8 décembre 2015
Cour d'appel de Lyon
RG n° 13/01879

1ère chambre civile B

Texte de la décision

R.G : 13/01879









Décision du

Tribunal de Grande Instance de ROANNE

Au fond

du 20 février 2013



RG : 11/00549







[Y] [M] Vve [L]



C/



[I]

SCP [D]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 08 Décembre 2015







APPELANTE :



Mme [Y] [M] veuve [L]

née le [Date naissance 1] 1943 à [Localité 2])

[Adresse 4]

[Adresse 4]



Représentée par la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON

Assisté de Me Guillaume GARDET, avocat au barreau de LYON











INTIMES :



Me [N] [I]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représenté par la SCP TACHET, AVOCAT, avocat au barreau de LYON





SCP [D]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représentée par la SCP TACHET, AVOCAT, avocat au barreau de LYON













******





Date de clôture de l'instruction : 18 Mars 2015



Date des plaidoiries tenues en audience publique : 10 Novembre 2015



Date de mise à disposition : 08 Décembre 2015



Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Jean-Jacques BAIZET, président

- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller

- Michel FICAGNA, conseiller



assistés pendant les débats de Emanuela MAUREL, greffier



A l'audience, Jean-Jacques BAIZET a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.



Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,



Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Emanuela MAUREL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.




****



EXPOSE DE L'AFFAIRE



Mme [M] [Y] et M [K] [L] se sont mariés le [Date mariage 1] 1972 à [Localité 3], après avoir conclu le 21 décembre 1972 un contrat de séparation de biens reçu par Maître [W], notaire à [Localité 1].



Le 28 février 1976, les époux [L] se sont consentis mutuellement une donation au conjoint survivant par actes reçus par Maître [C], notaire à [Localité 4].



Toutefois, le même jour [K] [L] a remis à ce notaire un testament olographe par lequel il excluait de la donation au dernier vivant faite à son épouse un appartement situé [Adresse 3] ainsi que les biens reçus en héritage de sa famille et qu'il léguait à ses héritiers.



Le 19 juillet 1930, M [K] [L], qui était médecin, a rédigé sur une feuille d'ordonnance médicale un testament olographe par lequel il léguait à son épouse l'appartement de [Localité 5].



L'original de ce testament olographe a disparu.



M [K] [L] est décédé le [Date décès 1] 2004, laissant pour lui succéder son épouse, Mme [M] [Y], ainsi que ses frères et s'urs, à savoir M [A] [L] et Mme [G] [L].



Mme [M] [Y] a pris attache avec Maître [I], notaire à [Localité 4], successeur de Maître [C].



Ce dernier et Maître [J], notaire de M [A] [L] et de Mme [G] [L], se sont rapprochés aux fins de règlement amiable de la succession [L].



Par acte reçu par Maître [I] en date des 25 et 28 février 2005, Mme [M] [Y] a consenti à M [A] [L] est à Mme [G] [L] un acte de délivrance de legs particuliers portant sur les biens visés par le testament olographe du 28 février 1976 qui avaient été exclus de la donation au dernier vivant des époux.



Cet acte de délivrance de legs a été établi sur la base du testament olographe du 28 février 1976, sans que le testament du 19 juillet 1990 n'ait été pris en compte.



Ultérieurement, Mme [M] [Y] à contester en justice la validité de cet acte par la voie d'une action en nullité, se fondant sur l'existence du testament olographe du 19 juillet 1990 afin de voir ses droits successoraux mieux évalués.



Par jugement rendu le 20 février 2008, le tribunal de grande instance de Roanne a débouté Mme [M] [Y] de l'intégralité de ses prétentions.



Par arrêt du 9 juin 2009, la cour d'appel de Lyon a confirmé ce jugement, et dit qu'il ne pouvait pas être tenu compte du testament du 19 juillet 1990 dont il était produit une photocopie par une personne n'ayant pas été dépositaire de l'original. Elle a également déclaré régulier l'acte de délivrance de legs particuliers des 25 et 28 février 2005.



Par un arrêt de non-admission en date du 22 septembre 2010, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par Mme [M] [Y] contre cet arrêt.



Mme [Y] a assigné M [I], notaire, et la SCP [D] en responsabilité pour la perte des testaments et en raison de manquements du notaire à son devoir de conseil, notamment sur la portée de l'acte de délivrance de legs.



Par jugement du 20 février 2013, le tribunal de grande instance de Roanne l'a débouté de ses demandes.



Mme [Y] a interjeté appel du jugement.



