3 juin 2009
Cour de cassation
Pourvoi n° 07-42.432

Chambre sociale

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2009:SO01158

Titres et sommaires

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - licenciement - licenciement disciplinaire - formalités préalables - formalités prévues par des dispositions conventionnelles ou un règlement intérieur - garantie de fond - violation - défaut - conditions - portée - saisine d'une instance disciplinaire - avis obligatoire - avis motivé - absence

Le non-respect par l'employeur du délai minimal de convocation devant un conseil de discipline, prévu par une convention collective, ne constitue pas la violation d'une garantie de fond, sauf si cette irrégularité a eu pour effet de priver le salarié d'assurer utilement sa défense devant cet organisme

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :





Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 4 avril 1995 en qualité de conducteur-receveur par la société des transports de l'agglomération de Montpellier (TAM), a été licencié pour faute grave le 31 janvier 2005 ;


Sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche :


Vu les articles L. 1232-1, L. 1332-1, L. 1332-2 et L. 2251-1 du code du travail et l'article 54 de la Convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs du 11 avril 1986, étendue par arrêté du 25 janvier 1993 ;


Attendu que pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le délai entre la remise de la convocation et la tenue du conseil de discipline, prévu par l'article 54 de la Convention collective n'a pas été respecté ;


Attendu, cependant, que le non-respect d'un délai conventionnel de saisine d'un organisme consultatif ne constitue pas la violation d'une garantie de fond, sauf si cette irrégularité a eu pour effet de priver le salarié de la possibilité d'assurer utilement sa défense devant cet organisme ;


Qu'en statuant comme elle l'a fait alors qu'il ne résulte pas de ses constatations que l'inobservation du délai de convocation a privé l'intéressé de la possibilité d'assurer utilement sa défense devant le conseil de discipline, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;


Et sur le premier moyen, pris en ses trois premières branches :


Vu les articles L. 1232-1, L. 1332-1, L. 1332-2 et L. 2251-1 du code du travail et l'article 49 de la Convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs du 11 avril 1986, étendue par arrêté du 25 janvier 1993 ;


Attendu que pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que l'avis du conseil de discipline, rapportant seulement le résultat du scrutin, est dépourvu de motivation ;


Qu'en statuant ainsi alors que, lorsque les procédures conventionnelles protectrices des droits du salarié contre son licenciement ont été mises en oeuvre par l'employeur, l'absence de motivation du conseil de discipline qui résulte de ce que ses membres n'ont pu se départager n'a pas pour effet de mettre en échec le pouvoir disciplinaire de l'employeur et de rendre irrégulière au regard des dispositions conventionnelles la procédure de licenciement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le second moyen :


CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 mars 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;


Condamne M. X... aux dépens ;


Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois juin deux mille neuf.




MOYENS ANNEXES au présent arrêt


Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Saem transports de l'agglomération de Montpellier.


PREMIER MOYEN DE CASSATION


III. Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement de Monsieur X..., d'AVOIR, en conséquence, condamné la Société TAM à lui payer les sommes de 4.147,40 à titre d'indemnité de préavis, 1.866,33 à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et 15.000 à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de l'AVOIR condamnée à rembourser aux «organismes concernés» les indemnités de chômage versées à Monsieur X... dans la limite des six premiers mois ;


