29 octobre 2015
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 14/16312

10e Chambre

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

10e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 29 OCTOBRE 2015



N°2015/448













Rôle N° 14/16312







COMPAGNIE D'ASSURANCE MACIF

SA LA PARISIENNE





C/



[X] [K]

CPAM DU VAR





































Grosse délivrée

le :

à :

Me Jauffrès

Me Paolacci

Me Camps









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 17 Juillet 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 12/02018.





APPELANTES



COMPAGNIE D'ASSURANCE MACIF prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés [Adresse 1] ou encore prise en son CENTRE DE GESTION PROVENCE MEDITERRANEE sis à [Localité 1] - représentée par son représentant légal en exercice y domicilié

représentée par Me Jean-Marie JAUFFRES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée de Me Jean-Louis SAVES, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Bilitis DAVID, avocat au barreau de TOULON,



SA LA PARISIENNE

[Adresse 2]

représentée par Me Pierre PAOLACCI, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Agnès STALLA, avocat au barreau de MARSEILLE





INTIMES



Monsieur [X] [K]

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 2], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Philippe CAMPS, avocat au barreau de TOULON



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU VAR prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié, [Adresse 4]

défaillante















*-*-*-*-*





















COMPOSITION DE LA COUR



En application des dispositions des articles 785, 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Septembre 2015 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Christiane BELIERES, Présidente, et Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller, chargées du rapport.



Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.













Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :



Madame Christiane BELIERES, Présidente

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller

Mme Anne VELLA, Conseiller







Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Octobre 2015.







ARRÊT



Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Octobre 2015.



Signé par Madame Christiane BELIERES, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.






















































EXPOSE DES FAITS ET PROCÉDURE



Le 23 avril 2009 M. [X] [K] pilotant sa moto a été victime d'un accident de la circulation à [Localité 3] dans lequel a été impliqué un véhicule assuré auprès de la société MACIF.



Un rapport d'expertise a été établi le 19 janvier 2010 par le Dr. [I], mandaté par l'assureur de M. [K], la Sa La Parisienne.



Statuant sur les assignations délivrées d'une part, le 12 avril 2012 et le 13 avril 2012 à la requête de M. [K] à l'encontre de la caisse primaire d'assurance maladie du Var (CPAM) et de La Parisienne, d'autre part, le 28 mai 2013 à la requête de La Parisienne à l'encontre de la MACIF le tribunal de grande instance de Toulon, par jugement assorti de l'exécution provisoire du 17 juillet 2014, a au visa des articles 1 à 6 de la loi du 5 juillet 1985 :

- reçu M. [K] en ses actions à l'encontre de la MACIF et de La Parisienne,

- déclaré la MACIF et La Parisienne entièrement responsables des dommages subis par M. [K] du fait de l'accident du 23 avril 2009,

- déclaré la décision commune et opposable à la CPAM et fixé le préjudice de celle-ci à la somme de 46 364,82 €,

- débouté M. [K] de ses demandes relatives aux divers préjudices financiers liés au remboursement des prêts et aux dommages et intérêts en application de l'article L 211-24 du code des assurances,

- réservé le poste de préjudice afférent aux dépenses de santé futures,

en conséquence

- condamné la MACIF et La Parisienne à payer in solidum à M. [K] :

* la somme de 432 128,15 € en réparation de son préjudice corporel, déduction faite de la provision de 5 800 € déjà versée et hors postes de préjudice soumis au recours de la CPAM,

* la somme de 1 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la MACIF et La Parisienne aux dépens.



Il a détaillé comme suit les différents chefs du préjudice corporel de M. [K] :

* dépenses de santé actuelles : 6 278,17 €,

* perte de gains professionnels actuels : 4 919 €,

* assistance à tierce personne permanente : 1 620 € (accord des parties sur ce point),

* perte de gains professionnels futurs : 381 962,05 €,

* incidence professionnelle : 20 000 €,

* déficit fonctionnel temporaire : 2 101,60 €,

* souffrances endurées : 5 500 €,

* préjudice esthétique temporaire : 2 400 €,

* préjudice d'agrément temporaire : 3 000 €,

* déficit fonctionnel permanent : 3 900 €,

* préjudice esthétique permanent : 2 000 €,

* préjudice d'agrément permanent : 10 000 €,

* bien détérioré : 525,50 €.



