25 juin 2013
Cour de cassation
Pourvoi n° 12-19.173

Chambre commerciale financière et économique

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2013:CO00662

Titres et sommaires

SOCIETE COMMERCIALE (RèGLES GéNéRALES) - dissolution - liquidateur - action en responsabilité - prescription - point de départ - reconnaissance des droits du créancier - décision passée en force de chose jugée

Le délai de la prescription de l'action en responsabilité engagée par un créancier à l'encontre d'un liquidateur amiable d'une société au titre des fautes qu'il aurait commises dans l'exercice de ses fonctions commence à courir le jour où les droits du créancier ont été reconnus par une décision de justice passée en force de chose jugée, au sens de l'article 500 du code de procédure civile

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :





Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Domaine de Clesseven, qui avait cédé à la société Relais de chasse de Klesseven, par acte du 29 juin 2000, un fonds de commerce incluant le droit au bail des lieux servant à son exploitation, a été dissoute le 30 septembre 2000, Mme X... étant nommée en qualité de liquidatrice ; que la vente du 29 juin 2000 a été annulée par un arrêt du 6 mai 2003, devenu irrévocable à la suite de la non-admission du pourvoi formé contre cette décision ; que faisant valoir que Mme X... avait commis diverses fautes, la société Relais de chasse de Klesseven l'a fait assigner en paiement de dommages-intérêts par acte du 13 novembre 2008 ; que Mme X... lui a opposé la fin de non-recevoir tirée de la prescription triennale applicable à l'action en responsabilité visant le liquidateur ;


Sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche, qui est préalable :


Vu les articles L. 237-12 et L. 225-254 du code de commerce ;


Attendu que pour déclarer recevable l'action de la société Relais de chasse de Klesseven l'arrêt, après avoir relevé que la procédure engagée par cette dernière aux fins d'annulation de la vente du fonds de commerce et de la cession concomitante du droit au bail et de réparation de son préjudice avait donné lieu à un jugement, puis à un arrêt de la cour d'appel et à la non-admission du pourvoi formé contre cet arrêt, retient que la décision définitive sur les droits de cette société à l'encontre de la société Domaine de Clesseven est celle qui ne peut faire l'objet de recours et que tel est le cas de la non-admission du pourvoi formé contre l'arrêt ayant statué sur le préjudice imputable à la société Domaine de Clesseven dont Mme X... a été la liquidatrice amiable ;


Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le délai de la prescription de l'action en responsabilité engagée à l'encontre de Mme X..., au titre des fautes qu'elle aurait commises dans l'exercice de ses fonctions de liquidatrice de la société Domaine de Clesseven, avait commencé à courir le jour où les droits de la société Relais de chasse de Klesseven ont été reconnus par une décision passée en force de chose jugée (au sens de l'article 500 du code de procédure civile), la cour d'appel a violé les textes susvisés ;


Et sur le premier moyen :


Vu l'article 12 du code de procédure civile ;


Attendu qu'après avoir relevé que la publication de la clôture des opérations de liquidation de la société Domaine de Clesseven, intervenue le 26 octobre 2000, avait rendu opposable aux tiers la cessation des fonctions de liquidatrice de Mme X... et après avoir apprécié au regard des dispositions des articles L. 237-12 et L. 225-254 du code de commerce la recevabilité de l'action en responsabilité dirigée contre cette dernière, l'arrêt lui impute diverses fautes, dont le défaut de contestation du congé avec refus de renouvellement délivré par le bailleur le 24 septembre 2007 et la conclusion d'un nouveau bail, en exécution d'un acte du 6 juin 2008 ; que l'arrêt en déduit que ces fautes ont permis à Mme X... et à son époux de récupérer le fonds, sans contrepartie sérieuse ; qu'il condamne ensuite Mme X... à payer à la société Relais de chasse de Klesseven une certaine somme « par application des dispositions de l'article 1382 du code civil » ;


Attendu qu'en statuant ainsi, par une décision qui ne permet pas à la Cour de cassation de déterminer si la responsabilité de Mme X... a été retenue au titre du régime applicable aux personnes investies de la qualité de liquidateur d'une société dissoute ou par application des règles de droit commun en matière de responsabilité civile, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :


CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 décembre 2011, rectifié par arrêt du 3 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;


Condamne la société Relais de chasse de Klesseven aux dépens ;


Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassés ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq juin deux mille treize.



