12 mars 2014
Cour de cassation
Pourvoi n° 12-27.918

Chambre sociale

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2014:SO00606

Titres et sommaires

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - conventions et accords collectifs - conventions diverses - convention collective nationale de l'hospitalisation privée du 18 avril 2002 - article 53 - 3 - contreparties au travail de nuit - temps de repos - calcul - heures réalisées entre 21 heures et 6 heures - définition

Au sens de l'article 53-3 de la convention collective nationale de l'hospitalisation privée du 18 avril 2002, les heures réalisées entre 21 heures et 6 heures ouvrant droit à repos s'entendent des heures de travail effectif accomplies sur cette plage horaire

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :





Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 11 juin 2005 en qualité de veilleuse de nuit par la société Maison de retraite résidence Les Peupliers dont le personnel relève de la convention collective nationale de l'hospitalisation privée du 18 avril 2002 ; qu'elle travaillait de 20 heures 50 à 6 heures 50 avec une demi-heure de pause jusqu'au 31 mai 2007 et de 20 heures 20 à 7 heures 20 avec une heure de pause à compter du 1er juin 2007 ; qu'ayant démissionné le 21 février 2008, elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre des contreparties conventionnelles au travail de nuit ;


Sur le moyen unique du pourvoi principal de la salariée :


Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;


Mais sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :


Vu l'article 53-1 de la Convention collective nationale de l'hospitalisation privée du 18 avril 2002 ;


Attendu, selon ce texte, que "Indépendamment de l'indemnité de sujétion pour travail de nuit, telle que définie par l'article 82.1 de la convention collective, il sera accordé, lorsque le travailleur de nuit au sens de l'article 53.1.2 a au moins accompli 3 heures de travail de nuit, par heure, un temps de repos équivalent à 2,50 % de chacune des heures réalisées entre 21 heures et 6 heures" ; qu'au sens de ce texte, les heures réalisées entre 21 heures et 6 heures ouvrant droit à repos s'entendent des heures de travail effectif accomplies sur cette plage horaire ;


Attendu que pour faire droit à la demande de la salariée selon son mode de calcul, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que puisque l'horaire de la salariée comprenait l'amplitude horaire comprise entre 21 h et 6 h du matin, c'est donc bien 9 heures de travail de nuit par jour de travail qu'il convient de comptabiliser et de multiplier par le nombre de nuits de travail réalisé pendant cette période ;


Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier si les calculs soumis par la salariée tenaient compte des périodes de pause, qui ne constituent pas du temps de travail effectif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;


PAR CES MOTIFS :


CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'elle a condamné la société Maison de retraite Résidence Les Peupliers à payer à Mme X... la somme de 976 euros au titre de l'indemnisation des heures de sujétion, l'arrêt rendu le 13 septembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;


Condamne Mme X..., épouse Y... aux dépens ;


Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze mars deux mille quatorze.



MOYENS ANNEXES au présent arrêt


Moyen produit au pourvoi principal par Me Ricard, avocat aux Conseils, pour Mme X....


Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande de la salariée au titre des repos compensateurs et congés payés afférents ;


AUX MOTIFS QU'Annick X... épouse Y... fonde sa demande sur l'absence d'effectivité de la pause conventionnelle ; qu'elle en conclut que ce fut du travail effectif, ne pouvant sortir de l'enceinte de la maison de retraite et devant régulièrement seconder sa collègue de travail ; que selon l'article L. 3121-1 du code du travail la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que selon l'article L. 3121-2 du même code le temps nécessaire à la restauration ainsi que les temps consacrés aux pauses sont considérés comme du temps de travail effectif lorsque les critères définis à l'article L. 3121-1 sont réunis ; que la pause consiste en un arrêt de travail de courte durée sur le lieu de travail à proximité ; que la période de pause n'est pas incompatible avec des interventions éventuelles et exceptionnelles demandées durant cette période au salarié en cas de nécessité, notamment pour des motifs de sécurité ; qu'Annick X... épouse Y... bénéficiait au sein de la maison de retraite d'une pièce se trouvant à l'écart des chambres des résidents et aménagée pour la distraction, la restauration et le repos (télévision, four, fauteuil et lit) ; qu'il ne ressort pas des pièces versées aux débats qu'elle ait été dans l'impossibilité de bénéficier de son temps de pause, les interventions ayant été rares ; que la salariée est ainsi mal fondée en sa demande et s'en verra débouter ; que la décision des premiers juges doit être infirmée ;