Par déclaration du 20 août 2014 la MACIF a interjeté un appel général de cette décision, enrôlé sous le numéro 14/16312 ; La Parisienne a également interjeté un appel général enrôlé sous le numéro 14/16497.



Ces appels, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, ont été joints par ordonnance du 27 novembre 2014 du conseiller de la mise en état pour être suivis sous le premier numéro.




PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES



La MACIF demande dans ses conclusions du 19 novembre 2014, infirmant partiellement le jugement, de :

- déclarer satisfactoires ses offres suivantes :

* dépenses de santé actuelles : sur justificatifs,

* perte de gains professionnels actuels 13 185,77 €,

(période du 23 avril 2009 au 06 novembre 2009)

* incidence professionnelle : 5 000 €,

* aide humaine : 1 620 €,

* bien détérioré - forfait : 525,50 €,

* souffrances endurées : 4 000 €,

* préjudice esthétique : 1 500 €,

* préjudice d'agrément : 1 500 €,

* déficit fonctionnel permanent : 3 % soit 1 200 € le point : 3 600 €,

* déficit fonctionnel temporaire : 2 101,60 €,

soit une somme (avant déduction prestations tiers payeurs) de : 33 032,87 €

soit une somme (après déduction prestations tiers payeurs) de : 11 247,10 €

dont à déduire la provision déjà versée : 5 800 €

soit un solde de : 5 447,10 €,

- juger que l'organisme social doit produire sa créance dûment ventilée poste par poste et enfermée dans les limites fixées par le rapport d'expertise judiciaire,

- débouter M. [K] de sa demande de condamnation à hauteur de 3 000 € à titre de dommages et intérêts, en tout état de cause ramener cette demande à de plus justes proportions,- débouter M. [K] de sa demande de condamnation à hauteur de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en tout état de cause ramener cette demande à de plus justes proportions,

très subsidiairement

- désigner un médecin expert avec mission de déterminer l'incidence professionnelle imputable à l'accident du 23 avril 2009 à ses frais avancées,

- condamner M. [K] aux dépens avec distraction.



Elle fait valoir que :

- dans le cadre de la convention IRCA La Parisienne a, pour son compte, présenté une première offre d'indemnisation à son assuré, M. [K], le 21 janvier 2011 puis une seconde offre le 25 août 2011,

- les conclusions du rapport d'expertise amiable, seules opposables à toutes les parties démontrent que :

* la prolongation de l'arrêt de travail de M. [K] au-delà du 6 novembre 2009 n'est pas imputable à l'accident,

* l'accident a entraîné une pénibilité accrue de l'activité professionnelle mais non une inaptitude,

* le premier juge a confondu perte de gains professionnels futurs qui n'est pas établie en l'espèce et incidence professionnelle,

* M. [K] n'a produit aucun élément sur sa situation professionnelle actuelle alors qu'il n'est pas dans l'impossibilité d'exercer une activité professionnelle,

* La Parisienne a présenté une offre dans le respect des délais légaux, cette offre étant suffisante au regard des sommes allouées par le premier juge.



M. [K] demande dans ses conclusions du 12 décembre 2014, au visa de la loi du 5 juillet 1985 et des articles L. 124-3 et L. 211-1 du code des assurances, de :

- juger que la médecine du travail l'a déclaré inapte à son poste, après avoir émis des recommandations,

- juger qu'il a été a été licencié pour inaptitude et que malgré de nombreuses tentatives de reclassement, aucune possibilité n'a pu être envisagée,

-juger que l'expert confirme une pénibilité accrue compte tenu du caractère spécifique de la profession exercée sans autre préconisation,

- juger que si le taux de déficit fonctionnel permanent est de 3 %, le retentissement professionnel, la perte de gains et l'incidence professionnelle n'ont pas de corrélation,

