14 octobre 2003
Cour de cassation
Pourvoi n° 02-86.376

Chambre criminelle

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

RESPONSABILITE PENALE - personne morale - conditions - fusion - absorption - effet - societe - société en général - responsabilité pénale

Aux termes de l'article 121-1 du Code pénal, nul n'est responsable pénalement que de son propre fait. Il s'ensuit, dans le cas où une société, poursuivie pour homicide involontaire, fait l'objet d'une fusion-absorption, que la société absorbante ne peut être déclarée coupable, l'absorption ayant fait perdre son existence juridique à la société absorbée (1).

Texte de la décision

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatorze octobre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le rapport de M. le conseiller référendaire PONSOT, les observations de la société civile professionnelle TIFFREAU, de Me ODENT, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;


Statuant sur les pourvois formés par :


- X... Christian, Y... René, Z... Michel, A... Paul, LA SOCIETE ACETEX CHIMIE,


contre l'arrêt de cour d'appel de PAU, chambre correctionnelle, en date du 28 août 2002, qui, pour homicide involontaire, les a condamnés, le premier, à 12 mois d'emprisonnement avec sursis, les trois suivants, à 10 mois d'emprisonnement avec sursis, la dernière à 150 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;


Vu le mémoire commun aux demandeurs et les mémoires en défense produits ;


Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, le 20 février 1997, Jean-François B..., salarié de la société Fournie Grospaud, entreprise exécutant un marché de nettoyage d'installations électriques pour la société Pardies Acétiques, a été électrocuté alors qu'il se trouvait en partie basse d'un caisson où passaient des câbles qui n'avaient pas été mis hors tension, l'intervention étant censée se limiter à la partie haute qui, seule, avait été sécurisée par les employés de Pardies Acétiques ; qu'à la suite de cet accident, ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel pour homicide involontaire, notamment, Christian X..., ingénieur responsable de maintenance, René Y..., électricien chef de poste, Michel Z..., coordonateur des travaux, Paul A..., chargé des opérations de consignation, ainsi que leur employeur, la société Pardies Acétiques, laquelle, en cours de procédure a été absorbée par la société Acetex Chimie ; que le tribunal correctionnel a renvoyé les prévenus des fins de la poursuite, à l'exception de la société Pardies Acétiques - Acetex Chimie et sursis à statuer sur les demandes des parties civiles ; que sur les appels de la personne morale et du ministère public, les juges du second degré sont entrés en voie de condamnation à l'encontre de chacun des demandeurs et ont déclaré la société Acetex Chimie civilement responsable ;


En cet état ;


Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 221-6 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;


"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Christian X... coupable d'homicide involontaire ;


"aux motifs que, Christian X..., responsable de la maintenance, élabore l'offre technique et le cahier des charges ; s'il savait que le demi-tableau D comprenait les cellules 9 et 10, il n'attire pas l'attention sur la spécificité dudit tableau comme lieu de raccordement au tableau G et pense que le service exploitation était à même de le vérifier ; il ne savait pas qu'une partie des installations restait sous tension et notamment que l'unité hydro-produits chimiques resterait en activité ; ce manque de prévision et de coordination interne dans l'analyse et la cohérence du chantier est particulièrement grave ; il admet d'ailleurs que le cahier des charges est incomplet et que certaines dispositions sont contradictoires entre elles ou ambiguës ; il ne dispose d'ailleurs pas de plan du secteur d'intervention ; il ne s'aperçoit pas de la distorsion entre l'offre et le devis présenté ; il ne fait pas parvenir aux gens chargés de la consignation les documents contractuels de base, pas plus qu'il ne fait référence à la norme UTEC 18 510 ; chargé de coordination au sens des articles 237-1 à 237-7 du Code du travail, il n'exige aucune visite préalable et conjointe du site avant d'établir un plan de prévention qui dès lors reste succinct et incomplet ; le refus allégué de Jean C... de se dispenser de cette visite ne saurait l'exonérer de sa responsabilité propre et révèle que la démarche de Christian X... ressort d'un choix délibéré où il préfère prendre un risque supplémentaire en se dispensant de suivre les procédures réglementaires impératives ; dans sa déclaration devant le magistrat instructeur, il affirme que le balisage et les opérations relevaient de la société Pardies Acétiques et que le personnel Fournie Grospaud n'avait aucune initiative à prendre ; l'expert Etier souligne que Christian X... participe à la confusion technique ultérieure qui va s'établir et son absence dans les phases de préparation participe à l'avènement du sinistre alors qu'il était le seul à appréhender la globalité de l'installation ; l'absence de suivi et d'information technique de Christian X... est qualifié de négligence par l'expert ; en réalité, elle constitue une violation d'une réglementation précise (absence de visite d'inspection et mise en place d'un plan de prévention appliqué - absence de référence à la norme UTEC) ;