MOYENS ANNEXES au présent arrêt


Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour Mme Y...



PREMIER MOYEN DE CASSATION


Il est fait grief à l'arrêt du 13 décembre 2011, rectifié par l'arrêt du 3 avril 2012 d'AVOIR condamné madame X... à payer à la société Relais de chasse de Klesseven une indemnité de 60.000 ¿ « par application des dispositions de l'article 1382 du code civil » ;


AUX MOTIFS QUE I- la recevabilité ; que madame X... invoque la prescription triennale de L. 237-12 du code de commerce selon lequel : « le liquidateur est responsable, à l'égard tant de la société que des tiers, des conséquences dommageables des fautes par lui commises dans l'exercice de ses fonctions. L'action en responsabilité contre les liquidateurs se prescrit dans les conditions prévues à l'article L. 225-254 » ; que selon l'article L. 225-54 visé par ce texte : « L'action en responsabilité contre les administrateurs ou le directeur général, tant sociale qu'individuelle, se prescrit par trois ans, à compter du fait dommageable ou s'il a été dissimulé, de sa révélation. Toutefois, lorsque le fait est qualifié crime, l'action se prescrit par dix ans » ; que le point de départ du délai de prescription de l'action en responsabilité contre le liquidateur, exercée sur le fondement des dispositions des articles L. 237-2 et L. 225-254 du code de commerce, court à compter du jour où les droits de la victime du fait dommageable imputable au liquidateur sont définitivement reconnus par une décision de justice ; qu'en l'espèce la société Relais de chasse de Klesseven a assigné la société Domaine de Clesseven le 27 décembre 2000 pour obtenir la nullité de la vente du fonds de commerce et la cession de bail conclus avec cette dernière et monsieur Z... ; que par jugement du 2 avril 2002 le tribunal de grande instance de Guingamp faisant droit à cette demande a en conséquence ordonné la restitution du prix et du dépôt de garantie par la société Domaine de Clesseven, soient les sommes respectivement de 158.242,07 ¿ et 17.074,29 ¿ ; que l'arrêt confirmatif de cette cour en date du 6 mai 2003 a fait l'objet d'une non admission du pourvoi le 15 novembre 2005 ; que la cessation des fonctions de madame X..., en qualité de liquidatrice amiable de la société Domaine de Clesseven, est opposable aux tiers du jour où la clôture des opérations liquidatives a été régulièrement publiée, soit en l'espèce le 26 octobre 2000 ; que la procédure tendant à faire reconnaître ses droits c'est-à-dire l'annulation de la vente du fonds et de la cession concomitante du droit au bail et à la réparation du préjudice causé à la société Relais de Chasse de Klesseven a fait l'objet d'un jugement, d'un arrêt de la cour de rennes et de la non admission du pourvoi par la cour de cassation ; que la décision définitive sur les droits de la société Relai de chasse de Klesseven contre la société Domaine de Clesseven résultant de cette annulation est celle qui ne peut plus faire l'objet de recours ; que tel est bien le cas de la non admission du pourvoi frappant l'arrêt de la cour d'appel de Rennes statuant sur le préjudice de la société Domaine de Clesseven dont madame X... a été la liquidatrice amiable ; que l'assignation de madame X..., liquidatrice, ayant été délivrée le 13 novembre 2008 soit moins de trois années après cette non admission du pourvoi prononcée le 15 novembre 2005, l'action en responsabilité contre celle ci n'est pas atteinte par la prescription triennale; que c'est dès lors à juste titre qu'elle a été déclarée recevable par les premiers juges ; que II- le fond ; que A- la demande principale de la société Relais de chasse de Klesseven ; que par acte du 20 février 2000, la SCI Chasse et Loisirs a vendu à Gérald A... 67 hectares de terrains attenant au domaine de chasse exploité en location par la société Domaine de Clesseven ; que par acte du 29 juin 2000 cette dernière a cédé à la société Relais de chasse de Klesseven, d'une part, son fonds de commerce d'élevage, chasse, restauration, location de meublé, centre de loisirs, achat et vente de tous produits de chasse et souvenirs, et, d'autre part son droit au bail sur les lieux d'exploitation loués par M. Z..., pour respectivement 1.038.000F (158.242,08 ¿) et 786.180 F (119.852,37 ¿); qu'à cette occasion, la société Relais de chasse de Klesseven a remboursé à la société Domaine de Clesseven somme de 112.000 F (17.074,29 ¿) au titre de son dépôt de garantie ; que par l'effet de ces actes la société