- juger qu'en raison de la perte diffuse de ses gains il a été contraint de déposer un dossier de surendettement auprès de la Banque de France, ne pouvant plus faire face régulièrement aux échéances de prêts et dettes de la vie quotidienne,

- juger que l'indemnisation des victimes du dommage repose sur le principe de la réparation intégrale et implique de replacer la victime dans la situation dans laquelle elle se trouvait avant la survenance du dommage,

- juger que cette indemnisation doit s'apparenter à une compensation sans omettre d'éléments et ne donne pas lieu à une double indemnisation,

- juger qu'il est fondé à solliciter tant la réparation de la perte de gains futurs que celle de l'incidence professionnelle,

en conséquence,

- confirmer le jugement,

- condamner in solidum la MACIF et La Parisienne à lui verser la somme de 437 928,15 € sous déduction de la provision de 5 800 € versée,

- dire qu'il y a lieu de réserver le poste de dépenses de santé futures,

- condamner la MACIF et La Parisienne à lui verser 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.



Il soutient que :

- la perte de son emploi est la conséquence certaine et directe des séquelles de l'accident, puisqu'il a été déclaré inapte au poste occupé avant l'accident et à tous travaux sur sol instable, que son employeur a tenté vainement de le reclasser dans d'autres entreprises et a dû le licencier,

- sa réinsertion professionnelle est problématique, qu'il a fait toutes les démarches nécessaires pour effectuer des formations pour se reclasser professionnellement mais la compagnie d'assurances n'a pas voulu prendre en charge les frais de ces formations.



La Parisienne demande dans ses conclusions du 30 septembre 2014, au visa des articles 1202 et suivants du code civil, de :



** sur l'absence d'obligation à garantie à l'égard de son assuré conducteur fautif,

* à titre principal juger qu'en sa qualité de conducteur d'un véhicule et en l'état de l'identification d'un tiers impliqué, M. [K] ne dispose d'aucune action en indemnisation à l'encontre de sa propre compagnie d'assurances ni en application des dispositions de la loi Badinter ni en application de garantie contractuelle conducteur non souscrite,

en conséquence,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il l'a,

- déclarée responsable du préjudice subi par M. [K],

- condamnée in solidum avec la MACIF à réparer le préjudice de celui-ci,

- condamnée in solidum avec la MACIF aux dépens de l'instance et à payer à M. [K] la somme de 1800 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamnée in solidum avec la MACIF aux entiers dépens l'instance,

- la mettre hors de cause,

* à titre subsidiaire :

- juger que la solidarité ne se présume pas,

- juger qu'elle serait en tout état de cause relevée et garantie de toute condamnation prononcée à son encontre par la MACIF, tenue d'indemniser le préjudice de M. [K], conducteur non fautif, en application des dispositions de la loi du 5 juillet 1985 et de l'implication du véhicule par ses soins,



** sur la liquidation du préjudice, en application des articles 1 et suivants de la loi du 5 juillet 1985,

* homologuer le rapport d'expertise du Dr. [I],

* liquider le préjudice de M. [K] ainsi qu'il suit :

- dépenses de santé actuelles : mémoire organisme social,

- frais matériels : 525,20 €,

- pertes de gains professionnels actuels : 13'185,77 €

dont à déduire : 9 286,20 €

dont à déduire : 4 539,53 €,

créance des organismes sociaux

- assistance tierce personne : 1 620 €,

- perte de gains professionnels futurs : néant,

- incidence professionnelle : 5 000 €,

- déficit fonctionnel temporaire total : 60 €,

- déficit fonctionnel temporaire partiel : 2 041,60 €,

- souffrances endurées 3/7 : 4 000 €,

- déficit fonctionnel permanent 3 % : 3 600 €,.

- Préjudice esthétique 1,5/7 : 1 500 €,

- préjudice d'agrément : 1 500 €,

* déduire la provision à hauteur de la somme de 5 800 €,

* inviter l'organisme social à faire valoir sa créance dûment ventilée poste par poste et enfermée dans les limites fixées par le rapport d'expertise,

* condamner tout succombant à lui payer une somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamner tout succombant aux dépens de première instance et d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile.