Christian X... écrit dès le 31 janvier 1997 une lettre de convocation qui insiste sur la prise en compte des règles de sécurité dans le déroulement des travaux et interventions, spécialement dans le domaine électrique ; il témoigne ainsi de la conscience aiguë du danger ; or, il laisse du fait d'une mauvaise définition des travaux, d'une analyse insuffisante des risques du site et d'un manque de transmission des informations de base se créer une situation multipliant les possibilités d'erreur de la part des intervenants... ; le déficit d'organisation dans la société Pardies Acétiques ne le dispensait pas, bien au contraire, d'appliquer avec la vigueur voulue, compte tenu des risques encourus, la réglementation en place (arrêt attaqué, p. 35) ;


"1 ) alors que les juges du fond ne pouvaient reprocher à Christian X... la violation de façon manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité, au motif qu'il n'avait pas effectué la visite d'inspection préalable et conjointe du site avec Jean C..., sans rechercher (comme ils y étaient invités) si ce dernier l'avait assuré qu'il connaissait déjà parfaitement les installations ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;


"2 ) alors que les juges du fond ne pouvaient reprocher à Christian X... la violation de façon manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité, ni une faute caractérisée qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il n'aurait pu ignorer, sans rechercher (comme ils y étaient invités) si les règles de sécurité prescrites et rappelées par le prévenu, faisant interdiction au personnel de Fournie Grospaud, en toute hypothèse, d'intervenir sur un tableau électrique qui n'avait pas été ouvert par le personnel de Pardies Acétiques, permettaient de prévenir l'accident ; que, dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;


Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 221-6 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;


"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Michel Z... coupable d'homicide involontaire ;


"aux motifs que, Michel Z..., coordonnateur des travaux, est chargé de faire le lien entre l'entreprise utilisatrice et la société prestataire ; destinataire du cahier des charges, il montre lors de la première réunion avec l'ensemble des entreprises contactées les points d'intervention et notamment le demi-tableau D côté couplage G ; interrogé sur les têtes de câble par Jean C..., il précise que la hiérarchie en décidera mais ignore finalement que cette prestation est incluse dans le marché ; il ne s'inquiète pas et n'est pas destinataire du plan de prévention à la rédaction duquel il ne participe pas étant ce jour-là empêché pour des raisons personnelles ; pour autant, il ne prend aucun renseignement supplémentaire malgré le flou évident qui subsistait ; il savait que l'électricité arrivait dans la zone dont la signalisation par rubalise était défaillante ; il assiste à la dépose de l'un des panneaux bas n 12 sans remarque et quitte le chantier sans rester à la disposition permanente de la société Fournie Grospaud ; il signe le permis de travail à 8 heures avant que la consignation ne soit faite ; devant le magistrat instructeur, il admet qu'il avait donné comme instruction de ne pas toucher à ce qui était enrubanné, ce qui laissait une marge de manoeuvre périlleuse à Fournie Grospaud, avec des caissons non neutralisés si ce n'est par des boulons aisément dévérouillables pour un professionnel outillé, sachant qu'au moins l'un des panneaux non rubalisé n'avait pas été remis ; il s'agissait du panneau 12 à proximité duquel M. D... travaillera ; Michel Z... reconnaît le défaut de balisage ; il tente dans sa défense à minimiser sa marge d'initiative ; il manifestera juste après les faits un état de choc caractéristique où il réalise que le contrôle d'absence de tension n'a pas été effectué en partie basse ; Michel Z... de par sa qualité et son niveau de compétence, a failli dans sa mission, en ne respectant pas la procédure concernant la signature du permis de travail et en restant sans réaction devant une absence de balisage et d'ouverture d'un des panneaux en partie basse, créant une situation de fausse sécurité alors qu'il aurait dû connaître de façon précise, du fait de sa mission, le champ d'intervention du prestataire et des modalités permettant de sécuriser le chantier" (arrêt attaqué, p. 36 et 37) ;


"1 ) alors que la cour d'appel ne pouvait affirmer que l'ouverture d'un caisson (n 12) en partie basse aurait créé une "situation fausse de sécurité" permettant d'intervenir sur l'ensemble des caissons situés en partie basse, sans remettre en cause les constatations du premier juge selon lesquelles le caisson bas n 12 avait été ouvert "pour seulement tenter d'ouvrir un caisson haut déconsigné et compris dans le chantier" ; que, dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;


"2 ) alors que la cour d'appel ne pouvait reprocher une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité que Michel Z... n'aurait pu ignorer, sans rechercher si le prévenu avait sciemment remis en cause les règles de sécurité prescrites à la victime, qui lui interdisaient, en toute hypothèse, d'ouvrir elle-même un tableau électrique et d'y intervenir sans qu'une vérification d'absence de tension ait été opérée ; que, dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;


Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 221-6 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;


"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Paul A... coupable d'homicide involontaire ;


"aux motifs que, Paul A..., chargé des opérations de consignation, connaissait la nature des travaux à effectuer, n'a pas été destinataire du cahier des charges, de l'offre et du plan de prévention ; il a signé le 5 février en tant que responsable d'exploitation la première partie du permis de travail, énumérant le risque et prescrivant la consignation, et ne procédait à aucune préparation particulière ; il sait que l'une des parties de l'installation est sous tension et notamment les caissons 9 et 10 ; il ne balise pas complètement la zone, pensant que le prestataire n'intervenait que sur les jeux de barre ; il admet finalement avoir déboulonné un des caissons en partie basse, qui ne figurait pas sous la rubalise et ne pas avoir procédé à une VAT en partie basse ; il reconnaît une succession de dysfonctionnements dont l'absence aurait permis d'éviter l'accident ; il quitte le chantier en laissant ouverte la cellule n 12 ; Paul A... commet des fautes précises et caractérisées, ce que confirmera l'expert Etier : - en ne respectant pas la procédure de consignation de façon rigoureuse, - en ne procédant pas à la mise en place d'une rubalise complète, - en laissant ouvrir un panneau en partie basse alors qu'il savait qu'il était sous tension ; - en ne faisant pas pratiquer une VAT ; - en abandonnant l'équipe Fournie Grospaud dans une situation où les repères de sécurité sont faussement établis (arrêt attaqué, p. 37) ;


"1 ) alors que, la cour d'appel ne pouvait affirmer que l'ouverture d'un caisson (n 12) en partie basse aurait créé une "situation fausse de sécurité" permettant d'intervenir sur l'ensemble des caissons situés en partie basse, sans remettre en cause les constatations du premier juge selon lesquelles le caisson bas n 12 avait été ouvert "pour seulement tenter d'ouvrir un caisson haut déconsigné et compris dans le chantier" ; que, dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;


"2 ) alors que, la cour d'appel ne pouvait reprocher une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité que Paul A... n'aurait pu ignorer, sans rechercher si le prévenu avait sciemment remis en cause les règles de sécurité prescrites à la victime, qui lui interdisaient, en toute hypothèse, d'ouvrir elle-même un tableau électrique et d'y intervenir sans qu'une vérification d'absence de tension ait été opérée ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;


Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 221-6 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;


"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré René Y... coupable d'homicide involontaire ;


"aux motifs que, René Y..., électricien chef de poste, chargé lui aussi de consignation, est avisé tardivement de sa mission (huit heures du matin) ; il n'est destinataire d'aucun document technique si ce n'est le permis de travail qu'il signe alors que l'entreprise prestataire l'a déjà signé ; dans un contexte d'impréparation totale, il ne procède pas à la signalisation des caissons bas ni à une vérification d'absence de tension dans ces zones là ; il ouvre 3 cellules dont la 12 sous tension sachant que les cellules voisines peuvent être sous tension, n'ayant pas eu le temps matériel de vérifier préalablement le schéma électrique au premier étage ; il ne fait valoir aucune observation sur le rubalisage et signe l'autorisation de travail dans une certaine précipitation sans avoir procédé personnellement à toutes les opérations et notamment les VAT qui auraient dû concerner l'ensemble des zones non rubalisées ; René Y... a commis des fautes graves, en méconnaissance de la réglementation aboutissant à exposer autrui à un risque mortel qu'il ne pouvait ignorer (arrêt attaqué, p. 38) ;


"1 ) alors que, la cour d'appel ne pouvait affirmer que l'ouverture d'un caisson (n 12) en partie basse aurait créé une "situation fausse de sécurité" permettant d'intervenir sur l'ensemble des caissons situés en partie basse, sans remettre en cause les constatations du premier juge selon lesquelles le caisson bas n 12 avait été ouvert "pour seulement tenter d'ouvrir un caisson haut déconsigné et compris dans le chantier" ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;


"2 ) alors que, la cour d'appel ne pouvait reprocher une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité que Paul A... n'aurait pu ignorer, sans rechercher si le prévenu avait sciemment remis en cause les règles de sécurité prescrites à la victime, qui lui interdisaient, en toute hypothèse, d'ouvrir elle-même un tableau électrique et d'y intervenir sans qu'une vérification d'absence de tension ait été opérée ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;


Sur le sixième moyen de cassation (subsidiaire), en ce qu'il est proposé pour Christian X..., René Y..., Michel Z... et Paul A..., pris de la violation des articles 121-3, 221-6 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;