ALORS QUE les temps consacrés aux pauses sont considérés comme du temps de travail effectif lorsque le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats que la salariée, dont le temps de présence quotidien de nuit excédait 8 heures et qui devait bénéficier, par application des dispositions conventionnelles en vigueur, d'un temps de repos équivalent à ce dépassement, n'avait pas le droit, pendant son temps de pause, de quitter l'établissement et devait se tenir à la disposition de son employeur, dès lors qu'elle avait l'obligation d'intervenir, en cas d'urgence, sur simple appel de sa collègue de travail, à n'importe quel moment ; qu'en décidant, néanmoins, que ce temps de repos ne constituait pas un temps de travail effectif devant être pris en compte pour le calcul des heures de récupération, la cour d'appel a violé les articles 53-2 de la convention collective unique, ensemble L. 3121-1 et L. 3121-2 du code du travail ;


ALORS QU'ayant retenu que la période de pause n'est pas incompatible avec des interventions « éventuelles et exceptionnelles » en cas de nécessité, la cour d'appel qui se borne à affirmer qu'il ne ressort pas des pièces produites aux débats que la salariée ait été dans l'impossibilité de bénéficier de son temps de pause, « les interventions ayant été rares », quand bien même la salariée contestait formellement les tableaux à vocation statistique comme les pseudo relevés de « bips » produits par l'employeur et contredits par les extraits du registre des incidents remplis par les veilleuses de nuit et régulièrement versés aux débats par l'exposante, établissant l'activité déployée par ces dernières auprès des résidents, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;


ALORS QU'en s'abstenant de réfuter les motifs du jugement de première instance, dont la salariée avait demandé la confirmation, aux termes desquels l'affirmation de l'employeur selon laquelle le salarié pouvait s'isoler pendant son temps de repos dans une chambre de repos et se trouvait donc abstrait de toutes les contraintes liées à l'exercice de son travail, ne résulte ni du contrat de travail de la salariée qui stipule au contraire que la salariée est notamment chargée d'effectuer la sécurité passive du bâtiment, la surveillance de nuit des résidents et de répondre aux appels des malades (article 4), ni de la fiche de poste établie en mai 2007 et signée par la salariée qui évoque simplement une « pause au 4ème étage » sans faire état de l'absence de bip à ce moment-là, ni de la note de service du 23 mai 2007 qui ne fait état que d'un « arrêt » du bip (et non de son absence), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;


ALORS QU'en s'abstenant, par ailleurs, de réfuter les motifs du jugement, repris à son compte par l'exposante, soulignant que la présence d'une seule gardienne de nuit était notoirement insuffisante, eu égard au nombre de résidents (90) et de leur âge ainsi que de leurs maladies très invalidantes (notamment la maladie d'alzheimer), en sorte que l'organisation du travail de la maison de retraite les peupliers et la nature de l'activité exercée ne permettaient pas à la salariée de prendre effectivement ses temps de pause mais l'obligeait à rester à la disposition de l'employeur pour aider la deuxième veilleuse de nuit et l'empêchaient de vaquer librement à des occupations personnelles, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;


ALORS QU' aux termes de l'article 53-7 de la convention collective unique, dans le cadre du travail de nuit, les employeurs ont l'obligation de mettre à la disposition des salariés les locaux et mobiliers nécessaires (relax ergonomique par exemple), permettant d'organiser le temps d'activité et de pause, dans des conditions satisfaisantes ; qu'en déduisant de cette obligation conventionnelle, la preuve que la salariée avait bénéficié de temps de pause, la cour d'appel a violé les articles 53-2 de la convention collective unique, ensemble L. 3121-1 et L. 3121-2 du code du travail.