La CPAM, assignée par la MACIF par acte d'huissier de justice du 16 septembre 2014 délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l'appel n'a pas constitué avocat mais par courrier du 20 septembre 2014, a fait connaître le montant de sa créance définitive de 46 320,32 € composée d'indemnités journalières (13 647,90 €), de prestations en nature (6 233,67 €), d'arrérages de rente (1.751,45 €) et de capital de rente (24 687,30 €).



L'arrêt sera réputé contradictoire conformément aux dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.




Motifs de la décision :



Le droit à indemnisation intégrale du préjudice corporel subi par M. [K] n'a jamais été contesté ; seule est discutée en cause d'appel l'évaluation de ce préjudice et l'obligation de La Parisienne à garantir ce dommage in solidum avec la MACIF.



Sur la garantie de La Parisienne



Il est constant qu'au moment de l'accident du 23 avril 2009, M. [K] était gardien de la moto qu'il pilotait et qui était assurée auprès de La Parisienne.



Il fonde son action à l'encontre de cet assureur sur la loi du 5 juillet 1985 et les articles L. 124-3 et L. 211-1 du code des assurances.



Or M. [K] ne peut se prévaloir des dispositions de la loi du 5 juillet 1985 à l'encontre de son propre assureur pour obtenir l'indemnisation de son dommage consécutif à cet accident de la circulation, en l'absence d'un tiers conducteur de sa moto et débiteur d'une indemnisation à son égard.



Il ne peut davantage invoquer la garantie contractuelle liée à l'assurance automobile de responsabilité obligatoire qui, en vertu de l'article R 211-8 du code des assurances, ne s'applique pas à la réparation des dommages subis par la personne conduisant le véhicule, faute de justifier avoir souscrit une assurance facultative conventionnelle couvrant les dommages corporels subis par le conducteur du véhicule terrestre à moteur.



La Parisienne doit en conséquence être mise hors de cause et le jugement sera infirmé en ce qu'il l'a condamnée in solidum avec la MACIF à l'indemnisation du préjudice subi par M. [K].



Sur le préjudice corporel



L'expert amiable [I] indique que M. [K] a présenté des traumatismes du genou gauche, de la cheville droite avec fracture malléolaire externe, du pied gauche avec fracture sous capitale des troisième, quatrième et cinquième métatarsiens, des lésions tégumentaires superficielles du genou et de la cheville gauches et qu'il conserve comme séquelles une raideur en flexion extension de la cheville droite et des douleurs épisodiques du genou gauche.



Il conclut à :

- un arrêt des activités professionnelles du 23 avril 2009 au 6 novembre 2009,

- un déficit fonctionnel temporaire total du 23 avril 2009 au 25 avril 2009,

- un déficit fonctionnel temporaire partiel classe IV du 26 avril 2009 au 23 mai 2009, classe III du 24 mai 2009 au 31 août 2009, classe II du 1er septembre 2009 au 1er octobre 2009, classe I du 2 octobre 2009 au 22 avril 2010,

- une consolidation au 23 avril 2010,

- des souffrances endurées de 3/7,

- un déficit fonctionnel permanent de 3 %,

- un préjudice esthétique permanent de 1,5/7,

- une pénibilité accrue dans l'exercice de la profession déclarée,

- un besoin d'assistance de tierce personne de 60 heures mensuelles pendant un mois puis de 40 heures mensuelles durant 3 mois incluant l'assistance aux trajets thérapeutiques.



Son rapport contient les éléments permettant à la cour de déterminer l'incidence professionnelle du dommage, sur laquelle l'expert a d'ailleurs fourni un avis, de sorte que la demande de nouvelle expertise formulée à titre subsidiaire par la MACIF doit être rejetée.



Il constitue une base valable d'évaluation du préjudice corporel subi à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime née le [Date naissance 1] 1962, de son activité de charpentier, de la date de consolidation, afin d'assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel sauf s'ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage.



