14 novembre 2013
Cour de cassation
Pourvoi n° 12-17.409

Chambre sociale

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2013:SO01894

Titres et sommaires

TRAVAIL REGLEMENTATION, REMUNERATION - salaire - paiement - prescription - prescription quinquennale - point de départ - détermination - prescription civile - action en paiement des salaires - date d'exigibilité - portée travail reglementation, remuneration - indemnités - indemnité de congés payés - délai - détermination prescription civile - contrat de travail - action en paiement d'indemnité de congés payés

Il résulte des articles L. 3245-1, L. 3242-1 et L. 3141-22 du code du travail que le délai de prescription des salaires court à compter de la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible, que pour les salariés payés au mois, la date d'exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l'entreprise et concerne l'intégralité du salaire afférent au mois considéré et que, s'agissant de l'indemnité de congés payés, le point de départ du délai de la prescription doit être fixé à l'expiration de la période légale ou conventionnelle au cours de laquelle les congés payés auraient pu être pris

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :





Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 20 novembre 2000 par l'association l'Avitarelle selon un contrat à durée déterminée de quatre mois ; qu'il a ensuite été lié à l'association par une succession de contrats à durée déterminée à temps partiel et à temps complet jusqu'au 17 mars 2003 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à obtenir la requalification de la relation contractuelle en un contrat à durée indéterminée conclu à compter du 20 novembre 2000 et à voir condamner l'employeur à lui payer certaines sommes, notamment à titre de rappel de salaire ;


Sur les deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens :


Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;


Mais sur le premier moyen :


Vu l'article L. 3245-1 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2013-501 du 14 juin 2013, ensemble les articles L. 3242-1 et L. 3141-22 du code du travail ;


Attendu qu'il résulte des textes susvisés que le délai de prescription des salaires court à compter de la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible, que pour les salariés payés au mois, la date d'exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l'entreprise et concerne l'intégralité du salaire afférent au mois considéré et que, s'agissant de l'indemnité de congés payés, le point de départ du délai de la prescription doit être fixé à l'expiration de la période légale ou conventionnelle au cours de laquelle les congés payés auraient pu être pris ;


Attendu que l'arrêt énonce que compte tenu de la date de saisine du conseil de prud'hommes intervenue le 24 avril 2006, les demandes de rappels de salaire (congés payés et prime de précarité afférente comprises) formées par le salarié aux titres de la reprise d'ancienneté, du repos compensateur conventionnel, des majorations sur les heures supplémentaires ou complémentaires, du travail de nuit, des heures manquantes et des périodes de carence pour la période antérieure au 24 avril 2001 sont prescrites ;


Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher la date à laquelle les créances étaient exigibles, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;


PAR CES MOTIFS :


CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il énonce que les demandes de rappels de salaire (congés payés et prime de précarité afférente comprise) formées par l'exposant au titre de la reprise d'ancienneté, au titre du repos compensateur conventionnel, au titre des majorations sur les heures supplémentaires ou complémentaires, au titre du travail de nuit, au titre des heures manquantes et au titre des périodes de carence pour la période antérieure au 24 avril 2001 sont prescrites, l'arrêt rendu le 1er février 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;


Condamne l'association L'Avitarelle aux dépens ;


Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association l'Avitarelle à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille treize.



MOYENS ANNEXES au présent arrêt


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. Guy X...



PREMIER MOYEN DE CASSATION


Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que les demandes de rappels de salaire (congés payés et prime de précarité afférente comprise) formées par l'exposant au titre de la reprise d'ancienneté, au titre du repos compensateur conventionnel, au titre des majorations sur les heures supplémentaires ou complémentaires, au titre du travail de nuit, au titre des heures manquantes et au titre des périodes de carence pour la période antérieure au 24 avril 2001, étaient prescrites ;


AUX MOTIFS QUE la date de saisine du conseil de prud'hommes était le 24 avril 2006 ;


ALORS QUE la prescription quinquennale de l'article L 3245-1 du Code du travail est interrompue par la reconnaissance de la dette, serait-ce dans son principe ; que selon le décompte manuscrit accompagnant le bulletin de paie de septembre 2001, émanant du chef de service, ainsi que le bulletin de paie de septembre 2001, toutes pièces soumises à la cour d'appel, l'Association AVITARELLE admettait qu'il y avait lieu à régularisation pour la période antérieure au 1er avril 2001 ; qu'ainsi la prescription a été interrompue ; qu'en opposant la prescription aux demandes concernant les sommes dues au titre de la période de travail antérieure au 24 avril 2001, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard du texte précité ;


ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE s'agissant du salaire dû et de ses incidences sur les autres créances, le point de départ du délai de prescription doit être fixé compte tenu de la périodicité du versement ; que la date habituelle du versement du salaire étant la fin du mois, le salaire du mois en cours ne saurait donner prise au jeu de la prescription ; qu'en retenant donc la date du 24 avril 2001 comme point de départ du délai de prescription, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L 3245-1 du Code du travail ;


ALORS, TOUJOURS SUBSIDIAIREMENT, QUE s'agissant de la créance d'indemnité de congés payés, le point de départ de la prescription doit être fixé à l'expiration de la période en cours de laquelle les congés auraient dû être pris ; qu'en l'occurrence, cette date est le 31 mai ; qu'en retenant que la créance d'indemnité de congés payés correspondant à la période courant de novembre 2000 à avril 2001 était prescrite, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L 3245-1 du Code du travail.


DEUXIEME MOYEN DE CASSATION


Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Guy X... de sa demande tendant à obtenir un rappel de salaire au titre des « heures manquantes » ;


AUX MOTIFS QUE pour la semaine du 14 mai au 20 mai 2001, l'appelant indique que le contrat de travail prévoit une durée hebdomadaire de travail de 18,50 heures et qu'il n'a travaillé que 16,5 heures, de sorte qu'il manque 2 heures de travail qui doivent lui être rémunérées même si elles n'ont pas été travaillées dans la mesure où les heures sont prévues au contrat et qu'il s'est tenu à la disposition de l'employeur ; que cependant la semaine dont s'agit est incluse dans la période du 8 mai au 24 mai 2001 pour laquelle il a été conclu le contrat à durée déterminée daté du 2 mai 2001 prévoyant une durée hebdomadaire de 18,50 heures et pour l'ensemble de cette période, le salarié a été payé sur la base de 64,50 heures de travail effectuées de sorte qu'il n'apparaît pas d'heures manquantes ; qu'il en est de même pour la semaine du 18 au 24 juin 2001 (CDD daté du 5 juin 2001 pour la période du 5 juin au 27 juin 2001 prévoyant une durée hebdomadaire de travail de 14 heures, le salarié ayant été payé pour l'ensemble de la période sur la base de 63,50 heures effectuées) ; qu'il en est de même pour chacune des semaines mentionnées par le salarié dans son tableau figurant en page 23 de ses conclusions ; que l'examen des différents contrats de travail à durée déterminée et des bulletins de salaire afférents à chacun d'entre eux fait apparaître qu'il n'y a pas d' « heures manquantes » par rapport à la durée hebdomadaire de travail contractuellement prévue ; que par suite, ce chef de demande sera rejeté ;


1° ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les parties et que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement ce qui est demandé ; qu'en retenant que l'examen des différents contrats de travail à durée déterminée et des bulletins de salaire afférents à chacun d'entre eux faisait apparaître qu'il n'y avait pas d'« heures manquantes » par rapport à la durée hebdomadaire de travail contractuellement prévue quand Monsieur X..., dans ses écritures d'appel, invitait la juridiction à vérifier si l'employeur n'avait pas commis des manquements dans son obligation de fournir le nombre d'heures de travail hebdomadaires tel que stipulées dans les contrats de travail, la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;


2° ALORS QUE si l'article L. 212-8-1, devenu l'article L. 3122-9 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, permet à l'employeur de faire varier la durée hebdomadaire du travail sur tout ou partie de l'année, c'est à la condition qu'une convention ou un accord collectif étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement soit conclu sur ce point ; qu'il appartient au juge de constater l'existence d'un tel accord ; qu'après avoir relevé que l'examen des différents contrats de travail à durée déterminée et des bulletins de salaire afférents à chacun d'entre eux faisait apparaître qu'il n'y avait pas d'« heures manquantes » par rapport à la durée hebdomadaire de travail contractuellement prévue, la cour d'appel, qui a fait application d'un mécanisme de modulation sans même constater l'existence d'un accord de modulation opposable au salarié, a violé l'article L. 3122-9 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige ;


3° ALORS QUE la mise en place de la modulation ne suppose pas seulement l'existence d'un accord collectif, mais également l'accord exprès du salarié ; qu'en faisant application d'un accord de modulation sans même rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par les écritures d'appel du salarié, que le salarié aurait donné son accord exprès à la mise en place de la modulation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3122-9 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige.