ALORS ENFIN QUE la salariée faisait expressément valoir dans ses conclusions d'appel (p. 9) que, conformément à l'article 53-2 alinéa 2 de la convention collective, le travail de nuit pour lequel il aura été fait application de la dérogation à la durée maximale quotidienne de 8 h du poste de nuit, devra bénéficier d'un temps de repos équivalent au temps du dépassement et rappelait qu'elle avait effectué deux heures de dépassement quotidien jusqu'au 31 mai 2007 puis trois heures de dépassement à compter du 1er juin, contestant les modalités de calcul des repos compensateurs retenues par l'employeur qui ne prenait en compte que 30 minutes de dépassement par nuit ; qu'en omettant de répondre à ce moyen déterminant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.





Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour la société Maison de retraite résidence Les Peupliers.


Il est fait grief à l'arrêt attaqué, après avoir infirmé partiellement le jugement entrepris et débouté Madame Y... de sa demande d'indemnités au titre du repos compensateur et congés payés y afférents, D'AVOIR confirmé le jugement pour le surplus et condamné la SARL maison de retraite les Peupliers à lui payer une indemnisation des heures de sujétion et congés payés y afférents ainsi qu'une indemnité aux frais irrépétibles ;


AUX MOTIFS QUE


« Sur les repos compensateurs et les congés payés y afférents


Annick X... épouse Y... fonde sa demande sur l'absence d'effectivité de la pause conventionnelle ; qu'elle en conclut que ce fut du travail effectif, ne pouvant sortir de l'enceinte de la maison de retraite et devant régulièrement seconder sa collègue de travail ; que selon l'article L 3121-1 du code du travail la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que selon l'article L 3121-2 du même code le temps nécessaire à la restauration ainsi que les temps consacrés aux pauses sont considérés comme du temps de travail effectif lorsque les critères définis à l'article L 3121-1 sont réunis ; que la pause consiste en un arrêt de travail de courte durée sur le lieu de travail à proximité ; que la période de pause n'est pas incompatible avec des interventions éventuelles et exceptionnelles demandées durant cette période au salarié en cas de nécessité, notamment pour des motifs de sécurité ; qu'Annick X... épouse Y... bénéficiait au sein de la maison de retraite d'une pièce se trouvant à l'écart des chambres des résidents et aménagée pour la distraction, la restauration et le repos (télévision, four, fauteuil et lit) ; qu'il ne ressort pas des pièces versées aux débats qu'elle ait été dans l'impossibilité de bénéficier de son temps de pause, les interventions ayant été rares ; que la salariée est ainsi mal fondée en sa demande et s'en verra débouter ; que la décision des premiers juges doit être infirmée » ;


« Sur l'indemnité pour heures de sujétion de nuit et les congés payés y afférents


Que selon l'article 53.1.1 de la convention collective nationale de l'hospitalisation privée du 18 avril 2002 tout travail effectué entre 21 heures et 6 heures est considéré comme travail de nuit ;


Que selon l'article 53.2 alinéa 2 du même texte le travailleur de nuit pour lequel il aura été fait application de la dérogation à la durée maximale quotidienne de 8 heures du poste de nuit devra bénéficier d'un temps de repos équivalent au temps de dépassement ;


Que selon l'article 53.3 du même texte indépendamment de l'indemnité de sujétion pour travail de nuit, telle que définie par l'article 82.1 de la convention collective, il sera accordé, lorsque le travailleur de nuit au sens de l'article 53.1.2 a au moins accompli 3 heures de travail par nuit, par heure, un temps de repos équivalent à 2,50 % de chacune des heures réalisées entre 21 heures et 6 heures ;


Que les premiers juges ont par des motifs précis et pertinents, que la cour adopte, relevé qu'Annick X... épouse Y... avait ainsi accompli 4.365 heures de travail de nuit ;


