8 septembre 2004
Cour de cassation
Pourvoi n° 03-83.104

Chambre criminelle

Texte de la décision

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le huit septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le rapport de Mme le conseiller DESGRANGE, les observations de Me FOUSSARD, de la société civile professionnelle THOUIN-PALAT et URTIN-PETIT, de Me BLANC, et de la société civile professionnelle BORE et SALVE DE BRUNETON, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;


Statuant sur les pourvois formés par :


- X... Roland,


- Y... René,


contre l'arrêt de la cour d'appel de RENNES, 3ème chambre, en date du 20 février 2003, qui les a condamnés, le premier pour escroquerie et tous deux pour infraction aux obligations prescrites par les articles L. 550-1 à L. 550-4 du Code monétaire et financier, Roland X... à 3 ans d'emprisonnement dont 2 ans avec sursis et mise à l'épreuve et René Y... à 1 an d'emprisonnement avec sursis et 1 500 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;


Vu les mémoires produits en demande et en défense ;


Sur le premier moyen de cassation, proposé pour Roland X... et pris de la violation de l'article 405 de l'ancien Code pénal, des articles 121-1 et 313-1 et suivants du Code pénal, de l'article 6, 1er de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;


"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Roland X... coupable d'escroquerie et, en répression, l'a condamné à une peine de trois ans d'emprisonnement assortie d'un sursis pour une durée de deux ans sous le régime de la mise à l'épreuve, outre des dommages et intérêts ;


"aux motifs que "ce n'est pas en tant que représentant du COP que la responsabilité pénale de Roland X... est recherchée, mais à raison de ses agissements personnels ; qu'il ressort de ses déclarations constantes, réitérées devant la Cour, que son activité principale résidait, en ce qui concerne les seules poursuites pénales, dans le négoce de diamants puis dans celui des monnaies anciennes ; que dans l'un et l'autre cas, il est constant que la valeur des biens cédés était surévaluée par rapport à la réalité ; que cela ressort autant des expertises fournies par les victimes à l'appui de leurs plaintes que des doléances mêmes formulées par Roland X... à l'encontre de Alain Z... ; qu'ayant insisté sur les valeurs refuges que constituaient ces produits, Roland X... convient que le but était que les acheteurs conservent leurs acquisitions ; que, pour les inciter à contracter, il a recouru à des tiers dignes de confiance à raison des relations personnelles qui les liaient à leurs clients : conseillers de banques, assureurs, époux d'expert-comptable ; que la bonne foi de ces intermédiaires est indifférente au regard des dispositions de l'article 405 de l'ancien Code pénal ; que, pour accréditer la valeur supposée des diamants, Roland X... remettait une "attestation de prix" du montant de la transaction, qu'il rédigeait lui-même ; que si dans la période visée dans les poursuites, ce document ne se présentait plus sous forme de "certificat d'estimation", il n'en demeure pas moins que Roland X..., qui négociait directement avec les diamantaires hollandais, ne pouvait ignorer la fausseté de l'attestation remise aux clients ;


que ce document était étayé par le bon de dédouanement et le certificat d'un institut international reconnu, pièces qui ne faisaient aucunement état de la valeur réelle des pierres mais confortaient la signature du dirigeant du COP ; qu'afin d'étouffer les éventuelles dernières inquiétudes des acquéreurs, celui-ci s'engageait à reprendre les diamants à leur valeur initiale, augmentée du rapport du bien ; que ce rapport, qualifié de plus-value ou d'intérêts, fixé dès la signature de l'engagement, était donc sans lien avec l'évolution du marché du diamant ; que certains client aient pu, durant les années fastes, faire des affaires lucratives, n'ôte rien au caractère frauduleux de cette mise en scène ; que bien plus, cette manoeuvre, classique dans les escroqueries, a donné du crédit au discours de Roland X... et a conduit certains clients à réinvestir leur mise en toute confiance ; que, s'agissant des pièces anciennes, le processus était identique, à cette nuance près que le certificat était établi par le vendeur, Henri A..., et que l'absence d'expertise fiable en ce domaine facilitait la surévaluation ; que là encore Roland X..., qui n'a d'ailleurs pas déposé plainte contre son partenaire, ne pouvait ignorer la démesure qui existait entre la valeur vénale du bien qu'il acquérait et le prix facturé aux épargnants ; que des déclarations constantes des victimes et de celles de René Y... devant la Cour, la présentation des pierres, puis des pièces, les certificats y afférents, le rapport escompté intervenaient dès le premier rendez-vous, antérieurement à la signature de l'engagement ;

qu'en déterminant des particuliers à lui remettre des sommes sans lien avec la valeur des acquisitions projetées et en recourant préalablement, pour ce faire, à des tiers dignes de confiance, à des documents visant à accréditer une valeur qu'il savait fausse, en promettant un rapport sans lien avec l'évolution des marchés des pierres précieuses et des pièces anciennes, Roland X... a bien escroqué la fortune d'autrui au sens de l'article 405 de l'ancien Code pénal, en vigueur au moment des faits (...)" (arrêt attaqué, p. 34 in fine, p. 35 et p. 36, 1er) ;


