16 décembre 2015
Cour d'appel de Paris
RG n° 14/15199

Pôle 4 - Chambre 5

Texte de la décision

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 5



ARRÊT DU 16 DÉCEMBRE 2015



(n° , 17 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/15199

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Avril 2014 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 06/04759





APPELANTE



Société EGIS BATIMENTS MANAGEMENT dont le nom commercial est IOSIS MANAGEMENT venant aux droits de la SARL COPIBAT, agissant en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 4]

[Localité 4]



Représentée par Me Jean-loup PEYTAVI, avocat au barreau de PARIS, toque : B1106

et assistée par Me DECHELETTE Gaël, avocat au barreau de PARIS, toque : P583.





INTIMÉES



HERVE SA prise en la personne de ses représentant légaux

siret: 609 80 2 0 533

[Adresse 5]

[Localité 2]

N° SIRET : 609 80 2 0 533



Représentée et assistée par Me James DUPICHOT de la SELARL PEISSE DUPICHOT LAGARDE BOTHOREL et Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : J149



Etablissement INSTITUT [Établissement 1] prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Localité 5]



Représentée et assistée par Me Patrick MARÈS de la SELARL FLEURY MARES DELVOLVE ROUCHE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0035



SAS INGEROP prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Me Dominique OLIVIER de l'AARPI Dominique OLIVIER - Sylvie KONG THONG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069 et assistée par Me ROCHARD Nathanaêl, avocat au barreau de PARIS, toque : P169.



SAS AIA ARCHITECTES pris en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représentée par Me Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0090

et assistée par Me PARINI Denis, avocat au barreau de PARIS , toque: G706.

SAS AIA INGENIERIE venant aux droits de CERA, prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représentée par Me Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0090 et assistée par Me PARINI Denis, avocat au barreau de PARIS , toque: G706.



Société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY SE venant aux droits d'AGF IART prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 6]

[Localité 6]/FRANCE



Représentée et assistée par Me Bénédicte ESQUELISSE de la SCP SOULIE COSTE-FLORET & AUTRES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0267.



COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 29 Septembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Agnès CHAUMAZ, Présidente de chambre

M. Claude TERREAUX, Conseiller

Madame Maryse LESAULT, Conseillère



Rapport ayant été fait par Madame Marie-Agnès CHAUMAZ, présidente, conformément à l'article 785 du Code de procédure civile



qui en ont délibéré



Greffier, lors des débats : Madame Coline PUECH



ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Agnès CHAUMAZ, président et par Madame Coline PUECH, greffier présent lors du prononcé.




*******

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES



L'INSTITUT [Établissement 1], maître d'ouvrage, a entrepris la réalisation de travaux de restructuration et d'extension de son bâtiment principal d'hospitalisation classé immeuble de grande hauteur (I.G.H.) situé à [Localité 5] (Val de Marne).



Après un appel d'offres infructueux, l'INSTITUT [Établissement 1] a consulté diverses entreprises selon la procédure du marché négocié.



Les 35 lots techniques du programme ont fait l'objet de marchés par corps d'état séparés.



Par marché privé du 28 janvier 2000, l'INSTITUT [Établissement 1] a confié la maîtrise d''uvre pour sa restructuration architecturale à un groupement de maîtres d'oeuvre composé des sociétés A.I.A (Architectes et Ingénieurs Associés), du BET INGEROP, assuré par la compagnie ALLIANZ, du BET CERA INGÉNIERIE devenu aujourd'hui AIA INGENIERIE et de la société SEET CECOBA .



En mai 2001, la société SEET CECOBA ROCHER a été remplacée par la société GAUDRIOT, elle-même remplacée par la société VULCANEO en mars 2005.



La société A.I.A (Architectes et Ingénieurs Associés) initialement seule mandataire commune de l'équipe de maîtrise d''uvre a ensuite exercé cette fonction conjointement avec le BET INGEROP (cf P 4 chapitre 5 du rapport d'expertise).



Par contrat distinct de maîtrise d''uvre, les études de synthèse ont été confiées au BET INGEROP.



Par acte d'engagement du 28 septembre 2000, accepté par l'INSTITUT [Établissement 1] le 20 avril 2001, la société COPIBAT, aux droits de laquelle vient la société EGIS BATIMENT MANAGEMENT a reçu une mission OPC (ordonnancement, pilotage, coordination) pour la restructuration et l'extension du bâtiment hôpital. La société EGIS BATIMENTS MANAGEMENT a également signé notamment le Cahier des Clauses Particulières.



Sa mission a été modifiée par avenant n°1 conclu le 26 décembre 2002. Mais son marché a été résilié au mois de février 2004 et la mission d'OPC a ensuite été confiée à la société GEMO.



La société BUREAU VERITAS est intervenue en qualité de contrôleur technique et de coordinateur 'Sécurité et Protection de la Santé'.



Par acte d'engagement du 8 juillet 2002, l'INSTITUT [Établissement 1] a confié à la société HERVE SA l'exécution du lot technique n°5 "gros oeuvre et démolitions' pour un prix global et forfaitaire de 11.362.000 € TTC .



Se plaignant de subir des coûts supplémentaires liés à la prolongation des délais d'exécution et à la réalisation de travaux supplémentaires ou modificatifs, la société HERVE a sollicité devant le juge des référés le paiement d'une indemnisation limitée aux seules étapes 0 et 1 du chantier. Elle a été déboutée par le juge des référés de sa demande de provision mais a obtenu la désignation de M. [U] [L] en qualité d'expert par ordonnance de référé du 27 février 2006, au contradictoire de l'INSTITUT [Établissement 1], des maître d''uvres et de la société COPIBAT .



Par acte d'huissier du 7 avril 2006, la société HERVE a assigné l'INSTITUT [Établissement 1] devant le tribunal de grande instance de CRETEIL pour demander sa condamnation à lui payer la somme totale de 2.628.463,17 € TTC .



Par actes d'huissier des 5 et 14 décembre 2006, la société HERVE a assigné la société INGEROP, la société AIA Architectes, la société CERA et la société COPIBAT. Le juge de la mise en état a ordonné la jonction des procédures le 9 janvier 2007 . A cette date, le sursis à statuer a également été prononcé dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise.



