16 septembre 2015
Cour de cassation
Pourvoi n° 14-14.530

Chambre sociale

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2015:SO01498

Titres et sommaires

TRANSPORTS EN COMMUN - ratp - personnel - statut du personnel - agents déclarés inaptes à leur emploi - reclassement du salarié - obligation de l'employeur - modalités - invitation de l'agent à présenter une demande - portée - réforme - inaptitude définitive à tout emploi - condition contrat de travail, execution - maladie du salarié - maladie ou accident non professionnel - inaptitude au travail - inaptitude consécutive à la maladie - cas - obligation pour la ratp d'inviter le salarié à présenter une demande de reclassement - défaut

Il résulte de la combinaison des articles L. 1211-1, L. 1226-2 du code du travail et 99 du chapitre VII du statut du personnel de la régie autonome des transports parisiens (RATP) prévu par l'article 31 de la loi n° 48-506 du 21 mars 1948 que lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve de manière définitive atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il appartient à l'employeur de le reclasser dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, de prononcer, dans les conditions prévues pour l'intéressé, la rupture du contrat de travail. Les dispositions de l'article 99 du statut de la RATP, en subordonnant le reclassement à la présentation d'une demande par l'intéressé ont pour objet d'interdire à l'employeur d'imposer un tel reclassement, mais ne le dispensent pas d'inviter l'intéressé à formuler une telle demande. Encourt en conséquence la cassation l'arrêt qui rejette la demande d'un salarié tendant à la requalification de sa réforme médicale en licenciement sans cause réelle et sérieuse, aux motifs qu'il n'a pas sollicité son reclassement conformément aux dispositions de l'article 99 du statut de la RATP, alors que l'intéressé n'avait pas été invité à présenter une telle demande avant que ne soit mise en oeuvre la procédure de réforme, ce dont il résultait que la décision de réforme n'avait pas été régulièrement prise

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :





Sur le moyen relevé d'office, après avis aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :


Vu les articles L. 1211-1, L. 1226-2 du code du travail et 99 du chapitre VII du statut du personnel de la RATP prévu par l'article 31 de la loi n° 48-506 du 21 mars 1948 ;


Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve de manière définitive atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il appartient à l'employeur de le reclasser dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, de prononcer, dans les conditions prévues pour l'intéressé, la rupture du contrat de travail ; que les dispositions de l'article 99 du statut de la RATP, en subordonnant le reclassement à la présentation d'une demande par l'intéressé ont pour objet d'interdire à l'employeur d'imposer un tel reclassement, mais ne le dispensent pas d'inviter l'intéressé à formuler une telle demande ;


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé par la RATP le 4 avril 1988 a été placé en congé de longue maladie à compter du 1er juillet 2002 pour une durée de cinq ans ; que par lettre du 6 mars, il a été invité par son employeur à opter entre, d'une part, sa réforme après avis de la commission médicale, et d'autre part, une mise en disponibilité sans solde ; que par lettre du 27 mars 2007, il a fait part de son souhait d'obtenir sa réforme médicale et de bénéficier de sa pension de retraite de manière anticipée ; que le médecin du travail a conclu, le 25 mai 2007, au terme de la seconde visite médicale de reprise qu'il était « inapte définitif à l'emploi statutaire » ; que le 14 juin 2007, il a été informé, après avis de la commission médicale, de sa mise à la retraite par voie de réforme à compter du 15 juin 2007 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la requalification de sa réforme en licenciement sans cause réelle et sérieuse et paiement de diverses sommes à ce titre ;


Attendu que, pour rejeter ces demandes, l'arrêt retient qu'il résulte des articles 94, 98 et 99 du statut du personnel de la RATP que l'agent reconnu inapte définitivement à l'emploi ne peut bénéficier d'un reclassement que s'il en fait la demande ; que la décision de réforme n'ayant pas été contestée par l'intéressé qui n'a pas davantage sollicité son reclassement, il convient de constater que la procédure prévue par le statut a été respectée ;


Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'agent n'avait pas été invité à présenter une demande de reclassement avant que ne soit mise en oeuvre la procédure de réforme, ce dont il résultait que la décision de réforme n'avait pas été régulièrement prise, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations a violé les textes susvisés ;


PAR CES MOTIFS :


CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes tendant à la requalification de la réforme en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et au paiement d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 31 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;


Condamne la société RATP aux dépens ;


Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société RATP et condamne celle-ci à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille quinze.



MOYEN ANNEXE au présent arrêt


Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. X...



Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande tendant à voir juger que sa réforme par la RATP produirait les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et à condamner cet employeur au paiement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts ;


AUX MOTIFS sur la qualification de la rupture du contrat de travail et ses conséquences QUE "Charles X... a été examiné, à sa demande, par le médecin du travail, qui, le 7 mai 2007, a constaté un début d'inaptitude provisoire, et le 25 mai 2007, l'inaptitude définitive du salarié à son emploi statutaire ; que l'appelant ayant sollicité, le 27 mars 2007, sa réforme à l'issue de son congé de longue durée prenant fin le 28 juin 2007, la commission médicale de la RATP a proposé sa mise à la retraite par voie de réforme à effet du 15 juin 2007 ; que l'intéressé qui n'a pas fait appel de cette décision a été rayé des effectifs de la RATP le 15 juin 2007 ; qu'il soutient que cette décision de réforme constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse, faute d'avoir été précédée d'une recherche de reclassement ;


QUE le statut du personnel de la RATP et le règlement des retraites de ce personnel présentent un caractère réglementaire dont la légalité relève de la compétence des juridictions administratives ; que les articles 94, 98 et 99 du statut du personnel de la RATP prévoient :


- que la commission médicale, à la demande des agents en congé de maladie de plus de 3 mois, se prononce sur leur inaptitude à tout emploi à la RATP, après avis d'inaptitude définitive à l'emploi statutaire par le médecin du travail, et sur leur réforme,


- que l'inaptitude définitive à tout emploi à la Régie entraîne obligatoirement la réforme de l'agent concerné,


- que celui-ci peut être reclassé dans un autre emploi,


- que le reclassement est subordonné notamment à l'établissement par l'agent d'une demande de reclassement ;


QUE le statut du personnel de la RATP qui n'a pas été contesté par l'appelant s'applique à la rupture de son contrat de travail par voie de réforme ; que la décision de réforme n'ayant pas été davantage contestée et le reclassement n'ayant pas été sollicité par Charles X..., il convient de constater que la procédure prévue par le statut a été respectée et qu'elle emporte en conséquence la réforme du salarié qui, en conséquence, perçoit une pension depuis le 15 juin 2007 ; que la correcte application du statut du personnel de la RATP ne permet pas en effet de qualifier la rupture du contrat de travail de licenciement sans cause réelle et sérieuse dans la mesure où l'agent reconnu en état d'inaptitude définitive ne bénéficie d'un reclassement que s'il en fait la demande ;


QUE dès lors, il n'y a lieu ni à constatation de la nullité du licenciement, ni à la réintégration de l'appelant au sein de la RATP, ni à condamnation de celle-ci au paiement des salaires et congés payés échus depuis le prononcé de la réforme, ni à sa condamnation à des dommages et intérêts pour préjudice matériel ou moral (...)" (arrêt p.6) ;


ALORS QUE selon les articles 97, 98 et 99 du statut du personnel de la RATP, lorsque l'inaptitude définitive de l'agent à son emploi statutaire est constatée par le médecin du travail, sa réforme ne peut intervenir que s'il est ensuite déclaré définitivement inapte à tout autre emploi par la commission médicale, ou si son reclassement est impossible ; qu'aux termes des articles 85, 94 et 99 de ce statut, la procédure de recherche d'un reclassement ou celle de déclaration d'inaptitude définitive à tout emploi ne peut être mise en oeuvre qu'à la demande de l'agent ; que la validité de la procédure de réforme n'est en conséquence acquise que si l'agent a été mis à même de choisir en toute connaissance de cause entre demander son reclassement ou demander à voir constater son inaptitude définitive à tout emploi dans la Régie ; qu'en l'espèce Monsieur X... avait, dans ses écritures d'appel, soutenu et justifié à partir du courrier que la CCAS de la RATP du 6 mars 2007 et du formulaire joint qu'à l'issue de son congé de maladie, la RATP non seulement ne l'avait pas mis à même de se prononcer en toute connaissance de cause sur ce choix, mais manquant à son obligation de loyauté dans la mise en oeuvre du statut, lui avait celé la possibilité d'opter pour une tentative de reclassement en ne lui offrant d'autre alternative qu'une mise en disponibilité sans solde ou la saisine de la Commission médicale pour réforme en cas d'inaptitude définitive à son emploi statutaire ; qu'en retenant, pour le débouter de sa demande tendant à voir juger que la réforme, prononcée dans ces conditions, produirait les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, que "le reclassement n'a(vait) pas été sollicité par Charles X..." et que "la correcte application du statut ne permet pas de qualifier la rupture de licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse dans la mesure où l'agent reconnu en état d'inaptitude définitive ne bénéficie d'un reclassement que s'il en fait la demande" sans répondre à ces conclusions soutenant que l'employeur ne l'avait pas mis à même de formuler une telle demande de reclassement, la Cour d'appel, qui a privé sa décision de motifs, a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

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