25 mars 1991
Cour de cassation
Pourvoi n° 89-16.686

Première chambre civile

Texte de la décision

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société anonyme régionale d'HLM de Poitiers, dont le siège social est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 22 mars 1989 par la cour d'appel de Poitiers (chambre civile-2ème section), au profit :

1°/ de M. X..., demeurant ...,

2°/ de la société anonyme Bureau Véritas, dont le siège social est 17 bis, place des Reflets, La Défense à Courbevoie (Hauts-de-Seine),

3°/ du Groupement de Maîtrise d'Oeuvre de Rick, X..., SECOBA, représenté par son mandataire commun M. de Rick, demeurant en cette qualité 2, rue du Réservoir à Saint-Maur des Fossés (Val-de-Marne),

4°/ de la société Soletco, société anonyme d'ingénieurs conseils, dont le siège social est à La Villedieu du Clain (Vienne),

5°/ de la société Dalla Vera, dont le siège social est ...,

défendeurs à la cassation ;

La société Dalla Vera a formé un pourvoi incident contre l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers ;

La société d'HLM de Poitiers, demanderesse au pourvoi principal, invoque à l'appui de son recours les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

La société Della Vera, demanderesse au pourvoi incident, invoque à l'appui de son recours le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 20 février 1991, où étaient présents : M. Jouhaud, président, M. Pinochet, rapporteur, MM. Viennois, Lesec, Kuhnmunch, Fouret, Mabilat, Mme Lescure, conseillers, M. Charruault, conseiller référendaire ; Mme Flipo, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. le conseiller Pinochet, les observations de Me Odent, avocat de la société anonyme régionale d'HLM de Poitiers, de la SCP Vier et Barthélémy, avocat de M. X..., de Me Mattéi-Dawance, avocat de la société anonyme Bureau Véritas, de Me Boulloche, avocat du Groupement de Maîtrise d'Oeuvre de Rick, X..., Secoba, de la SCP Célice et Blancpain, avocat de la société Soletco, de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat de la société Dalla Vera, conclusions de Mme Flipo, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, que pour le début de l'année 1974, la société régionale d'habitations à loyer modéré de Poitiers (la société d'HLM) a chargé la société Soletco de l'étude du sous-sol d'un terrain sur lequel elle

envisageait de construire un ensemble immobilier ; qu'au vu du rapport de cette société, la construction a été entreprise ; que des fouilles exécutées par la société Della Vera, chargée des fondations, ont fait apparaître des cavités souterraines dont l'existence n'avait pas été révélée par l'étude du sol et qui ont nécessité l'arrêt du chantier et la confortation des fondations ; que, au vu du rapport d'un expert commis en référé, la société d'HLM a assigné la société Soletco, la société Dalla Vera, le groupement

de maîtrise d'oeuvre de Ryck, X... et Secoba (le groupement) ainsi que le bureau Véritas, en paiement du surcoût des fondations ; que la société Dalla Vera a demandé à la société d'HLM, à la société Soletco, au groupement et au bureau Véritas réparation du préjudice résultant pour elle de l'arrêt du chantier ; que les demandes ont été rejetées par l'arrêt infirmatif attaqué ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de la société Dalla Vera, pris en ses deux premières branches :

Attendu que cette société fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande dirigée contre la société d'HLM alors que, d'une part, en statuant comme elle a fait, la cour d'appel n'aurait pas tiré les conséquences légales de ses constatations selon lesquelles l'attitude adoptée par le maître de l'ouvrage n'était pas étrangère à l'incident relatif à la découverte imprévue des cavités souterraines, alors que, d'autre part, en se bornant à relever que le maître de l'ouvrage aurait consenti une prolongation des délais contractuels et payé le coût des travaux supplémentaires, au lieu de vérifier si l'entreprise avait subi un préjudice distinct résultant de l'immobilisation de son personnel et de son matériel, les juges du second degré auraient privé leur décision de base légale ;

Mais attendu que les juges du second degré ont estimé, dans l'exercice de leur pouvoir souverain d'appréciation des éléments de la cause, que la société Dalla Vera ne rapportait pas la preuve d'une faute du maître de l'ouvrage ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en ses deux premières branches ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal de la société d'HLM :



Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que pour rejeter la demande dirigée par la société d'HLM contre la société Soletco, l'arrêt attaqué a retenu que cette société n'avait manqué à aucune de ses obligations contractuelles, l'accident de terrain, imprévisible, n'ayant pas été révélé par ses sondages ;

Attendu qu'en se déterminant par ces motifs après avoir énoncé que la société Soletco, par contrat du 27 janvier 1974, s'était engagée à réaliser une étude géotechnique sur le terrain aux fins de permettre une adaptation au sol des fondations des ouvrages à construire, et que, d'après les constatations de l'expert judiciaire, les puits avaient été creusés à une profondeur n'excédant pas le niveau auquel devaient être effectuées les fouilles, malgré des règles de l'art recommandant de les creuser à une profondeur supérieure, la cour d'appel s'est contredite et, partant, a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen du pourvoi principal et la troisième branche du moyen unique du pourvoi incident :

Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que pour débouter, en infirmant le jugement entrepris sauf en ce qui concerne l'entreprise Dalla Vera, la société d'HLM de sa demande dirigée contre cette société, le groupement, le bureau Véritas, et l'entreprise Dalla Vera de sa demande dirigée contre la société Soletco, le groupement et le bureau Véritas, la cour d'appel n'a donné aucun motif à sa décision et, partant, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la société d'HLM de ses demandes dirigées contre la société Soletco, le Groupement, le bureau Véritas et l'entreprise Dalla Vera, de sa demande dirigée contre la société Soletco, le groupement et le bureau Véritas, l'arrêt rendu le 22 mars 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne M. X..., les sociétés Bureau Véritas, Soletco et le Groupement de maîtrise d'oeuvre de Rick, X..., Secoba, aux dépens ceux avancés par la société d'HLM de Poitiers à la somme de deux cent quatre vingt huit francs seize centimes, ceux avancés par la société Dalla Vera, liquidés à la somme de cinq cent quarante huit francs trois centimes, et aux frais d'exécution du présent arrêt ;

Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Poitiers, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt cinq mars mil neuf cent quatre vingt onze.

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