31 janvier 2006
Cour de cassation
Pourvoi n° 02-18.297

Première chambre civile

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

CONFLIT DE LOIS - régimes matrimoniaux - régime légal - détermination - coexistence du droit coutumier local et du droit français en algérie - portée - situation de succession d'etats lors de l'indépendance de l'algérie - recherche de la volonté présumée des époux - transcription du mariage sur les registres d'état civil français - critères - premier domicile matrimonial

Est exclusive d'un conflit de lois dans le temps, la détermination du régime matrimonial d'époux mariés en Algérie dès lors qu'à l'époque de leur mariage coexistait avec le droit français un droit coutumier local.

Texte de la décision

Attendu que M. X... et Mme Y..., français, domiciliés en Algérie, se sont mariés sans contrat en 1954 selon le rite malékite devant le cadi de la Mahakma de Blida, mariage transcrit le lendemain sur les registres de l'état civil de la mairie de Meurad (Algérie) ; que les époux ont habité en Algérie jusqu'à l'indépendance en 1962, date à laquelle ils se sont installés en France ; que M. X... ayant acquis un immeuble en 1976 et les époux ayant divorcé en 1996, une difficulté les a opposés, devant le notaire liquidateur, pour la détermination de leur régime matrimonial ;


Sur le premier moyen pris en ses quatre branches :


Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Toulouse, 19 septembre 2001) d'avoir décidé que les époux étaient soumis au régime de la séparation de biens par l'effet de leur mariage selon la coutume musulmane et du droit algérien et non pas au régime de la communauté légale du droit français, de sorte que la maison d'habitation était un propre du mari, alors, selon le pourvoi :


1 / qu'en Algérie, avant l'indépendance, le régime matrimonial des époux mariés sans contrat, était celui de la communauté légale, même si les époux étaient de statut personnel ou de statut civil, l'indépendance n'ayant crée qu'une situation de succession d'Etats et non de conflits de lois dans l'espace, de sorte que la cour d'appel, tout en relevant que leur mariage selon le rite malékite "n'emportait pas soumission à une loi étrangère " a décidé le contraire, violant ainsi la Constitution de 1946, la loi de 1947 sur l'organisation de l'Algérie, les articles 1399 et 1400 du Code civil applicables à l'époque et 10 de la loi du 13 juillet 1965 ;


2 / qu'en ne recherchant pas le statut personnel dont relevaient les époux tout en appliquant à leur mariage le droit coutumier qui était le seul point de rattachement au droit local, alors que les articles 3 et 8 de la loi du 28 septembre 1947 prévoyaient que les intéressés étaient soit de statut civil, soumis au droit métropolitain sans pouvoir en changer, soit de statut personnel local pouvant alors en changer par renonciation expresse, et que Mme Y... soutenait dans ses écritures qu'ils étaient tous les deux de statut civil, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de ces textes ;


3 / qu'en se bornant à prendre en compte le seul critère du domicile en Algérie au moment du mariage pour déterminer la loi applicable au régime matrimonial des époux alors qu'il y avait d'autres éléments, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 3 du Code civil et des règles applicables au conflit de loi ;


4 / qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de ces mêmes textes, car M. X... ne pouvait pas, sans se contredire, faire valoir en 1989, qu'ils relevaient du régime de la communauté légale du droit français, ce sur quoi l'arrêt ne s'est pas expliqué ;


Mais attendu, d'abord, que le premier grief est inopérant dès lors qu'à l'époque du mariage de M. X... et de Mme Y..., coexistait en Algérie, avec le droit français, un droit coutumier local de sorte que la détermination de leur régime matrimonial, qui est exclusive d'un conflit de lois dans le temps, doit être recherchée, faute de choix exprès des conjoints, par référence à leur volonté présumée; qu'ensuite, par motifs propres et adoptés, l'arrêt relève que les époux se sont mariés sans contrat en Algérie selon le rite malékite devant le cadi de la Mahakma de Blida, qu'il sont restés pendant plus de huit ans dans ce pays où ils ont fixé leur premier domicile matrimonial, qu'ils y ont vécu jusqu'en 1962, date où ils se sont installés en France en optant pour la nationalité française ; que prenant en compte leur statut personnel, dont il se déduisait qu'ils étaient soumis au statut de droit civil local, la cour d'appel a pu décider qu'une simple transcription sur le registre d'état civil, se référant à une célébration intervenue selon la coutume musulmane, ne traduisait pas la volonté non équivoque des époux de soumettre leur régime matrimonial au droit commun français et que le premier établissement des époux en Algérie étant stable et durable, consacrait leur volonté au moment de leur mariage d'être régi par le droit coutumier local en vigueur ; que de ces appréciations souveraines, elle en a exactement déduit que le régime applicable, d'après le droit local, était celui de la séparation de biens ; qu'enfin, l'allégation selon laquelle M. X... aurait reconnu être soumis au régime légal français, ne constitue qu'une simple affirmation dépourvue de toute offre de preuve ;


que le moyen, qui manque en fait en ses trois dernières branches, ne peut être accueilli ;


Sur le second moyen tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe au présent arrêt :


Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de son action en indemnité sur le fondement d'un enrichissement sans cause ;


Attendu que c'est par une décision motivée que la cour d'appel a souverainement estimé qu'elle ne rapportait pas la preuve de sa participation aux activités professionnelles de son mari excédant son obligation de contribuer aux charges du mariage ; que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :


REJETTE le pourvoi ;


Condamne Mme Y... aux dépens ;


Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un janvier deux mille six.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.