1 juin 2010
Cour de cassation
Pourvoi n° 09-14.115

Chambre commerciale financière et économique

ECLI:FR:CCASS:2010:CO00592

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :





Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :


Vu l'article 455 du code de procédure civile ;


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société ADT télésurveillance, aux droits de laquelle est la société ADT France, ayant résilié le contrat d'agent commercial qui la liait à la société Boss protection, cette dernière l'a assignée en paiement d'une indemnité de cessation de contrat ; que la société Boss protection ayant été mise en liquidation judiciaire, son liquidateur, M. X..., est intervenu à l'instance ;


Attendu que pour dire que la société Boss protection n'a pas commis de faute grave de nature à justifier la rupture du contrat d'agent commercial, l'arrêt retient que l'octroi par la société ADT France d'un préavis à son agent démontre que celle-ci ne considérait pas l'attitude de la société Boss protection comme suffisamment grave pour rendre impossible le maintien du lien contractuel ;


Attendu qu'en statuant ainsi, sans s'expliquer sur les faits délictueux qui auraient été commis par la société Boss protection pendant l'exécution du contrat, mais n'auraient été découverts par la société ADT France que postérieurement à la rupture des relations contractuelles, susceptibles de justifier la résiliation du contrat pour faute grave qui étaient invoqués par la mandante, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;








PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :


CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 mars 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;


Condamne M. X..., ès qualités, aux dépens ;


Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du premier juin deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt


Moyens produits par la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat aux Conseils pour la société ADT télésurveillance


PREMIER MOYEN DE CASSATION


Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement ayant dit que la société BOSS PROTECTION n'avait pas commis de faute de nature à justifier la rupture du contrat d'agent commercial ;


AUX MOTIFS QUE « le 24 novembre 2006, le tribunal de commerce de MONTPELLIER a ouvert à l'encontre de la société BOSS PROTECTION une procédure de redressement judiciaire convertie en liquidation judiciaire le 12 janvier 2007 ; que Me X... désigné en qualité de liquidateur judiciaire intervient volontairement à la présente instance ; que par ce courrier du 8 juillet 2002, la société ADT après s'être étonnée de ce que la société BOSS PROTECTION « avait jugé bon d'éditer et de faire circuler un document publicitaire qui ne comporte pas le logo ADT mais l'offre et la reproduction des produits utilisés dans le cadre du DEALER PROGRAM FRANCE », lui rappelait que le contrat du 24 décembre 2001 prévoyait en son article 8 que « si le distributeur agréé souhaite réaliser des documents ou gadgets publicitaires portant la marque ADT sous quelque forme que ce soit, le ou les logos déposés par ADT SURVEILLANCE y compris celui propre à son statut de distributeur agréé, il doit obtenir au préalable une autorisation écrite de ADT SURVEILLANCE et lui avoir communiqué un descriptif détaillé de ses différents projets en la matière » ; qu'elle terminait sa lettre en lui indiquant qu'elle mettait fin au contrat de distributeur agréé ADT à compter du 8 août 2002 et lui demandait de prendre les mesures nécessaires pour cesser, à cette date, toute activité visant sa représentation ; que le 8 août 2002, la société ADT adressait un courrier RAR à la société BOSS PROTECTION où elle ne formulait aucun reproche à son encontre mais l'informait de sa volonté de résilier le contrat d'agent commercial et de ce qu'elle disposait du délai de préavis contractuel à compter de la réception de la lettre ; qu'en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi ; que l'agent commercial perd ce droit à réparation s'il ne notifie pas au mandant dans le délai d'un an à compter de la cessation du contrat qu'il entend faire valoir ses droits ; que le 8 novembre 2002, le conseil de la société BOSS PROTECTION manifestait auprès de la société ADT l'intention de sa cliente de faire valoir ses droits ; que la société BOSS PROTECTION n'a donc pas perdu son droit à réparation ; que par ailleurs, la réparation prévue par l'article L 134-12 du Code de commerce n'est pas due si la cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial ; que la faute grave génératrice de la perte du droit à réparation est celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel ; que le fait de faire circuler un document publicitaire qui ne comportait pas le logo ADT mais l'offre et la reproduction des produits utilisés dans le cadre du DEALER PROGRAM FRANCE ne portait pas atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun ; que par ailleurs, le contrat d'agent prévoyait qu'en cas de faute grave de l'une des parties, le contrat pourrait être dénoncé par l'autre sans préavis ; que le courrier du 8 juillet accordait un préavis d'un mois à la société BOSS PROTECTION et que le courrier du 8 août lui accordait un autre mois de préavis ; que la société ADT ne considérait donc pas que l'attitude de la société BOSS PROTECTION était suffisamment grave pour rendre impossible le maintien du lien contractuel et priver la société BOSS PROTECTION de son droit à indemnité ;


