29 janvier 2014
Cour de cassation
Pourvoi n° 13-10.803

Troisième chambre civile

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2014:C300093

Titres et sommaires

REFERE - mesures conservatoires ou de remise en état - trouble manifestement illicite - applications diverses - inexécution des mesures de démolition ordonnées par le juge pénal - demande d'expulsion des occupants de constructions irrégulièrement édifiées - pouvoirs du juge

Le juge des référés pouvant toujours prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent afin de faire cesser le trouble manifestement illicite que constitue l'inexécution des mesures de démolition ordonnées par le juge pénal, c'est sans excéder ses pouvoirs qu'une cour d'appel retient sa compétence pour statuer sur la demande d'expulsion des occupants des constructions irrégulièrement édifiées

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 8 novembre 2012), rendu en matière de référé, que par un précédent arrêt définitif du 14 décembre 2007, la chambre des appels correctionnels a ordonné la démolition, dans un délai de six mois, de deux constructions qu'avait édifiées M. Abel X..., déclaré coupable de défaut de permis de construire ; que M. Alain X... occupant la propriété avec sa famille à la suite d'une donation consentie par son père, le préfet du Vaucluse a assigné les époux X... en expulsion devant le juge des référés ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt d'ordonner leur expulsion, alors, selon le moyen, que, selon l'article L. 211-3 du code de l'organisation judiciaire, le tribunal de grande instance connaît des seules affaires civiles et commerciales pour lesquelles compétence n'est pas attribuée, en raison de leur nature, à une autre juridiction ; que, selon l'article 710 du code de procédure pénale, tous incidents contentieux relatifs à l'exécution d'une décision répressive sont portés devant la juridiction qui a rendu la décision ; qu'en décidant que le juge des référés avait le pouvoir d'ordonner toute mesure nécessaire pour assurer l'exécution de la décision rendue par la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Nîmes quand cette difficulté ne pouvait être portée que devant cette dernière, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les textes susvisés ;

Mais attendu que le juge des référés pouvant toujours prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent afin de faire cesser le trouble manifestement illicite que constitue l'inexécution des mesures de démolition ordonnées par le juge pénal, c'est sans excéder ses pouvoirs que la cour d'appel a retenu sa compétence pour statuer sur la demande d'expulsion des occupants des constructions irrégulièrement édifiées ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, qu'il n'était pas justifié de la réalité de l'activité d'apicultrice invoquée par Mme X... ni de la nécessité de l'exercer dans les lieux litigieux et que les époux X... ne démontraient pas que leur situation pouvait être régularisée, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante et qui a pu en déduire que l'expulsion des occupants devait être ordonnée afin de mettre fin au trouble manifestement illicite que constituait le maintien des constructions édifiées irrégulièrement, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. et Mme X... à payer au préfet du Vaucluse la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de M. et Mme X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf janvier deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné l'expulsion de M. et Mme X... et de tous occupants de leur chef de la maison d'habitation qu'ils occupent à Valréas, pour permettre l'exécution de l'arrêt correctionnel rendu le 14 décembre 2007,

AUX MOTIFS QUE par arrêt en date du 14 décembre 2007, la cour d'appel de Rennes a confirmé le jugement correctionnel qui condamnait M. Abel X..., pour construction sans permis, à la remise en état des lieux par la démolition des constructions litigieuses, sauf à dire que le délai de démolition sera de six mois et courra du jour où l'arrêt sera définitif ; que l'immeuble est aujourd'hui la propriété de M. Alain X... qui l'occupe avec son épouse et ses enfants ; qu'expliquant que les travaux de démolition n'ont pas été entrepris et qu'ils ne peuvent être exécutés d'office qu'après décision judiciaire ordonnant l'expulsion des occupants actuels, le préfet du Vaucluse a assigné M. et Mme Alain X... devant le juge des référés aux fins de voir ordonner leur expulsion ; que l'inexécution de la décision du juge répressif constitue un trouble manifestement illicite au sens de l'article 809 al. 1 du code de procédure civile, que le juge des référés a le pouvoir de faire cesser en ordonnant l'expulsion ; que rien ne s'oppose à ce qu'il soit fait droit à la demande du préfet ;

ALORS QUE selon l'article L. 211-3 du code de l'organisation judiciaire, le tribunal de grande instance connaît des seules affaires civiles et commerciales pour lesquelles compétence n'est pas attribuée, en raison de leur nature, à une autre juridiction ; que selon l'article 710 du code de procédure pénale, tous incidents contentieux relatifs à l'exécution d'une décision répressive sont portées devant la juridiction qui a rendu la décision ; qu'en décidant que le juge des référés avait le pouvoir d'ordonner toute mesure nécessaire pour assurer l'exécution de la décision rendue par la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Rennes quand cette difficulté ne pouvait être portée que devant cette dernière, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les textes susvisés.

SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné l'expulsion de M. et Mme X... et de tous occupants de leur chef de la maison d'habitation qu'ils occupent à Valréas,

AUX MOTIFS QUE la remise en état des lieux par la démolition des constructions effectuées sans permis résulte d'une condamnation pénale devenue définitive ; que les époux X... ne démontrent pas que cette situation est régularisable alors que deux demandes de permis de construire ont été refusées par arrêtés du 15 octobre 2007 et du 6 mars 2008, qu'une troisième demande du 31 mai 2011 au nom de Mme Claudine X... a également fait l'objet d'une arrêté du 25 juillet 2011 portant refus de permis de construire, arrêté qui fait lui-même l'objet d'un recours déposé par Mme Claudine X... devant le tribunal administratif de Nîmes et qu'une autre demande de permis de construire a encore été déposée en mairie le 28 août 2012 ; que les appelants ne justifient d'aucun élément sérieux de nature à faire échec à la décision de remise en état des lieux, en l'état de l'absence de permis de construire ;

ALORS QUE les époux X... faisaient valoir que Mme X... avait déposé le 28 août 2012 une nouvelle demande de permis de construire en se prévalant de l'activité d'apicultrice qu'elle avait développée sur le site et des dispositions nouvelles de l'article NC 1 du règlement du plan local d'urbanisme prévoyant désormais que « peuvent être admis les constructions liées et nécessaires à l'exploitation agricole » ; qu'en se bornant, à énoncer que « les époux X... ne démontrent pas que cette situation est régularisable » et à faire référence aux motifs des premiers juges nécessairement inopérants en ce qu'antérieurs à la nouvelle demande de permis, sans rechercher si l'activité apicole de Mme X... n'était pas de nature à permettre la régularisation de la situation litigieuse et ainsi à faire disparaître le caractère manifestement illicite du trouble allégué par le préfet, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 809 du code de procédure civile.

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