Le 9 avril 2009, la société HERVE a adressé aux maîtres d''uvre un second mémoire en réclamant au titre des étapes 2,3 et 4 du chantier le paiement d'une somme supplémentaire de 2.271.179,57 € TTC au titre des coûts supplémentaires liés à la prolongation des délais d'exécution et à la réalisation de travaux supplémentaires ou modificatifs. Cette réclamation fait l'objet d'une procédure distincte dans laquelle une autre expertise a été ordonnée .



La réception des travaux de la société HERVE est intervenue le 10 avril 2009 avec des réserves à lever par celle-ci avant le 31 mai 2009 .







Le 22 juin 2009, l'INSTITUT [Établissement 1] a adressé le décompte général définitif de son marché à la société HERVE qui l'a refusé et qui a maintenu diverses réclamations.



Après dépôt du rapport d'expertise intervenu le 15 avril 2010 et rejet par ordonnance du juge de la mise en état du 24 mai 2012 d'une nouvelle demande de provision formée par la société HERVE, le tribunal de grande instance de CRETEIL a, par jugement du 2 avril 2014 :

- donné acte à la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY (France) venant aux droit de la société AGF IART, de son intervention volontaire à l'instance en qualité d'assureur de la société INGEROP ;

- rejeté la demande tendant à voir constater I'extinction de l'instance;

- rejeté la demande de jonction avec la procédure enregistrée sous le n°10/06326;

-condamné in solidum la société AIA ARCHITECTES, la société AIA INGENIERIE venant aux droits de la société CERA, la société INGEROP , la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY (France) venant aux droit de la société AGF IART en qualité d'assureur de la société INGEROP et la société EGIS BATIMENT exerçant sous le nom commercial de IOSIS MANAGEMENT venant aux droits de la société COPIBAT à payer à la société HERVE la somme de 417.070 € au titre de l'indemnisation des dommages subis dans l'exécution de ses travaux pour les phases 0 et 1 de l'opération de restructuration et d'extension des bâtiments de l'lNSTlTUT [Établissement 1] ;

- dit que cette indemnité portera intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

- condamné la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY (France) venant aux droit de la société AGF IART à garantir son assurée la société INGEROP,

- dit la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY (France) venant aux droit de la société AGF IART fondée à opposer ses franchise et plafond de garantie;

- dans les rapports entre co-responsables, a dit que les responsabilités incombent à:- la société EGIS BATIMENT exerçant sous le nom commercial de IOSIS MANAGEMENT venant aux droits de la société COPIBAT dans la proportion de 55%,

- la société AIA ARCHITECTES dans la proportion de 15%,

- la société AIA INGENIERIE venant aux droits de la société CERA dans la proportion de 15 %,

- la société INGEROP clans la proportion de 15 % ;

- fait droit aux appels en garantie de :

- de la société EGIS BATIMENT exerçant sous le nom commercial de IOSIS MANAGEMENT venant aux droits de la société COPIBAT à l'encontre de la société AIA ARCHITECTES, la société AIA INGENIERIE venant aux droits de la société CERA, la société INGEROP,

- de la société AIA ARCHITECTES et Ia société AIA INGENIERIE venant aux droits de la société CERA à l'encontre de la société EGIS BATIMENT exerçant sous le nom commercial de IOSIS MANAGEMENT venant aux droits de la société COPIBAT,

- de la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY (France) venant aux droit de la société AGF IART en qualité d'assureur de la société INGEROP à l'encontre de la société AIA ARCHITECTES et la société AIA INGENIERIE venant aux droits de la société CERA, pour la condamnation prononcée à leur encontre au titre de l'indemnisation de la société HERVE, sur la base et dans la limite du partage de responsabilité instauré ;

- condamné l'INSTITUT [Établissement 1] à payer à la société HERVE les sommes de 6.374,09 € TTC et 20.570 € TTC avec intérêts au taux contractuel à compter de l'assignation en paiement délivrée le 7 avril 2006, en paiement des travaux modificatifs et supplémentaires ;

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement ;

-condamné in solidum l'lNSTlTUT [Établissement 1], la société AIA ARCHITECTES. la société AIA lNGENIERIE venant aux droits de la société CERA, société INGEROP, la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY ( France) venant aux droit de la société AGF IART en qualité d'assureur de la société INGEROP et la société EGIS BATIMENT exerçant sous Ie nom commercial de IOSIS MANAGEMENT venant aux droits de la société COPIBAT à payer à la société HERVE la somme de 30.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum l'lNSTlTUT [Établissement 1], la société AIA ARCHITECTES, la société AIA INGENIERIE venant aux droits de la société CERA, la société INGEROP, la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY (France) venant aux droit de la société AGF IART en qualité d'assureur de la société INGEROP et la société EGIS BATIMENT exerçant sous le nom commercial de IOSIS MANAGEMENT venant aux droits de la société COPIBAT aux dépens qui comprendront les frais d'expertise judiciaire ;

- réparti comme suit la charge finale des frais Irrépétibles et des dépens:

- 50 % à la charge de la société EGIS BATIMENT exerçant sous le nom commercial de IOSIS MANAGEMENT venant aux droits de la société COPIBAT,- 15 % à la charge de la société AIA ARCHITECTES,

- 15 % à la charge de la société AIA INGENIERIE venant aux droits de la société CERA,

- 15 % à la charge de la société INGEROP et la société ALLIANZ

GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY ( France) venant aux droit de la société AGF IART en qualité d'assureur de la société INGEROP,

- 5 % à la charge de l'lNSTlTUT [Établissement 1].

- fait droit aux appels en garantie au titre des frais Irrépétibles et des dépens, sur la base et dans la limite de cette répartition ;

- accordé à la SELARL PEISSE DUPICHOT LAGARDE BOTHOREL & ASSOCIES, avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires des parties.



Le 17 juillet 2014, la société EGIS BATIMENTS MANAGEMENT a interjeté appel principal de ce jugement .




