5 octobre 1994
Cour de cassation
Pourvoi n° 92-19.764

Troisième chambre civile

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

ARCHITECTE ENTREPRENEUR - responsabilité - responsabilité à l'égard du maître de l'ouvrage - garantie décennale - action en garantie - délai - interruption - citation en référé antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 5 juillet 1985 (non) - refere - assignation - portée - prescription civile - condition - acte interruptif - action en justice - citation en référé - citation en référé antérieure à la loi du 5 juillet 1985 (non) - copropriete - syndic - pluralité de responsables - faute personnelle du syndic dans l'accomplissement de sa mission - absence de vérifications de l'avocat - fautes ayant concouru à la réalisation de l'entier dommage - condamnation in solidum - faute - faute personnelle dans l'accomplissement de sa mission - effet

Avant l'entrée en vigueur de la loi du 5 juillet 1985, l'assignation en référé n'avait pas d'effet interruptif et le délai de garantie décennale ne pouvait être interrompu que par une assignation au fond.

Texte de la décision

Joint les pourvois n°s 92-19.769 et 92-19.764 ;


Sur le moyen unique du pourvoi n° 92-19.769 :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 juin 1992), que la société civile immobilière du Parc de Montparnasse a fait construire un groupe d'immeubles dont les réceptions ont eu lieu les 17 décembre 1974 et 22 décembre 1975 ; qu'invoquant des désordres, le syndicat des copropriétaires a assigné en référé, aux fins d'expertise et provision, le 11 janvier 1985, la SCI et son assureur, l'Union des assurances de Paris (UAP), puis, au fond, en réparation, cette société et cette compagnie, en décembre 1988, et, pour le cas où la forclusion décennale serait encourue, le syndic de la copropriété, la société Sogindo et MM. Y... et X..., avocats successifs du syndicat, pour fautes professionnelles ; que la SCI a formé des appels en garantie contre MM. Joutel, Escande et Vincent, architectes, les locateurs d'ouvrage et leurs assureurs ;


Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le condamner à indemnisation envers le syndicat des copropriétaires pour avoir présenté la demande en garantie décennale de celui-ci après expiration du délai de forclusion des articles 1792 et 2270 du Code civil, alors, selon le moyen, que l'assignation en référé-provision interrompt la prescription en ce qu'elle tend à faire déclarer non sérieusement contestable l'existence d'une obligation ; que l'arrêt attaqué a expressément constaté que M. X... avait fait délivrer, le 11 janvier 1985, au nom du syndicat des copropriétaires, une assignation contre les constructeurs, aux fins d'expertise et de provision ; que la cour d'appel a déclaré que cette assignation en référé-provision n'avait pas interrompu la prescription décennale, acquise au moment des assignations au fond délivrées en décembre 1988 par M. X..., pour en déduire que ce dernier avait engagé sa responsabilité en faisant perdre au syndicat des copropriétaires la chance d'obtenir réparation des dommages subis ; qu'en statuant ainsi, pour condamner M. X... au paiement de diverses sommes au profit du syndicat des copropriétaires, la cour d'appel a violé les articles 2244 et 1382 du Code civil ;


Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu qu'antérieurement à l'entrée en vigueur, le 1er janvier 1986, de la loi du 5 juillet 1985, l'assignation en référé n'avait pas d'effet interruptif et que le délai de garantie décennale ne pouvait être interrompu que par une assignation au fond ;


D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;


Sur les premier et deuxième moyens, réunis, du pourvoi n° 92-19.764 :