Le 4 juin 2013, ellle a déposé une inscription de faux incidente contre un acte authentique visant le procès-verbal de dépôt et de description du 18 février 2005 relatif au testament du 28 février 1976, procès-verbal établi par M [I], notaire, en reprochant à ce dernier d'avoir énoncé des faits inexacts quant à l'existence de l'original du testament au 18 février 2005.



Au terme de ses dernières conclusions, Mme [Y] demande à la cour de :



- débouter les intimés de l'ensemble de leurs demandes,

- déclarer recevable et bien fondé la demande de faux en écriture publique,

- ordonner toutes mesures utiles aux fins de faire constater que l'original du testament visé par le procès-verbal argué de faux n'existe pas,

- constater que le procès-verbal du 18 février 2005 est un faux,

- déclarer le procès-verbal du 18 février 2005 nul et de nul effet,



En tout état de cause :



- constater l'impossibilité pour les intimés de produire les originaux des testaments du 28 février 1976 et du 19 juillet 1990 ;

- constater la faute de Maître [I], membre de la Scp [D], et le manquement à ses obligations professionnelles et notamment à son devoir de conseil,



En conséquence,



- condamner solidairement ou in solidum Maître [N] [I] et la Scp [D] au paiement des sommes :

- 150 000 euros en réparation du préjudice subi pour la perte de l'appartement de [Localité 5],

- 37 350 euros en réparation du préjudice subi pour la perte des loyers issu de la location de l'appartement de [Localité 5], outre somme à parfaire jusqu'à ce qu'une décision définitive soit rendue,

- 89 850,60 euros en réparation du préjudice subi pour la perte de la moitié indivise des biens de famille,

- 26 975 euros en réparation du préjudice subi pour la perte des loyers issus de la location de l'appartement de [Localité 4], outre somme à parfaire jusqu'à ce qu'une décision définitive soit rendue,

- 4980,09 euros TTC à parfaire en réparation du préjudice subi par la perte des dividendes,

- 13 300 euros au titre de la perte de chance d'obtenir le remboursement du trop versé des droits de mutation, sauf à parfaire,



Condamner solidairement ou in solidum Maître [N] [I] et la Scp [D] au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de dommages-intérêts, en réparation de son préjudice moral,



Condamner solidairement Maître [N] [I] et la Scp [D] au paiement de la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.



Sur l'inscription de faux incidente, elle soutient que les intimés étant incapables de produire l'original du testament du 28 février 1976, elle demontre l'impossibilité pour eux de prouver l'existence de l'original au jour de son inscription au rang des minutes le 18 février 2005 et donc de confirmer l'exactitude de leurs déclarations quant à la prétendue existence de l'original. Elle considère que le lien avec les prétentions originaires relatives à la responsabilité civile des intimés est demontré, puisque, s'il s'avère que l'inscription au rang des minutes du testament du 28 février 1167 s'est déroulée le 18 février 2005 sans que le notaire instrumentaire n'ait déposé effectivement de l'original du testament, l'ensemble du règlement de la succession repose sur un faux intellectuel.



Elle souligne que le seul élément que produit M [I] est la photocopie d'une enveloppe qui n'est pas visée dans le procès-verbal d'ouverture du testament et qui ne saurait valoir preuve, et qu'à aucun moment, à compter du décès du testateur, l'original du testament n'a été produit.



Elle considère que le notaire ne peut se prévaloir du bordereau du fichier central des dernières volontés qui ne mentionne pas la nature de l'acte, puisqu'il aurait dû déclarer les deux acte rédigés le 28 février 1976, c'est-à-dire le testament et la donation entre époux, alors qu'il n'en a déclaré qu'un.



Elle souligne que le procès-verbal de dépôt du testament ne précise aucune circonstance de remise du testament, ni les matériaux utilisés pour l'écriture, ni la couleur de l'encre, ni l'indication qu'il était contenu dans un pli cacheté, ni aucune description de l'enveloppe, qu'il a été rédigé plus d'un an après le décès du défunt, que le tampon 'enregistré' ne comporte aucune date, et que le bâtonnage allégué par l'intimé ne prouve pas que cette opération n'aurait pas été réalisée sur une copie. Elle considère que ces nombreuses carences caractérisent nécessairement un faux.



Sur la responsabilité des intimés, elle soutient que dès lors que le faux intellectuel est avéré, celle-ci est nécessairement caractérisée à leur encontre, et qu'elle l'est également au titre du défaut de conservation des deux testament de 1976 et 1990.