Par conclusions récapitulatives du 15 septembre 2015, la société EGIS BATIMENTS MANAGEMENT venant aux droits de la SARL COPIBAT a demandé à la cour, au visa des articles 1134 et 1382 du code civil, du rapport d'expertise de M. [U] [L] du 15 janvier 2010 et du jugement rendu le 2 avril 2014 par le tribunal de grande instance de Créteil, de:



- réformer 1e jugement entrepris en ce qu'il l'a condamnée in solidum aux côtés des sociétés AIA ARCHITECTES, AIA INGENIERIE (venant aux droits de la société CERA),INGEROP et ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALITY (France) à payer à la société HERVE la somme de 417 070 € au titre de l'indemnisation des dommages subis dans l'exécution de ses travaux pour les phases 0 et 1 de 1'opération de restructuration et d'extension des BATIMENT de INSTITUT [Établissement 1] ;



Statuant à nouveau :

A titre principal, débouter la société HERVE de sa demande de condamnation dirigée à son encontre ;



A titre subsidiaire,

- confirmer le jugement en ce qu'i1 a fixé le montant du préjudice de la société HERVE au titre des conséquences de la prolongation du délai et des conditions d'exécution des travaux de son marché à la somme de 417 070 € HT ;

- limiter sa part de responsabilité à 15 % du préjudice de la société HERVE,

- dire bien fondé son appel en garantie dirigé contre l'IGR et les sociétés AIA ARCHITECTES, AIA INGENIERIE et INGEROP et y faire droit en les condamnant in solidum à la relever et garantir de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre an titre du. préjudice de la société HERVE,

- débouter les sociétés HERVE, INGEROP, ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALITY (France), assureur de la société INGEROP, AIA ARCHITECTES et AIA INGENIERIE de leur appel incident et de l'ensemble de leurs demandes ;



Dans tous les cas, condamner la société HERVE, ou à défaut, tout succombant, à lui payer la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction. de droit au profit de Maître Jean-Loup PEYTAVI, avocat aux offres de droit, en application de l'article 699 du code civil.



Par conclusions du 7 septembre 2015, la société HERVE a demandé à la cour, en visant les articles 1134, 1147, 1382 et 1793 du code civil, le bouleversement des conditions d'exécution et de l'économie du contrat, son mémoire en réclamation n°1, le rapport d'expertise et l'ensemble des dires et pièces produits notamment par elle, statuant sur l'appel interjeté par la société EGIS BATIMENT MANAGEMENT à l'encontre du jugement rendu par le tribunal de grande instance de CRETEIL le 2 avril 2014, de :

- débouter purement et simplement l'appelante principale de ses demandes et confirmer le jugement en ce qu'il a retenu le principe de responsabilité de EGIS BATIMENT MANAGEMENT venant aux droits de COPIBAT, en sa qualité d'OPC, mais aussi le principe de responsabilité de AIA INGENIERIE, AIA ARCHITECTE et INGEROP, membres du groupement de maîtrise d''uvre ;

- accueillir son appel incident ;

En conséquence,

- infirmer le jugement en ce qu'il a écarté, à l'exception de certains travaux modificatifs, l'obligation à paiement et la responsabilité de l'INSTITUT [Établissement 1] ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a limité à tort l'indemnisation des préjudices subis par la société HERVE SA tant au titre des conséquences de l'allongement du délai qu'au titre des travaux modificatifs ;

Statuant à nouveau :

- constater la prolongation anormale des délais d'exécution du chantier pour une cause étrangère à la société HERVE SA et imputable à une mauvaise gestion de son chantier par l'INSTITUT [Établissement 1] ;

- constater, dire et juger que le planning contractuel sur la base duquel elle a émis son offre de prix global et forfaitaire a été totalement modifié en cours d'exécution du chantier;

- constater une modification essentielle du marché conduisant à la réalisation de l'ouvrage dans des conditions totalement étrangères aux conditions d'exécution prévues initialement par ledit marché ;

-constater une modification essentielle du marché compte tenu des nombreuses modifications de l'ouvrage en cours de travaux portant atteinte au plan arrêté et convenu;

-constater la défaillance de l'INSTITUT [Établissement 1] dans la gestion et la planification de son chantier engageant sa responsabilité ;

- dire et juger que le marché qu'elle a conclu avec l'INSTITUT [Établissement 1] a fait l'objet de graves difficultés ayant conduit à son bouleversement économique;

- dire et juger que l'INSTITUT [Établissement 1] a commis de multiples fautes contractuelles, notamment dans la gestion de son Marché, ayant entraîné de graves préjudices à son cocontractant, la société HERVE SA ;

- dire et juger que la présence aux pièces marchés de clauses permettant au maître d'ouvrage d'imposer unilatéralement à l'entreprise la réalisation des travaux modificatifs ou supplémentaires fait perdre au marché à forfait son caractère pur et simple et l'autorise à solliciter l'indemnisation de ses surcoûts ;

- dire et juger que l'émission de réserves par HERVE SA aux différents ordres de services qui lui ont été délivrés par l'IGR, quant au montant des prestations et aux conséquences financières de l'allongement des délais la rend recevable et bien fondée dans ses demandes en paiement des surcoûts ;

- dire et juger que la société AIA ARCHITECTE, AIA INGENIERIE (venant aux droits de CERA), INGEROP et IOSIS MANAGEMENT (venant aux droits de COPIBAT) ont engagé leur responsabilité délictuelle à son encontre ;

- constater, dire et juger que les sociétés AIA ARCHITECTE, AIA INGENIERIE (venant aux droits de CERA), INGEROP et IOSIS MANAGEMENT (venant aux droits de COPIBAT) ont manqué à leurs obligations contractuelles à l'égard du maître d'ouvrage et ont, dès lors, engagé leur responsabilité délictuelle à l'encontre de la société HERVE SA qui a subi un préjudice du fait de ces différents manquements ;

En conséquence,

- la déclarer recevable et bien fondée dans sa demande d'indemnisation de son préjudice lié aux étapes 0 et 1 pour prolongation des délais d'exécution à hauteur de 1.821.936 € HT ;

- la déclarer recevable et bien fondée dans sa demande de paiement des travaux modificatifs exécutés au cours des étapes 0 et 1 par elle à hauteur de 375.775,68 € HT ;

- condamner in solidum l'INSTITUT [Établissement 1], AIA ARCHITECTE, AIA INGENIERIE (venant aux droits de CERA), INGEROP et IOSIS MANAGEMENT (venant aux droits de COPIBAT) à lui payer une somme de 2.197.711,68 € HT soit 2.628.463,17 € TTC;



Sur les intérêts moratoires :

