15 janvier 2013
Cour de cassation
Pourvoi n° 11-28.109

Chambre sociale

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2013:SO00065

Titres et sommaires

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - employeur - pouvoir disciplinaire - sanction - conditions - faute du salarié - prescription - délai - interruption - cas

La notification par l'employeur, après l'engagement de la procédure disciplinaire, d'une proposition de modification de contrat de travail soumise au salarié, interrompt le délai de deux mois prévu par l'article L. 1332-4 du code du travail qui court depuis la convocation à l'entretien préalable. Le refus de cette proposition par le salarié interrompt à nouveau ce délai, en sorte que la convocation du salarié par l'employeur à un entretien préalable en vue d'une autre sanction disciplinaire doit intervenir dans les deux mois de ce refus

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique qui est recevable :

Vu l'article L. 1332-4 du code du travail ;

Attendu que la notification par l'employeur, après l'engagement de la procédure disciplinaire, d'une proposition de modification de contrat de travail soumise au salarié, interrompt le délai de deux mois prévu par l'article L. 1332-4 du code du travail qui court depuis la convocation à l'entretien préalable ; que le refus de cette proposition par le salarié interrompt à nouveau ce délai ; qu'il s'ensuit que la convocation du salarié par l'employeur à un entretien préalable en vue d'une autre sanction disciplinaire doit intervenir dans les deux mois de ce refus ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 2 mai 1989 par la société Inforsud en qualité d'agent technique, a été reclassé le 1er janvier 2002, dans le cadre d'un plan social, au sein de la société Chabrillac avec la qualification d'attaché trafic ; qu'il a été convoqué le 11 février 2008 à un entretien préalable à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement pour faute grave qui s'est tenu le 19 février 2008 ; que le 17 mars 2008, l'employeur lui a notifié une décision de rétrogradation au poste d'attaché administratif, en précisant les modalités d'acceptation ou de refus de cette modification du contrat de travail ; que par lettre du 15 avril 2008, le salarié a contesté les griefs qui lui étaient reprochés et réitéré sa demande de réintégration dans la société Inforsud ; qu'il a été convoqué le 20 mai 2008 à un nouvel entretien préalable reporté au 10 juin 2008 en raison d'un arrêt maladie ; que par lettre du 18 juin 2008, il a été licencié pour faute grave ;

Attendu que pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que la convocation au premier entretien préalable ayant eu lieu le 11 février 2008 et, à défaut de manifestation expresse d'acceptation ou de refus du salarié à la mesure de rétrogradation, la prescription des faits fautifs était normalement acquise le 11 avril 2008 ; qu'il appartenait à l'employeur d'organiser une procédure de rétrogradation lui permettant de recueillir la réponse du salarié dans un délai l'autorisant à convoquer le salarié à un nouvel entretien avant cette date impérative ; qu'il en déduit que lorsque la nouvelle procédure avait été mise en oeuvre le 20 mai 2008, les faits fondant le licenciement pour faute grave étaient prescrits depuis le 11 avril 2008 ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le délai de prescription de l'article L. 1332-4 du code du travail avait été interrompu le 11 février 2008 par la convocation au premier entretien préalable, puis le 17 mars 2008 par la notification de la proposition de rétrogradation par l'employeur et le 15 avril 2008 par la lettre du salarié aux termes de laquelle celui-ci a refusé la mesure de rétrogradation, en sorte que le délai de deux mois n'était pas expiré lors de la convocation du 20 mai 2008 à un nouvel entretien préalable au licenciement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 octobre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Chabrillac.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement de M. X... dénué de cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné l'exposante à lui verser les sommes de 3. 269 euros à titre d'indemnité de préavis, de 362, 90 euros au titre des congés payés afférents, de 5. 443, 50 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement, de 37. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse, d'AVOIR condamné l'exposante au titre de l'article 700 du Code du procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