Elle affirme qu'elle a remis l'original du testament du 19 juillet 1990 à M [I] qui ne l'a ni enregistré ni conservé, et qu'il résulte de nombreuses pièces, notamment d'une sommation interpellative du 3 octobre 2008 qu'il a eu cet original en sa possession. Elle considère que le notaire ne justifie d'aucun 'acte de diligence objectif' relatif à la validité de ce testament durant le règlement de la succession.



Elle reproche en outre au notaire un manquement à son devoir de conseil sur les questions relatives à la validité des testaments et au regard de la signature de l'acte de délivrance de legs, et estime qu'il n'a pas représenté au mieux ses intérêts dans le règlement de la succession. Elle affirme qu'il ne justifie d'aucune déligence en vue de porter à sa connaissance la portée et la teneur de l'acte de notoriété des 25 et 28 février 2005, que l'acte de délivrance de legs du 28 février 2005 ne s'est avéré ni conforme à ses intérêts, ni conforme à ce que le notaire lui avait expliqué auparavant, que la signature de cet acte s'est déroulée dans une précipitation anormale, alors qu'elle était seule, hors la présence du notaire instrumentaire, que le notaire l'a laissée dans la croyance érronée que le testament du 19 juillet 1990 serait respecté, de même que les articles 757-2 et 757-3 du code civil.



Elle précise qu'au moment de la signature du legs, elle se trouvait dans un état de vulnérabilité particulier du fait de troubles de santé.



Elle soutient que le défaut de conseil lui a été nettement préjudiciable, puisqu'elle a été privée de toute possibilité d'agir pour contester la régularité du règlement de la succession, en étant privée de deux informations essentielles consistant dans la perte du testament de 1990 et de l'absence du testament de 1976.



Elle fait valoir que sur instructions du notaire, elle a payé des frais de succession pour l'appartement de [Localité 5] qui ne lui a pas été dévolu et que le notaire n'a jamais fait état de la possibilité d'une rectification.



La Scp [D] et M [I] demandent à la cour de rejeter l'inscription de faux incidente et, à tout le moins, de la déclarer inutile à la solution du litige principal, et de confirmer le jugement.



Ils reconnaissent que la Scp n'est pas en mesure de mettre à la disposition de la cour la minute de l'acte reçu le 18 février 2005, ni ses annexes dont le testament du 28 février 1976, cette minute ayant été égarée, mais soutiennent que le testament existe, que mention en a été faite au fichier central des dernières volontés, et, qu'a été conservée l'enveloppe originale à l'intérieur de laquelle il avait été déposé au coffre, qu'une expédition du procès-verbal de dépôt et de description a été adressée au greffe du tribunal de grande instance de Roanne, que Mme [L] produit la copie d'une expédition de l'acte du 18 février 2005, avec, en annexe, copie du testament, qui fait apparaître le bâtonnage effectué préalablement au dépôt pour garantir l'intégralité du texte, lequel n'a pas pu intervenir que sur l'original.



Ils soutiennent que M [L] ne rapporte pas la preuve du faux allégué et soulignent qu'au cours des précédentes procédures devant le tribunal de grande instance de Roanne et la cour d'appel de Lyon, elle n'a jamais contesté la réalité du testament du 28 février 1976.



Il considère que l'inscription de faux n'a aucune incidence sur l'action en responsabilité engagée, de sorte que la cour pourra l'écarter, Mme [L] cherchant par ce biais à remettre en cause les décisions définitives rendues par un recours en révision notamment quant à l'éventuelle application de l'article 757-3 du code civil à son profit.



Sur la perte de l'original du testament du 19 juillet 1990, ils font valoir que celui-ci n'a jamais été remis au notaire, que M [L] n'avait pas estimé opportun d'assurer la conservation de l'original en les déposant entre les mains d'un notaire, que Mme [L] s'est présentée à l'étude munie seulement du double autocopiant du papier d'ordonnance sur le lequel était écrit le testament , mais en aucun cas avec le feuillet original qu'elle ne détenait pas.



Sur le manquement au devoir de conseil, ils estiment qu'aucun reproche ne peut leur être adressé, d'une part sur la teneur de la portée de l'acte de notoriété des 25 et 28 février 2005, qui ne détermine pas l'étendue des droits susceptibles de bénéficier à chacun et qui ne fait pas grief à Mme [L], d'autre part sur la déclaration de succession qu'elle a régularisée en parfaite connaissance de cause.