Relais de chasse de Klesseven s'est retrouvée directement ou indirectement à la tête d'un important domaine de chasse à Glomel ; que cependant, le 30 septembre 2000, la société Domaine de Clesseven, était dissoute et madame X..., jusqu'alors gérante, désignée en qualité de liquidatrice amiable ; que la vente du fonds et la cession de bail ont été annulées ; que la société Domaine de Clesseven est définitivement condamnée à restituer le prix de vente de ce fonds (158.242,07 ¿) et à payer divers frais (16.181,55 ¿) outre 1.000 ¿, par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à la société Relais de chasse de Klesseven; que Gérald Z..., bailleur, est lui aussi définitivement condamné à restituer le dépôt de garantie à cette société (17.074,29 ¿) ; que le 23 octobre 2006, la société Relais de chasse de Klesseven, occupante sans droit, était mise en demeure de quitter les lieux qu'elle louait à Gérald Z... puis son expulsion était ordonnée en référé le 14 février 2007 avec fixation d'une indemnité d'occupation ; que pour le paiement de cette indemnité, la société Domaine de Clesseven faisait pratiquer des saisies attribution au préjudice de la société Relais de chasse de Klesseven les 14 mars et 27 avril 2007 ; que le bailleur donnait congé à la société Domaine de Clesseven, redevenue locataire, et la sommait d'exécuter divers travaux ; le bailleur recevait à cette fin la somme de 64.000 ¿ ; que la société Relais de chasse de Klesseven quittait les lieux le 15 janvier 2008 puis faisait pratiquer diverses saisies attribution en août 2008 au préjudice de la société Domaine de Clesseven pour garantir la restitution du prix de vente du fonds de commerce ; que la société Relais de chasse de Klesseven a finalement perçu 88.848,22 ¿ le 21 septembre 2009 ; que recherchant la responsabilité de madame X..., liquidatrice de la société Domaine de Clesseven, la société Relais de chasse de Klesseven lui fait grief d'avoir : - précipité la clôture des opérations liquidatives et ainsi contraint la société Relais de chasse de Klesseven a faire pratiquer notamment entre les mains des notaires chargés de la vente du fonds une saisie conservatoire sur le prix déjà sérieusement entamé ; - continué ses fonctions après la clôture officielle des opérations liquidatives ; - omis sciemment de contester le congé donné par le bailleur le 24 septembre 2007 alors qu'elle continuait d'agir comme liquidatrice et qu'aucun motif grave ne justifiait ce congé ; - au mépris de ses droits puisque ce bail, les meubles et la licence d'exploitation de débits de boissons faisaient partie du fonds de commerce, acquis personnellement et avec son époux gratuitement ou sans contrepartie sérieuse, le 19 juillet 2008, outre cette licence et les meubles garnissant les lieux, un droit au bail concernant les mêmes biens que ceux loués par la société Domaine de Clesseven dont elle était liquidatrice, en violation de l'article L237-7 du Code de Commerce qui interdit au liquidateur la cession de tout ou partie de l'actif de la société en liquidation à lui même ou à ses employés ou à leurs conjoint, ascendants ou descendants, avant de céder à son tour ce droit à des tiers le 5 août 2008 pour le prix de 220.000 ¿ ; que la société Relais de chasse de Klesseven soutient que ces fautes ont entraîné à ses dépens le transfert de l'ensemble des biens compris dans le fonds de commerce alors que le prix de vente ne lui en a toujours pas été restitué ; qu'elle évalue son préjudice au montant de ce prix de vente (158.242,08 ¿) augmenté des intérêts au taux légal depuis le jugement du 2 avril 2002, soit un total de 333.166 ¿ arrêté au 25 juin 2009, diminué de la somme de 88.648,22 ¿ déjà versée ; que madame X... soutient au contraire que : - la dissolution de la société Domaine de Clesseven et la clôture le même jour des opérations liquidatives régulièrement publiées sont intervenues après la cession du fonds de commerce et du droit au bail, seuls éléments d'actifs de la société, et sans qu'il y eût fraude de la liquidatrice, rien ne laissant prévoir l'action en nullité ensuite intentée ; - la contestation du congé donné par le bailleur à la société Domaine de Clesseven pour inexécution des travaux était inutile puisque la suspension des effets de la clause résolutoire mise en jeu pour ce même motif avait été déjà obtenue en référé ; - ce congé était la suite logique des annulations intervenues alors que la société Domaine de Clesseven se maintenait dans les