10 décembre 2008
Cour de cassation
Pourvoi n° 07-19.899

Troisième chambre civile

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2008:C301276

Titres et sommaires

BAIL COMMERCIAL - résiliation - clause résolutoire - suspension - octroi de délais de paiement - inobservation - octroi de nouveaux délais de paiement - exclusion - cas - entreprise en difficulte (loi du 26 juillet 2005) - prévention des difficultés - procédure de conciliation - déroulement de la conciliation - délais de paiement - cas refere - applications diverses - inobservation des délais de paiement accordés

Lorsqu'une ordonnance de référé passée en force de chose jugée a accordé au titulaire d'un bail à usage commercial des délais pour régler un arriéré de loyers et le loyer courant en suspendant la réalisation de la clause résolutoire, la cour d'appel qui constate que ces délais n'ont pas été respectés, ne peut en accorder de nouveaux au motif que la locataire bénéficie de la procédure de conciliation instituée par les articles L. 611-4 et suivants du code de commerce

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :






Sur le moyen unique :


Vu les articles 1244-1 du code civil et L. 611-7 du code de commerce ;


Attendu que, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues et que, si, au cours de la procédure de conciliation, le débiteur est poursuivi par un créancier, le juge qui a ouvert cette procédure peut, à la demande du débiteur et après avoir été éclairé par le conciliateur, faite application des articles 1244-1 à 1244-3 du code civil ;


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 juillet 2007) que M. X... a donné en location à la Société nouvelle carrosserie automobile école militaire (SNCAEM) des locaux à usage commercial de garage ; que le bailleur a fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire le 6 juin 2006 ; que le juge des référés, par ordonnance du 2 octobre 2006, a accordé des délais de paiement à la locataire et suspendu les effets de la clause résolutoire ; que le président du tribunal de commerce a, le 9 octobre 2006, désigné un conciliateur ; que le bailleur a délivré, faute de paiement à l'échéance de la dette, un commandement de libérer les lieux le 9 novembre 2006 ; que la SNCAEM a saisi le juge du tribunal de commerce afin d'obtenir de nouveaux délais ;


Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient que la délivrance, le 9 novembre 2006, du commandement de libérer les lieux constitue un acte de poursuite, que l'article L. 611-7 alinéa 5 du code de commerce autorise le débiteur à assigner le créancier devant le juge du tribunal de commerce afin d'obtenir des délais dans les conditions des articles 1244-1 et suivants, qu'en vertu de l'article 488 du code de procédure civile, l'ordonnance de référé du 2 octobre 2006 n'a pas acquis l'autorité de chose jugée, que rien ne s'oppose à ce que la demande de délais de paiement soit examinée par le premier juge et que le fait que la SNCAEM n'ait pas respecté l'échéancier fixé par le président du tribunal de grande instance ne saurait constituer un obstacle à l'octroi de nouveaux délais en considération de la situation respective des parties ;


Qu'en statuant ainsi alors que la procédure de conciliation instituée par les articles L. 611-4 et suivants du code de commerce n'entraîne pas la suspension des poursuites individuelles et alors que l'ordonnance du 2 octobre 2006 était passée en force de chose jugée et que dès lors la clause résolutoire était acquise à la date de la première échéance non respectée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;


PAR CES MOTIFS :


CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a accordé un délai de six mois à la SNCAEM pour apurer sa dette locative, l'arrêt rendu le 6 juillet 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;


Condamne la SNCAEM aux dépens ;


Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SNCAEM à payer la somme de 2 500 euros à M. X... ; rejette la demande de la SNCAEM ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé à l'audience publique du dix décembre deux mille huit par M. Peyrat, conseiller doyen faisant fonction de président, conformément à l'article 452 du code de procédure civile.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt


Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour M. X....


LE MOYEN REPROCHE à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR accordé à la société Nouvelle Carrosserie Automobile Ecole Militaire un délai de six mois pour s'acquitter de sa dette locative telle qu'arrêtée au 7 septembre 2007, et ce, par mensualités égales et consécutives, la première devant être réglée avant le 10 du mois suivant le prononcé de l'arrêt ;


AUX MOTIFS QU'en vertu de l'article 488 du nouveau Code de procédure civile, l'ordonnance de référé du 2 octobre 2006, qui a accordé des délais de paiement au preneur et qui n'a pas été frappée d'appel, n'a pas acquis l'autorité de la force jugée ; que, dès lors, rien ne s'opposait à ce que la demande de délais de paiement soit examinée par le premier juge ; que le fait que la SNCAEM n'ait pas respecté l'échéancier fixé en référé ne saurait constituer un obstacle à l'octroi de nouveaux délais en considération de la situation respective des parties, sur le fondement des articles L 611-7 du Code de commerce et 1244-1 du Code civil ;


ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE si en présence d'un bail commercial comportant une clause résolutoire, le juge des référés peut accorder des délais de paiement au preneur sur le fondement de l'article 1244-1 du Code civil et suspendre la réalisation de la clause, le non respect de ces délais entraine l'acquisition de la clause résolutoire et la résolution du bail, de sorte que de nouveaux délais de paiement ne peuvent pas être accordés par le juge ; qu'en retenant que le fait que le preneur n'ait pas respecté l'échéancier fixé en référé ne constituait pas un obstacle à l'octroi de nouveaux délais en considération de la situation respective des parties, la Cour d'appel a violé les articles L 611-7 du Code de commerce et 1244-1 du Code civil ;


ALORS, EN SECOND LIEU, QU'en présence d'un bail commercial comportant une clause résolutoire, le non respect des délais de paiement accordés au preneur sur le fondement de l'article 1244-1 du Code civil par une ordonnance de référé passée en force de chose jugée entraine l'acquisition de la clause résolutoire et la résolution du bail à la date de la première échéance non respectée ; que pour accorder de nouveaux délais de paiement à la SNCAEM, la Cour d'appel a énoncé que l'ordonnance de référé du 2 octobre 2006 qui avait déjà accordé des délais de paiement n'avait pas acquis « l'autorité de la force jugée » ; qu'en statuant ainsi après avoir relevé que l'ordonnance du 2 octobre 2006 n'avait pas été frappée d'appel, la Cour d'appel n'a pas tiré de ses constatations les conséquences légales qui en découlaient et a violé les articles 488 et 500 du Code de procédure civile, 1244-1 du Code civil et L 611-7 du Code de commerce.

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