Ils font valoir que l'acte de délivrance de Legs constitue la mise en 'uvre d'un accord transactionnel intervenu entre les parties, que Mme [L] a été éclairée sur la teneur et les conséquences de cette date, sur lesquels elle n'a pas pu se méprendre. Ils soulignent que le frère et la s'ur de Mme [L] pouvaient prétendre à la totalité des biens hérités par leur frère de leurs parents, et qu'ils ont accepté de ne recevoir qu'une part moindre. Ils considèrent que Mme [L] ne pouvait en aucun cas bénéficier de l'application de l'article 757-3 du code civile, puisque la finalité du testament du 28 février 1976 était de lui dénier tout droit successoral sur les biens dont son époux héritait de ses parents, et que, comme l'a relevé la cour d'appel de Lyon, en ne prenant aucune disposition testamentaire après la promulgation de la loi du 3 décembre 2001, M [L] a persisté dans son intention d'exclure son épouse de la dévolution des biens issus de sa famille.



Ils précisent que Mme [L] ne justifie pas son affirmation selon laquelle ses capacités cognitives auraient été affectées.



Ils affirment que M [I] a tenté, dans les limites des textes et de la jurisprudence, de faire prévaloir une solution favorable aux intérêts de Mme [L] et qu'en l'absence du testament de juillet 1990, ni le legs de l'appartement de [Localité 5] ni les dispositions de l'article 757-3 du code civile ne pouvaient être retenus.



Ils soutiennent que Mme [L] ne peut leur reprocher de ne pas avoir été éclairée sur le caractère erroné des droits d'enregistrement payés, que la déclaration effectuée tient compte des revendications formulées par elle, puisque, s'il n'en avait pas été ainsi, toute tentative ultérieure de faire admettre les dispositions issues du testament du 19 juillet 1990 aurait été vouée à l'échec, puisque la déclaration de succession aurait établi qu'elle y avait renoncé. Ils précisent que rien n'interdisait à Mme [L] de déposer une déclaration de succession rectificative et de demander la restitution partielle des droits payés, mais qu'au lieu de procéder de la sorte, elle a choisi d'engager de poursuivre une procédure jusqu'à la cour de cassation.



Ils considèrent enfin que les préjudices invoqués sont inexistants.



Le dossier a été communiqué au Ministère Public qui a indiqué ne pas avoir d'observation à présenter. Cet avis a été communiqué aux parties.






MOTIFS



Attendu qu'aux termes de l'article 307 du code de procédure civile 'le juge se prononce sur le faux à moins qu'il ne puisse statuer sans tenir compte de la pièce arguée de faux' ;



Attendu que l'inscription de faux est susceptible d'avoir une incidence sur l'action en responsabilité engagée à l'encontre du notaire ; qu'en effet, comme le souligne justement Mme [Y], s'il s'avère que l'inscription au rang des minutes du testament du 28 février 1976 s'est déroulée le 18 février 2005 sans que le notaire ait disposé effectivement de l'original du testament, l'ensemble du règlement de la succession aurait reposé sur un faux intellectuel et la responsabilité du notaire serait engagée ;



Attendu que le procès-verbal du 18 février 2005 argué de faux indique que de son vivant, M [K] [L] avait confié à l'étude de notaire 'un testament en date du 28 février 1976, rédigé sur une feuille de papier blanc au format 21 cm x 29,7 cm, et comportant huit lignes, en sus de la signature et de la date, le tout contenant quarante mots.



Cet écrit commence par les mots '28 février 1976- Je confirme la donation' et se termine par les mots 'à mes héritiers de droit' et la signature.



Il ne paraît présenter aucune défectuosité.



La description étant achevée, le notaire soussigné a bâtonné les blancs du testament' ;



Attendu que la Scp [D] précise qu'elle est dans l'incapacité de produire la minute de l'acte reçu le 18 février 2005, ni ses annexes, dont le testament du 28 février 1976, ceux-ci ayant disparu ; que cette situation est insuffisante, à elle-seule, à établir le faux allégué ;



Attendu que Mme [Y], sur laquelle repose la charge de la preuve du faux, fait valoir que le procès-verbal critiqué ne précise aucune circonstance de remise du testament du 28 février 1976, ni les matériaux utilisés pour l'écriture, ni la couleur de l'encre, ni l'indication que le testament était contenu dans un pli cacheté, ni aucune description de l'enveloppe ; que l'absence de ces précisions n'apporte pas la démonstration de l'inexistence de l'original du testament ; qu'il en va de même de la rédaction du procès-verbal plus d'un an après le décès de M [L] ;