lieux sans régler ni loyers ni indemnité d'occupation, et que, désormais inexploité, le fonds lui même périclitait ; - que le protocole transactionnel conclu entre les époux X... et le bailleur le 6 juin 2008, c'est-à-dire après l'expulsion de la société Domaine de Clesseven, tirait les conséquences de cette situation et permettait la conclusion d'un nouveau bail notarié le 19 juillet 2008, sans fraude de quiconque, les biens, les objets mobiliers, les conditions financières notamment étant différents ; que la cession à un tiers le 5 août 2008 de ce nouveau bail dont ils étaient juridiquement titulaires, s'explique par le souhait des époux X... de se retirer en raison de leur âge ; que la licence visée dans la cession du fonds en 2000 était périmée faute d'exploitation de sorte qu'elle n'avait aucune valeur marchande et que l'obtention d'une nouvelle licence de débits de boissons par les nouveaux locataires exploitants n'a pu spolier la société Relais de chasse de Klesseven ; que le matériel cédé au tiers était composé de celui mentionné dans l'acte pour 18.000 ¿, appartenant en propre aux époux X..., compris un tracteur acquis au prix de 12.000 ¿ et de celui, dépourvu de toute valeur faute d'entretien, abandonné par le bailleur ; qu'après avoir fourni en février 2000 des indications gravement erronées sur le nombre d'actions de chasse qui ont entraîné l'annulation pour dol des actes de vente et cession conclus avec la société Relais de chasse de Klesseven, la société Domaine de Clesseven a délibérément quelques semaines seulement après ces actes précipité sa dissolution et la clôture des opérations liquidatives le même jour alors que ces manouvres rendaient très prévisibles une réaction de l'acquéreur cessionnaire ; que cette précipitation a permis à la société Domaine de Clesseven de disposer des fonds correspondant au prix de vente au mépris des droits de la société Relais de chasse de Klesseven, le notaire entre les mains duquel la saisie a été faite ayant indiqué qu'il n'en restait que la moitié ; que redevenu titulaire du bail, la liquidatrice, a poursuivi sa mission et a omis d'en contester le congé tout en déployant beaucoup d'activité pour ensuite tirer profit personnellement des conséquences de ce congé et de l'annulation ; que tout en affirmant qu'elle tenait ce droit de la société Domaine de Clesseven, elle a en effet conclu, avec son époux, un « nouveau » bail moyennant une faible contrepartie (80.000 ¿) sur les mêmes biens pour l'essentiel ainsi qu'il est mentionné à l'article 1er du protocole du 6 juin 2008, et l'a cédé presque immédiatement pour un coût presque trois fois supérieur ; que par ce moyen, tout en perdant le fonds auquel ce bail était attaché, la société Relais de chasse de Klesseven, a été privée des droits résultant de ce bail et de sa rupture dans l'intérêt personnel de la liquidatrice ; que contrairement aux affirmations de madame X..., l'obtention en référé d'une suspension des effets de la clause résolutoire du bail, dont le but était de procurer des délais de paiement, ne dispensait en rien celle ci de contester le refus de renouvellement qui remettait directement en cause les droits de la société Relais de chasse de Klesseven tirés de ce bail ; que ces faits ont entraîné pour la société Relais de chasse de Klesseven la perte du fonds et du droit au bail sans aucune contrepartie, alors que la restitution des fonds perçus par les notaires n'a pu à ce jour avoir lieu, la société Domaine de Clesseven ayant perdu la totalité de son patrimoine ; que la péremption de la licence étant due à l'inexploitation du fonds par les époux X..., après le départ de la société Relais de chasse de Klesseven, alors que cette licence ne devait son existence qu'à l'activité de la société Relais de chasse de Klesseven, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que la cession de cette licence, incluse dans le fonds, aux époux Le Gall avait lésé cette société ; qu'il en résulte qu'au total, grâce aux fautes de madame X..., le fonds a pu être récupéré par elle même et son époux, sans contrepartie sérieuse, dans la totalité de ses éléments comprenant le droit au bail et la licence ; que cette opération réalisée aux dépens de la société Relais de chasse de Klesseven, justifie en principe sa demande de réparation dirigée contre la liquidatrice ; que tenant compte de la valeur du fonds et des sommes perçues par la société Relais de chasse de Klesseven, le préjudice sera évalué à 60.000 ¿ ;


