11 décembre 1991
Cour de cassation
Pourvoi n° 90-17.489

Troisième chambre civile

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

CASSATION - pourvoi - pourvoi incident - recevabilité - désistement du demandeur au pourvoi principal - refus justifié du défendeur ayant formé un pourvoi incident - désistement - effets - demandeur au pourvoi incident - refus justifié d'accepter le désistement au pourvoi principal - recevabilité du pourvoi incident - architecte entrepreneur - responsabilité - responsabilité à l'égard du maître de l'ouvrage - garantie décennale - action en garantie - bénéficiaires - vente de l'immeuble - maître de l'ouvrage s'étant engagé à remédier aux désordres - assurance responsabilite - action directe de la victime - personne pouvant l'exercer - victime du sinistre - personne subrogée dans ses droits pour l'avoir désintéressée - tiers lésé - appelant en garantie (non) - assurance - assurance responsabilité - action directe de l'architecte contre l'assureur du constructeur - condition

Le désistement du pourvoi doit être accepté s'il contient des réserves ou si le défendeur a préalablement formé un pourvoi incident et le juge déclare le désistement parfait si la non-acceptation ne se fonde sur aucun motif légitime. En conséquence le refus, justifié, d'accepter le désistement formulé par le défendeur qui a formé un pourvoi incident rend ce désistement non avenu.

Texte de la décision

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Sur le désistement du pourvoi principal :


Vu l'article 1024 du nouveau Code de procédure civile, ensemble les articles 1025 et 396 du même Code ;


Attendu que le désistement du pourvoi doit être accepté s'il contient des réserves ou si le défendeur a préalablement formé un pourvoi incident ; que le juge déclare le désistement parfait si la non-acceptation du défendeur ne se fonde sur aucun motif légitime ;


Attendu que les consorts X..., qui avaient formé un pourvoi principal le 26 juillet 1990, ont déclaré s'en désister purement et simplement le 20 septembre 1991 ;


Attendu que la Caisse d'assurance mutuelle du bâtiment a formé un pourvoi incident le 18 février 1991 ; qu'elle a déclaré maintenir son pourvoi incident et poursuivre la procédure ;


Attendu que le refus, justifié, d'accepter le désistement de pourvoi principal rend ce désistement non avenu ;


Sur le premier moyen du pourvoi principal :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 9 mai 1990), que la Société civile immobilière du Bas-Rhin (SIBAR) a, courant 1963-1965, fait construire, en vue de le vendre par lots, un immeuble sous la maîtrise d'oeuvre de M. X..., architecte, aux droits duquel se trouvent les consorts X..., assisté du bureau d'études des fluides et des structures Léonard Y... ; que le gros-oeuvre a été exécuté par la société Soprelest, depuis en liquidation des biens, la société Stenger et fils, actuellement en liquidation judiciaire, étant chargée des travaux de chauffage ; que ces deux entreprises étaient assurées auprès de la Caisse d'assurance mutuelle du bâtiment (CAMB) ; qu'après réception intervenue en avril 1965, des copropriétaires ayant invoqué des désordres du système de chauffage, la SIBAR a assigné MM. X... et Y... et les sociétés Stenger et fils et Soprelest en réparation ; que M. X... a sollicité, notamment, la garantie du bureau d'études

Y...

et de la CAMB ;


Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable l'action introduite par la SIBAR et condamné M. X..., in solidum avec le bureau d'études

Y...

, à réparer les désordres, alors, selon le moyen, 1°) qu'aux termes de l'assignation délivrée le 27 mai 1973 à l'architecte X..., la société SIBAR demandait au tribunal de " condamner les défendeurs in solidum à effectuer les travaux de remise en état de l'installation de chauffage des immeubles appartenant à la demanderesse et sis ...... " ; qu'en l'état de cette assignation, qui ne tendait qu'à la réparation des désordres affectant les seuls appartements dont la SIBAR était propriétaire au jour de la signification de cette assignation à l'architecte X..., le 7 mai 1973, la cour d'appel, qui ne précise pas si, à cette date, la société SIBAR aurait encore été propriétaire d'un ou de plusieurs des vingt deux appartements présentant des désordres et aurait eu ainsi qualité à agir en réparation contre l'architecte, a) n'a pas répondu aux conclusions dont elle était saisie, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; b) n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 122 du nouveau Code de procédure civile ; c) a violé les

articles 1792 et 2270 du Code civil et les articles 1 et suivants de la loi du 10 juillet 1965 en portant condamnation des ayants cause de l'architecte envers la société SIBAR à réparer les désordres affectant un immeuble totalement vendu par le promoteur et au sujet desquels la demande du syndicat de copropriété était irrecevable ; 2°) que l'arrêt attaqué, qui relève que les désordres allégués par la société SIBAR auraient été de nature à déprécier la valeur des appartements encore invendus par elle, mais qui ne constate pas que les ventes postérieures à l'assignation du 7 mai 1973 l'auraient été à un prix dévalué, n'a pas donné de base légale, au regard des articles 1792 et 2270 du Code civil, à sa décision qui a condamné l'architecte, avec le bureau d'études, à réparer des désordres affectant les tuyaux de chauffage défectueux selon les modalités du rapport d'expertise du 29 octobre 1985 ; 3°) que ni la " mise en cause " de la société SIBAR par onze copropriétaires à l'automne 1968, ni l'engagement de la société SIBAR au profit de l'un d'eux, ni la sollicitation d'une mesure conservatoire, ni la mise en demeure d'un copropriétaire n'ont constitué des actes mettant en jeu, dans le délai décennal, la garantie de la société SIBAR et lui donnant ainsi qualité pour agir, à son tour, en garantie contre les constructeurs sur le fondement des articles 1792 et 2270 du Code civil, qui ont été violés ;


Mais attendu que la cour d'appel qui, après avoir exactement rappelé que le maître de l'ouvrage peut, postérieurement à la vente, exercer l'action en garantie décennale si celle-ci présente pour lui un intérêt direct et certain, a répondu aux conclusions et légalement justifié sa décision de ce chef en retenant que la société SIBAR, qui n'avait pas, dans son assignation du 7 mai 1973, demandé seulement la réparation des désordres affectant les appartements dont elle était demeurée propriétaire, le dernier étant vendu en 1976, s'était, après les réclamations formulées par les acquéreurs des appartements atteints de désordres, engagée à y remédier ;


Sur le second moyen du pourvoi principal : (sans intérêt) ;


Mais sur le moyen unique du pourvoi incident :


Vu l'article L. 124-3 du Code des assurances ;


Attendu que l'assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé, jusqu'à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l'assuré ;


Attendu que, pour déclarer recevable l'action exercée par M. X... contre la CAMB en qualité d'assureur des sociétés Stenger et fils et Soprelest, l'arrêt retient que le recours est fondé sur l'action directe ouverte à la société SIBAR, victime du sinistre, et que M. X... se trouve subrogé à concurrence des montants qui seront payés à celle-ci ;


Qu'en statuant ainsi, alors que M. X... n'avait pas encore désintéressé la société SIBAR, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;


PAR CES MOTIFS :


CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré recevable et partiellement bien fondé l'appel en garantie exercé par M. X... contre la CAMB en qualité d'assureur des sociétés Stenger et fils et Soprelest, l'arrêt rendu le 9 mai 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz

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