins-aquarelles (3. 340)
- peintures (1. 064)
- tapisseries (29)
- estampes (12. 947)
- sculptures-volumes (4. 484)
- céramiques (808)
- photos (35) ;

qu'il a ensuite procédé par sondage en sélectionnant une oeuvre dans les listes apparaissant à l'ouverture de chacune de ces rubriques ; qu'il a pu établir, en procédant à l'impression de ce qu'il constatait sur l'écran, qu'à chaque recherche était associé un visuel de l'oeuvre de Y... ; que Monsieur Claude X...-Y..., ès qualités, verse aux débats (en pièces 12 à 15), différents tableaux de synthèse résultant des constats des 9 janvier et 18 février 2008 relatifs aux oeuvres de Y..., aux oeuvres de photographes incorporant des oeuvres de Y..., aux services en ligne Artprice Personal Research et Artpricing, informations accompagnées d'un visuel de l'oeuvre concernée ; qu'ainsi, eu égard à l'importance quantitative des faits incriminés qui ont donné lieu aux recherches de l'huissier selon une méthode dont la société ARTPRICE. COM ne tente pas de contester la pertinence au moyen de preuves contraires ¿ si ce n'est par la production d'un constat réalisé deux ans plus tard en cours de procédure (pièce 7 de l'intimée) ¿ il y a lieu de considérer que l'appelant est fondé à prétendre qu'en ne retenant que la contrefaçon de 55 oeuvres et non de 22. 707 oeuvres, le Tribunal n'a pas pris la juste mesure des faits de contrefaçon allégués ; »

1/ ALORS QUE la reproduction ou la présentation d'une oeuvre, accessoirement à un sujet traité, ne réalise pas la communication au public constitutive de contrefaçon ; qu'en l'espèce, le caractère accessoire de la visualisation des oeuvres d'art par rapport à l'activité d'information du site, centrée sur l'analyse et l'évolution en temps réel du marché de l'art à l'échelle mondiale (ventes aux enchères publiques passées et futures), ne pouvait réaliser une communication des oeuvres au public constitutive de contrefaçon ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé par fausse application les articles L. 122-4 et L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle ;

2/ ALORS QUE les droits patrimoniaux des héritiers de l'auteur sur ses oeuvres doivent être mis en balance avec le droit légitime du public à l'information sur les oeuvres graphiques ou plastiques mises en vente sur le marché mondial de l'art ; qu'en l'espèce, l'utilisation par la société ARTPRICE. COM de reproductions d'oeuvres graphiques ou plastiques sur son site Internet dédié à l'information sur le marché mondial de l'art, en vue de proposer au public, à la consultation libre ou payante, des informations sur la cote et l'histoire des oeuvres mises en vente sur ce marché, accessoirement illustrées de leur reproduction, relève de l'exercice du droit à la liberté d'expression et que sa condamnation à de lourds dommages et intérêts pour ces faits ainsi que l'interdiction totale qui est faite d'utiliser des reproductions d'oeuvres de Pablo Y..., artiste encore majeur sur le marché mondial actuel de l'art, s'analysent en une ingérence dans l'exercice de cette liberté, disproportionnée au regard du but poursuivi de défense du droit de propriété des héritiers d'un auteur renommé et prolifique qui, sous le couvert de l'exercice de leur droit de propriété, subordonnent leur autorisation de reproduction à des prétentions exorbitantes ; que la Cour d'appel qui ne s'est pas livrée à cette mise en balance, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 10, alinéas 1 et 2, de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

TROISIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société ARTPRICE. COM à verser à Monsieur Claude X...-Y... ès qualités d'administrateur de la succession Y... la somme de 300. 000 euros en réparation du préjudice patrimonial résultant de la contrefaçon et celle de 30 000 euros au titre du préjudice moral et d'avoir, en tant que de besoin, interdit à la société ARTPRICE. COM de reproduire, sans autorisation, des oeuvres de Pablo Y... sur le site qu'elle exploite ;