AUX MOTIFS QUE « Monsieur Denis X... a été engagé le 2 mai 1989 par la société INFORSUD en qualité d'agent technique. Après diverses évolutions de sa situation professionnelle à l'intérieur du groupe INFORSUD, Monsieur Denis X... faisait l'objet, dans le cadre du plan social d'INFORSUD Diffusion, d'un reclassement, le 1er janvier 2002, au sein de la société SAS CHABRILLAC, avec la qualification d'attaché trafic. Plusieurs difficultés émaillaient la relation de travail, le salarié reprochant à l'employeur de ne pas avoir correctement défini ses fonctions et l'accroissement de sa charge de travail ; l'employeur adressant plusieurs avertissements au salarié qui en contestait la teneur. Le 11 février 2008, la SAS CHABRILLAC convoquait le salarié pour le 19 février 2008 à un entretien préalable à un licenciement pour faute grave. Le 17 mars 2008 la SAS CHABRILLAC a notifié à Monsieur Denis X... une décision de rétrogradation à titre disciplinaire au poste d'attaché administratif, en précisant les modalités d'acceptation ou de refus de cette modification du contrat de travail. Par courrier du 15 avril 2008, Monsieur Denis X... contestait les griefs qui lui étaient reprochés et indiquait qu'il réitérait sa demande de réintégrer INFORSUD. Le 23 avril suivant, la SAS CHABRILLAC répondait qu'elle maintenait les griefs énoncés à l'encontre du salarié et la rétrogradation à titre disciplinaire et sollicitait de la part de celui-ci une réponse expresse concernant le poste proposé pour la mise en oeuvre de la rétrogradation, accordant un nouveau délai de 10 jours, précisant qu'au terme de ce délai elle envisagerait la mise en oeuvre de la rupture du contrat de travail pour faute grave. Constatant l'absence de réponse expresse de la part du salarié, la SAS CHABRILLAC a convoqué Monsieur Denis X... le 20 mai 2008, à un entretien préalable au licenciement pour le 2 juin 2008. Le 29 mai 2008, en raison de l'arrêt maladie du salarié du 27 mai au 27 juin 2008, la SAS CHABRILLAC reportait la date de l'entretien préalable en convoquant Monsieur Denis X... à un nouvel entretien pour le 10 juin 2008 afin de tenir compte des horaires de sorties autorisées par le médecin prescripteur. Monsieur Denis X... a été licencié pour faute grave par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 18 juin 2008. Le 27 juin 2008, Monsieur Denis X... contestant ce licenciement a saisi le Conseil de Prud'hommes de Toulouse, qui par jugement du 11 mars 2010, retenant la prescription des faits fautifs a considéré que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné la SAS CHABRILLAC à payer les sommes suivantes :
-3. 629, 00 € au titre de l'indemnité de préavis,
362, 90 € au titre des congés payés y afférents,
-5. 443, 50 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,
-30. 000, 00 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
La SAS CHABRILLAC a relevé appel de la décision dans des conditions de forme et de délais qui ne sont pas critiquables. L'appelante et l'intimé ont développé oralement à l'audience leurs conclusions écrites déposées au greffe respectivement les 25 janvier 2011 et 11 avril 2011, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et aux termes desquelles :- la SAS CHABRILLAC sollicite l'infirmation du jugement et le débouté de l'ensemble des demandes de Monsieur Denis X... et la condamnation de celui-ci au paiement d'une somme de 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.- Monsieur Denis X... demande la confirmation du jugement du Conseil de Prud'hommes en toutes ses dispositions à l'exception du quantum de dommages-intérêts qu'il souhaite voir porter à la somme de 50. 4435 €, ainsi qu'une indemnité de 2. 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il résulte des articles L. 1332-1 et suivants du Code du Travail relatif à la procédure disciplinaire que lorsque le salarié n'accepte pas une mesure de rétrogradation disciplinaire notifiée après un premier entretien préalable, l'employeur qui ne peut imposer cette modification du contrat de travail et qui envisage de prononcer un licenciement au lieu de la sanction initiale, doit convoquer l'intéressé à un nouvel entretien dans le délai de 2 mois de la prescription des faits fautifs prévu à l'article L. 1332-4 du Code du Travail ; le délai étant interrompu par la convocation et par le refus du salarié. Par des motifs pertinents que la Cour adopte le Conseil de Prud'hommes qui a justement relevé qu'aucun fait nouveau n'était invoqué à l'appui du licenciement à l'exception de ceux ayant motivé la décision de rétrogradation, que la convocation au premier entretien préalable ayant eu lieu le 11 février 2008, la prescription des faits fautifs était normalement acquise au 11 avril 2008, que le délai de réponse accordé au salarié expirait le 16 avril, soit 