"alors que, premièrement, nul n'est responsable que de son propre fait ; qu'au cas d'espèce, Roland X... faisait valoir qu'il n'avait personnellement réalisé que deux opérations, celles concernant Marie-Ange B... et Laurent C..., lesquels ne s'étaient d'ailleurs pas constitués partie civile (conclusions d'appel, p. 2, 4) ; qu'en statuant comme ils l'ont fait, sans délimiter précisément quels pouvaient être les contrats à l'occasion desquels Roland X... se serait rendu coupable d'escroquerie, et ce alors même qu'ils ont précisé que ce n'était pas en tant que représentant de la société COP, mais à raison de ses agissements personnels, que Roland X... était poursuivi, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés ;


"et alors que, deuxièmement, Roland X... avait fait valoir (conclusions d'appel, p. 2, 6) que le certificat d'estimation mentionnait expressément que le prix indiqué était celui de l'entreprise et non celui du marché, et que les clients démarchés étaient suffisamment expérimentés pour ne pas se méprendre sur la nature du document ; qu'en énonçant seulement que le certificat d'estimation relatait un prix supérieur à celui du marché sans s'expliquer sur le moyen soulevé par Roland X..., les juges du fond ont en toute hypothèse violé les textes susvisés" ;


Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et du jugement mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit d'escroquerie dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles des indemnités propres à réparer le préjudice en découlant ;


D'où il suit que le moyen qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;


Mais sur le second moyen de cassation, proposé pour Roland X... et pris de la violation des articles L. 550-1, L. 550-3 et L. 573-8 du Code monétaire et financier, 111-3 et 111-4 du Code pénal, de l'article 6, 1er de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;


"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Roland X... coupable d'une violation aux dispositions de la loi n° 83-1 du 3 janvier 1983 modifiée par la loi du 14 décembre 1985 et devenues les articles L. 550-1, L. 550-3 et L. 573-8 du Code monétaire et financier et, en répression, l'a condamné à une peine de trois ans d'emprisonnement assortie d'un sursis pour une durée de deux ans sous le régime de la mise à l'épreuve, outre des dommages et intérêts ;


"aux motifs que "la loi du 14 décembre 1985 modifiait en partie la loi n° 83-1 du 3 janvier 1983 sur le développement des investissements et la protection de l'épargne à laquelle était soumise "toute personne qui, directement ou indirectement par voie (...) de démarchage, propose à titre habituel à des tiers (...) d'acquérir des droits (...) sur des biens mobiliers lorsque les acquéreurs n'en assurent pas eux-mêmes la gestion ou lorsque le contrat offre une faculté de reprise ou d'échange et la revalorisation du capital investi", "toute personne qui recueille des fonds à cette fin" ; que l'activité des personnes visées à l'article 36 de la loi du 3 janvier 1983, ainsi modifié et repris ci-dessus, était soumise au contrôle de la COB qui examinait notamment la conformité des documents contractuels avec la législation et s'assurait que la société présentait "le minimum de garanties exigé d'un placement destiné au public" qu'il ressort de la suppression de la clause de rachat, à partir de 1987, que Roland X... n'ignorait pas ces circonstances ; qu'il a d'ailleurs indiqué, tant en première instance que devant la Cour, que le caractère coûteux de l'opération l'avait dissuadé de poursuivre plus avant les démarches entamées en ce sens auprès de la COB ; que ces déclarations ont été confirmées par Alain Z... lors de l'enquête ; que c'est donc en connaissance qu'il a agi, un simple report au texte visé démontrant qu'il entrait bien, en tant qu'auteur, directement ou indirectement, dans le champ de la loi de 1983 modifiée ; que cette loi, dans sa rédaction première, débordait du simple cas du démarchage à domicile et édictait des mesures s'étendant de l'appel public à l'épargne à la mise en place des sociétés anonymes (...)" (arrêt attaqué, p. 36, 3, 4, 5, 6 et 7) ;