Que sur la base d'un salaire horaire brut de 8,96 € l'indemnité due se calcule comme suit :


4.365 heures X 2,5 % X 8,96 € = 976 €, somme à laquelle s'ajoutent les congés payés de 97 € ;


Que la décision des premiers juges doit être confirmée ; (arrêt p. 3 et 4) ;


ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE


« Sur la demande au titre des indemnités de sujétion de nuit


Attendu qu'aux termes de l'article 53-2 de la convention collective précitée, « indépendamment de l'indemnité de sujétion pour travail de nuit, il sera accordé, lorsque le travailleur de nuit (...) a au moins accompli trois heures de travail de nuit, par heure, un temps de repos équivalent à 2,50 % de chacun des heures réalisées entre 21 h et 6h, l'article 53-2 précisant sur ce point que « ce temps de repos en compensation, assimilé à du temps de travail effectif, sera comptabilisé sur le bulletin de salaire (...) » ;


Que dès lors, puisque l'horaire de Madame Y... comprenait l'amplitude horaire comprise entre 21 h et 6 h du matin, c'est donc bien 9 heures de travail de nuit par jour de travail qu'il convient de comptabiliser, puisque le temps de repos est clairement assimilé à du temps de travail effectif, qu'en conséquence, il sera comptabilisé en nombre de nuits effectuées, en appliquant le coefficient de 2,5 % selon la convention collective précitée, et en le multipliant par le nombre de nuits de travail réalisés pendant cette période, soit 485 nuits, selon un calcul, non contesté par l'employeur, comme suit : soit 485X9 = 4365 h X 2,5 % = 109,12 h ;


Qu'en conséquence, Madame Y... aurait dû bénéficier d'un temps de repos de 109 heures,


Qu'aussi, convient-il de juger que Madame Annick Y... pouvait prétendre aux indemnités sollicitées en l'espèce, 109 X 8,96 euros/h, soit 976 €, outre l'indemnité de congés payés afférente, soit 97 € ;


Attendu que la société Maison de retraite LES PEUPLIERS sera en conséquence condamnée à verser à Madame Y... la somme de 976 € au titre de l'indemnité des heures de sujétion, et celle de 97 € au titre du solde de congés payés afférent »


1./ ALORS QU'aux termes des articles 53-2 et 53-3 de la convention collective nationale de l'hospitalisation privée du 18 avril 2002, en contrepartie de chaque heure de travail de nuit, effectué au-delà de 3 heures, donne lieu à un temps de repos équivalent à 2,50 % de chacune des heures réalisées entre 21 h et 6 h ; que ce temps de repos en compensation, assimilé à du temps de travail effectif, est comptabilisé sur le bulletin de salaire et tient compte des seules heures travaillées ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui a fait droit à l'intégralité de la demande de Madame Y..., tendant à bénéficier d'un temps de repos de 109 heures, a ainsi assimilé les heures de travail effectif avec l'amplitude horaire, méconnaissant ainsi les dispositions conventionnelles susvisées ;


2./ ALORS QUE dans ses conclusions délaissées, la maison de retraite LES PEUPLIERS faisait valoir que Madame Y... n'avait tenu aucun compte du temps de pause dans ses calculs et confondait amplitude et durée de travail en assimilant sa durée de travail et sa durée de travail de nuit ; que la cour d'appel qui a elle-même énoncé que le temps de pause ne constituait pas un temps de travail effectif, s'agissant du repos compensateur, ne pouvait ensuite faire droit aux demandes de Madame Y... à un repos supplémentaire, conformément à l'article 53-3 de la convention collective, sans vérifier si les calculs de la salariée intégrait également les temps de pause et si l'employeur ne démontrait pas avoir, sur chaque bulletin de paie, rempli la salariée de ses droits à ce titre ; que l'arrêt est entaché d'un défaut de base légale au regard des articles 53-2 et 53-3 de la convention collective nationale de l'hospitalisation privée du 18 avril 2002.

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