- confirmer le jugement en ce qu'il a assorti les condamnations prononcées à l'encontre de l'INSTITUT [Établissement 1] des intérêts moratoires au taux contractuel (intérêt légal majoré de 7 points) à compter de l'assignation en paiement du 7 avril 2006 ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé le point de départ des intérêts moratoires à compter du prononcé du jugement au titre des condamnations prononcées à l'encontre de EGIS BATIMENT, AIA INGENIERIE, AIA ARCHITECTES, INGEROP et ALLIANZ ;



En application de l'article 1153-1 du code civil,

- fixer le point de départ de l'intérêt moratoire au titre des condamnations prononcées à l'encontre de EGIS BATIMENT, AIA INGENIERIE, AIA ARCHITECTES, INGEROP et ALLIANZ à compter de l'assignation en paiement du 7 avril 2006 ;



SUBSIDIAIREMENT,

- confirmer le jugement du 4 avril 2014 du tribunal de grande instance de CRETEIL en toutes ses dispositions ;

En tout état de cause,

- condamner in solidum l'INSTITUT [Établissement 1], AIA ARCHITECTE, AIA INGENIERIE (venant aux droits de CERA), INGEROP et IOSIS MANAGEMENT (venant aux droits de COPIBAT) au paiement d'une somme de 310.662,28 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui comprendront les honoraires de l'expert judiciaire pour 46.550,29 € TTC dont recouvrement au profit de la SELARL PEISSE DUPICHOT LAGARDE BOTHOREL & ASSOCIES dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile



Par conclusions du 10 février 2015, 'faisant corps avec le dispositif', l'INSTITUT [Établissement 1] a demandé à la cour, au visa des articles 1134 et 1793 du code civil et du rapport de M. [U] [L] du 15 janvier 2010, statuant sur l'appel interjeté par la société EGIS BATIMENTS MANAGEMENT à l'encontre du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Créteil le 2 avril 2014, de:



- confirmer le jugement en ce qu'il a écarté sa responsabilité dans la survenance des dommages subis par la société HERVE ;

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamné à payer à la société HERVE les sommes de 6.974, 09 € TTC et 20.570 € TTC ;

Et statuant à nouveau :

- le dire et juger recevable et bien fondé en ses observations ;

En conséquence :

- rejeter toutes les demandes, fins et prétentions formées par la société HERVE SA ;

- condamner in solidum les sociétés AIA ARCHITECTES, AIA INGENIERIE, INGEROP et IOSIS MANAGEMENT à le relever et à garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre dans le cadre de la présente procédure;

- condamner toute partie succombant à lui payer une somme de 100.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner toute partie succombant aux dépens par application de l'article 696 du code de procédure civile, dont le montant sera recouvré par la SELARL FLEURY MARES DELVOLVE ROUCHE, avocats au Barreau de PARIS, conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.



Par conclusions signifiées le 21 janvier 2015 et le 10 février 2015 à Maître Dominique OLIVIER, la société AIA INGENIERIE venant aux droits de CERA et la société AIA ARCHITECTES demandent à la cour de:



- déclarer la société EGIS BATIMENTS MANAGEMENT irrecevable et mal fondée en son appel ;

- l'en débouter ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu à son encontre une responsabilité de 55% ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé des condamnations contre AIA ARCHITECTES et AIA INGENIERIE ;

- les mettre purement et simplement hors de cause, la preuve d'une faute n'étant pas rapportée à leur encontre ;



A titre très subsidiaire,

- confirmer Ie jugement en ce qu'il a limité la condamnation prononcée à l'encontre de la société HERVE à la somme de 417.070 € sans taxe ;

- limiter la part de responsabilité des sociétés AIA INGENIERIE et AIA ARCHITECTES aux 5% proposés par l'expert judiciaire ;

- en tout état de cause, dire et juger que les sommes imputées à la maîtrise d'oeuvre devront être réparties au sein de la maîtrise d'oeuvre au prorata des honoraires réellement perçus entre AIA ARCHITECTES, AIA INGENIERIE d'une part et lNGEROP d'autre part ;

- condamner la société EGIS BATIMENTS à les relever intégralement ou dans les plus amples proportions de ce chef ;

- dire et juger que les sommes sollicitées au titre des travaux supplémentaires doivent rester a la charge du maître de l'ouvrage ;





- rejeter toutes demandes plus amples ou contraires de quelque partie que ce soit et condamner tous succombants en tous les dépens tant de première instance que d'appel dont Ie montant pourra être recouvré dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile par Maître Pascale FLAURAUD .



Par conclusions du 20 février 2015, la société INGEROP a demandé à la cour statuant sur l'appel interjeté par la société EGIS BATIMENT venant aux droits de COPIBAT, les appels incidents de la société HERVE et de l'INSTITUT [Établissement 1], de:

- débouter la société EGIS BATIMENT venant aux droits de la société COPIBAT

- débouter la société HERVE et l'INSTITUT [Établissement 1] de leurs demandes en ce qu'elles visent a obtenir la condamnation de la société INGEROP

- la dire et juger recevable et bien fondée en son appel incident ;

Statuant de nouveau :

-infirmer le jugement en ce qu'il a retenu une part de responsabilité de 15 % à sa charge ;

-dire et juger qu'il n'est pas rapporté de preuve d'une faute contractuelle commise par elle ;

-dire et juger que les retards de chantier sont la conséquence exclusive de manquements commis par la société EGIS BATIMENT venant aux droits de la société COPIBAT, coordinateur OPC ;

- ce faisant, la mettre hors de cause, la preuve d'une faute n'étant pas rapportée à son encontre ;

-confirmer le jugement déféré au titre des travaux modificatifs et supplémentaires, de sorte que l'lNSTlTUT [Établissement 1] devra seul assumer la charge financière;



A titre subsidiaire,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a limité l'indemnisation de la société HERVE 21 la somme de 417 070 € HT ;

- infirmer le jugement déféré sur les quotes-parts-parts de responsabilité ;

-dire et juger que la responsabilité de la maîtrise d'oeuvre sera strictement limitée a la part de 5 % consacree par l'expertise judiciaire de M. [L], soit une somme de 20.853.50€ ;

- dire et juger que les sommes imputées au groupement de maîtrise d'oeuvre seront reparties par tiers entre les sociétés AIA ARCHITECTES, AIA INGENIERIE et INGEROP de sorte que la part imputable à la société INGEROP sera strictement limitée à la somme de 6.951.16€ ;

- débouter la société HERVE du surplus de ses demandes comme mal fondées;

- débouter la société EGIS BATIMENT et l'lNSTlTUT [Établissement 1] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

- en tout état de cause, condamner in solidum les sociétés AIA INGENIERIE, AIA ARCHITECTES, 1'INSTITUT [Établissement 1] et la société EGIS BATIMENT à la garantir de toutes les condamnations mises à sa charge ;

- condamner la compagnie ALLIANZ GCS, agissant es-qualité d'assureur de sa responsabilité civile à la relever et garantir ;

- condamner l'INSTITUT [Établissement 1], la société EGIS BATIMENT et la société HERVE au paiement de la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile qui pourront être recouvrés par Maître Dominique OLIVIER.