5 jours après l'acquisition de la prescription des faits fautifs, qu'il appartenait à l'employeur d'organiser une procédure de rétrogradation lui permettant de recueillir la réponse du salarié dans un délai l'autorisant à convoquer le salarié avant cette date impérative, qu'à défaut de manifestation expresse d'acceptation ou de refus du salarié, il appartenait à l'employeur de procéder immédiatement à la convocation à un nouvel entretien préalable, que ni les arrêts maladie ni la procédure de rétractation n'avaient eu pour effet de suspendre le délai de prescription, a pu ainsi considérer à bon droit que lorsque la nouvelle procédure avait été mise en oeuvre le 20 mai 2008, la prescription des faits fautifs était acquise depuis le 11 avril 2008 et qu'en conséquence le licenciement pour faute grave de Monsieur Denis X... intervenu, 18 juin 2008 en se fondant sur de faits antérieurs au 11 février 2008 était dépourvu de cause réelle sérieuse. La décision du Conseil de Prud'hommes doit être confirmée sur ce point. Le quantum des sommes allouées au titre des indemnités de rupture n'étant pas contesté, la décision sera également confirmée. Monsieur Denis X..., âgé de 52 ans, avait près de 20 ans d'ancienneté dans le groupe au jour de son licenciement et percevait un salaire moyen mensuel de 1. 800 €. Il justifie avoir été indemnisé par la caisse primaire d'assurance maladie pendant plus de 2 ans à la suite de son licenciement et avoir été classé en invalidité 2e catégorie à compter du 1er octobre 2010. Il apparaît donc que le Conseil de Prud'hommes a fait une appréciation erronée du préjudice subi par le salarié à la suite de la rupture de son contrat de travail et que la Cour estime à 37. 000 €. La décision sera réformée sur ce point » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES, QU'« une irrégularité de procédure n'est pas en soi de nature à priver un licenciement de cause réelle et sérieuse ; qu'il convient cependant de préciser qu'une absence de procédure ou un licenciement fondé sur des faits prescrits produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; Attendu que si le licenciement de M. Denis X... a été prononcé pour faute grave et que les parties ont abondamment débattu sur la caractérisation de ladite faute, il n'en demeure pas moins que le salarié soutient d'abord que l'existence d'une faute grave, dans le cadre de cette procédure, ne saurait être admise pour deux raisons dont il convient d'apprécier la portée ; Qu'en premier lieu, il allègue la prescription des faits fautifs ; Qu'ensuite, il invoque la règle de l'impossibilité pour l'employeur de sanctionner deux fois les mêmes fautes. Attendu que s'il ressort que l'un ou l'autre de ces deux moyens est caractérisé au terme de cette analyse, il ne sera pas utile d'examiner la pertinence des griefs contenus dans la lettre de licenciement. Sur la prescription des faits fautifs ; Attendu qu'aux termes de l'article L. 1332-4 du Code du Travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à j'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ; que toutefois des fautes antérieures à ce délai de deux mois et déjà sanctionnées peuvent être invoquées par l'employeur à la suite d'un nouveau manquement du salarié ; Attendu de plus l'article L. 1332-2 du même code dispose que lorsque l'employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en lui précisant l'objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n'ayant pas d'incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié. Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise. Au cours de l'entretien, l'employeur indique le motif de la sanction envisagée et recueille les explications du salarié. La sanction ne peut intervenir moins d'un jour franc, ni plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien. Elle est motivée et notifiée à l'intéressé. Attendu qu'en l'espèce, le délai de prescription de deux mois des faits fautifs prévu à l'article L. 1332-4 du Code du Travail a été interrompu par l'engagement des poursuites disciplinaires du fait de la convocation à l'entretien préalable du 11 février 2008. Que par suite, l'employeur disposait d'un délai d'un mois après l'entretien préalable du 19 février 2008 pour arrêter sa position ; Que l'employeur a pu valablement le 17 mars 2008 signifier à M. Denis X... qu'il renonçait à procéder à son licenciement pour faute grave et qu'il prenait la décision de mettre en oeuvre sa rétrogradation à titre disciplinaire ; Que s'agissant d'une modification substantielle du contrat de travail, l'employeur a également respecté les droits du salarié en sollicitant sa position ; Que de même, la SAS CHABRILLAC pouvait envisager de prononcer le licenciement de M. Denis X... au lieu de la sanction disciplinaire refusée dès lors qu'il devait convoquer l'intéressé à un nouvel entretien et aux conditions que cette nouvelle procédure soit engagée dans un délai restreint et qu'à cette date la prescription des faits ne soit pas acquise. Attendu qu'il est constant que la procédure du licenciement pour faute grave de M. Denis X... a duré plus de quatre mois et que les faits sur lesquels la SAS CHABRlLLAC s'est fondée pour engager ladite procédure sont les mêmes que ceux mentionnés dans la lettre de licenciement. Attendu que l'employeur prétend, en s'appuyant sur un arrêt de la Cour de Cassation du 27 mars 2007 (n° 05-41. 