15 novembre 2006
Cour de cassation
Pourvoi n° 05-15.475

Troisième chambre civile

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL - préemption - nullité de plein droit de la déclaration - conditions - détermination - alsace - moselle - propriété immobilière - acte translatif de propriété - acte sous seing privé - rédaction d'un acte authentique dans un délai de six mois - point de départ à l'égard d'une safer - date de la décision de préemption

Ne donne pas de base légale à sa décision la cour d'appel qui retient qu'une déclaration de préemption d'une société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) encourt la nullité pour n'avoir pas respecté le délai de deux mois prévu à l'article L. 412-8 du code rural, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la SAFER avait été préalablement mise en demeure par voie d'huissier de justice de réaliser l'acte authentique.

Texte de la décision

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 17 mars 2005) qu'aux termes d'une promesse synallagmatique de vente en date du 29 septembre 2000, M. X... a vendu à Mme Y... une parcelle de terre en nature de pré ; que le notaire désigné pour établir l'acte authentique de vente a, le 24 octobre 2000, notifié l'opération de vente envisagée à la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) d'Alsace laquelle a fait valoir son droit de préemption le 20 décembre 2000 ; que le 29 mars 2001, le notaire chargé de la rédaction de l'acte authentique de vente au profit de la SAFER a dressé un procès verbal de carence, M. X... ne s'étant pas présenté pour régulariser la vente ; que le 23 mai 2001, la SAFER a assigné M. X... aux fins de passer l'acte authentique de vente à son profit ;


Sur le moyen unique, pris en sa première branche :


Vu l'article L. 412-8 du code rural ;


Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que le point de départ du délai de deux mois prévu par l'article L. 412-8 du code rural pour permettre à la SAFER de réaliser l'acte de vente authentique est la date du 20 décembre 2000, que par conséquent l'action de la société tendant à la réalisation de l'acte de vente en la forme authentique aurait dû être introduite au plus tard le 20 février 2001, la nullité de la déclaration de préemption étant ensuite encourue dans les conditions fixées par l'alinéa 4 de l'article L. 412-8 susvisé ;


Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la SAFER avait été préalablement mise en demeure par voie d'huissier de justice de réaliser l'acte de vente authentique, dans les conditions prévues à l'article L. 412-8, alinéa 4, du code rural, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;


Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :


Vu l'article 42 de la loi du 1er juin 1924, mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle dans sa rédaction applicable en la cause, ensemble les articles L. 412-8 et R. 143-4 du code rural ;


Attendu que tout acte entre vifs, translatif ou déclaratif de propriété immobilière et tout acte entre vifs portant constitution ou transmission d'une servitude foncière ne peuvent faire l'objet d'une inscription que s'ils ont été dressés par devant notaire ; que l'acte souscrit sous une autre forme doit être suivi, à peine de nullité, d'un acte authentique, ou, en cas de refus de l'une des parties, d'une demande en justice, et cela dans les six mois qui suivent la passation de l'acte ;


Attendu que pour dire la demande irrecevable, l'arrêt retient que lorsque la SAFER a engagé son action pour réaliser l'acte de vente, le 23 mai 2001, le délai de six mois prévu à l'article 42 de la loi civile du 1er juin 1924 applicable à tout acte translatif de propriété immobilière en Alsace-Moselle et dont le point de départ est fixé à la date de cet acte soit en l'espèce le 29 septembre 2000, était écoulé, entraînant la nullité de celui-ci, que par suite la SAFER Alsace était irrecevable en son action ;


Qu'en statuant ainsi, alors que le délai de six mois ne courait à l'égard de la SAFER qu'à compter de la date de sa décision de préemption rendant la vente parfaite et non à compter de celle de la promesse de vente initiale à laquelle elle était demeurée étrangère, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :


CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 mars 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;


remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Colmar, autrement composée ;


Condamne M. X... aux dépens ;


Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ; le condamne à payer à la SAFER Alsace la somme de 2 000 euros ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille six, et signé par Mme Berdeaux, greffier de chambre ayant assisté au prononcé de l'arrêt.

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