18 janvier 2005
Cour de cassation
Pourvoi n° 02-13.733

Première chambre civile

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - crédit à la consommation - défaillance de l'emprunteur - action - délai de forclusion - point de départ - date du dépassement du découvert convenu - applications diverses - compte d'un montant déterminé - conditions - détermination

Lorsque les parties sont convenues d'un découvert en compte d'un montant limité, le dépassement de ce découvert, dès lors qu'il n'a pas été ultérieurement restauré, manifeste la défaillance de l'emprunteur et constitue le point de départ du délai biennal de forclusion prévu par l'article L. 311-37 du Code de la consommation.

Texte de la décision

Sur les deux moyens réunis, le premier pris en ses trois branches :


Attendu que suivant offre préalable du 18 avril 1996, la Caisse régionale de Crédit agricole des Savoie a consenti à M. et Mme X..., depuis divorcés, un crédit à la consommation remboursable en 60 mensualités par prélèvement sur le compte ouvert à leur nom dans le même établissement et sur lequel ils bénéficiaient d'un découvert autorisé de 6 000 francs ; que M. et Mme Y..., parents de Mme X..., ont garanti le remboursement de cet emprunt par leur cautionnement solidaire ; que les emprunteurs étant défaillants, la banque les a assignés, avec les cautions, en paiement des sommes lui restant dues ;


Attendu que le Crédit agricole fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Chambéry, 5 février 2002) d'avoir déclaré son action irrecevable et de l'avoir condamné à indemniser ses adversaires pour procédure abusive, alors, selon le premier moyen :


1 / que le Crédit agricole faisait valoir que le prélèvement des échéances du prêt s'effectuait sur le compte des emprunteurs qui bénéficiaient aussi d'une ouverture de crédit à hauteur de 6 000 francs, selon acte du 19 juin 1993, pour une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction, cette ouverture de crédit ayant été tacitement renouvelée jusqu'au 9 juin 1998 ; qu'en considérant que le défaut de renouvellement du crédit à l'expiration de la période d'un an et le défaut de remboursement impliquaient que le délai biennal de l'article L. 311-37 du Code de la consommation ne commençait à courir qu'à compter de l'expiration de cette période contractuelle, même si le compte continuait à fonctionner, pour en déduire que le délai de forclusion avait commencé à courir à compter du 9 juin 1994 à défaut de justification de la reconduction de l'ouverture de crédit trois mois avant son échéance, la cour d'appel, qui a relevé que le compte avait continué de fonctionner, que le montant de l'ouverture de crédit avait été dépassé à plusieurs reprises et notamment le 31 mai 1996, et qui a par là même constaté l'existence d'une convention tacite de découvert, ne pouvait décider que le point de départ du délai de forclusion était l'expiration de la convention expresse d'ouverture de crédit, sans violer les articles L. 311-9 et suivants et L. 311-37 du Code de la consommation ;


2 / qu'en cas de découvert tacite autorisé, les échéances d'un prêt étant prélevées sur le compte devenu débiteur, le délai biennal de forclusion prévu par l'article L. 311-37 du Code de la consommation ne peut commencer à courir qu'à compter de la date à laquelle le solde débiteur du compte est devenu exigible ; qu'en décidant que le délai de forclusion avait commencé à courir à compter du 9 juin 1994 à défaut de justification de la reconduction de l'ouverture de crédit trois mois avant son échéance, motif pris que le défaut de renouvellement du crédit à l'expiration de la période d'un an et le défaut de remboursement impliquaient que le délai biennal ne commençait à courir qu'à compter de l'expiration de cette période contractuelle, même si le compte avait continué à fonctionner, tout en relevant que le compte avait continué à fonctionner à découvert, le montant du découvert autorisé ayant été dépassé à plusieurs reprises, et notamment le 31 mai 1996, ce qui caractérisait une convention tacite de découvert, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 311-9 et L. 311-37 du Code de la consommation ;


3 / que la banque faisait valoir que les prélèvements mensuels en remboursement des échéances du prêt opérées sur le compte fonctionnant à découvert valaient paiement, le point de départ du délai de forclusion devant être fixé à la date à laquelle le solde débiteur était devenu exigible ; qu'ayant constaté que, nonobstant l'absence d'offre écrite de renouvellement de la convention expresse du 9 juin 1993, le compte avait fonctionné à découvert, que le montant de l'ouverture de crédit avait été dépassé à plusieurs reprises, notamment le 31 mai 1996 pour en déduire que ce dépassement devait être considéré comme l'échéance impayée, constituant le point de départ du délai, en l'absence de nouvelle offre écrite, la cour d'appel, qui a constaté que les parties étaient liées par une convention de découvert tacite et qui devait seulement prendre en considération la date d'exigibilité du solde débiteur, a violé les articles L. 311-9 et suivants et L. 311-37 du Code de la consommation ;


et alors, selon le second moyen, que la cassation à intervenir sur le premier moyen du chef du dispositif qui a constaté la forclusion de l'action du Crédit agricole au titre du prêt entraînera par voie de conséquence celle du chef du dispositif qui condamne cette banque à payer des dommages et intérêts aux consorts Y... ;


Mais attendu que lorsque les parties sont convenues d'un découvert en compte d'un montant limité, le dépassement de ce découvert manifeste la défaillance de l'emprunteur et constitue le point de départ du délai biennal de forclusion ; que la cour d'appel qui a constaté que l'ouverture de crédit consentie le 9 juin 1993, à défaut d'avoir été régulièrement renouvelée, s'était tacitement poursuivie avec un montant identique qui avait été dépassé le 31 mai 1996, a exactement décidé, dès lors qu'il n'était pas soutenu que ce dépassement avait été ultérieurement restauré, que ce dépassement devait être considéré comme une échéance impayée et que l'action, introduite par actes des 14 et 16 avril 1999, était irrecevable ; que le premier moyen, qui est inopérant en sa première branche pour critiquer des motifs surabondants, et qui manque en fait en sa deuxième branche, est mal fondé en sa troisième ;


que le rejet du premier moyen prive le second de fondement ;

PAR CES MOTIFS :


Rejette le pourvoi ;


Condamne la Caisse régionale de Crédit agricole des Savoie aux dépens ;


Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la Caisse régionale de Crédit agricole des Savoie ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille cinq.

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