7 avril 1998
Cour de cassation
Pourvoi n° 95-13.413

Chambre commerciale financière et économique

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

BANQUE - responsabilité - compte - ouverture et fonctionnement - exécution des ordres du mandataire d'une association foncière urbaine - mandataire - pouvoirs - mandataire d'une association foncière urbaine - ouverture et gestion du compte (non) - mandat - compte bancaire - responsabilite delictuelle ou quasi delictuelle - faute

Justifie sa décision une cour d'appel qui, pour engager la responsabilité d'une banque pour avoir accepté d'ouvrir un compte bancaire au nom d'une association foncière urbaine régie par l'article L. 322-4-1 du Code de l'urbanisme, sur demande d'un mandataire, et d'avoir exécuté des ordres de paiement sur demande de celui-ci, décide, d'une part, que les principes d'organisation imposés par la loi, selon lesquels la gestion des comptes de l'association est nécessairement autonome et interne, ne pouvaient échapper à la connaissance de la banque, retient, d'autre part, que bien que le compte ait fonctionné au su de l'association sur ordres de son mandataire, la faute de la banque ayant toléré une telle pratique illégale a contribué à la réalisation du préjudice subi par l'association, et retient, enfin, que la faute de la banque a une relation de causalité avec les détournements, bien que les fonds retirés du compte aient transité par un autre compte ouvert auprès d'un autre établissement avant leur appropriation par le mandataire.

Texte de la décision

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 février 1995), que l'Association foncière urbaine libre des Templiers (AFUL) a engagé une action en responsabilité contre la BNP, lui reprochant d'avoir accepté d'ouvrir à son nom un compte bancaire, sur demande d'une mandataire, la société OFREP, et d'avoir exécuté les ordres de paiement émanant de celle-ci ; qu'elle a réclamé à la banque des dommages-intérêts pour le montant détourné par sa mandataire ;


Attendu que la BNP fait grief à l'arrêt de sa condamnation à indemniser l'AFUL pour la moitié des sommes détournées après inscription dans ses livres, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en n'expliquant pas en quoi l'irrégularité de la délégation consentie à l'OFREP ne pouvait échapper à la connaissance de la banque, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; alors, d'autre part, que ne caractérise pas une faute en relation de causalité avec le préjudice invoqué par le titulaire d'un compte la cour d'appel qui impute à faute à la banque le fait d'avoir ouvert et laissé fonctionner ce compte sous la signature d'un délégataire, au vu et au su du délégant, quand bien même cette délégation aurait-elle été irrégulière ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; alors, en outre, que la cour d'appel constate, en toute hypothèse, que trois des quatre virements litigieux, d'un montant global de 1 640 880 francs, ont été faits en faveur de l'AFUL sur un compte dont celle-ci était titulaire dans les livres du Crédit agricole ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses constatations d'où il résultait que l'appropriation par l'OFREP du montant de ces trois virements, postérieurement à leur entrée dans le compte dont l'AFUL était titulaire dans les livres du Crédit agricole, n'était pas en relation de causalité avec la faute imputée à la BNP, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; et alors, enfin, qu'en se bornant à énoncer qu'il est constant qu'en l'absence de délivrance du permis de construire, la prestataire de services ne pouvait prétendre à aucune rémunération, sans rechercher si l'OFREP, qui avait reçu mission de réaliser pour le compte de l'AFUL " tous travaux, démarches administratives ou toutes démarches généralement quelconques, que nécessite l'exécution de l'opération de réhabilitation envisagée ", n'avait pas droit à rémunération pour la préparation du dossier relatif à la délivrance du permis de démolir, quand bien même celui-ci n'aurait pas été délivré en définitive, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;


Mais attendu, d'une part, que l'arrêt, après avoir rappelé les dispositions de l'article L. 322-4-1 du Code de l'urbanisme, en a déduit que " que si la direction des travaux peut être déléguée, par contre la gestion des comptes de l'AFUL est nécessairement autonome et interne " et que ces principes d'organisation, imposés par la loi, ne pouvaient échapper à la connaissance de la banque ; que la cour d'appel a légalement justifié sa décision à cet égard ;


Attendu, d'autre part, que la cour d'appel a pu retenir que bien que le compte ouvert au nom de l'AFUL ait fonctionné au su de celle-ci sur ordres de sa mandataire, la faute de la banque ayant toléré une telle pratique illégale, a " contribué à la réalisation du préjudice " subi par l'association ;


Attendu, en outre, que la cour d'appel a pu retenir que la faute de la BNP avait une relation de causalité avec les détournements, bien que les fonds retirés du compte ouvert dans les livres de cette banque aient transité par un autre compte dans une Caisse de Crédit agricole avant leur appropriation par la société mandataire ;


Attendu, enfin, que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a légalement justifié sa décision en retenant que L'AFUL n'était pas débitrice de frais de commissions envers la société OFREP ;


D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;


PAR CES MOTIFS :


REJETTE le pourvoi.

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