10 mars 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-15.618

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2021:CO00208

Texte de la décision

COMM.

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 10 mars 2021




Rejet


Mme MOUILLARD, président



Arrêt n° 208 F-D

Pourvoi n° U 19-15.618




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 10 MARS 2021

La société Banque populaire méditerranée, société coopérative de banque populaire, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° U 19-15.618 contre l'arrêt rendu le 10 janvier 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 3-3), dans le litige l'opposant à Mme Y... V..., épouse R..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Graff-Daudret, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Banque populaire méditerranée, de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de Mme V..., épouse R..., et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 19 janvier 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Graff-Daudret, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 janvier 2019), par un acte du 25 février 2011, la société Banque populaire provençale et corse, aux droits de laquelle est venue la société Banque populaire méditerranée (la banque), a consenti à la SARLU [...] (la société) un prêt, garanti par le cautionnement de Mme R....

2. La société ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque a assigné en paiement la caution, qui lui a opposé la nullité de l'acte de prêt, pour avoir été souscrit par une société qui n'avait pas la personnalité morale, n'ayant été immatriculée au registre du commerce et des sociétés que le 3 mars 2011, et a demandé, en conséquence, l'annulation de son engagement.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La banque fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande de Mme R..., alors « que tant que les parties au contrat de prêt n'ont pas été remises en l'état antérieur à la conclusion de leur convention annulée, l'obligation de restituer inhérente à ce contrat demeure valable, de sorte que le cautionnement garantissant l'exécution de celui-ci subsiste jusqu'à l'extinction de cette obligation ; qu'en retenant pourtant que "le contrat de prêt est frappé de nullité puisqu'il a été consenti à une société qui n'avait pas encore de personnalité morale" et que "la Banque populaire méditerranée ne peut par conséquent se prévaloir de l'engagement de Y... R... qui s'est portée caution de ce prêt", la cour d'appel a violé l'article 2289 du code civil. »

Réponse de la Cour

4. Après avoir relevé que la société avait été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 3 mars 2011, postérieurement à la conclusion du contrat de prêt cautionné, daté du 25 février 2011, l'arrêt énonce que, selon l'article L. 210-6 du code de commerce, les sociétés commerciales jouissent de la personnalité morale à compter de la date de leur immatriculation au registre du commerce et des sociétés. L'arrêt retient que le contrat de prêt a été signé par la société, représentée par son gérant, ce dont il déduit que ce n'est pas ce dernier qui a agi pour le compte de la société en formation en sa qualité d'associé ou de gérant mais la société elle-même, peu important qu'il n'ait pas été mentionné dans l'acte que celle-ci était en cours d'immatriculation. En l'état de l'indication de la société elle-même comme partie contractante, laquelle, dépourvue de la personnalité juridique, ne pouvait être tenue des obligations résultant du contrat de prêt litigieux, la cour d'appel a exactement rejeté la demande formée contre la caution.

5. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Banque populaire méditerranée aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Banque populaire méditerranée et la condamne à payer à Mme V..., épouse R..., la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Banque populaire méditerranée.

Il est fait grief à la décision infirmative attaquée d'avoir dit que la Banque Populaire Méditerranée ne peut se prévaloir à l'encontre de Y... R... d'un acte de cautionnement d'une dette frappée de nullité absolue ;

aux motifs que « sur la nullité de l'acte de prêt et du cautionnement : que selon l'article L210-6 du code de commerce, les sociétés commerciales jouissent de la personnalité morale à dater de leur immatriculation au registre du commerce et des sociétés ; qu'en l'espèce, l'appelante fait valoir que le contrat de prêt du 25 février 2011 a été signé par la SARLU [...] qui n'avait pas encore de personnalité morale puisqu'elle n'a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Draguignan que le 3 mars 2011 et ses statuts enregistrés au service des impôts de Draguignan que le 10 mars 2011 ; qu'elle excipe par conséquent de la nullité de l'acte de prêt signé par une société dépourvue de capacité juridique et de la nullité subséquente de son engagement de caution qui ne peut exister sur une obligation nulle ; qu'étant observé que l'intimée ne répond pas sur ce point, l'analyse de l'acte du 25 février 2011 établit que la Banque Populaire Provençale et Corse a accordé un prêt de 135.000 euros, pour financer l'achat de matériel et l'aménagement du fonds de commerce, à la SARLU [...] représentée par son gérant O... R..., sans mention qu'elle était seulement en cours de formation ; qu'or, cette société n'a été immatriculée qu'ultérieurement le 3 mars 2011 ; que le contrat de prêt est donc frappé de nullité puisqu'il a été consenti à une société qui n'avait pas encore de personnalité morale et était dès lors dépourvue de capacité juridique ; que la Banque Populaire Méditerranée ne peut par conséquent se prévaloir de l'engagement de Y... R... qui s'est portée caution de ce prêt, conformément aux dispositions de l'article 2289 du code civil » ;

alors que tant que les parties au contrat de prêt n'ont pas été remises en l'état antérieur à la conclusion de leur convention annulée, l'obligation de restituer inhérente à ce contrat demeure valable, de sorte que le cautionnement garantissant l'exécution de celui-ci subsiste jusqu'à l'extinction de cette obligation ; qu'en retenant pourtant que « le contrat de prêt est frappé de nullité puisqu'il a été consenti à une société qui n'avait pas encore de personnalité morale » et que « la Banque Populaire Méditerranée ne peut par conséquent se prévaloir de l'engagement de Y...-Claude R... qui s'est portée caution de ce prêt » (arrêt, p. 5, alinéas 6 et 7), la cour d'appel a violé l'article 2289 du code civil.

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