Par conclusions récapitulatives n°2 du 14 septembre 2015, la compagnie ALLIANZ GLOBAL CORPORATE § SPECIALTY SE, venant aux droits d'ALLIANZ GLOBAL CORPORATE § SPECIALTY (France) SA, elle même venant aux droits d'AGF IART demande à la cour de :



A titre principal,

Au visa des articles 1147 et 1382 du code civil

- constater l'absence de faute personnelle commise par la société INGEROP ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum les sociétés INGEROP et la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY aux côtés des sociétés AIA ARCHITECTES, AIA INGENIERIE et EGIS BATIMENTS MANAGEMENT à payer à la société HERVE la somme de 417.070 € ;

Et statuant à nouveau :

- rejeter toute demande de condamnation dirigée contre la société INGEROP et la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY ;



A titre subsidiaire,

Au visa des articles 1147 et 1382 du code civil et du rapport d'expertise de Monsieur [L]

- confirmer le jugement en ce qu'il a fixé le montant du préjudice de la société HERVE à la somme de 417.070 € ;

- dire et juger que la responsabilité de la maîtrise d'oeuvre ne peut excéder 5% du montant des dommages, soit 20.853,50 € ;

- dire et juger que dans ses rapports avec les autres sociétés du groupement de maîtrise d'oeuvre, la responsabilité d'INGEROP est limitée à 1/3 et condamner in solidum les sociétés AIA INGENIERIE et AIA ARCHITECTES à la garantir pour le surplus des condamnations mises à la charge de la maîtrise d'oeuvre ;

- Subsidiairement, condamner in solidum l'INSTITUT [Établissement 1] et la société EGIS BATIMENTS MANAGEMENT à relever et garantir la société INGEROP et la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY de toutes condamnations qui seraient mises à leur charge pour la part excédent 5% des dommages ;



En tout état de cause,

Au visa de l'article L112-6 du code des assurances :

- la dire et juger bien fondée à opposer ses limites contractuelles de garantie ;

- lui donner acte du plafond de garantie annuelle de 7.600.000 €, tous sinistres confondus;

- dire et juger que sa garantie est limitée aux sommes mises à la charge de la société INGEROP, déduction faite de la franchise de 100.000 € ;

- condamner tout succombant au paiement d'une indemnité de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.



L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 septembre 2015 .



La cour se réfère pour plus ample exposé des demandes aux conclusions ainsi visées.






MOTIFS





Considérant qu'il convient de rappeler que suite à l'appel principal interjeté par la société EGIS BATIMENTS MANAGEMENT venant aux droits de la société COPIBAT pour contester sa responsabilité en l'espèce, la société HERVE, demanderesse initiale au procès, a formé un appel incident ;







Que celle-ci se plaint que pour des causes qui ne lui sont pas imputables, l'exécution du chantier a pris du retard, ce qui la conduit à invoquer un bouleversement de l'économie et des conditions d'exécution du contrat ; qu'elle réclame en conséquence l'indemnisation des préjudices qu'elle dit avoir subis de ce fait en prétendant également que le marché contient des clauses qui lui permettent de sortir du forfait ;



Considérant que le rapport d'expertise établi le 15 janvier 2010 après 10 réunions contradictoires organisées entre le 17 mai 2007 et le 2 mars 2009 rend compte des investigations minutieuses de l'expert dont les conclusions pertinentes ont été adoptées à juste titre par le jugement ;



Considérant qu'au soutien de son appel, la société HERVE remet en cause le caractère forfaitaire de son marché en invoquant d'abord l'existence de clauses insérées aux pièces des marchés disqualifiant selon elle la notion de marché à forfait ;



Qu'elle se réfère au CCAG Marchés Publics de travaux pour contester l'article 4.3 du CCAP ; que cependant, l'article 2 du CCAP définit les pièces contractuelles en précisant qu'elles prévalent les unes par rapport aux autres dans l'ordre dans lequel elles sont énumérées en cas de contradiction entre elles ;



Que le cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable aux marchés publics de travaux ne figure qu'après l'ensemble des documents d'ordre particulier comme le CCAP, le calendrier prévisionnel enveloppe contractuel des travaux, le CCTC, le Cahier des Clauses Techniques Particulières etc et qu'il se trouve en outre en 2ème position des documents d'ordre général, après le code des marchés publics ;



Que compte tenu de son positionnement dans l'ordre de l'ensemble de ces pièces, il ne saurait par conséquent servir de justificatif pour obtenir l'annulation de dispositions stipulées dans des documents ayant une force contractuelle supérieure ;



Considérant que la société HERVE invoque également un bouleversement de l'économie et des conditions d'exécution du marché ainsi que la prolongation du chantier pour contester le caractère forfaitaire de son contrat ;



Qu'il convient néanmoins d'observer que la cour n'est saisie dans le cadre de la présente instance que des étapes 0 et 1 du chantier et n'en a par conséquent pas une vision globale de nature à faire apparaître le bouleversement général invoqué ; que par ailleurs, le début du chantier a certes été retardé en raison d'aléas (notamment découverte de réseaux enterrés et amiantés pendant les travaux préparatoires, découverte de terres polluées, report des travaux de désamiantage de la zone cafétéria) dont il n'est pas discuté que la société HERVE n'était pas responsable ; que le délai d'exécution des travaux a été effectivement prolongé de ce fait ; que cependant, si le maître d'ouvrage a pris en charge financièrement les conséquences de ces aléas, ils ne lui sont pas non plus imputables; qu'en conséquence, les entreprises doivent supporter leur part de charge qui en résulte, étant souligné qu'il leur incombe en vertu de plusieurs articles du CCAP (articles 3.1, 3.2n 3.2.1 a etc) d'assumer les conséquences des aléas courants notamment ceux découlant de la co-activité de plusieurs entreprises intervenant simultanément et successivement sur le même chantier (cf rapport chap 7 P19 et 20) ;