TROISIEME MOYEN DE CASSATION


Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Guy X... de sa demande tendant à obtenir un rappel de salaire au titre des « périodes de carences » ;


AUX MOTIFS QUE l'appelant n'établit pas qu'au cours des périodes séparant chaque contrat de travail à durée déterminée, il s'est tenu à la disposition de l'employeur lequel ne saurait être tenu rétroactivement, du fait de la requalification des contrats de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, d'une obligation de fournir du travail pendant les périodes intermédiaires ; que par suite, ce chef de demande sera rejeté ;


1° ALORS QUE le juge qui fait droit à la demande de requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, s'il doit allouer au salarié, en application des dispositions de l'article L. 1245-2 du code du travail, une indemnité spécifique de ce chef, peut, sans réaliser un cumul d'indemnités illicite, accorder au salarié les sommes qu'il estime dues au titre de salaires impayés ; qu'en énonçant que l'employeur ne serait être tenu rétroactivement, du fait de la requalification des contrats de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, d'une obligation de fournir du travail pendant les périodes intermédiaires, la cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif inopérant, a privé sa décision de la base légale au regard de l'article L. 3211-1 du code du travail ;


2° ALORS QUE le juge qui fait droit à une demande de requalification de contrats de travail à durée déterminée successifs en un contrat à durée indéterminée, s'il doit allouer une indemnité spécifique de ce chef, peut, sans réaliser un cumul illicite d'indemnités, accorder les sommes qu'il estime dues au titre de salaires impayés ; qu'il peut en conséquence allouer au salarié en sus un rappel de salaire au titre de périodes qui séparaient l'exécution des contrats de travail à durée déterminée irréguliers, pendant lesquelles le salarié est resté à la disposition de l'employeur ; qu'en déboutant Monsieur X... de cette demande, au motif qu'il n'établissait pas qu'il serait resté à la disposition de l'employeur, sans même rechercher ainsi qu'elle y était invitée, si la fréquence, la régularité et le nombre des contrats n'établissaient pas que le salarié était resté à la disposition de son employeur, la cour d'appel a de nouveau privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3211-1 du code du travail.


QUATRIEME MOYEN DE CASSATION


Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que, pour la période non atteinte par la prescription, des heures complémentaires au delà du dixième ont été réglées à un taux majoré, de même que certaines heures supplémentaires ;


AU MOTIF QUE les bulletins de paie font apparaître certaines heures de travail à un taux supérieur à celui du salaire de base ;


ALORS QUE, les bulletins de salaire versés aux débats ne font pas apparaître le paiement d'heures complémentaires ou supplémentaires à un taux majoré ; que le bulletin de salaire établi pour la période du 1er au 14 janvier 2002, par exemple, révèle au contraire que les heures dites « complémentaires » ont été payées au taux horaire de base ; qu'en se déterminant de la sorte, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce bulletin de paie.


CINQUIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)


Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Guy X... de sa demande à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil ;


AUX MOTIFS QU'il n'est démontré que l'employeur aurait commis une faute au titre des « heures manquantes » et des heures sur les « périodes de carence », étant relevé que le recours dans des conditions irrégulières au contrat de travail à durée déterminée a été sanctionné par l'allocation d'une indemnité de requalification ; que par suite, la demande en paiement de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil sera rejetée ;


1° ALORS QU'en déboutant Monsieur Guy X... de sa demande à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil au motif qu'il n'était pas démontré que l'employeur aurait commis une faute au titre des heures manquantes et des périodes de carence quand elle s'était dispensée de constater l'existence d'un accord de modulation auquel le salarié aurait donné son accord exprès, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil.


2° ALORS QUE le juge qui fait droit à la demande de requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, s'il doit allouer au salarié, une indemnité spécifique de ce chef, peut sans réaliser un cumul d'indemnités illicite accorder au salarié les sommes qu'il estime dues au titre de salaires impayés ou faire droit à une demande au titre d'un préjudice distinct; qu'en refusant de faire droit à la demande du salarié au motif inopérant que le recours dans des conditions irrégulières au contrat de travail à durée déterminée avait été sanctionné par l'allocation d'une indemnité de requalification, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1242-5 du code du travail ensemble l'article 1382 du code civil.

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