14 avril 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-81.196

Chambre criminelle - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:CR00484

Titres et sommaires

ATTEINTE A L'ACTION DE JUSTICE - Entrave à la saisine de la justice - Non-dénonciation d'agressions sexuelles sur mineurs - Eléments constitutifs - Obligation de dénonciation - Etendue - Cas - Prescription de l'action publique portant sur les faits - Effets - Maintien de l'obligation de dénonciation

L'obligation de dénonciation, prévue par l'article 434-3 du code pénal, subsiste, même s'il apparaît à celui qui a connaissance des faits sur laquelle elle porte que ceux-ci sont prescrits

Texte de la décision

N° V 20-81.196 FS-P

N° 00484


SL2
14 AVRIL 2021


REJET


M. SOULARD président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 14 AVRIL 2021



REJET du pourvoi formé par MM. [P] [J], [F] [P], [P] [P], [T] [S], [S] [T], [W] [V], [R] [F] et [C] [I], parties civiles, contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, 4e chambre, en date du 30 janvier 2020, qui, dans la procédure suivie sur citation directe, a déclaré irrecevable leur action contre M. [H] [C], pour le délit d'omission de porter secours, relaxé celui-ci pour le délit de non-dénonciation d'agressions sexuelles sur mineurs et statué sur l'action civile.

Un mémoire et des observations complémentaires en demande et un mémoire en défense ont été produits.

Sur le rapport de M. de Larosière de Champfeu, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de MM. [P] [J], [F] [P], [P] [P], [T] [S], [S] [T], [W] [V], [R] [F] et [C] [I], parties civiles, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [H] [C], et les conclusions de M. Petitprez, avocat général, les avocats ayant eu la parole en dernier, après débats en l'audience publique du 17 mars 2021 où étaient présents M. Soulard, président, M. de Larosière de Champfeu, conseiller rapporteur, Mme Slove, M. Guéry, Mmes Sudre, Issenjou, M. Turbeaux, conseillers de la chambre, Mmes Carbonaro, Barbé, M. Mallard, conseillers référendaires, M. Petitprez, avocat général, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Le 17 juillet 2014, M. [F] a écrit au directeur de cabinet de M. [C], archevêque de [Localité 1] depuis 2002, pour dénoncer des faits d'agressions sexuelles dont il avait été victime, au cours de son enfance, avec d'autres jeunes gens, de la part de M. [U], prêtre du diocèse de [Localité 1], curé de paroisse, aumônier d'un établissement catholique et aumônier d'unité scoute.

3. Plusieurs rencontres ont ensuite eu lieu entre M. [F], M. [C], et plusieurs de ses collaborateurs. M. [C] a déchargé M. [U] de ses fonctions de curé, puis, le 29 juillet et le 31 août 2015, lui a interdit tout ministère sacerdotal et toute activité comportant des contacts avec des mineurs.

4. Le 5 juin 2015, M. [F] a déposé plainte contre M. [U], pour agressions sexuelles sur mineurs de quinze ans par personne ayant autorité, devant le procureur de la République à Lyon, lequel a ouvert une information judiciaire, le 25 janvier 2016. D'autres victimes ont été identifiées. M. [U], qui a reconnu avoir procédé à des attouchements sexuels sur de nombreux enfants, jusqu'en 1991, a été renvoyé devant le tribunal correctionnel, par ordonnance du 29 octobre 2019.

5. Le 17 février 2016, MM. [S] et [B], tous deux victimes de M. [U], ont déposé, devant le juge d'instruction saisi du dossier dans lequel M. [U] était mis en examen, une plainte pour non-dénonciation d'agressions sexuelles sur des mineurs et omission de porter secours, afin que la responsabilité de certains des membres du diocèse de [Localité 1] puisse être recherchée. Le juge d'instruction a communiqué la plainte au procureur de la République, qui a décidé l'ouverture d'une enquête préliminaire, le 26 février 2016. A l'issue de celle-ci, il a procédé à un classement sans suite, le 1er août 2016.

6. Par actes des 23 mai, 1er juin et 17 juillet 2017, MM. [S], [F], [T], [B], [P] [P], [F] [P], [V], [I], [J], indiquant avoir été victimes d'agressions sexuelles commises par M. [U], ont fait citer devant le tribunal correctionnel de Lyon M. [C] et plusieurs de ses collaborateurs.

7. M. [C] a ainsi été cité pour omission de porter secours, de 2002 à 2015, pour avoir laissé des enfants et adolescents être au contact de M. [U] et les avoir ainsi exposés à des agressions sexuelles, et pour non-dénonciation d'agressions sexuelles sur mineurs, au cours de la même période.