"alors que la loi pénale est d'interprétation stricte ;


qu'au cas d'espèce, en condamnant Roland X... alors qu'ils reconnaissaient que, pour la période visée à la prévention, ce dernier avait fait supprimer la clause de rachat qu'il proposait à sa clientèle, de sorte que l'instrumentum n'offrait plus une faculté de reprise ou d'échange et la revalorisation du capital investi, les juges du fond n'ont pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations et ont violé les textes susvisés" ;


Et sur le moyen unique de cassation, proposé pour René Y... et pris de la violation des articles 121-1 et 121-3 du Code pénal, 36 et suivants de la loi n° 83-1 du 3 janvier 1983 modifiée, 26 et 27 de la loi n° 85-1321 du 14 décembre 1985, L. 550-1 à L. 550-5 et L. 573-8 du Code monétaire et financier, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;


"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré René Y... coupable d'avoir méconnu les obligations des articles 37 à 39 de la loi du 3 janvier 1983 relatives à la surveillance des placements ;


"aux motifs que : "sur la loi du 3 janvier 1983 : la loi du 14 décembre 1985 modifiait en partie la loi n° 83-1 du 3 janvier 1983 sur le développement des investissements et la protection de l'épargne à laquelle était soumise "toute personne qui, directement ou indirectement par voie (...) de démarchage, propose à titre habituel à des tiers (...) d'acquérir des droits (...) sur des biens mobiliers lorsque les acquéreurs n'en assurent pas eux-mêmes la gestion ou lorsque le contrat offre une faculté de reprise ou d'échange et la revalorisation du capital investi" ; "toute personne qui recueille des fonds à cette fin" ; l'activité des personnes visées à l'article 36 de la loi du 3 janvier 1983, ainsi modifié et repris ci-dessus, était soumise au contrôle de la COB qui examinait notamment la conformité des documents contractuels avec la législation et s'assurait que la société présentait "le minimum de garanties exigé d'un placement destiné au public" ; il ressort de la suppression de la clause de rachat, à partir de 1987, que Robert X... n'ignorait pas ces circonstances ; il a d'ailleurs indiqué, tant en première instance que devant la Cour que le caractère coûteux de l'opération l'avait dissuadé de poursuivre plus avant les démarches entamées en ce sens, auprès de la COB ; ces déclarations ont été confirmées par Alain Z..., lors de l'enquête ; c'est donc en connaissance qu'il a agi, un simple report au texte visé démontrant qu'il entrait bien, en tant qu'auteur, directement ou indirectement, dans le champ de la loi de 1983 modifiée ; cette loi, dans sa rédaction première, débordait du simple cadre du démarchage à domicile et édictait des mesures s'étendant de l'appel public à l'épargne à la mise en place des sociétés anonymes ; banquiers ou assureurs, René Y..., Alban D... et Alain E... ne pouvaient ignorer la portée de ce texte visant à sécuriser l'épargne ;


la modification du 14 décembre 1985, qui renforçait la réglementation en matière de démarchage à domicile ne pouvait pas plus être ignorée de ces professionnels, dont l'activité habituelle se déroulait, pour partie, aux domiciles des particuliers avec lesquels ils contractaient ; au surplus, alors qu'ils reconnaissaient l'aspect particulièrement porteur de l'argument du rachat, ces commerciaux reconnus ne peuvent se retrancher derrière une simple consigne de leur donneur d'ordre, quelle que soit leur confiance en lui, pour justifier l'abandon, sans questionnement de leur part, de cette mention dans les contrats souscrits ultérieurement à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi ; c'est donc sciemment que René Y..., Alban D... et Alain E..., personnes visées à l'article 36-2 de la loi de 1983, ont méconnu les dispositions des articles 37 et suivants de la même loi ; il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que le tribunal a déclaré Roland X..., René Y..., Alban D... et Alain E... coupables des faits qui leur sont reprochés ; les peines prononcées seront confirmées, les premiers juges les ayant justifiées tant au regard de la gravité des faits que de la personnalité des prévenus, par des motifs pertinents que la Cour adopte" (arrêt, pages 36 et 37) ;