AUX MOTIFS QUE, « s'agissant des utilisations relevées par les constats d'huissier des 9 janvier et 18 février 2008, alors que Monsieur Claude X...-Y..., ès qualités, soutient que la société ARTPRICE. COM répertorie actuellement sur son site près de 29. 000 résultats d'adjudication concernant l'oeuvre de Pablo Y... listés dans ses bases de données et accompagnés des visuels correspondants, cette dernière objecte que les pièces versées aux débats par la partie adverse ne font état que de 22 oeuvres reproduites dans les rubriques Artprice Images et Artprice Catalog Library et de 13 oeuvres reproduites pour les rubriques Artprice Personal Research et Artpricing il y a quatre ans, ajoutant que les oeuvres de l'artiste incorporées dans des photographies ne sont pas identifiables et que les autres demandes, notamment celles relatives aux rubriques Petites annonces Artprice, Artprice Intelligence Links ou les applications iPhone ne résultent que d'allégations dénuées de fondement ; qu'il convient toutefois de relever que la société ARTPRICE. COM n'affirme pas que le nombre d'oeuvres figurant dans le constat dressé par l'huissier le 9 janvier 2008 ne correspond à aucune réalité et qu'à la date du constat les 22. 707 occurrences découvertes n'étaient pas stockées par ses soins dans sa base pour être mises en ligne ; qu'elle fait d'ailleurs état pour s'en prévaloir (¿) d'un article du journal Le Monde du 11 août 2012 (pièce 22)
évoquant l'exploitation par l'appelant des 60. 000 oeuvres répertoriées de son père ; que l'examen du constat dressé le 9 janvier 2008 permet de constater que la méthode adoptée par l'huissier a consisté, après acquittement en ligne d'un abonnement annuel au montant annoncé de 329 euros, à sélectionner le nom « Pablo Y... » sur la page-sommaire afin d'accéder à une rubrique intitulée « ses résultats d'adjudication » dont le nombre était chiffré à 22. 707 (page 25/ 190 du constat) ; que cette rubrique était décomposée en sous-rubriques, à savoir :

- dessins-aquarelles (3. 340)
- peintures (1. 064)
- tapisseries (29)
- estampes (12. 947)
- sculptures-volumes (4. 484)
- céramiques (808)
- photos (35) ;

qu'il a ensuite procédé par sondage en sélectionnant une oeuvre dans les listes apparaissant à l'ouverture de chacune de ces rubriques ; qu'il a pu établir, en procédant à l'impression de ce qu'il constatait sur l'écran, qu'à chaque recherche était associé un visuel de l'oeuvre de Y... ; que Monsieur Claude X...-Y..., ès qualités, verse aux débats (en pièces 12 à 15), différents tableaux de synthèse résultant des constats des 9 janvier et 18 février 2008 relatifs aux oeuvres de Y..., aux oeuvres de photographes incorporant des oeuvres de Y..., aux services en ligne Artprice Personal Research et Artpricing, informations accompagnées d'un visuel de l'oeuvre concernée ; qu'ainsi, eu égard à l'importance quantitative des faits incriminés qui ont donné lieu aux recherches de l'huissier selon une méthode dont la société ARTPRICE. COM ne tente pas de contester la pertinence au moyen de preuves contraires ¿ si ce n'est par la production d'un constat réalisé deux ans plus tard en cours de procédure (pièce 7 de l'intimée) ¿ il y a lieu de considérer que l'appelant est fondé à prétendre qu'en ne retenant que la contrefaçon de 55 oeuvres et non de 22. 707 oeuvres, le Tribunal n'a pas pris la juste mesure des faits de contrefaçon allégués » ;

1°/ ALORS QUE retenir la contrefaçon d'une oeuvre par reproduction suppose d'identifier précisément l'oeuvre ainsi reproduite ; qu'en retenant que 22 707 oeuvres de Y... auraient été contrefaites, sans identifier aucune de ces oeuvres, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 335-2 du code de la propriété intellectuelle ;