ALORS QU'il appartient au juge de déterminer le régime de responsabilité applicable à la demande de dommages-intérêts dont il est saisi ; qu'après avoir retenu que la demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de madame X... était soumise à la prescription triennale résultant des dispositions de l'article L. 237-12 du code de commerce, qui régissent l'action en responsabilité contre les personnes investies de la qualité de liquidateur d'une société dissoute, la cour d'appel a condamné madame X... au paiement d'une indemnité « par application de l'article 1382 du code civil » ; qu'en statuant ainsi, sans préciser lequel de ces deux régimes de responsabilité était applicable, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 12 du code de procédure civile.


DEUXIEME MOYEN DE CASSATION


Il est fait grief à l'arrêt du 13 décembre 2011, rectifié par l'arrêt du 3 avril 2012, d'AVOIR dit recevable l'action de la société Relais de chasse de Klesseven et d'AVOIR, en conséquence, condamné madame X... à lui verser une indemnité de 60.000 ¿ ;


AUX MOTIFS QUE madame X... invoque la prescription triennale de L. 237-12 du code de commerce selon lequel : « le liquidateur est responsable, à l'égard tant de la société que des tiers, des conséquences dommageables des fautes par lui commises dans l'exercice de ses fonctions. L'action en responsabilité contre les liquidateurs se prescrit dans les conditions prévues à l'article L. 225-254 » ; que selon l'article L. 225-54 visé par ce texte : « L'action en responsabilité contre les administrateurs ou le directeur général, tant sociale qu'individuelle, se prescrit par trois ans, à compter du fait dommageable ou s'il a été dissimulé, de sa révélation. Toutefois, lorsque le fait est qualifié crime, l'action se prescrit par dix ans » ; que le point de départ du délai de prescription de l'action en responsabilité contre le liquidateur, exercée sur le fondement des dispositions des articles L. 237-2 et L. 225-254 du code de commerce, court à compter du jour où les droits de la victime du fait dommageable imputable au liquidateur sont définitivement reconnus par une décision de justice ; qu'en l'espèce la société Relais de chasse de Klesseven a assigné la société Domaine de Clesseven le 27 décembre 2000 pour obtenir la nullité de la vente du fonds de commerce et la cession de bail conclus avec cette dernière et monsieur Z... ; que par jugement du 2 avril 2002 le tribunal de grande instance de Guingamp faisant droit à cette demande a en conséquence ordonné la restitution du prix et du dépôt de garantie par la société Domaine de Clesseven, soient les sommes respectivement de 158.242,07 ¿ et 17.074,29 ¿ ; que l'arrêt confirmatif de cette cour en date du 6 mai 2003 a fait l'objet d'une non admission du pourvoi le 15 novembre 2005 ; que la cessation des fonctions de madame X..., en qualité de liquidatrice amiable de la société Domaine de Clesseven, est opposable aux tiers du jour où la clôture des opérations liquidatives a été régulièrement publiée, soit en l'espèce le 26 octobre 2000 ; que la procédure tendant à faire reconnaître ses droits c'est-à-dire l'annulation de la vente du fonds et de la cession concomitante du droit au bail et à la réparation du préjudice causé à la société Relais de Chasse de Klesseven a fait l'objet d'un jugement, d'un arrêt de la cour de rennes et de la non admission du pourvoi par la cour de cassation ; que la décision définitive sur les droits de la société Relai de chasse de Klesseven contre la société Domaine de Clesseven résultant de cette annulation est celle qui ne peut plus faire l'objet de recours ; que tel est bien le cas de la non admission du pourvoi frappant l'arrêt de la cour d'appel de Rennes statuant sur le préjudice de la société Domaine de Clesseven dont madame X... a été la liquidatrice amiable ; que l'assignation de madame X..., liquidatrice, ayant été délivrée le 13 novembre 2008 soit moins de trois années après cette non admission du pourvoi prononcée le 15 novembre 2005, l'action en responsabilité contre celle ci n'est pas atteinte par la prescription triennale; que c'est dès lors à juste titre qu'elle a été déclarée recevable par les premiers juges ;