8. Par jugement du 7 mars 2019, le tribunal correctionnel de Lyon a déclaré irrecevable l'action des parties civiles, s'agissant de l'infraction d'omission de porter secours. Le tribunal a relaxé les collaborateurs de M. [C], ou jugé que l'action publique était éteinte par prescription à leur égard. Le tribunal correctionnel a retenu, en ce qui concerne M. [C], que l'infraction de non-dénonciation d'agressions sexuelles n'était pas constituée pour la période antérieure à 2010, que l'action publique était éteinte par prescription, depuis 2013, pour la non-révélation d'une agression dont il avait eu connaissance en 2010, et l'a déclaré coupable des faits de non-dénonciation des agressions sexuelles qui lui avaient été révélées à partir de juillet 2014 et jusqu'au 5 juin 2015. Le tribunal l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis. Il a prononcé sur les intérêts civils.

9. Ce jugement a été frappé d'appel par M. [C] et par les parties civiles, ainsi que par le ministère public, à titre incident.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

10. Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré prescrits les faits de non-dénonciation d'agressions sexuelles sur mineurs commis en mars 2010, alors :

« 1°/ que le délit de non-dénonciation d'atteintes et d'agressions sexuelles sur mineur prévu par l'article 434-3 du code pénal est une infraction continue ou successive, qui est constituée dès la connaissance des faits, laquelle fait naître l'obligation de les dénoncer, et perdure ou se renouvelle tant qu'il n'a pas été satisfait à cette obligation ; que le point de départ de la prescription doit donc être fixé au jour où ce délit cesse, c'est-à-dire soit au jour de la dénonciation des faits soit au jour de la disparition de l'obligation de dénonciation ; que, dès lors, en énonçant, pour déclarer prescrits les faits de non-dénonciation qui auraient été commis en mars 2010, que le délit de non-dénonciation est un délit instantané se prescrivant par trois ans à compter de la commission des faits, et qu'en l'absence d'acte interruptif de prescription intervenu avant le 26 février 2016, les faits antérieurs au 26 février 2013 sont prescrits, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs erronés et a violé les articles 7, 8 du Code de procédure pénale et 434-3 du code pénal dans leur rédaction applicable à l'époque des faits ;

2°/ que le point de départ de la prescription du délit de non-dénonciation prévu par l'article 434-3 du code pénal doit être fixé soit au jour de la dénonciation des faits soit au jour de la disparition de l'obligation de dénonciation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel relève qu'en mars 2010, M. [C] a été précisément informé que M. [U] avait commis des agressions sexuelles sur M. [S] lorsque celui-ci était âgé de 11 ans, et qu'il ne les a pas dénoncées ; qu'il ressort par ailleurs de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que ces faits d'agressions sexuelles, non prescrits, ont été découverts à l'occasion de l'enquête préliminaire ouverte le 15 juillet 2015, portant sur les faits reprochés à M. [U], et qu'ils ont été dénoncés par M. [S] lui-même par une plainte du 20 octobre 2015 ; qu'en déclarant ces faits de non-dénonciation prescrits, lorsque la prescription n'avait pu commencer à courir avant l'ouverture de cette enquête, la cour d'appel a violé les articles 7, 8 du code de procédure pénale et 434-3 du code pénal dans leur rédaction applicable à l'époque des faits ;

3°/ que subsidiairement et en tout état de cause, le délit de non-dénonciation prévu par l'article 434-3 du code pénal est une infraction clandestine ; qu'en énonçant, pour retenir le contraire et déclarer les faits de non-dénonciation de mars 2010 prescrits, que « l'infraction à dénoncer était tout de même connue par la victime », lorsque la connaissance par la victime des agressions sexuelles dont elle a fait l'objet n'implique pas celle du délit de non-dénonciation commis à son préjudice et qu'il ressortait des pièces de la procédure qu'en l'espèce ce n'était qu'au cours de l'année 2015 que M. [S] avait eu connaissance des faits de non-dénonciation commis à son encontre par M. [C] depuis le 31 mars 2010, la cour d'appel a violé les articles 7, 8 du code de procédure pénale et 434-3 du code pénal dans leur rédaction applicable à l'époque des faits ;

4°/ qu'enfin, le délai de prescription du délit de non-dénonciation prévu par l'article 434-3 du code pénal court à compter du jour où le délit est apparu et a pu être constaté dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique ; que, dès lors, en déclarant prescrits les faits de non-dénonciation commis au préjudice de M. [S], lorsqu'il ressort des énonciations de l'arrêt et des pièces de la procédure que ces faits, pour lesquels M. [S] et une autre partie civile ont déposé plainte le 17 février 2016, avaient été mis au jour à l'occasion de l'enquête préliminaire ouverte le 15 juillet 2015 à l'encontre M. [U], ce dont il se déduisait que le délit était apparu dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique au plus tôt au cours du second semestre de l'année 2015, la cour d'appel a violé les articles 7, 8 du code de procédure pénale et 434-3 du code pénal dans leur rédaction applicable à l'époque des faits. »

Réponse de la Cour

11. Il résulte de l'arrêt attaqué que M. [C] a été informé, en mars 2010, que M. [U] avait commis des agressions sexuelles sur M. [S], alors que celui-ci, né en 1979, était âgé de onze ans.

