28 novembre 2012
Cour de cassation
Pourvoi n° 10-28.372

Première chambre civile

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2012:C101387

Titres et sommaires

VERIFICATION D'ECRITURE - dénégation d'écriture - ecrit produit en cours d'instance - examen par le juge - office du juge - détermination - preuve - preuve littérale - acte sous seing privé - ecrits produits en cours d'instance - ecrit argué de faux - protection des consommateurs - cautionnement - information annuelle de la caution - obligation - domaine d'application - cautionnement consenti par une personne physique à un créancier professionnel - caution - information annuelle

Il résulte de l'article 1324 du code civil et des articles 287 et 288 du code de procédure civile que lorsque l'écriture et la signature d'un acte sous seing privé sont contestées, il appartient au juge de vérifier l'acte contesté s'il entend en tenir compte pour statuer

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que suivant offre du 29 septembre 2003, le Crédit moderne des Antilles (la banque) a consenti à M. Jean-Joël X... un prêt d'un montant de 90 000 euros pour le paiement duquel Mme Thomassine X... et Mme Germaine X..., respectivement mère et soeur de l'emprunteur ainsi que Mme Marie-Louise Y..., qui était alors l'épouse de l'emprunteur, se seraient portées caution ; que la banque a prononcé la déchéance du terme le 30 juin 2006 et a obtenu la condamnation de l'emprunteur et des cautions au paiement du prêt dont les mensualités n'étaient plus réglées ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1324 du code civil, ensemble les articles 287 et 288 du code de procédure civile ;

Attendu que pour condamner Mme Thomassine X... solidairement avec M. Jean-Joël X... à payer une certaine somme à la banque en sa qualité de caution, l'arrêt retient que la procédure de vérification d'écriture doit être mise en oeuvre par le juge à moins qu'il dispose d'emblée d'éléments lui permettant de rejeter la contestation, qu'en l'espèce, l'acte de caution dont Mme Thomassine X... conteste la validité, comporte une mention manuscrite répondant aux prescriptions du code de la consommation, suivie de la signature de la caution, que l'écrit qui n'est entaché d'aucune irrégularité n'a pas à être complété par un élément de preuve extrinsèque, que Mme Thomassine X... qui affirme ne pas savoir lire et écrire ne produit aucun document permettant d'asseoir cette affirmation qui dès lors ne repose sur aucun élément concret, que le document signé par la caution comporte des renseignements d'ordre personnel qui n'ont pu être fournis que par Mme Thomassine X... elle-même, qu'ainsi la cour d'appel dispose d'éléments qui lui permettent de rejeter la contestation d'écriture ;

Qu'en statuant ainsi alors qu'il lui appartenait, avant de trancher la contestation de vérifier l'acte contesté dont elle a tenu compte, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 341-6 du code de la consommation ;

Attendu que pour condamner solidairement Mme Thomassine X... et Mme Germaine X... avec M. Jean-Joël X... à payer une certaine somme à la banque en leur qualité de caution, l'arrêt retient que les dispositions du titre III du code de la consommation, relatives aux crédits à la consommation, définis notamment par leur montant qui ne peut être supérieur à 21 500 euros, ne sont pas applicables au présent litige, qu'au demeurant, tant l'emprunteur principal que la caution ont été avisés par les termes du contrat de ce que ces dispositions légales n'étaient pas applicables ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les dispositions d'ordre public édictées par l'article L. 341-6 du code de la consommation, issu de la loi du 1er août 2003 et entré en vigueur le 5 février 2004, sont, relativement à l'information due à la caution personne physique postérieurement à cette date, applicables à tout cautionnement consenti par une personne physique à un créancier professionnel, la cour d'appel a violé, par refus d'application, le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions prononçant condamnations à l'encontre de Mme Thomassine X... et Mme Germaine X..., l'arrêt rendu le 5 juillet 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre, autrement composée ;

Condamne la société Crédit moderne des Antilles aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Crédit moderne des Antilles ; la condamne à payer à Mme Germaine X... et Mme Thomassine X... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille douze.





MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils, pour les consorts X...


Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Madame Thomassine X... et Marie-Louise X..., solidairement avec Jean-Noël X..., à payer au Crédit Moderne des Antilles la somme de 85.134,67 euros avec intérêts au taux légal en exécution de leurs engagements de caution ;

Aux motifs que, « conformément aux dispositions de l'article 287du code de procédure civile, dont l'application est sollicitée par les appelants, si la caution conteste son écriture ou sa signature, la procédure de vérification d'écriture doit être mise en oeuvre par le juge à moins qu'il dispose d'emblée d'éléments lui permettant de rejeter la contestation ; qu'en l'espèce, l'acte de caution dont Madame Thomassine X... conteste la validité, comporte une mention manuscrite répondant aux prescriptions du code de la consommation, suivie de la signature de la caution ; que l'écrit qui n'est entaché d'aucune irrégularité n'a pas à être complété par un élément de preuve extrinsèque ; que Mme Thomassine X... qui affirme ne pas savoir lire et écrire, ne produit aucun document permettant d'asseoir cette affirmation qui dès lors ne repose sur aucun élément concret ; que le document signé par la caution comporte des renseignements d'ordre personnel qui n'ont pu être fournis que par Mme Thomassine X... elle-même ; qu'ainsi la cour dispose d'éléments qui lui permettent de rejeter la contestation d'écriture qui n'est pas fondée ; que l'emprunteur a souscrit un contrat de prêt pour un montant de 90.000€ ; que dès lors les dispositions du titre III du code de la consommation, relatives aux crédits à la consommation, définis notamment par leur montant qui ne peut être supérieur à 21.500€ en application de l'article R311-1 du code de la consommation en sa rédaction applicable en l'espèce, n'est pas applicable au présent litige ; qu'au demeurant, tant l'emprunteur principal que la caution ont été avisés par les termes du contrat au chapitre III intitulé "conditions applicables au crédit supérieur à 21 500€", de ce que ces dispositions légales n'étaient pas applicables ; que le moyen tiré du non respect des articles L313-9 et L341-6 du code de la consommation est inopérant » ;

1/ Alors que, d'une part, lorsque la partie, à qui on oppose un acte sous seing privé, déclare ne pas reconnaître la signature qui lui est attribuée, il appartient au juge de vérifier l'acte contesté et de procéder à la vérification d'écriture au vu des éléments dont il dispose après avoir, s'il y a lieu, enjoint aux parties de produire tous documents à lui comparer ; que pour condamner Madame Thomassine X... à exécuter l'engagement de caution pour lequel Madame X... contestait cependant son écriture, la cour d'appel, qui n'a pas écarté l'acte contesté sans lequel elle ne pouvait statuer, a considéré que "la procédure de vérification d'écriture devait être mise en oeuvre par le juge à moins qu'il dispose d'emblée d'éléments lui permettant de rejeter la contestation" et a estimé que "le document signé par la caution comporte des renseignements d'ordre personnel qui n'ont pu être fournis que par Mme Thomassine X... elle-même" ; qu'en statuant par de tels motifs, sans ordonner la vérification d'écriture sollicitée, la cour d'appel a violé les articles 1324 du Code civil, 287 et 288 du Code de procédure civile ;

2/ Alors que, d'autre part, le créancier professionnel est tenu de faire connaître à la caution personne physique, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie, ainsi que le terme de cet engagement, à peine de déchéance des pénalités ou intérêts de retard échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information ; que cette disposition d'ordre public est applicable à tout cautionnement donné par une personne physique à un créancier professionnel ; qu'elle n'est écartée ni par les dispositions de l'article L.311-2 du Code de la consommation, ni par la volonté des parties ; qu'en jugeant néanmoins que l'obligation d'information des cautions prévue par ce texte n'était pas applicable en conséquence des dispositions de l'article R.311-1 du Code de la consommation et des stipulations contractuelles, la cour d'appel a violé les articles 6 du Code civil, L.341-6, L.311-2 et R.311-1 du Code de la consommation.

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