Attendu que la société Sogindo fait grief à l'arrêt de la condamner, in solidum, avec M. X... à indemnisation envers le syndicat des copropriétaires, alors, selon le moyen, 1° qu'il était certes constant et relevé par l'arrêt attaqué que, concernant les premiers bâtiments, la garantie décennale expirait le 17 décembre 1984 et que, dans un courrier du 11 décembre 1984, la société Sogindo, syndic des immeubles, avait écrit à M. X... : " il y a lieu de faire désigner... un expert en référé et d'interrompre dans quelques mois, par une action au fond, l'ancienne garantie décennale " ; mais que l'arrêt attaqué a aussi noté que, par la gravité des conséquences qui s'y attachent, la recherche et l'établissement des points de départ des délais de garantie doivent être la préoccupation initiale primordiale des conseils en matière de désordres immobiliers et constaté que M. X..., responsable du choix des procédures et de leur bonne marche, avait été, à partir du 8 novembre 1984, en possession d'un dossier de son confrère, M. Y..., qui contenait obligatoirement les procès-verbaux de réception, ou, à tout le moins, tous documents utiles pour fixer le point de départ du délai décennal ; qu'il s'ensuit que ne déduit pas les conséquences légales de ses propres constatations et manque de base légale au regard des articles 1146 et suivants du Code civil l'arrêt attaqué qui retient que l'indication erronée contenue dans la lettre du syndic du 11 décembre 1984 avait pu être cause du préjudice subi par le maître de l'ouvrage par suite du défaut de mise en oeuvre, dans le délai légal, de la garantie décennale par l'avocat, M. X... ; 2° que, dans son courrier du 11 décembre 1984 à M. X..., la société Sogindo indiquait qu'il y avait lieu " d'interrompre dans quelques mois, par une action au fond, l'ancienne garantie décennale " en visant tout à la fois " le défaut de respect de certaines prescriptions concernant la sécurité des IGH " et " les problèmes d'étanchéité et de gros oeuvre, de terrasses, balcons, façades ou réseaux enfouis ", sans aucunement distinguer entre les bâtiments réceptionnés en décembre 1974 et ceux qui l'avaient été en décembre 1975 ; qu'il s'ensuit que faute d'avoir pris en considération les termes de ce courrier du 11 décembre 1984 du syndic, ne justifie pas légalement sa solution au regard des articles 1146 et suivants du Code civil l'arrêt attaqué qui retient qu'aucune pièce n'établit que le syndic avait prié l'avocat d'assigner au fond concernant les bâtiments réceptionnés en décembre 1975 ; 3° que dans les rapports de l'avocat et du syndic, ne justifie pas légalement sa solution au regard des articles 1382 et suivants du Code civil l'arrêt attaqué qui consacre un partage de responsabilités par moitié, sans s'expliquer sur le moyen des conclusions d'appel de la société Sogindo, faisant valoir qu'il appartient, au besoin à l'avocat, de rectifier les éventuelles erreurs du syndic, lequel n'est pas un homme de l'art, d'autant que la cour d'appel a relevé que l'avocat était responsable du choix des procédures et de leur bonne marche, et qu'il avait été mis en possession, en temps utile, de tous les éléments permettant de fixer le point de départ du délai décennal et donc de corriger l'information erronée du syndic " ;




Mais attendu qu'ayant constaté que, dès décembre 1983, la société Sogindo, syndic gestionnaire et professionnel de l'immobilier, avait reçu mandat du syndicat des copropriétaires d'agir en justice, que le 11 décembre 1984 seulement, elle avait, quelques jours avant l'expiration du délai de garantie décennale, écrit à l'avocat " qu'il y avait lieu de faire désigner un expert en référé et d'interrompre dans quelques mois par une action au fond " ce délai et qu'aucune pièce ne prouvait que le syndic ait, pendant l'année 1985, prié M. X... d'assigner au fond pour " sauver ce qui pouvait encore l'être ", la cour d'appel a répondu aux conclusions et légalement justifié sa décision de ce chef en retenant que ce manque de diligence dans l'exercice de son mandat, cette imprécision et cette indication erronée constituaient une faute du syndic qui, avec l'absence de vérification imputable à M. X..., responsable du choix des procédures, avait contribué à la réalisation de l'entier préjudice du syndicat ;


Sur le troisième moyen du pourvoi n° 92-19.764, ci-après annexé :

(sans intérêt) ;


D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;


PAR CES MOTIFS :


REJETTE les pourvois.

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