1°) ALORS QUE la prescription triennale de l'action en responsabilité engagée à l'encontre du liquidateur court à compter du jour où les droits de la victime du fait dommageable imputé au liquidateur ont été reconnus par une décision de justice revêtue de l'autorité de chose jugée ; que la cour d'appel a constaté que, par un jugement du 2 avril 2002, le tribunal de grande instance de Guingamp avait fait droit à la demande d'annulation de la vente du fonds de commerce et ordonné la restitution du prix et du dépôt de garantie par la société Domaine de Clesseven à la société Relais de Chasse de Klesseven ; qu'en fixant le point de départ de la prescription triennale de l'action en responsabilité engagée par la société Relais de Chasse de Klesseven à l'encontre madame X..., liquidatrice de la société Domaine de Clesseven, au 15 novembre 2005, jour du prononcé de l'arrêt de la Cour de cassation ayant définitivement mis fin au litige relatif à la vente du fonds de commerce, quand le droit de créance de la société Relais de Chasse de Klesseven avait été reconnu dès le 2 avril 2002 par une décision de justice revêtue de l'autorité de chose jugée, de sorte que son action était prescrite à compter du 2 avril 2005, la cour d'appel a violé les articles L. 237-2 et L. 225-254 du code de commerce, ensemble l'article 2234 du code civil ;


2°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE la prescription triennale de l'action en responsabilité engagée à l'encontre du liquidateur commence, au plus tard, à courir du jour où les droits de la victime du fait dommageable imputé au liquidateur ont été reconnus par une décision de justice revêtue de la force exécutoire ; que la cour d'appel a constaté que le jugement du 2 avril 2002, ayant reconnu le droit de la société Relais de chasse de Klesseven à la restitution du prix de vente du fonds de commerce, avait été confirmé en appel par un arrêt du 6 mai 2003 ; qu'en estimant que la prescription triennale n'était pas acquise au 13 novembre 2008, quand le droit de créance de la société Relais de chasse de Klesseven avait été reconnu dès le 6 mai 2003 par une décision revêtue de la force exécutoire, la cour d'appel a violé les articles L. 237-2 et L. 225-254 du code de commerce, ensemble l'article 2234 du code civil.


TROISIEME MOYEN DE CASSATION


Il est fait grief à l'arrêt du 13 décembre 2011, rectifié par l'arrêt du 3 avril 2012, d'AVOIR condamné madame X... à payer à la société Relais de chasse de Klesseven une indemnité de 60.000 ¿ ;