"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la société Acetex Chimie ainsi que Christian X..., Michel Z..., Paul A... et René Y... coupables d'homicide involontaire ;


"aux motifs que , ... le comportement de Paul A... rend inopérante l'argumentation de la défense lorsque celle-ci prétend que la signalisation ordinaire (triangle HT) et le boulonnage des caissons bas étaient suffisants pour aviser Jean-François B... du danger et que celui-ci avait commis une faute en ouvrant le panneau, ce qui au demeurant est contesté par les autres salariés de l'entreprise Fournie Grospaud ; en effet, alors qu'en procédure de consignation, seule la signalisation spécifique prévaut, Paul A... autorise et participe même à l'ouverture des panneaux, doté des éléments de sécurité habituels, ce qui ne pouvait que conforter les salariés de l'entreprise prestataire que les caissons bas non compris dans la zone rubalisée étaient utilisables et accessibles... ; il importe peu de savoir en définitive si... les panneaux 9 et 10 ont été ouverts en présence ou non des salariés de Pardies Acétiques ; il est en effet acquis aux débats : - que les panneaux n'étaient pas rubalisés alors qu'ils auraient dû l'être puisque certains n'ignoraient pas la présence de la haute tension ; - que certains de ces panneaux (1 à 3 caissons bas) ont été déboulonnés avec l'aide ou en présence des personnes chargées de la consignation ou du coordonnateur des travaux (et notamment le 12 sous tension) et laissés ouverts en l'état sans réserve ni observation particulière ; qu'aucune VAT complémentaire n'a été opérée, ce qui en tout état de cause créait une fausse sécurisation dont Jean-François B... a été victime (arrêt attaqué, p. 37 et 38) ;


"alors que, les prévenus faisaient observer que selon les règles impératives de sécurité connues de la victime, le personnel de la société Fournie Grospaud n'aurait dû intervenir que sur des tableaux électriques ouverts par le personnel qualifié de la société Pardies Acétiques et soumis à une vérification d'absence de tension (VAT) ; qu'en ne recherchant pas si Jean-François B... avait délibérément enfreint ces règles, en prenant l'initiative d'ouvrir le tableau n 9 (donnant accès au caisson, où s'est produit l'accident) hors la présence du personnel qualifié de la société Pardies Acétiques, au surplus sans procéder lui-même spontanément à une vérification d'absence de tension, et s'il avait ainsi commis une faute de nature à exonérer les prévenus de toute responsabilité, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;


Les moyens étant réunis ;


Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré les prévenus coupables ;


D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;


Mais sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1, 221-6 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6-2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;


"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la société Acetex Chimie coupable d'homicide involontaire et l'a condamnée à une amende de 150.000 euros ;


"aux motifs propres que, l'entreprise SA Acetex Chimie qui a absorbé par fusion la SA Pardies Acetiques et a ainsi continué sa personnalité juridique, doit être retenue dans les liens de la prévention (arrêt attaqué, p. 34) ;


"et aux motifs adoptés que, dans la mesure où la SA Acetex Chimie a absorbé par fusion la SA Pardies Acétiques et a donc emprunté sa personnalité juridique, elle a aussi épousé sa responsabilité pénale (jugement entrepris, p. 13) ;


"alors que, nul n'est responsable pénalement que de son propre fait ; que la société Acetex Chimie ne pouvait être déclarée coupable ni condamnée pour des faits commis par la société Pardies Acetiques qui avait perdu son existence juridique par suite d'une fusion ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;


Vu l'article 121-1 du Code pénal ;


Attendu qu'aux termes de ce texte, nul n'est responsable pénalement que de son propre fait ;


Attendu que, pour déclarer la société Acetex Chimie, coupable d'homicide involontaire, après avoir constaté qu'elle avait absorbé la société Pardies Acétiques postérieurement à l'accident, la cour d'appel énonce qu'elle a "ainsi continué sa personnalité juridique" ;


Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que l'absorption avait fait perdre son existence juridique à la société absorbée, la juridiction du second degré a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;


D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de Cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire ;

Par ces motifs, et sans qu'il n'y ait lieu d'examiner le sixième moyen en ce qu'il est proposé pour la société Acetex Chimie ;


CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Pau, en date du 28 août 2002, mais en ses seules dispositions ayant déclaré la société Acetex Chimie coupable du délit d'homicide involontaire, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;


DIT n'y avoir lieu à renvoi ;


ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Pau et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;


Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;


Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Ponsot conseiller rapporteur, M. Joly, Mmes Chanet, Anzani, MM. Beyer, Pometan conseillers de la chambre, M. Valat, Mme Ménotti conseillers référendaires ;


Avocat général : M. Fréchède ;


Greffier de chambre : Mme Randouin ;


En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

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