Attendu que le notaire a décrit le format de la feuille, le nombre de lignes, la signature, la date, le nombre de mots, le commencement et la fin du testament ; que rien n'établit que le bâtonnage effectué pour garantir l'intégrité du texte n'a pas été effectué sur l'original du testament, mais sur une copie ; que l'argument selon lequel le tampon 'annexons ce jour' et le tampon 'enregistré' ne comportent aucune date est sans portée, dès lors que les mentions figurant sur le procès-verbal sont les suivantes :'annexé' à la minutes d'un acte reçu par le notaire soussigné ce jour' et 'enregistrement sur état 75 euros' et que le renvoi à la date à laquelle est reçu l'acte auquel le document est annexé indique la date de manière explicite ;



Attendu que les réponses du notaire à une sommation interpellative qui lui a été adressée le 3 octobre 2008 sont sans incidence sur la démonstration du faux allégué ; que le notaire a alors simplement indiqué qu'il ne retrouvait pas l'original du testament ;



Attendu le compte rendu d'interrogation du fichier central des dernières volontés fait apparaître la mention d'un acte du 16 février 1976, à la date du 9 mars 2004, par 'Maîtres [I] et [D]', notaires associés ;



Attendu que s'il existe plusieurs testaments, ils doivent être déposés dans le même procès-verbal même si l'un deux est révoqué par l'autre ; que cependant en l'espèce, en l'absence de l'original du testament du 19 juillet 1990, le notaire n'avait pas l'obligation de l'inclure dans le procès-verbal qu'il a dressé ;



Attendu en conséquence que Mme [Y] échoue à rapporter la preuve du faux allégué ; que l'inscription de faux incidente doit être rejetée ;



Attendu qu'en application de l'article 305 du code de procédure civile, le demandeur en faux qui succombe est condamné à une amende civile, d'un maximum de 3000 euros ; que Mme [Y] qui succombe doit être condamnée à une amende civile de 1500 euros ;



Attendu, sur la responsabilité des intimés, que Mme [Y] invoque trois fautes constituées par le procès-verbal du 18 février 2005 argué de faux, la perte des originaux des testaments olographes du 28 février 1976 et du 19 juillet 1990, et le manquement au devoir de conseil ;



Attendu que dès lors que l'inscription de faux incidente est rejetée, la première faute n'est pas caractérisée ;



Attendu qu'aucun élément n'établit que le notaire a été dépositaire du testament du 19 juillet 1990 ; que l'original de cet acte n'a jamais été produit ; que, comme le soulignent justement les intimés, le testament avait été établi par M [L] sur une liasse de son carnet d'ordonnances ; que ce dernier n'avait pas jugé utile de le déposer entre les mains d'un notaire pour en assurer la conservation ; que Mme [Y] ne démontre pas qu'elle a détenu elle-même l'original de ce testament ni qu'elle l'a remis à M [I] ; que la réponse adressée par ce dernier à la sommation interpellative qui lui a été notifiée le 3 octobre 2008 n'accrédite nullement la thèse selon laquelle il a pu être en possession de l'original du testament, puisqu'il a répondu qu'il ne possédait qu'une photocopie de ce document, qu'il avait bien vu le double carboné, mais qu'il ne l'avait pas ; que si, au cours des discussions entre les parties et leurs notaires, M [I] a tenté de parvenir à une solution amiable qui tienne compte du testament du 19 juillet 1990, il n'en résulte pas pour autant qu'il a été en possession de l'original de cet acte ; qu'il a alors simplement dans l'intérêt de Mme [Y] tenté de faire prévaloir les dispositions prises par M [L] le 19 juillet 1990 et de les faire accepter par les héritiers ; qu'aucune faute ne peut être imputée à M [I] au titre de la disparition de l'original du testament du 19 juillet 1990 ;



Attendues que si les intimés ne sont pas en mesure de communiquer l'original du testament du 28 février 1976, Mme [Y] ne subit aucun préjudice découlant de cette situation, dès lors qu'elle succombe en son inscription de faux contre le procès-verbal du 18 février 2005 et qu'elle a été déboutée par une décision passée en force de chose jugée de ses demandes en nullité de la délivrance des legs consentie les 25 et 28 février 2005 ; que la production de l'original du testament n'aurais pu que confirmer le bien fondé des décisions rendues et du rejet de l'inscription de faux ;