12. Pour déclarer éteinte par prescription l'action publique pour le délit de non-dénonciation, par M. [C], de ces faits aux autorités judiciaires et administratives, la cour d'appel relève que cette infraction est un délit instantané pour lequel la prescription commence à courir au moment où la personne prend connaissance des faits susceptibles de constituer l'infraction principale et ne les dénonce pas, soit, en l'espèce, en mars 2010. Elle ajoute que le délai de prescription de trois ans, alors applicable, n'a pas été interrompu avant l'ouverture, le 26 février 2016, par le procureur de la République, d'une enquête à la suite de la plainte en non-dénonciation, déposée par M. [S]. La cour d'appel retient encore que cette infraction n'avait aucun caractère clandestin, car la victime en avait connaissance et pouvait la dénoncer.

13. En prononçant ainsi, la cour d'appel n'a pas encouru le grief allégué.

14. En effet, le délit de non-dénonciation de mauvais traitement sur mineur, prévu et puni par l'article 434-3 du code pénal, dans sa rédaction applicable en la cause, était un délit instantané dont la prescription courait à compter du jour où le prévenu avait eu connaissance des faits qu'il devait dénoncer.

15. Le moyen, irrecevable en tant qu'il est présenté par les autres demandeurs que M. [S], ne peut, dès lors, être admis.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

16. Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué en ce qu'il a relaxé M. [C] du chef de non-dénonciation d'atteintes et d'agressions sexuelles commis sur mineurs s'agissant des faits postérieurs au 26 février 2013 et d'avoir débouté les parties civiles de leurs demandes indemnitaires, alors :

« 1°/ que l'article 434-3 du code pénal, dans sa version applicable à l'époque des faits, et dès lors que la loi n°2016-297 du 14 mars 2016, qui a précisé que l'obligation de dénonciation prévue par ce texte porte également sur les agressions sexuelles, revêt sur ce point un caractère interprétatif, réprimait le fait, pour quiconque ayant eu connaissance de privations, de mauvais traitements ou d'agressions ou atteintes sexuelles infligés à un mineur de quinze ans ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique ou d'un état de grossesse, de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives ; que ce texte ne subordonne pas l'obligation de dénonciation des faits infligés au mineur ou à une personne vulnérable à la possibilité de poursuivre ces faits ; que, dès lors, en retenant, pour relaxer le prévenu et débouter certaines parties civiles de leurs demandes indemnitaires, que le délit de non-dénonciation n'était pas constitué s'agissant des faits d'atteintes et d'agressions sexuelles prescrits, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, a méconnu le texte susvisé et l'article 111-4 du code pénal ;

2°/ que l'article 434-3 du code pénal, qui incrimine la non-dénonciation d'infractions qui ont pour caractéristique commune de présenter un risque élevé de réitération, n'a pas pour seule finalité de permettre à la justice de poursuivre l'auteur de ces faits, mais aussi de lui offrir la possibilité de découvrir des faits nouveaux et d'empêcher le renouvellement de l'infraction, sur la même victime ou sur d'autres mineurs ou personnes vulnérables ; qu'il s'ensuit que l'obligation de dénonciation, à laquelle le texte susvisé n'apporte aucune limitation temporelle, subsiste même lorsque les faits principaux ne peuvent plus être poursuivis pour cause de prescription ; que, dès lors, en retenant, pour débouter de leurs demandes indemnitaires les parties civiles ayant été victimes d'agressions sexuelles prescrites, que l'obligation de dénonciation ne saurait être considérée comme juridiquement maintenue lorsque l'infraction principale est prescrite et que l'intérêt protégé par l'article 434-3 du code pénal n'existe plus, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de ce texte et violé l'article 111-4 du code pénal ;

3°/ qu'il résulte de l'article 434-3 du code pénal que la connaissance de faits de privations, de mauvais traitements ou d'agressions ou atteintes sexuelles infligés à un mineur ou à une personne vulnérable emporte l'obligation de les dénoncer aux autorités judiciaires ou administratives, y compris lorsque l'état de minorité ou de vulnérabilité de la victime a cessé ; que, dès lors, en se fondant, pour relaxer le prévenu et débouter les parties civiles de leurs demandes indemnitaires, sur le fait que celles-ci étaient majeures et n'étaient atteintes ni d'une maladie, ni d'une infirmité, ni d'une déficience physique ou psychique au sens de la loi lorsque les faits commis à leur encontre ont été portés à la connaissance du prévenu, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, a méconnu le texte susvisé et l'article 111-4 du code pénal ;