Que si le maintien du merlon central a gêné la société HERVE comme elle le soutient, il lui incombait par ailleurs dans le cadre de ses obligations découlant de l'article 3.2.1 du CCAP de supporter 'les frais liés aux contraintes de phasage de l'opération et toutes les dispositions qu'il faudra mettre en 'uvre pour permettre à l'établissement de poursuivre son activité dans des conditions acceptables ';









Considérant que la société HERVE invoque également d'autres événements, comme la résiliation en février 2004 du marché COPIBAT par l'INSTITUT [Établissement 1], qui a eu pour effet de priver le déroulement du chantier d'un OPC pendant deux mois puisque l'INSTITUT [Établissement 1] n'a procédé au remplacement de la société COPIBAT par la société GEMO que le 20 avril 2004 ;



Que cependant, le retard global des phases 0 et 1 du chantier a été examiné attentivement par l'expert ; qu'il a proposé à juste titre d'admettre l'indemnisation de la société HERVE à ce titre pour ses dépenses complémentaires sur le personnel d'encadrement, les installations et matériels de chantier, les frais de bureau et les charges de prorata, le personnel d'exécution étant pris en compte au titre des pertes de rendement; que l'expert a en outre pris en considération le surcoût des études et les pertes de couverture des frais généraux ;





Qu'il a chiffré le montant total de ces surcoûts supportés par la société HERVE à la somme totale de 431.399 € HT (soit 515.953 € TTC) ;



Considérant que ce montant ne représentant finalement qu'une part de l'ordre de 4,5% du montant de son marché de travaux, la variation n'est pas d'une ampleur telle qu'elle conduise à un bouleversement de l'économie du contrat justifiant la sortie du marché à forfait ; que c'est donc à juste titre que le jugement a écarté ce moyen comme non fondé ;



Considérant que le fait que les délais impartis pour réaliser les travaux n'aient pas été officiellement prolongés en raison du refus par le maître d'ouvrage de procéder au recalage des délais n'a pas eu de conséquence financière pour la société HERVE à laquelle il n'est réclamé ni pénalités de retard ni indemnisation éventuelle du fait du retard ;



Considérant en définitive qu'au vu du rapport d'expertise et de ces éléments, le jugement a chiffré à juste titre à la somme de 417.070 € HT le montant des surcoûts supportés indûment par la société HERVE en réparation de son préjudice ;



Considérant que dans le cadre d'un marché à forfait, en vertu de l'article 1793 du code civil , seuls les travaux modificatifs et supplémentaires ayant fait l'objet d'un ordre de service écrit du maître d'ouvrage sont pris en considération ;



Considérant qu'après avoir soigneusement examiné chacun des postes de réclamation, l'expert a partiellement admis le bien fondé des réclamations de la société HERVE au titre des ordres de service 05.13, 05.21, 05.22, 05.23, 05.32, 05.33 et 05.35 à hauteur de la somme supplémentaire en faveur de la société HERVE de 5.828,18 € HT (soit 6.974,09 € TTC) et en réduisant le montant des moins values opposées par les maîtres d''uvre de la somme totale de 17.198,73 € HT (soit 20.569,68 € TTC) ;



Qu'il convient d'observer que l'expert a répondu avec pertinence à chacune des réclamations formulées par la société HERVE ; qu'au vu de son avis, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné l'INSTITUT [Établissement 1] à lui payer les sommes de 6.974,09 € TTC au titre de la valorisation des ordres de services contestés et de 20.570 € TTC au titre de la réduction des moins-values à opérer sur le montant du marché ; que le montant de ces condamnations sera majoré des intérêts au taux contractuel à compter de l'assignation en paiement délivrée le 7 avril 2006 et le jugement confirmé de ce chef ;



Que le jugement sera également confirmé en ce qu'il a rejeté la réclamation complémentaire de la société HERVE à hauteur de la somme totale de 21.456,05 € TTC, faute de preuve qu'ils ont fait l'objet d'ordres de service écrits ;



Considérant en définitive que le jugement a retenu à juste titre la responsabilité in solidum des maîtres d'oeuvre, la société AIA ARCHITECTES, la société AIA INGENIERIE venant aux droits de la société CERA et la société INGEROP ainsi que de l'OPC coordinateur, à savoir la société EGIS BATIMENT venant aux droits de la société COPIBAT ;



Considérant qu'il a mis à juste titre l'INSTITUT [Établissement 1] maître d'ouvrage hors de cause comme n'ayant pas de compétence notoire en matière de construction ;



Qu'en effet, si l'INSTITUT [Établissement 1] s'est fait assister de la société HOSPICONSEIL dans son contrat signé avec les maîtres d''uvre, il convient de relever que selon le contrat de maîtrise d''uvre, cette intervention s'est arrêtée à la mise au point de l'A.P.S. ; que cela signifie que l'intervention de la société HOSPICONSEIL a ensuite pris fin ; qu'il convient d'ailleurs de souligner que la spécificité des travaux qui font l'objet de ce litige exige une compétence technique appropriée dont il n'est pas démontré que cette société dispose ;



Que l'INSTITUT [Établissement 1] s'est au contraire entouré d'une équipe de maîtres d'oeuvre et d'un professionnel investi d'une mission d'OPC, chargé à ce titre de l''Ordonnancement', du 'Pilotage' et de la 'Coordination' de l'opération pour concevoir et gérer ce chantier nécessairement délicat puisqu'exigeant la réalisation de travaux alors que l'activité médicale de l'INSTITUT [Établissement 1] se poursuivait dans le bâtiment ;



Qu'aucune mention de la société HOSPICONSEIL n'est par ailleurs indiquée dans l'acte d'engagement signé en juillet 2002 entre la société HERVE et l'INSTITUT [Établissement 1], dépourvu à ce stade de tout assistant technique à la hauteur des travaux ;



Que dans ces conditions, le jugement sera confirmé en ce qu'il a écarté la 'compétence notoire' de l'INSTITUT [Établissement 1] en matière de construction;



Considérant qu'il ne saurait être fait grief au maître d'ouvrage d'avoir demandé le respect du délai global d'exécution convenu dès lors que ces professionnels et en particulier les maîtres d'oeuvre n'apportent pas la preuve de l'avoir expressément informé de la nécessité impérative de modifier le calendrier en raison d'imprévus survenus en cours de chantier ;