Attendu, sur le grief tenant aux manquements au devoir de conseil, que par de justes motifs, le premier juge a exactement considéré d'une part que M [I] ne démontre pas avoir éclairé Mme [Y] sur les conséquences de la signature de l'acte de délivrance de legs et qu'il a, à ce titre, manqué à son devoir de conseil, d'autre part que ce manquement est dépourvu de lien de causalité avec le préjudice allégué, dès lors que la signature de l'acte de délivrance de legs par Mme [Y] n'a pas modifié ses droits successoraux, que, par application de l'article 970 du code civil, le testament du 19 juillet 1990 ne pouvait être pris en considération en l'absence d'original, que celui du 28 février 1976 devait trouver application, ce qui avait pour effet d'exclure des droits successoraux de l'épouse sur l'appartement de [Localité 5] ainsi que les biens de la famille [L], et que ce n'est qu'en l'absence de dispositions testamentaires contraires que les dispositions issues de la loi du 3 décembre 2001 portant sur les droits du conjoint survivant, et notamment l'article 757-3 du code civil permettant au conjoint survivant de recueillir la moitié des biens de famille de son époux prè-décédé trouvaient application, comme l'a retenu la cour d'appel de Lyon dans son arrêt définitif du 9 juin 2009 ; que M [L], qui n'a pas modifié ses dernières volontés après la promulgation de ce texte, a toujours entendu exclure son conjoint du bénéfice de la dévolution des biens qu'il avait reçus de sa famille ;



Attendu qu'il résulte des correspondances produites aux débats que, comme le soulignent exactement les intimés, dans le cadre du processus transactionnel engagé entre les parties, M [I] a tenté d'obtenir des frères et s'urs de M [L] des concessions plus favorables aux intérêts de Mme [Y], alors qu'ils se trouvaient dans une position favorable compte tenu des droits respectifs des parties tels que précisés précédemment ; que c'est ainsi que le frère et la s'ur de M [L] ont consenti à ne pas revendiquer la totalité des biens de famille qui leur revenaient ; que les liquidités s'élevant à 225 192,38 euros ont été conservées par Mme [Y], le notaire de M [A] [L] et de Mme [G] [L] ayant indiqué dans une correspondance du 22 mars 2006 que les prétentions de ses clients sur les actifs monétaires hérités de leurs parents ont été réduites à titre transactionnel de façon importante ; que Mme [Y] ne démontre par aucun élément que compte tenu de cette concession importante, son notaire aurait pu obtenir davantage ;



Attendu que la signature de l'acte a été reçue par M [H], notaire assistant qui avait suivi le dossier ; que si Mme [Y] établit par différentes pièces médicales qu'elle a subi un traitement au cours des années 2004 et 2005 pour un état dépressif grave réactionnel au décès de son mari, il n'en résulte pas qu'elle n'était pas en capacité de comprendre et signer l'acte constatant l'accord élaboré entre les parties ; qu'en toute hypothèse, compte tenu de ce qui précède et de l'arrêt définitif du 9 juin 2009, la signature de cet acte n'a pu lui causer les préjudice qu'elle allégué ;



Attendu que le paiement de droits d'enregistrement incluant la valeur de l'appartement de [Localité 5] découle des choix procéduraux opéré par Mme [Y] et des prétentions formulées par elle, puisqu'elle pouvait tout à la fois réclamer le bénéfice du testament du 19 juillet 1990 et donc le legs de l'appartement, et présenter une déclaration de succession qui en aurait exclu l'application ; qu'elle ne pouvait non plus présenter dans les délais une déclaration rectificative, qui aurait été contraire aux prétentions qu'elle formulait dans les procédures qu'elle a poursuivies jusque devant la Cour de cassation ; qu'aucun reproche ne peut être imputé au notaire à ce titre ;



Attendu en conséquence que le jugement entrepris qui a débouté Mme [Y] de ses demandes doit être confirmé ;



Attendu que Mme [Y] qui succombe doit supporter les dépens ;



qu'Il n'y a pas lieu application de l'article 700 du code de procédure civile





PAR CES MOTIFS





Rejette l'inscription de faux incidente présenté par Mme [Y],



Condamne Mme [Y] à une amende de civile 1500 euros,



Confirme le jugement entrepris,



Déboute Mme [Y] de ses demandes indemnitaires présentées à hauteur d'appel,



Rejette les demandes présentées en application de l'article 700 du code de procédure civile,



Condamne Mme [Y] aux dépens, avec droit de recouvrement direct par la Scp Tachet, avocat.









LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

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