"et aux motifs, adoptés des premiers juges, que : "le 16 mai 1983 a été constituée entre plusieurs membres de la famille X..., Claude F... et Alain Z..., la SARL Diamants F...
Z... Bretagne-Normandie, ayant pour objet le négoce de pierres précieuses et bénéficiant de la concession exclusive consentie par la SA DDS France sur la Bretagne et la Basse Normandie dans le cadre du groupe conseil Z... ; Claude F... ayant quitté la société, celle-ci prenait le 30 novembre 1984 la dénomination de SARL Groupe Conseil Z... Bretagne-Basse Normandie ; en 1986, la SA DDS était dissoute ; la SARL élargissait ses activités par la vente de pièces antiques puis par une activité de ventes d'immeubles ; en 1988, la SARL devenait la SARL Comptoir des Objets Précieux (COP) et s'approvisionnait directement à Anvers ; suite à une assignation de l'URSSAF, la SARL COP était mise en redressement judiciaire le 5 février 1991 puis en liquidation de biens le 5 mars 1991 ; une clôture pour insuffisance d'actif intervenait le 3 septembre 1996 ; la COP proposait, pour la période visée à la prévention, à ses clients, deux types de contrats de vente avec option de rachat ; pour un investissement inférieur à 100 000 francs le rachat pouvait intervenir entre la deuxième et la quatrième année de placement ; pour les sommes égales ou supérieures à 100 000 francs, il s'agissait de contrats de 5 ans avec rachat annuel partiel et rachat du solde au prix initialement investi, à l'échéance du contrat ; il y avait application d'une plus value lors des rachats, les pièces anciennes ainsi négociées étaient accompagnées d'un certificat d'authenticité délivré par "Nomisma SARL banque des monnaies" ; ces certificats décrivaient les pièces et faisaient référence à des valeurs d'estimation d'experts lors de ventes antérieures ; les pierres précieuses étaient accompagnées d'un certificat délivré par l'IGI (International Gemmological Institute) à Anvers, qui donnait les caractéristiques de ces pierres et d'une attestation de prix délivrée par GSC Bretagne Basse Normandie, prix de vente TTC, portant la mention "suivant nos tarifs", ou "sur la base de notre tarif en vigueur à ce jour" et l'indication ; "le présent certificat constitue une estimation valeur de remplacement" ; en fait les prix ainsi annoncés ne correspondaient nullement à la valeur négociable de la pierre ou de la pièce ; dans un premier temps, les contrats ont pu être honorés mais rapidement il s'est avéré que les rachats partiels et rachats de soldes ne pouvaient être réglés que par les sommes provenant de la souscription de nouveaux contrats ; la SARL ayant été mise en liquidation de biens, de nombreux clients n'ont perçu aucun règlement ou des règlements partiels et ont constaté que les pierres ou pièces qu'ils détenaient ne pouvaient être revendues qu'à un prix en moyenne inférieur au vingtième du prix d'achat initial ;




Roland X... a reconnu qu'il n'ignorait pas, à partir de 1987, que les prix de vente qu'il pratiquait étaient largement supérieurs à la valeur marchande des pierres et pièces concernées ; il a prétendu que les acheteurs étaient prévenus de ce fait lors de la négociation ;


cependant au cours de l'enquête, les très nombreux clients interrogés ont contesté ce point ; en fait l'opération était présentée comme un investissement donnant lieu à versement d'intérêts ; cela est attesté par des lettres versées par de nombreux clients faisant état d'une majoration de "10 % l'an" ; ainsi, les personnes qui ont contracté avaient la certitude de pouvoir percevoir un pourcentage du capital placé et non l'espérance d'un capital augmentant en fonction des cours et dégageant des bénéfices lors de la revente ; la SARL ne disposait pas de fonds propres pour effectuer les rachats ;


les opérations ne pouvaient produire de bénéfices en raison de la surévaluation des pierres et pièces ; Roland X..., bien que sachant la situation de la SARL a poursuivi ses activités en profitant de la confiance créée par les premières séries d'opérations menées à bonne fin et en s'appuyant sur des collaborateurs qui en raison de leurs activités professionnelles antérieures ou de leurs liens avec certains clients inspiraient cette même confiance et conduisaient les acheteurs à signer des conventions avant même de voir ce qu'ils allaient acquérir ; ainsi, Roland X... a poursuivi une activité de négoce de pierres et de pièces antiques alors d'une part qu'il avait connaissance de la surévaluation de ces objets et du caractère trompeur des attestations de prix délivrées aux clients et que d'autre part la situation financière de la société ne lui permettait plus de faire face à ces engagements ; Roland X... a directement participé à ces opérations en sollicitant les certificats litigieux et en établissant lui-même des attestations de prix ; par ailleurs la loi du 14 décembre 1985 qui modifiait la loi du 3 janvier 1983 concernant la surveillance des opérations de placement imposait un régime de contrôle par la commission des opérations de bourse pour toute personne qui, notamment par le procédé du démarchage, proposait à des tiers d'acquérir des biens mobiliers avec faculté de reprise et revalorisation du capital et à toute personne recueillant les fonds à cette fin ; Roland X..., connaissant cette législation, avait supprimé à partir de 1987 la clause de rachat dans les contrats qu'il proposait mais cette possibilité d'investissement demeurait clairement proposée aux clients par Roland X... et ses collaborateurs ; les formalités prévues par la loi du 14 décembre 1985 n'ont pas été remplies par Roland X... ; les garanties demandées par la COB n'avaient pu être fournies ; tous les prévenus, professionnels des placements et investissements, n'ignoraient pas cette législation et ont en connaissance de cause présenté et fait souscrire des opérations sans respecter les dispositions de la loi ; Henri A..., gérant de la société Nomisma (dont l'activité consistait dans l'achat et la revente de pièces) fournissait à Roland X... des estimations de valeur ; il a reconnu lors de ses interrogatoires que ces estimations correspondaient à des catalogues de vente aux enchères mais que les ventes se réalisaient le plus souvent à des prix inférieurs ; il n'ignorait pas le procédé de placement employé par Roland X... car il avait lui même été gérant d'une SARL Groupe Conseil Z... Pays de Loire dans le cadre d'une concession par la SA DDS ; de plus il ressort des débats à l'audience que des clients ont été mis en contact direct avec Henri A... dans le cadre de contrats de la SARL COP (par exemple avec Mme G...) ;