Qu'il leur incombait de conseiller au maître d'ouvrage de remplacer les calendriers périmés par de nouveaux calendriers, ce qu'ils ne justifient pas avoir fait, et de notifier ensuite ces derniers aux entreprises par ordres de services signés du maître d'ouvrage ;



Qu'il incombait en effet à l'équipe des maîtres d'oeuvre et à l'OPC d'éclairer le maître d'ouvrage sur les conséquences du retard initial en lui recommandant clairement de 'recaler' le planning de travaux et de renoncer à exiger le respect d'un délai d'exécution global de 42 mois rendu impossible à tenir suite à la survenance au début du chantier des aléas précédemment évoqués, ce qu'ils ne justifient pas avoir fait ;



Considérant que l'équipe des maîtres d'oeuvre composée de la société AIA ARCHITECTES, de la société AIA INGENIERIE venant aux droits de la société CERA et de la société INGEROP a commis d'autres erreurs à l'origine du sinistre ; qu'en particulier, elle ne justifie pas avoir tenté de dissuader le maître d'ouvrage de choisir la procédure des marchés conclus par corps d'état séparés avec plusieurs dizaines d'entreprises s'agissant d'un chantier qui réunissait 35 lots techniques ;





Que profane en matière de chantier, l'INSTITUT [Établissement 1] ne pouvait pas avoir conscience des risques et des inconvénients mis en évidence par l'expert et résultant du choix de la procédure de marchés par corps d'état séparés, par rapport au choix d'une entreprise générale qui aurait confié l'exécution de travaux à des sous-traitants; que l'expert a estimé qu'en laissant le maître d'ouvrage s'engager dans la voie des marchés par corps d'état séparés, alors que ce choix , par les difficultés qu'il renferme, n'avait 'aucune chance de réussir sans graves contentieux', les maîtres d''uvre portent une part de responsabilité dans la désorganisation de l'opération (cf chapitre 5 P11) ;



Que l'expert a clairement mis en évidence qu'un marché global conclu avec une entreprise générale faisant appel à des sous-traitants aurait facilité le déroulement du chantier en soulignant que cette dernière aurait eu pour sa part les moyens de faire céder les entreprises sous-traitantes sur la planification de leurs tâches ; (cf chapitre 4 P.16-17)







Que les maîtres d'oeuvre qui ont rédigé le CCAP sont également responsables de ses imprécisions et de ses contradictions avec les pièces annexées étant rappelé qu'en cas de divergence entre des documents, c'est l'ordre de préséance des documents annexés au CCAP ou au CCTP qui prévaut ; que l'expert a en particulier relevé que deux calendriers prévisionnels sont cités sur la même ligne au 2° de l'article 2.1.1 du CCAP à savoir le 'calendrier prévisionnel enveloppe contractuel des travaux' et le 'calendrier prévisionnel détaillé indicatif travaux', ce qui crée nécessairement une ambiguïté que l'expert a tranchée en retenant le seul calendrier exploitable à savoir le 'calendrier enveloppe tous corps d'état' pourtant cité après celui-ci (cf chapitre 4 § 4.4.1) ; que les lacunes du CCAP ont elles aussi contribué à perturber l'avancement du chantier et joué un rôle dans le retard;



Que surtout, le préjudice subi par la société HERVE est lié à l'allongement des délais du chantier; que sur ce point, l'expert a aussi relevé que le rédacteur du CCAP a inscrit deux fois certaines pièces ce qui met de la dyscohérence dans l'ordre de préséance des documents (cf exemples chapitre 4 P19 et 20) ;



Qu'enfin, si l'OPC anciennement COPIBAT 'est le premier responsable des deux plannings qu'il a établis' et que l'expert a qualifiés d''indigents', il incombait aux maîtres d'oeuvre de relever leur insuffisance pour inviter le maître d'ouvrage à rappeler à l'OPC ses obligations même si l'expert a rappelé à juste titre qu'ils n'étaient pas chargés d'établir ces plannings et qu'ils ne pouvaient pas se substituer à l'OPC dans cette tâche (cf Chapitre 5 P12);



Qu'en conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité des maîtres d'oeuvre, à savoir la société AIA ARCHITECTES. la société AIA lNGENIERIE venant aux droits de la société CERA et la société INGEROP ;



Considérant que tout au long de ses opérations, l'expert a mis en évidence les carences de la société COPIBAT dans sa mission d'OPC ; qu'il convient de souligner que cette dernière a accepté sa mission en connaissant les difficultés engendrées par le choix de la procédure des marchés par corps d'état séparés et les limites de ses propres pouvoirs à l'égard des entreprises, même si l'expert a indiqué ne pas comprendre qu'elle ait accepté un cahier des charges aussi lourd;



Que comme les maîtres d''uvre, l'OPC COPIBAT ne démontre pas avoir tenté de dissuader le maître d'ouvrage, profane pour se lancer dans un projet aussi lourd, de choisir de traiter par corps d'états séparés ;



Considérant qu'il incombait aussi à l'OPC COPIBAT de conseiller au maître d'ouvrage de décaler le délai imparti aux entreprises pour exécuter leurs travaux le calendrier initial étant devenu périmé par suite d'aléas extérieurs aux parties au litige ;



Qu'il ressort du rapport d'expertise que si l'OPC COPIBAT a établi une succession d'une demi-douzaine de calendriers de mars à octobre 2003, elle ne les jamais actualisés et s'est contentée de pointer l'avancement réel des travaux par rapport au calendrier 'idéal' inclus dans les marchés des entreprises (cf Chap 3 P 43 );



Qu'alors que l'un des rôles de l'OPC est d'informer constamment les entreprises des dates auxquelles chacune d'entre elles devra accomplir ses travaux, l'expert a souligné que ses 7 calendriers sont restés identiques 'à la seule différence que des lignes s'alignaient verticalement sur la date de production du calendrier' et qu'ils 'ne comportent même pas d'indication sur les dates auxquelles les divers travaux ont été réellement exécutés ' (cf Chapitre 5 P17) ;



Que l'expert a également relevé que les comptes rendus de réunion de coordination (CCRC) sont reproduits quasiment à l'identique sans mise à jour des thèmes non traités qui n'ont pas fait débat ; qu'il a ainsi constaté une absence de mise à jour alors que certaines indications sont devenues inadéquates (cf P 19 chapitre 5) ;



