14 juin 1995
Cour de cassation
Pourvoi n° 94-83.025

Chambre criminelle

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

ADMINISTRATION A AUTRUI DE SUBSTANCES NUISIBLES A LA SANTE - eléments constitutifs - elément matériel - maladie ou incapacité de travail - définition - peines - peine justifiée - erreur de qualification - coups ou violences volontaires avec préméditation - faits constituant le délit d'administration de substances nuisibles à la santé

Le fait de mettre à la disposition des membres d'une équipe de football des bouteilles d'eau minérale, après y avoir introduit à dessein du " valium ", caractérise le délit d'administration de substances nuisibles à la santé, prévu et réprimé tant par l'article 318 du Code pénal applicable au moment des faits que par l'article 222-15 du Code pénal entré en vigueur le 1er mars 1994, dès lors qu'il est établi que l'absorption de ce breuvage par deux joueurs a entraîné une diminution de leurs facultés physiques caractérisant une altération de leur santé.

Texte de la décision

REJET du pourvoi formé par :

- X... Marcel,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans, chambre correctionnelle, du 24 mai 1994, qui, pour coups ou violences volontaires avec préméditation, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement assorti du sursis simple et 5 000 francs d'amende ainsi qu'à des réparations civiles.



LA COUR,



Vu le mémoire produit ;



Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 388 et 593 du Code de procédure pénale, 222-15 du Code pénal (dans sa rédaction applicable à compter du 1er mars 1994), excès de pouvoir et manque de base légale :



" alors, d'une part, que les éléments constitutifs des délits d'administration d'une substance nuisible à la santé par simple mise à la disposition du produit à la victime et de violences volontaires avec préméditation sont totalement distincts ; que la juridiction correctionnelle n'était saisie ni de faits de violences, ni d'une circonstance de préméditation qui n'était en aucun cas visée dans la citation ; qu'en requalifiant les faits en violences volontaires avec préméditation, sans que le prévenu ait accepté de s'expliquer notamment sur cette circonstance aggravante, seule de nature à justifier l'existence d'un délit, faute d'incapacité de la victime, la cour d'appel a dépassé les limites de sa saisine et excédé ses pouvoirs ;



" alors, d'autre part, que ne constitue pas une violence laquelle suppose que son auteur cherche à atteindre sa victime par un coup de force le visant directement le simple fait d'introduire du valium dans une bouteille d'eau dans l'espoir que celui qui la boira verra ses facultés provisoirement et partiellement amoindries ; que la cour d'appel n'a donc pas caractérisé l'infraction qu'elle retient à l'encontre du prévenu " ;



Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Marcel Y..., vice-président d'un club de football, a, à l'occasion d'une rencontre, mis, à la disposition des adversaires de son club, des bouteilles d'eau minérale dans lesquelles il avait introduit, à l'aide d'une seringue, une certaine quantité de valium, médicament qu'il s'était à dessein fait prescrire par son médecin traitant ; qu'après avoir bu de ce breuvage, deux joueurs ont subi une altération passagère de leurs facultés physiques ;



Attendu que Marcel Y... est poursuivi pour administration d'une substance nuisible à la santé ;



Attendu que les premiers juges ont relaxé le prévenu en retenant, au vu des constatations médicales effectuées, que les victimes n'avaient souffert d'aucune maladie ;



Attendu que, pour infirmer cette décision et déclarer Marcel Y... coupable de coups ou violences volontaires avec préméditation, la juridiction du second degré retient que l'administration d'un calmant diminuant la capacité physique d'un sportif caractérise une atteinte à l'intégrité physique qui est un élément constitutif de l'infraction de violences ou voies de fait prévue par l'article 309 du Code pénal ;



Attendu qu'en prononçant ainsi après avoir constaté que l'absorption de valium par deux joueurs avait entraîné une diminution de leurs facultés physiques, caractérisant une altération de leur santé, les juges ont écarté à tort le délit prévu et réprimé par l'article 318 du Code pénal pour lui substituer la qualification de violences ou voies de fait avec préméditation ;



Que les faits tels qu'ils ont été constatés caractérisent l'infraction prévue tant par ce texte alors applicable que par l'article 222-15 du Code pénal entré en vigueur le 1er mars 1994 ;



D'où il suit que la peine prononcée et les dommages-intérêts alloués sont justifiés dans les conditions prévues par l'article 598 du Code de procédure pénale et que le moyen ne saurait être accueilli ;



Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;



REJETTE le pourvoi.

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