Préjudices patrimoniaux



temporaires (avant consolidation)



- Dépenses de santé actuelles 6 233,67 €

Ce poste est constitué des frais d'hospitalisation, frais médicaux et pharmaceutiques, massages et divers pris en charge par la CPAM soit, selon le décompte définitif au 29 septembre 2014, 6.233,67 €, la victime n'invoquant aucun frais de cette nature restés à sa charge.





- Perte de gains professionnels actuels13 185,77 €

Ce poste vise à compenser une incapacité temporaire spécifique concernant les répercussions du dommage sur la sphère professionnelle de la victime et doit être évalué au regard de la preuve d'une perte effective de revenus.



L'expert a précisé que le 5 octobre 2009 le Dr. [Y] a délivré une prolongation de l'arrêt de travail à échéance du 15 octobre 2009 faisant mention de 'fracture astragale', que cet arrêt a été prolongé par le Dr. [Q], chirurgien orthopédique, jusqu'au 6 novembre 2009, puis qu'il a été reconduit successivement par le médecin généraliste traitant jusqu'au 8 février 2010 (page 4) mais que cette lésion ne peut être considérée comme médico-légalement imputable à l'accident du 23 avril 2009 (page 9).



L'expert a estimé que l'arrêt temporaire des activités professionnelles devait être fixé du 23 avril 2009 au 2 novembre 2009, correspondant aux arrêts de travail prescrits par le chirurgien orthopédique.



Il ne ressort pas des pièces communiquées par les parties que l'arrêt des activités professionnelles en lien avec l'accident puisse être fixée à une date postérieure à celle retenue par l'expert eu égard à la non imputabilité de la lésion de l'astragale droite, étant précisé que la décision d'inaptitude prise par le médecin du travail en mars 2010 n'a pas incidence sur ce point.



Au vu de son bulletin de salaire du mois de décembre 2008 versé aux débats M. [K] percevait lors de l'accident un salaire net imposable de 1 839,56 € par mois (cumul net imposable de 22.074,71 € au 31/12/2008).



Sa perte de gains s'établit ainsi à la somme de 11 957,14 € (1 839,56 € x 6,50 mois) pour les périodes d'arrêt d'activité retenues par l'expert ; la MACIF offrant 13 185,77 € cette somme sera retenue.



Des indemnités journalières ont été versées sur cette même période du 23 avril au 6 novembre 2009 par la CPAM pour un montant de 9 286,20 € (13 647,90 € x 198 jours / 291 jours) et par BTP-Prévoyance pour un montant de 3.899,26 € [175,80 € + 997, 24 € + 668,64 € + 494,93 € +503,38 € + 323,60 € + 34,37 € + 6,88 € + 96,25 € + 96,25 € + 89,39 € + 96,25 € + 89,39 € + 61,89 € + 48,13 € + 96,25 € + 20,62 € (96,25 € / 14 j x 3 jours) ] soit au total la somme de 13.185,46 € qui s'imputent sur ce poste de dommage qu'elles ont vocation de réparer de sorte qu'aucune indemnité ne revient à la victime qui a été entièrement remplie de ses droits.



- Assistance de tierce personne 1 620 €

L'indemnité de 1 620 € allouée par le tribunal n'est critiquée par aucune partie en cause d'appel.

Elle a été allouée, à tort, au titre des préjudices patrimoniaux permanents car elle porte sur les quatre mois suivant l'accident et donc sur une période antérieure à la consolidation ; elle dit être requalifiée en préjudice patrimonial temporaire.



Préjudices patrimoniaux



permanents (après consolidation)



- Perte de gains professionnels futurs Néant

Ce poste est destiné à indemniser la victime de la perte ou de la diminution directe de ses revenus à compter de la date de consolidation, consécutive à l'invalidité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du fait dommageable.



L'expert n'a pas estimé que les séquelles dont M. [K] était atteint le rendaient inapte à l'exercice de son activité professionnelle de charpentier antérieure à l'accident, aucune instabilité articulaire n'ayant été cliniquement retrouvée, seule étant avérée selon lui une pénibilité accrue.