921), que la prescription des faits fautifs s'analyse au regard du délai d'un mois qui commence à courir à compter de l'entretien préalable et que, dès lors que le licenciement est intervenu le 18 juin 2008, soit 8 jours après la tenue du deuxième entretien préalable, suite au refus de M. Denis X... d'accepter sa rétrogradation, la prescription des faits fautifs n'était pas acquise à cette date ; Que peu importe, pour la SAS CHABRlLLAC, une fois l'engagement des poursuites disciplinaires accompli dans le délai prévu à l'article L. 1332-4 du Code du Travail, soit le 11 février 2008, le déroulement et la durée totale de la procédure dès lors que le délai d'un mois entre la date du dernier entretien préalable et la notification du licenciement ait été respecté ; Que concernant la longueur inhabituelle de la procédure, l'employeur invoque les nombreuses absences pour maladie de M. Denis X..., le contenu de son courrier du 15 avril 2008 qui ne répondait pas à la question posée et qui aurait amené la SAS CHABRlLLAC à lui octroyer un délai supplémentaire de 10 jours pour recueillir sa réponse. Attendu tout d'abord, il convient de préciser que l'interprétation que fait l'employeur de la prescription des faits fautifs revient à dire qu'une fois accomplie la formalité de la convocation à l'entretien préalable dans le délai de deux mois prévu à l'article L. 1332-4 du Code du Travail, l'interruption de cette prescription demeure acquise quelle que soit la durée de la procédure. Que faire abstraction du critère de cette durée dans le cadre d'un licenciement pour faute grave ou plus généralement dans celui d'une procédure disciplinaire, ne saurait être admis en ce qu'il n'est pas compatible avec la logique des textes qui est basée sur l'urgence ; Que d'ailleurs, l'arrêt de la Cour de Cassation auquel se réfère la SAS CHABRILLAC, s'il dit que le délai d'un mois prévu par l'article L. 1332-2 du Code du Travail court à compter de la date fixée pour un nouvel entretien, ne dit pas pour autant que la procédure entre la convocation au premier entretien préalable et la modification du licenciement n'est pas assujettie à un impératif de durée ; Attendu que si la convocation à l'entretien préalable interrompt le délai de prescription de deux mois prévus à l'article L. 1332-4 du Code du Travail, un nouveau, délai de deux mois commence à courir à compter de cette date ; Que ni les arrêts maladie de M. Denis X..., ni la procédure de rétrogradation n'ont pour effet de suspendre. Attendu qu'en l'espèce, la convocation au premier entretien préalable ayant eu lieu le 11 février 2008, la prescription des faits fautifs donc acquise au 11 avril 2008 ; Qu'en conséquence, la SAS CHABRILLAC devait organiser une procédure de rétrogradation dans un délai l'autorisant à convoquer le salarié avant cette date impérative à un nouvel entretien préalable pour envisager le licenciement pour faute grave. Que cette convocation a été effectuée le 20 mai 2008, soit 40 jours après l'expiration du délai imparti à l'employeur pour procéder à une nouvelle convocation. Attendu que quand bien même l'argumentation développée par la SAS CHABRILLAC quant à sa volonté de ne pas rompre le contrat en laissant le temps nécessaire au salarié pour prendre une décision avisée ne saurait être minimisée par le Conseil, il n'en demeure pas moins que sa procédure de rétrogradation laisse perplexe quant à sa conception ; Qu'il ne saurait être retenu l'argument de la SAS CHABRILLAC concernant une prétendue difficulté d'interprétation liée au contenu du courrier qu'adressa M. Denis X... à son employeur le 15 avril 2008. Qu'en effet, la proposition de rétrogradation a été communiquée à M. Denis X... le 17 mars 2008 ; Que les modalités d'acceptation ou de refus de ladite proposition ont été libellées de la façon suivante : « Cette acceptation pourra résulter de la signature d'un double de la présente et de la fiche de fonction annexée, précédée de la mention « lu et approuvé » ou de votre silence durant un délai d'un mois à compter de la date de première présentation de la présente conformément aux dispositions de l'article L. 321-1-2 du Code du Travail. Il est bien entendu qu'en cas de refus exprès ou tacite de cette décision, nous