ALORS QUE D'UNE PART la société ADT faisait expressément valoir dans ses écritures que la cause de la rupture des relations commerciales entre les parties ne reposait pas sur un seul et unique grief – la diffusion d'un document publicitaire ne comportant pas le logo ADT – mais sur la réitération par la société BOSS PROTECTION de fautes contractuelles graves auxquelles elle avait été mise en demeure de mettre un terme par plusieurs courriers recommandés (conclusions d'appel de l'exposante, p.10 alinéas 7 et 8 et p.12 à 15) ; que la société ADT faisait ainsi notamment valoir que le courrier du 8 juillet 2002 notifiant la résiliation du contrat d'agent commercial à la société BOSS PROTECTION rappelait l'absence de prise en compte par celle-ci de l'avertissement délivré quelques mois plus tôt par la société ADT en raison des manquements précédemment commis ; qu'en se bornant en l'espèce à affirmer que « le fait de faire circuler un document publicitaire qui ne comportait pas le logo ADT mais l'offre et la reproduction des produits utilisés dans le cadre du DEALER PROGRAM FRANCE ne portait pas atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun » sans rechercher si, ainsi que le soutenait la société ADT dans ses écritures, la réitération des fautes contractuelles commises par la société BOSS PROTECTION – et notamment la diffusion par celle-ci à plusieurs reprises de tracts publicitaires non conformes aux dispositions du contrat d'agent commercial et non autorisés par la société ADT – en dépit des avertissements déjà reçus, ne leur conférait pas le caractère de gravité suffisante pour justifier la rupture des relations contractuelles sans indemnité, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 134-13 du Code de commerce ;


ALORS QUE D'AUTRE PART l'ensemble des fautes commises par l'agent commercial antérieurement à la rupture des relations contractuelles avec son mandant mais révélées à celui-ci postérieurement à ladite rupture doivent être prises en considération pour apprécier si cette rupture est justifiée par une faute grave de l'agent privant ce dernier de toute indemnité ; qu'en l'espèce la société ADT indiquait avoir découvert l'existence – postérieurement à la rupture du contrat d'agent commercial le 8 juillet 2002 – de faits délictueux d'une particulière gravité commis par la société BOSS PROTECTION durant l'exécution de son contrat et qui avaient perduré après la cessation dudit contrat ; qu'en se bornant néanmoins à relever que certains faits dénoncés dans la lettre de rupture ne pouvant être qualifiés de faute grave et que la société ADT ayant accordé un préavis à la société BOSS PROTECTION, cela démontrait qu'elle ne considérait pas l'attitude de cette société comme suffisamment grave pour rendre impossible le maintien du lien contractuel, sans s'expliquer sur ces faits délictueux, de nature à justifier la rupture du contrat d'agent commercial pour faute grave, ainsi expressément invoqués et découverts postérieurement à la rupture des relations contractuelles, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)


Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société ADT FRANCE à payer à Maître X..., ès-qualités, la somme de 280.000 € à titre d'indemnité avec intérêts au taux légal à compter du 8 novembre 2002, date de la mise en demeure ;


AUX MOTIFS QU' « au vu des relevés des commissions versées à la société BOSS PROTECTION du 1er janvier 2002 au 30 juin 2002 (pièce 5 de son bordereau), la Cour possède les éléments d'appréciation suffisants, sans qu'il soit nécessaire de recourir à une mesure d'instruction, pour évaluer la juste réparation du préjudice subi par l'agent commercial qui consiste en la perte de la rémunération qu'il pouvait raisonnablement espérer en cas de poursuite de son activité ; que la société BOSS PROTECTION pouvait raisonnablement espérer percevoir au cours des deux années à venir ; qu'au vu des commissions versées au cours du 1er semestre 2002, la société BOSS PROTECTION pouvait raisonnablement espérer percevoir au cours des deux années à venir la somme de 280.000 € ; que c'est la somme qui lui sera allouée à titre d'indemnité outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 novembre 2002 » ;


ALORS QUE D'UNE PART la société ADT invoquait expressément dans ses écritures la carence manifeste de la société BOSS PROTECTION dans l'administration de la preuve du préjudice qu'elle alléguait avoir subi du fait de la résiliation du contrat d'agent commercial et notamment le fait que cette dernière ne justifiait aucunement des prétendus investissements qu'elle aurait réalisés pour l'exercice de son activité d'agent commercial pour le compte de la société ADT ; qu'en se bornant en l'espèce à fixer le montant de l'indemnité due à la société BOSS PROTECTION à l'équivalent de deux années de commissions sans répondre aux écritures circonstanciées de la société ADT sur ce point, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;


ALORS QUE D'AUTRE PART la société ADT faisait également valoir dans ses écritures que l'indemnité due à la société BOSS PROTECTION ne pouvait en tout état de cause être fixée à hauteur de deux années de commissions en raison de la très brève durée d'exécution du contrat d'agent commercial liant les parties, qui n'avait pas excédé huit mois ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen pourtant décisif, la Cour d'appel a derechef violé l'article 455 du Code de procédure civile.

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