AUX MOTIFS QUE «la convention collective des réseaux de transports publics urbains de voyageurs prévoit en son chapitre VI concernant la discipline générale que : - les sanctions du 2ème degré (licenciement avec ou sans indemnité) doivent être prises après avis motivé du conseil de discipline (article 49), - les questions soumises au conseil de discipline sont relatives à l'examen des fautes des agents de l'entreprise susceptibles de comporter une sanction du deuxième degré (article 51 IV), - le chef de service chargé de l'instruction de l'affaire, entend l'intéressé et lui donne connaissance de son dossier et des pièces relatives aux faits reprochés, il dresse, séance tenante, un procèsverbal de l'audience qu'il fait signer par l'intéressé et par l'assistant de celui-ci, après leur en avoir donné lecture (article 52 alinéa 2), - l'agent doit être avisé de sa comparution devant le conseil de discipline, huit jours au moins avant la réunion de ce conseil (article 54 alinéa 2), - après délibération, le conseil émet son avis sur la sanction disciplinaire à appliquer à l'agent qui lui est déféré (article 54, alinéa 4), - le président recueille les voix sans voter lui-même et transmet l'avis du conseil de discipline au directeur du réseau qui déterminé la sanction à appliquer ; que lors de l'entretien préalable au licenciement le 17 janvier 2005, la société TAM a remis à Monsieur X... une lettre datée du 14 janvier 2005 l'invitant à se présenter le 20 janvier 2005 devant la personne chargée d'instruire son dossier et le convoquant le 21 janvier 2005 devant le conseil de discipline ; que le délai entre la remise de cette convocation et la tenue du conseil est de cinq jours et ne respecte pas celui de huit jours prévu à l'article 54 alinéa 2 de la convention collective ; que l'avis du conseil de discipline du 21 janvier 2005 est ainsi rédigé : «1 "Pas de sanction", 2 "Suspension temporaire sans solde", 3 "Licenciement sans indemnité"», et suivi des noms et signatures des membres, les chiffres susénoncés correspondant au nombre de voix du scrutin ; que force est de constater que cet avis ne permet pas de connaître les faits reprochés à Monsieur X... et les faits qui les appuyaient ; qu'il ne contient aucune indication sur l'appréciation de leur réalité et de leur gravité par les membres du conseil et qu'il s'avère dépourvu de toute motivation en infraction à l'obligation de l'avis motivé prévu par l'article 49 de la convention collective ; que vainement la société TAM soutient-elle qu'en l'absence de toute précision à l'article 54 consacré à la procédure devant le conseil de discipline sur la motivation de la décision, l'avis motivé ne peut être que le vote sur telle ou telle sanction et que c'est un vote sur le choix de la sanction auquel il est procédé et non pas un vote sur la raison de celle-ci ; qu'en effet, d'une part le fait que l'article 54 ne contienne aucune disposition sur la motivation est sans portée dès lors qu'un autre article (art. 49) la prévoit et, d'autre part, un vote ne peut être assimilé à une motivation et retenir une telle assertion viderait de sa portée l'obligation de l'avis motivé prévue par la convention collective ; qu'ainsi la procédure conventionnelle de licenciement n'a pas été respectée ; que les formalités particulières imposées par la convention collective préalablement au licenciement constituent pour le salarié une garantie de fond dont la méconnaissance rend sans cause réelle et sérieuse la rupture du contrat de travail ; qu'ainsi, le licenciement de Monsieur X... doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse» ;


ALORS, D'UNE PART QUE l'employeur ne peut contraindre les membres du conseil de discipline à rendre ou non un avis, pas plus qu'à le motiver de telle ou telle manière ; que dès lors, si la consultation d'un organisme chargé, en vertu d'une disposition conventionnelle, de donner un avis sur la mesure disciplinaire envisagée par l'employeur constitue pour le salarié une garantie de fond, la régularité du licenciement dépend exclusivement de la convocation régulière du conseil de discipline et n'est pas subordonnée à des conditions tenant au contenu même de l'avis, peu important que la convention collective prévoie qu'il devrait être motivé ; qu'en déclarant dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement de Monsieur X..., au motif que l'avis rendu par le conseil de discipline n'était pas motivé, cependant qu'elle constatait que l'employeur avait recueilli l'avis d'un conseil de discipline régulièrement composé, ce dont il résultait qu'il avait parfaitement respecté les obligations mises à sa charge par la convention collective en matière de procédure disciplinaire, la Cour d'appel a violé les articles L. 122-14-3 et L. 122-41 du Code du travail, ensemble les articles 49 et suivants de la Convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs ;


