18 avril 2000
Cour de cassation
Pourvoi n° 97-44.235

Chambre sociale

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - salaire - primes - prime de fin d'année - attribution - conditions - limites - atteinte aux libertés et droits fondamentaux du salarié - maintien du droit - refus - sanction pécuniaire illicite - constatations suffisantes - protection des droits de la personne - libertés fondamentales - libertés et droits fondamentaux du salarié - atteinte - prime - conditions d'attribution

Si l'employeur peut assortir la prime qu'il institue de conditions, encore faut-il que celles-ci ne portent pas atteinte aux libertés et droits fondamentaux du salarié. Une société ne pouvait, sans porter atteinte à la liberté de travail du salarié, subordonner le maintien du droit à la prime de fin d'année à la condition de la présence du salarié dans l'entreprise au 30 juin de l'année suivant son versement et déduire le montant de la prime du solde de tout compte du salarié qui avait démissionné avant cette date, sauf à pratiquer une sanction pécuniaire illicite.

Texte de la décision

Sur le moyen unique :


Attendu, selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Forbach, 18 juin 1997), que Mme X..., embauchée le 14 septembre 1992 en qualité d'employée de bureau par la société Rehau, a démissionné le 31 janvier 1997 ; que l'employeur ayant déduit du solde de tout compte le montant de la prime de fin d'année, versée avec le salaire de décembre 1996, aux motifs que ladite prime était remboursable si la salariée donnait sa démission avant le 30 juin de l'année suivant son versement, Mme X... a saisi la juridiction prud'homale ;


Attendu que la société Rehau fait grief au jugement de l'avoir condamnée à payer à la salariée le montant de la prime de fin d'année, alors, selon le moyen, d'une part, que même si une prime a un caractère de complément de salaire, son paiement peut être subordonné à certaines conditions ; que pour condamner la société Rehau industrie à payer à Mme X..., démissionnaire en janvier 1997, une prime de fin d'année au titre de l'année 1996, le conseil de prud'hommes a énoncé que cette gratification réunissait les caractères de constance, généralité et fixité rendant son paiement obligatoire, sans que l'employeur puisse faire référence à un acte contractuel du moment qu'il s'autorisait unilatéralement à demander le remboursement de ladite prime dans certaines conditions ; qu'en statuant ainsi quand la société Rehau industrie, qui instituait un complément de rémunération, avait la faculté d'en subordonner l'octroi à certaines conditions, le conseil de prud'hommes a violé, par refus d'application, l'article 1134 du Code civil ; que, d'autre part, dans son courrier du 23 décembre 1996 accompagnant le versement de la gratification de fin d'année, la société Rehau industrie rappelait que " ce versement correspond à un avantage supplémentaire Rehau qui ne relève d'aucune obligation légale ou conventionnelle, cette gratification est bénévole et révocable, en l'acceptant, vous prenez l'engagement de la rembourser à la société si vous donnez votre démission avant le 30 juin 1997 " ; qu'en condamnant la société Rehau industrie à payer à Mme X..., démissionnaire en janvier 1997, une prime de fin d'année au titre de l'année 1996 quand il constatait que le maintien du paiement de cette prime était subordonné par l'employeur à l'absence de démission du salarié avant le 30 juin de l'année suivant son versement, le conseil de prud'hommes a violé l'article 1134 du Code civil ;


Mais attendu que si l'employeur peut assortir la prime qu'il institue de conditions, encore faut-il que celles-ci ne portent pas atteinte aux libertés et droits fondamentaux du salarié ;


Que la société Rehau industrie ne pouvait, sans porter atteinte à la liberté de travail de la salariée, subordonner le maintien du droit à la prime de fin d'année à la condition de la présence de Mme X... dans l'entreprise au 30 juin de l'année suivant son versement et déduire le montant de la prime du solde de tout compte de la salariée qui avait démissionné avant cette date, sauf à pratiquer une sanction pécuniaire illicite ;


Que par ce motif de pur droit, substitué à ceux des premiers juges, la décision se trouve légalement justifiée ;


PAR CES MOTIFS :


REJETTE le pourvoi.

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