2°/ ALORS QU'établir la contrefaçon d'une série d'oeuvres suppose de prouver la réalité de la reproduction de chacune d'elles, et ce quel que soit leur nombre ; que pour retenir que la société ARTPRICE. COM aurait reproduit non pas 55 ¿ comme l'avaient retenu les premiers juges ¿ mais 22 707 « oeuvres » de Pablo Y..., la Cour d'appel s'est bornée à retenir que le procès-verbal de constat du 9 janvier 2008 mentionnait 22 707 « résultats d'adjudications », que cette rubrique était décomposée en sept sous-rubriques et que « par sondage » l'huissier aurait pu accéder à un visuel d'une oeuvre de chacune des sept sous-rubriques ; qu'elle a encore relevé que Monsieur X...-Y... versait aux débats différents tableaux de synthèse résultant des constats des 9 janvier et 18 février 2008 relatifs aux oeuvres de Y... ; qu'en se fondant sur ces seuls éléments, cependant que les 22 707 « résultats d'adjudications » correspondaient à la reprise de données libres de droit issues de ventes aux enchères publiques, telles que les prix de vente, les noms des oeuvres, les dates et lieu des ventes, etc., et que les tableaux établis par Monsieur X...-Y... lui-même ne mentionnaient que 55 oeuvres effectivement vues sur le site internet, la Cour d'appel n'a aucunement justifié l'existence d'une contrefaçon de 22 707 oeuvres de Y... ; qu'en statuant ainsi, elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle ;

3/ ALORS QU'il incombe au demandeur en contrefaçon d'en établir les éléments constitutifs ; que, par ailleurs, lorsqu ¿ une partie a la charge de la preuve, celle-ci ne peut se déduire du silence, prétendu ou avéré, de la partie adverse ; qu'en l'espèce, en déclarant déduire l'existence d'une contrefaçon de « 22. 707 oeuvres » de la simple absence d'allégation par la société ARTPRICE. COM de ce que « les 22. 707 occurrences découvertes n'étaient pas stockées par ses soins dans sa base pour être mises en ligne » et de son absence de contestation de la méthode de recherche par sondage employée par l'huissier, quand il incombait à Monsieur Claude X...-Y... d'établir concrètement l'existence, expressément contestée par la société ARTPRICE. COM, d'une base de données stockant 22. 707 images reproduisant des oeuvres de Pablo Y..., la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation de l'article 1315 du code civil ;

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société ARTPRICE. COM à verser à Monsieur Claude X...-Y... ès qualités d'administrateur de la succession Y... la somme de 30. 000 euros en réparation du préjudice moral résultant de la contrefaçon ;

AUX MOTIFS QUE « l'appelant poursuit par ailleurs l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté sa demande d'indemnisation du préjudice moral qu'a causé aux ayants droit de l'artiste qu'il représente l'utilisation de l'oeuvre de Y... par la société ARTPRICE. COM ; qu'il convient de considérer qu'ils peuvent se prévaloir d'une atteinte à l'esprit de l'oeuvre du fait de son utilisation par une société qui la fait coexister avec une importante quantité d'autres, sans avoir sollicité leur accord, et qu'ils déconsidèrent en la qualifiant de « première société anti-droits d'auteur » puisqu'elle les confisque et se les approprie à grande échelle, grâce aux nouvelles technologies, ceci à des fins capitalistiques ; »

ALORS QUE l'exercice du droit moral par les héritiers d'un auteur n'est pas discrétionnaire et doit être objectivement justifié ; qu'en se bornant à relever la « coexistence » de l'oeuvre de Pablo Y... avec « une importante quantité d'autres » sans caractériser une quelconque « altération » ou « dépréciation » objectives de l'oeuvre de Pablo Y... ou de son auteur, puis à faire état d'un jugement péjoratif, mais purement subjectif, porté par Monsieur Claude X...-Y... sur l'activité de la société ARTPRICE. COM, pourtant cotée au Premier Marché réglementé de la bourse de Paris et cotée sur Eurolist/ Euronext avec 18. 000 actionnaires, la Cour d'appel a statué par des motifs impropres à justifier légalement sa décision au regard des dispositions combinées des articles L. 121-1 et suivants et L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle.

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