AUX MOTIFS QUE par acte du 20 février 2000, la SCI Chasse et Loisirs a vendu à Gérald A... 67 hectares de terrains attenant au domaine de chasse exploité en location par la société Domaine de Clesseven ; que par acte du 29 juin 2000 cette dernière a cédé à la société Relais de chasse de Klesseven, d'une part, son fonds de commerce d'élevage, chasse, restauration, location de meublé, centre de loisirs, achat et vente de tous produits de chasse et souvenirs, et, d'autre part son droit au bail sur les lieux d'exploitation loués par M. Z..., pour respectivement 1.038.000F (158.242,08 ¿) et 786.180 F (119.852,37 ¿); qu'à cette occasion, la société Relais de chasse de Klesseven a remboursé à la société Domaine de Clesseven somme de 112.000 F (17.074,29 ¿) au titre de son dépôt de garantie ; que par l'effet de ces actes la société Relais de chasse de Klesseven s'est retrouvée directement ou indirectement à la tête d'un important domaine de chasse à Glomel ; que cependant, le 30 septembre 2000, la société Domaine de Clesseven, était dissoute et madame X..., jusqu'alors gérante, désignée en qualité de liquidatrice amiable ; que la vente du fonds et la cession de bail ont été annulées ; que la société Domaine de Clesseven est définitivement condamnée à restituer le prix de vente de ce fonds (158.242,07 ¿) et à payer divers frais (16.181,55 ¿) outre 1.000 ¿, par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à la société Relais de chasse de Klesseven; que Gérald Z..., bailleur, est lui aussi définitivement condamné à restituer le dépôt de garantie à cette société (17.074,29 ¿) ; que le 23 octobre 2006, la société Relais de chasse de Klesseven, occupante sans droit, était mise en demeure de quitter les lieux qu'elle louait à Gérald Z... puis son expulsion était ordonnée en référé le 14 février 2007 avec fixation d'une indemnité d'occupation ; que pour le paiement de cette indemnité, la société Domaine de Clesseven faisait pratiquer des saisies attribution au préjudice de la société Relais de chasse de Klesseven les 14 mars et 27 avril 2007 ; que le bailleur donnait congé à la société Domaine de Clesseven, redevenue locataire, et la sommait d'exécuter divers travaux ; le bailleur recevait à cette fin la somme de 64.000 ¿ ; que la société Relais de chasse de Klesseven quittait les lieux le 15 janvier 2008 puis faisait pratiquer diverses saisies attribution en août 2008 au préjudice de la société Domaine de Clesseven pour garantir la restitution du prix de vente du fonds de commerce ; que la société Relais de chasse de Klesseven a finalement perçu 88.848,22 ¿ le 21 septembre 2009 ; que recherchant la responsabilité de madame X..., liquidatrice de la société Domaine de Clesseven, la société Relais de chasse de Klesseven lui fait grief d'avoir : - précipité la clôture des opérations liquidatives et ainsi contraint la société Relais de chasse de Klesseven a faire pratiquer notamment entre les mains des notaires chargés de la vente du fonds une saisie conservatoire sur le prix déjà sérieusement entamé ; - continué ses fonctions après la clôture officielle des opérations liquidatives ; - omis sciemment de contester le congé donné par le bailleur le 24 septembre 2007 alors qu'elle continuait d'agir comme liquidatrice et qu'aucun motif grave ne justifiait ce congé ; - au mépris de ses droits puisque ce bail, les meubles et la licence d'exploitation de débits de boissons faisaient partie du fonds de commerce, acquis personnellement et avec son époux gratuitement ou sans contrepartie sérieuse, le 19 juillet 2008, outre cette licence et les meubles garnissant les lieux, un droit au bail concernant les mêmes biens que ceux loués par la société Domaine de Clesseven dont elle était liquidatrice, en violation de l'article L237-7 du Code de Commerce qui interdit au liquidateur la cession de tout ou partie de l'actif de la société en liquidation à lui même ou à ses employés ou à leurs conjoint, ascendants ou descendants, avant de céder à son tour ce droit à des tiers le 5 août 2008 pour le prix de 220.000 ¿ ; que la société Relais de chasse de Klesseven soutient que ces fautes ont entraîné à ses dépens le transfert de l'ensemble des biens compris dans le fonds de commerce alors que le prix de vente ne lui en a toujours pas été restitué ; qu'elle évalue son préjudice au montant de ce prix de vente (158.242,08 ¿) augmenté des intérêts au taux légal depuis le jugement du 2 avril 2002, soit un total de 333.166 ¿ arrêté au 25 juin 2009, diminué de la somme de 88.648,22 ¿ déjà versée ; que madame X... soutient au contraire que : - la dissolution de la société Domaine de Clesseven et la clôture le même jour des opérations liquidatives régulièrement publiées sont intervenues après la cession du fonds de commerce et du droit au bail, seuls éléments d'actifs de la société, et sans qu'il y eût fraude de la liquidatrice, rien ne laissant prévoir l'action en nullité ensuite intentée ; - la contestation du congé donné par le bailleur à la société Domaine de Clesseven pour inexécution des travaux était inutile puisque la suspension des effets de la clause résolutoire mise en jeu pour ce même motif avait été déjà obtenue en référé ; - ce congé était la suite logique des annulations intervenues alors que la société Domaine de Clesseven se maintenait dans les lieux sans régler ni loyers ni indemnité d'occupation, et que, désormais inexploité, le fonds lui même périclitait ; - que le protocole transactionnel conclu entre les époux X... et le bailleur