QU'IL EN VA D'AUTANT PLUS AINSI QUE lorsque les procédures conventionnelles protectrices des droits du salarié contre son licenciement ont été mises en oeuvre par l'employeur, l'absence d'avis du conseil de discipline régulièrement saisi qui résulte de ce que ses membres n'ont pu se départager n'a pas pour effet de mettre en échec le pouvoir disciplinaire de l'employeur et de rendre irrégulière la procédure disciplinaire de licenciement ; que doit être assimilée à cette hypothèse la situation où les membres du conseil de discipline se sont trouvés, à l'issue d'un vote à bulletin secret, en situation de partage des voix pour et contre le licenciement et où l'avis rendu, faute de pouvoir dégager un avis -ni a fortiori une motivation– majoritaire, s'est trouvé réduit au détail des votes exprimés ; que la cour d'appel, qui déclare dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement en raison de l'absence de motivation de l'avis rendu par le conseil de discipline, cependant qu'elle constatait qu'à l'issue d'un vote à bulletin secret, sur les six membres ayant voix délibérative au sein du conseil de discipline, trois s'étaient déclarés favorables au licenciement, et trois hostiles, ce dont il résultait que le conseil, en état de partage des voix, n'avait pas pu dégager d'avis majoritaire, a méconnu les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations au regard des articles L. 122-14-3 et L. 122-41 du Code du travail, ensemble les articles 49 et suivants de la Convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs ;


ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'à supposer même que l'absence de motivation de l'avis rendu par le Conseil de discipline puisse être considérée comme une irrégularité, ladite irrégularité ne saurait constituer, dès lors que le conseil a été régulièrement composé et consulté, qu'une irrégularité de forme justifiant tout au plus que soient octroyés au salarié des dommages et intérêts pour non respect de la procédure conventionnelle de licenciement ; que la Cour d'appel, en jugeant au contraire que cette prétendue irrégularité aurait pour effet de priver automatiquement de cause réelle et sérieuse le licenciement, a en toute hypothèse violé, pour cette raison supplémentaire, les articles L. 122-14-3 et L. 122-41 du Code du travail, ensemble les articles 49 et suivants de la Convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs ;


ALORS, ENFIN ET EN TOUTE HYPOTHÈSE, QUE le nonrespect du délai de huit jours, prévu par l'article 54, alinéa 2 de la Convention collective, entre la convocation du salarié devant le Conseil de discipline et sa comparution devant ledit conseil, ne constitue pas la violation d'une garantie de fond privant le licenciement de cause réelle et sérieuse mais une simple irrégularité de forme justifiant que soient octroyés au salarié des dommages et intérêts pour non respect de la procédure conventionnelle de licenciement ; que la Cour d'appel, en déclarant le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, au motif que le délai précité n'avait pas été respecté, a violé l'article L. 122-14-3 du Code du travail et l'article 54, alinéa 2 de la Convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs.





SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)


IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société TAM à payer à Monsieur X... la somme de 4.147,40 à titre d'indemnité de préavis ;


AUX MOTIFS QU'en l'absence de faute grave, il devait bénéficier d'un préavis de deux mois par application de l'article L. 122-6 3° du Code du travail et il lui revient la somme de 4.147,40 ;


ALORS QUE l'indemnité de préavis n'est pas due, même lorsque le licenciement prononcé ne repose pas sur une faute grave, si le préavis n'a pu, du fait du salarié, être effectué ; que la Cour d'appel, qui a condamné l'employeur à verser à Monsieur X... une indemnité de préavis, cependant qu'elle constatait d'une part que celui-ci était en arrêt de travail au moment du licenciement, et d'autre part qu'il travaillait, nonobstant cet arrêt de travail, pour un autre employeur, faits qui caractérisaient tous deux l'impossibilité, imputable au seul fait du salarié, d'accomplir le préavis, n'a pas tiré de ses constatation les conséquences légales qui s'en évinçaient au regard de l'article L. 122-8 du Code du travail.

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