4°/ qu'enfin, l'élément moral du délit de non-dénonciation prévu par l'article 434-3 du code pénal consiste dans le fait de s'abstenir volontairement de dénoncer les mauvais traitements aux autorités judiciaires ou administratives ; qu'en l'espèce, pour retenir que l'élément intentionnel faisait défaut et débouter les partes civiles de leurs demandes indemnitaires, la cour d'appel énonce que le cardinal [C] n'a pas dissuadé M. [F] de porter plainte à l'encontre du père [U] et que les démarches entreprises par MM. [F] et [S] auprès de lui l'avaient été non pour que M. [C] porte plainte contre ce prêtre, mais dans le but qu'il le retire immédiatement de l'exercice de son ministère et de toute activité impliquant des contacts avec des enfants, ce qu'il avait fait même si cela avait pris près d'un an ; qu'en se déterminant ainsi par des motifs inopérants, tenant, d'une part, à l'absence de volonté du prévenu de dissuader les victimes d'agir en justice et, d'autre part, aux motifs ayant conduit celles-ci à l'informer des faits qu'elles avait subis enfants, lorsque la volonté du prévenu de ne pas dénoncer les atteintes et agressions sexuelles commises sur les parties civiles aux autorités judiciaires ou administratives se déduisait du seul fait que celui-ci avait connaissance de ces violences sexuelles et qu'il ne les avait néanmoins jamais dénoncées à ces autorités, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 434-3 du code pénal. »

Réponse de la Cour

17. L'article 434-3 du code pénal, dans sa rédaction applicable au moment des faits, issue de l'ordonnance n° 2000-916 du 16 septembre 2000, réprime le fait, pour quiconque ayant eu connaissance de privations, de mauvais traitements ou d'atteintes sexuelles infligés à un mineur de quinze ans ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique ou d'un état de grossesse, de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives.

18. Cet article est inséré dans une section du code pénal intitulée « Des entraves à la saisine de la justice ». Or, loin de poser un principe général obligeant les particuliers à dénoncer tous les faits délictueux dont ils ont connaissance, principe qui n'est énoncé nulle part ailleurs dans le code pénal, les dispositions contenues dans cette section ne rendent la dénonciation obligatoire que lorsqu'elle est particulièrement nécessaire en raison de certaines circonstances de fait. Comme tout texte d'incrimination, surtout s'il ne découle pas d'un principe général, cette disposition doit être interprétée de manière stricte.

19. Cet article a pour but de lever l'obstacle aux poursuites pouvant résulter de ce que l'âge ou la fragilité de la victime l'ont empêchée de dénoncer les faits. Il en résulte que, lorsque cet obstacle est levé, l'obligation de dénonciation ainsi prévue disparaît.

20. Aussi, la condition, prévue par le texte en cause, tenant à la vulnérabilité de la victime, doit-elle être remplie non seulement au moment où les faits ont été commis, mais encore lorsque la personne poursuivie pour leur non-dénonciation en a pris connaissance.

21. En revanche, tant que l'obstacle ainsi prévu par la loi demeure, l'obligation de dénoncer persiste, même s'il apparaît à celui qui prend connaissance des faits que ceux-ci ne pourraient plus être poursuivis, compte tenu de la prescription de l'action publique. En effet, d'une part, la condition que la prescription ne soit pas acquise ne figure pas à l'article 434-3 du code pénal, d'autre part, les règles relatives à la prescription sont complexes et ne peuvent être laissées à l'appréciation d'une personne qui peut, en particulier, ignorer l'existence d'un acte de nature à l'interrompre.

22. Pour prononcer la relaxe de M. [C], en ce qui concerne la non-dénonciation, par celui-ci, aux autorités administratives et judiciaires, d'agressions sexuelles commises par M. [U], et qui sont parvenues à sa connaissance en 2014 et en 2015, la cour d'appel énonce que son obligation de les dénoncer avait disparu, d'une part, parce que la prescription de l'action publique était acquise quand il avait été informé de leur existence, d'autre part, parce que leurs victimes, alors âgées de trente-quatre à trente-six ans, insérées au plan familial, social et professionnel et ne souffrant pas d'une maladie ou d'une déficience les empêchant de porter plainte, étaient en mesure de faire connaître elles-mêmes ces faits aux autorités administratives et judiciaires.

23. C'est à tort que la cour d'appel a estimé que l'obligation de dénoncer ces agressions sexuelles commises sur des mineurs avait disparu en raison de la prescription de l'action publique.

24. Cependant, la cassation n'est pas pour autant encourue, dès lors que, par des motifs relevant de son appréciation souveraine, la cour d'appel énonce que les victimes étaient, au moment où les faits ont été portés à la connaissance de M. [C], en état de les dénoncer elles-mêmes et que ce seul motif est de nature à justifier la relaxe prononcée.

25. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatorze avril deux mille vingt et un.

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