Il a été indiqué supra que passé le 6 novembre 2009 M. [K] a été en mesure de retravailler, étant rappelé que la lésion astragalienne n'a pas été considérée comme médico-légalement imputable à l'accident ; le licenciement intervenu le 1er avril 2010, à la suite de la décision d'inaptitude au poste antérieur prise par le médecin du travail, est donc sans lien de causalité direct et exclusif avec les séquelles de l'accident ; au demeurant, la décision du médecin du travail telle que reproduite dans la lettre de congédiement ne vise pas une inaptitude dans cette branche professionnelle mais uniquement 'au poste anciennement occupé et aux conditions de travail dans l'entreprise' et le considère apte à tout autre poste respectant les restrictions posées (pas de travail sur sols instables en général et pas de conduite prolongée).



M. [K] ne saurait donc prétendre être indemnisé sur la base d'une perte de gains à la fois certaine, déterminée et intégrale, d'autant qu'il ne donne pas le moindre élément sur sa situation professionnelle depuis cette date alors qu'elle remonte à plus de 5 ans ; et le dernier relevé de situation de Pole Emploi est en date de décembre 2010.



La pénibilité accrue de l'exercice professionnel ne peut donner lieu à indemnisation qu'au titre de l'incidence professionnelle du dommage.



M. [K] ne justifie donc pas de la réalité d'une perte de gains professionnels futurs, réclamée sur la base de son salaire annuel lors de l'accident de 30.460 € à capitaliser à titre viager ; aucune indemnité ne lui sera donc allouée au titre de ce poste de préjudice.



- Incidence professionnelle10 000 €

Ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap.



L'expert a noté que M. [K] reste atteint d'une discrète raideur de la flexion extension de la cheville droite limitant l'accroupissement et l'agenouillement et des gonalgies gauches épisodiques.



Il a estimé que ces séquelles entraînent une pénibilité accrue en raison de la spécificité de la profession de charpentier de M. [K].



Ces éléments établissent que dans tous métiers supposant l'accroupissement et l'agenouillement fréquents M. [K] sera confronté à une fatigabilité plus importante, avec une dévalorisation sur le marché du travail.



Au vu de l'ensemble de ces données s'agissant d'une victime âgée de 47 ans au jour de la consolidation et de 52 ans au jour de la liquidation, l'incidence professionnelle du dommage sera réparée par l'allocation d'une somme de 10 000 €.



Sur cette indemnité s'impute la rente accident du travail de 24 687,34 € réglée par la CPAM qu'elle a vocation à réparer, à hauteur de 10 000 €



Aucune indemnité ne revient à ce titre à M. [K].



Préjudices extra-patrimoniaux



temporaires (avant consolidation)



- Déficit fonctionnel temporaire2 101,60 €

Ce poste inclut la perte de la qualité de la vie et des joies usuelles de l'existence et le préjudice d'agrément et le préjudice sexuel pendant l'incapacité temporaire.



L'indemnité accordée par le premier juge soit 2.101,60 n'est critiqué en cause d'appel par aucune partie.



- Souffrances endurées5 500 €

Ce poste prend en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime en raison du traumatisme initial, de l'hospitalisation, des soins astreignants ; évalué à 3/7 par l'expert, il justifie l'octroi d'une indemnité de 5 500 €.



- Préjudice esthétique temporaire1 000 €

Ce poste de dommage cherche à réparer les atteintes physiques et plus généralement les éléments de nature à altérer l'apparence physique avant la consolidation,



Il est caractérisé par une immobilisation en fauteuil pendant deux mois, l'utilisation de deux cannes anglaises pendant deux mois et d'une canne pendant un mois supplémentaire, ce qui justifie l'octroi d'une indemnité de 1.000 €.



permanents (après consolidation)



- Dépenses de santé futuresRéservé

Ce poste vise les frais hospitaliers, médicaux, paramédicaux, pharmaceutiques et assimilés, même occasionnels mais médicalement prévisibles, rendus nécessaires par l'état pathologique de la victime après la consolidation et incluent les frais liés soit à l'installation de prothèses soit à la pose d'appareillages spécifiques nécessaires afin de suppléer le handicap physiologique.