Joseph H..., salarié de la COP, a participé personnellement à plusieurs opérations et a démarché des clients ; selon René Y..., il était au courant de la surévaluation des pierres ; Alain D... avait un statut d'agent commercial et disposait de ce fait d'une certaine autonomie ; il avait été avisé par Roland X... qu'il y avait un problème au niveau des contrats mais il ne s'est pas inquiété de ce point et a continué à démarcher des clients ; Alain E... était également agent commercial et exerçait par ailleurs une activité d'agent d'assurance et de conseiller en placement ; Mme I... a reconnu que Roland X... lui avait demandé de ne plus parler d'intérêts mais de plus-values ; qu'elle ne s'était pas inquiétée de la légalité des contrats à la négociation desquels elle a participé, ses seuls doutes portant sur la valeur des pierres ; René Y... a reconnu que les clients souhaitaient bénéficier de rentrées d'argent et d'une rentabilité immédiate que les arguments de vente ont toujours été axés sur ces objectifs ;




qu'en conséquence, il conviendra de retenir la culpabilité de Roland X..., d'Alain E..., de René Y..., d'Alban D..." (jugement, pages 32 à 35) ;


"alors que les formalités prévues par les articles 37 à 39 de la loi n° 83-1 du 3 janvier 1983, dans leur rédaction issue de la loi n° 85-1321 du 14 décembre 1985, devenus les articles L. 550-3 à L. 550-5 du Code monétaire et financier, ne sont requises, sous la sanction de l'article 40 de la loi, devenu l'article L. 573-8 dudit Code, que lorsque le contrat proposant à des tiers d'acquérir des droits sur des biens mobiliers ou immobiliers offre une faculté de reprise ou d'échange et la revalorisation du capital investi ; que, dès lors, en déclarant le demandeur coupable d'avoir, de 1988 à 1990, méconnu les dispositions légales susvisées, tout en relevant, par motifs propres et adoptés des premiers juges, qu'à partir de 1987, Roland X... avait fait supprimer la clause de rachat dans les contrats proposés aux clients, ce dont il résultait que lesdits contrats, auraient-ils caractérisé une escroquerie au préjudice des clients, en ce que ces derniers étaient convaincus de l'existence d'une telle faculté de rachat en réalité inexistante, n'étaient pas soumis aux obligations légales susvisées, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé les textes susvisés" ;


Les moyens étant réunis ;


Vu l'article 593 du Code de procédure pénale, ensemble les articles L. 550-1 à L. 550-4 du Code monétaire et financier ;


Attendu que le juge répressif ne peut prononcer une peine sans avoir relevé les éléments constitutifs de l'infraction qu'il réprime ;


Attendu que, pour déclarer Roland X... et René Y... coupables d'infraction aux articles L. 550-1 à L. 550-4 du Code monétaire et financier, organisant le démarchage pour proposer à des tiers d'acquérir des biens mobiliers par le moyen de contrats offrant une faculté de reprise du capital investi, l'arrêt prononce par les motifs repris aux moyens ;


Mais attendu qu'en l'état de ces énonciations qui établissent que Roland X... avait, à partir de 1987, fait supprimer la clause de rachat dans les contrats de vente de pierres précieuses qu'il proposait, ainsi que René Y..., à ses clients, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a méconnu les textes susvisés ;


D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs,


CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Rennes en date du 20 février 2003, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi ;


RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Rouen, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;


ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Rennes et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé.


Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;


Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Desgrange conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;


Greffier de chambre : Mme Lambert ;


En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

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