le 6 juin 2008, c'est-à-dire après l'expulsion de la société Domaine de Clesseven, tirait les conséquences de cette situation et permettait la conclusion d'un nouveau bail notarié le 19 juillet 2008, sans fraude de quiconque, les biens, les objets mobiliers, les conditions financières notamment étant différents ; que la cession à un tiers le 5 août 2008 de ce nouveau bail dont ils étaient juridiquement titulaires, s'explique par le souhait des époux X... de se retirer en raison de leur âge ; que la licence visée dans la cession du fonds en 2000 était périmée faute d'exploitation de sorte qu'elle n'avait aucune valeur marchande et que l'obtention d'une nouvelle licence de débits de boissons par les nouveaux locataires exploitants n'a pu spolier la société Relais de chasse de Klesseven ; que le matériel cédé au tiers était composé de celui mentionné dans l'acte pour 18.000 ¿, appartenant en propre aux époux X..., compris un tracteur acquis au prix de 12.000 ¿ et de celui, dépourvu de toute valeur faute d'entretien, abandonné par le bailleur ; qu'après avoir fourni en février 2000 des indications gravement erronées sur le nombre d'actions de chasse qui ont entraîné l'annulation pour dol des actes de vente et cession conclus avec la société Relais de chasse de Klesseven, la société Domaine de Clesseven a délibérément quelques semaines seulement après ces actes précipité sa dissolution et la clôture des opérations liquidatives le même jour alors que ces manouvres rendaient très prévisibles une réaction de l'acquéreur cessionnaire ; que cette précipitation a permis à la société Domaine de Clesseven de disposer des fonds correspondant au prix de vente au mépris des droits de la société Relais de chasse de Klesseven, le notaire entre les mains duquel la saisie a été faite ayant indiqué qu'il n'en restait que la moitié ; que redevenu titulaire du bail, la liquidatrice, a poursuivi sa mission et a omis d'en contester le congé tout en déployant beaucoup d'activité pour ensuite tirer profit personnellement des conséquences de ce congé et de l'annulation ; que tout en affirmant qu'elle tenait ce droit de la société Domaine de Clesseven, elle a en effet conclu, avec son époux, un « nouveau » bail moyennant une faible contrepartie (80.000 ¿) sur les mêmes biens pour l'essentiel ainsi qu'il est mentionné à l'article 1er du protocole du 6 juin 2008, et l'a cédé presque immédiatement pour un coût presque trois fois supérieur ; que par ce moyen, tout en perdant le fonds auquel ce bail était attaché, la société Relais de chasse de Klesseven, a été privée des droits résultant de ce bail et de sa rupture dans l'intérêt personnel de la liquidatrice ; que contrairement aux affirmations de madame X..., l'obtention en référé d'une suspension des effets de la clause résolutoire du bail, dont le but était de procurer des délais de paiement, ne dispensait en rien celle ci de contester le refus de renouvellement qui remettait directement en cause les droits de la société Relais de chasse de Klesseven tirés de ce bail ; que ces faits ont entraîné pour la société Relais de chasse de Klesseven la perte du fonds et du droit au bail sans aucune contrepartie, alors que la restitution des fonds perçus par les notaires n'a pu à ce jour avoir lieu, la société Domaine de Clesseven ayant perdu la totalité de son patrimoine ; que la péremption de la licence étant due à l'inexploitation du fonds par les époux X..., après le départ de la société Relais de chasse de Klesseven, alors que cette licence ne devait son existence qu'à l'activité de la société Relais de chasse de Klesseven, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que la cession de cette licence, incluse dans le fonds, aux époux Le Gall avait lésé cette société ; qu'il en résulte qu'au total, grâce aux fautes de madame X..., le fonds a pu être récupéré par elle même et son époux, sans contrepartie sérieuse, dans la totalité de ses éléments comprenant le droit au bail et la licence ; que cette opération réalisée aux dépens de la société Relais de chasse de Klesseven, justifie en principe sa demande de réparation dirigée contre la liquidatrice ; que tenant compte de la valeur du fonds et des sommes perçues par la société Relais de chasse de Klesseven, le préjudice sera évalué à 60.000 ¿ ;


ALORS QUE le droit au renouvellement du bail ne peut être invoqué à défaut d'exploitation effective du fonds de commerce ; qu'aux termes de ses conclusions d'appel, madame X... faisait valoir que le bailleur avait délivré congé, le 24 septembre 2007, à la société Domaine de Clesseven en raison du défaut d'exploitation du fonds de commerce, imputable à la société Relais de chasse de Klesseven qui s'était irrégulièrement maintenue dans les lieux à la suite de l'annulation judiciaire de la vente du fonds ; qu'en retenant néanmoins la responsabilité de madame X... pour avoir omis de contester le congé en sa qualité de liquidatrice de la société Domaine de Clesseven, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le preneur n'était pas privé de son droit au renouvellement du bail en raison du défaut d'exploitation effective du fonds de commerce imputable à la société Relais de chasse de Klesseven, de sorte que l'absence de contestation du congé donné par le bailleur n'était ni fautive ni en lien de causalité avec la perte du droit au bail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, ensemble l'article L. 145-8 du code de commerce.

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