serons conduit à en tirer les conséquences en envisageant la mise en oeuvre de la rupture de votre contrat de travail pour faute grave initialement envisagée », attendu que nonobstant la surprenante référence à l'article L. 321-1-2 du Code du Travail, relative à la réglementation sur le licenciement économique, il convient de retenir des règles fixées par l'employeur pour recueillir la position de M. Denis X... ; que le délai de réponse accordé au salarié expirait le 16 avril 2008 soit 5 jours après l'acquisition de la prescription des faits fautifs, selon une articulation des solutions présentées au salarié et dont l'énoncé démontre un défaut de conception, la possibilité d'une acceptation ou d'un refus tacite s'annulait réciproquement, qu'il ressort en définitive que M. Denis X... ne pouvait accepter sa rétrogradation qu'en signant le double de la lettre du 17 mars et de la fiche fonction annexée. Que faute d'une telle manifestation expresse d'acceptation ou d'un refus exprès notifiés dans les délais, aucune place ne pouvait être laissée à l'interprétation de la volonté du salarié. Attendu que son courrier du 15 avril 2008 ne faisait nullement référence à une acceptation ou un refus de la rétrogradation, l'employeur devait en tirer les conséquences en constatant le refus de M. Denis X... et procéder immédiatement la convocation à un nouvel entretien préalable ; Que pourtant, déjà hors délai, l'employeur a plus que tardé à agir, repoussant sa décision de convoquer le salarié à un nouvel entretien préalable à une date, le 20 mai 2008, incompatible avec les délais restreints que nécessite une procédure de ce type ; Attendu qu'il ressort de tout ce qui précède que, lorsque la nouvelle procédure a été mise en oeuvre le 20 mai 2008, la prescription des faits fautifs était acquise depuis le 11 avril 2008 ; Qu'en conséquence, le licenciement pour faute grave de M. Denis X..., intervenu le 18 juin 2008, en se prévalant sur des faits antérieurs au 11 février 2008 est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Sur les conséquences du licenciement : Attendu qu'un salarié objet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse a droit à une indemnité de préavis, à une indemnité de licenciement et à des dommages et intérêts destinés à réparer le préjudice subi, étant rappelé que le montant de ceux-ci ne peut être inférieur à la somme déterminée par l'article L. 1235-3 du Code du Travail. Attendu que l'ancienneté de M. Denis X... au service de la SAS CHABRILLAC est supérieure à deux ans et que l'entreprise compte plus de Il salariés, le salarié peut revendiquer : une indemnité de préavis d'un montant de 3. 629, 00 euros plus les congés payés y afférents, une indemnité légale de licenciement de 5. 443, 50 euros, des dommages et intérêts (…) ; Sur les autres demandes : attendu qu'il convient d'ordonner à la SAS CHABRILLAC de remettre à M. Denis X... un certificat de travail portant les dates d'emploi du 2 mai 1989 au 20 août 2008 ainsi qu'une attestation ASSEDIC conforme aux dispositions de la présente décision et sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette remise d'une astreinte. Attendu que l'exécution provisoire est de droit en ce qui concerne la remise du certificat de travail, la remise de l'attestation ASSEDIC, le paiement de sommes au titre de rémunération, en application de l'article R. 1454-28 du Code du Travail, la moyenne des trois demi ers mois de salaire de M. Denis X... étant de 1. 814, 50 euros » ;

ALORS QUE lorsque le salarié refuse une mesure de rétrogradation disciplinaire notifiée après un premier entretien préalable, l'employeur qui envisage de prononcer un licenciement au lieu de la sanction initiale doit convoquer l'intéressé à un nouvel entretien dans le délai de la prescription de deux mois prévu à l'article L. 1332-4 du code du travail ; que le refus du salarié interrompt ce délai ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a considéré que M. X... avait refusé le 15 avril 2008 la rétrogradation disciplinaire qui lui avait été proposée le 17 mars 2008 après un premier entretien préalable auquel il avait été convoqué le 11 février 2008, et a constaté que l'employeur, qui avait ensuite envisagé de le licencier, l'avait convoqué, le 20 mai 2008, à un second entretien préalable ; que pour retenir que la prescription était acquise au 11 avril 2008, la Cour d'appel a considéré que le délai avait commencé à courir à compter de la première convocation à un entretien préalable ; qu'en statuant ainsi quand il résultait de ses propres constatations que le délai de prescription n'avait commencé à courir qu'à compter du refus du salarié en date du 15 avril 2008, la Cour d'appel a violé l'article L. 1332-4 du Code du Travail.

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