L'expert a relevé que des frais médicaux après consolidation sont à envisager pour surveillance radiologique annuelle de la cheville droite, par clichés standard, durant trois ans ; M. [K] ne sollicite pas la liquidation de ces dépenses mais qu'elles soient réservées ; il sera fait droit à cette demande.



- Déficit fonctionnel permanent 3 900 €

Ce poste de dommage vise à indemniser la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l'atteinte anatomo-physiologique à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence (personnelles, familiale et sociales).



Il est caractérisé par une raideur en flexion extension de la cheville droite et des douleurs épisodiques du genou gauche, ce qui conduit à un taux de 3 % justifiant une indemnité de 3 900 € pour un homme âgé de 47 ans à la consolidation.



Le solde de la rente versée par la CPAM, soit 14.687,34 € (24 687,34 € - 10 000 €) qui en vertu de l'article L 434-2 du code de la sécurité sociale indemnise d'une part, les pertes de gains professionnels futurs et l'incidence professionnelle de l'invalidité et d'autre part le déficit fonctionnel permanent, s'impute sur ce poste.



Aucune indemnité ne revient donc à M. [K].



- Préjudice esthétique 1 700 €

Ce poste de dommage cherche à réparer les atteintes physiques et plus généralement les éléments de nature à altérer l'apparence physique.



Qualifié de 1,5/7 au titre de la lésion punctiforme prémalléolaire interne droite et de la cicatrice pararotulienne interne gauche, il doit être indemnisé à hauteur de 1 700 €.



- Préjudice d'agrément1 500 €

Ce poste de dommage vise exclusivement l'impossibilité ou la difficulté pour la victime à poursuivre la pratique d'une activité spécifique sportive ou de loisir.



M. [K] ne justifie pas ( attestation ou autre) qu'il s'adonnait, avant l'accident, à une activité de cette nature ; toutefois la MACIF offrant à ce titre une somme de 1 500 €, ce poste de préjudice sera liquidé à 1 500 €.



Le préjudice corporel global subi par M. [K] s'établit ainsi à la somme de 46 741,04 € soit, après imputation des débours des tiers payeurs ( CPAM : 29.419,87 € et ProBtp : 3.899,26 €), une somme de 13 421,91 € lui revenant qui, en application de l'article 1153-1 du code civil, porte intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, soit le 17 juillet 2014.



Sur le préjudice matériel



La MACIF ne discute pas ce chef de préjudice et accepte de verser à M. [K] la somme de 525,50€ qu'il demande ; les intérêts courront à compter du 17 juillet 2014 en application de l'article 1153-1 du code civil.



Sur les demandes annexes



La MACIF qui succombe partiellement dans ses prétentions et qui est tenue à indemnisation supportera la charge des entiers dépens de première instance et d'appel et ne peut, de ce fait, bénéficier des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



L'équité commande d'allouer à M. [K] une indemnité globale de 3 000 € au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel et de rejeter celle présentée par La Parisienne au même titre.



PAR CES MOTIFS



La Cour,



- Infirme le jugement,

sauf en ses dispositions relatives au rejet des préjudices financiers liés au remboursement des prêts, aux dommages et intérêts de l'article L 211-24 du code des assurances, au dommage matériel, à la réserve des dépenses de santé futures,



Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,



- Met hors de cause la SA La Parisienne,



- Rejette la demande de nouvelle expertise sur l'incidence professionnelle,



- Fixe le préjudice corporel global de M. [X] [K] à la somme de 46 741,04 €

- Dit que l'indemnité revenant à cette victime s'établit à 13 421,91 €,



- Condamne la société MACIF à payer à M. [X] [K] les sommes de

* 13 421,91 €, en réparation de son préjudice corporel, sauf à déduire les provisions versées, avec intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2014,

* 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



- Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit d'une autre partie.



- Condamne la société MACIF aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.





Le greffier Le président

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.