Que si , comme il l'a ajouté à juste titre, ce n'est pas cela qui a entravé la marche de l'opération, cela montre au minimum un défaut d'attention du rédacteur de ces CRRC qui ne devait pas les relire beaucoup avant de les diffuser et qui de ce fait n'incitait pas les lecteurs à y attacher trop d'importance;



Que comme l'a souligné l'expert, le retard de démarrage des travaux lui a pourtant donné un délai supplémentaire pour réussir la mise au point des calendriers détaillés et pour recaler l'opération au fur et à mesure que les retards initiaux s'accroissaient ; que l'expert a également relevé que la société COPIBAT a manqué de réactivité face aux aléas (cf Chapitre 5 P33) ;



Considérant qu'analysant les comptes rendus de réunion de coordination (dits CRRC), l'expert a relevé que la société COPIBAT aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société EGIS BATIMENTS MANAGEMENT s'est heurtée à la difficulté d'obtenir des entreprises les pièces qu'elle leur demandait étant précisé qu'elle n'avait aucun pouvoir coercitif à leur égard;



Qu'après avoir relevé cette difficulté du CRRC 28 au CRRC 33, la société COPIBAT aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société EGIS BATIMENTS MANAGEMENT a fini par faire disparaître ce tableau à partir de son CRRC n°35, c'est à dire 10 mois après le début de l'opération ; que l'expert en a conclu à juste titre à une 'erreur de méthode ' ; que si elle avait alerté les maîtres d''uvre sur ses difficultés, elle aurait en principe pu obtenir une intervention de leur part à l'égard des entreprises ;



Considérant en définitive qu'il s'avère que les défaillances de la société AIA ARCHITECTES, de la société AIA INGENIERIE venant aux droits de la société CERA, de la société INGEROP d'une part et de la société COPIBAT d'autre part ayant ensemble contribué à la survenance du sinistre, le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu leur responsabilité et les a condamnées in solidum à payer à la société HERVE :

- la somme de 417.070 € HT en réparation de ses dommages subis dans l'exécution de ses travaux pour les phases 0 et 1 de l'opération litigieuse,

- avec intérêts au taux légal à compter du jugement du 2 avril 2014 ;



Considérant qu'au regard de la gravité des fautes commises et de leur importance dans la survenance du sinistre, le jugement sera également confirmé sur la répartition des responsabilités entre l'équipe des maître d''uvres ;



Qu'en conséquence, la société AIA ARCHITECTES, la société AIA INGENIERIE venant aux droits de la société CERA, la société INGEROP supporteront in solidum 45% du montant des condamnations et la société EGIS BATIMENT venant aux droits de la société COPIBAT 55% ;





Considérant que dans leurs rapports internes, la société AIA ARCHITECTES et la société AIA INGENIERIE demandent que les sommes imputées à la maîtrise d'oeuvre soient réparties au sein de leur équipe au prorata des honoraires réellement perçus entre les sociétés AIA ARCHITECTES et AIA INGENIERIE d'une part et lNGEROP d'autre part tandis que le bureau INGEROP demande que les sommes imputées au groupement de maîtrise d'oeuvre soient reparties par tiers entre les sociétés AIA ARCHITECTES, AIA INGENIERIE et INGEROP ;



Considérant que les sociétés AIA ARCHITECTES et AIA INGENIERIE n'apportent aucun élément sur le montant des honoraires perçus par les maîtres d''uvre ou sur leur montant en pourcentage ; que par ailleurs, il n'est pas soutenu qu'une convention ait été signée entre les sociétés AIA ARCHITECTES , AIA INGENIERIE et INGEROP pour répartir une éventuelle condamnation à leur encontre ; que dans ces conditions, dans leurs rapports internes, le jugement sera confirmé en ce qu'il a fixé une répartition par tiers, à savoir 15% chacune ;



Que cette répartition interviendra également pour les condamnations prononcées par le présent arrêt au titre des dépens et des frais irrépétibles ;



Considérant que la compagnie ALLIANZ GLOBAL CORPORATE § SPECIALTY SE venant aux droits d'ALLIANZ GLOBAL CORPORATE § SPECIALTY (France) SA, elle même venant aux droits d'AGF IART, en sa qualité d'assureur de la société INGEROP ne conteste pas sa garantie mais oppose au visa de l'article L112-6 du code des assurances et sans susciter de discussion sa franchise de 100.000 € et son plafond de garantie annuelle de 7.600.000 €, tous sinistres confondus; qu'elle sera donc condamnée in solidum avec son assurée, dans les limites de sa garantie et le jugement également confirmé de ce chef ;



Considérant qu'il sera statué sur les dépens et frais irrépétibles dans les termes du dispositif ;





PAR CES MOTIFS,



La cour,



Confirme le jugement sauf en ce qu'il a laissé une part de 5% à la charge de L'INSTITUT [Établissement 1] dans la répartition de la charge finale des frais irrépétibles et des dépens ;



Déboute les parties de leurs autres demandes;



Statuant à nouveau et y ajoutant,



Condamne in solidum la société AIA ARCHITECTES. la société AIA lNGENIERIE venant aux droits de la société CERA, la société INGEROP, la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY ( France) venant aux droit de la société AGF IART en qualité d'assureur de la société INGEROP et la société EGIS BATIMENT exerçant sous le nom commercial de IOSIS MANAGEMENT venant aux droits de la société COPIBAT à payer à la société HERVE la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile;



Condamne in solidum la société AIA ARCHITECTES, la société AIA INGENIERIE venant aux droits de la société CERA, la société INGEROP, la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY (France) venant aux droit de la société AGF IART en qualité d'assureur de la société INGEROP et la société EGIS BATIMENT exerçant sous le nom commercial de IOSIS MANAGEMENT venant aux droits de la société COPIBAT aux dépens de première instance et d'appel, qui comprendront les honoraires de l'expert judiciaire ;





- Répartit la charge finale de l'intégralité des condamnations prononcées, y compris les frais irrépétibles et les dépens de la manière suivante:

- 55 % a la charge de la société EGIS BATIMENT exerçant sous le nom commercial de IOSIS MANAGEMENT venant aux droits de la société COPIBAT,

- 15 % a la charge de la société AIA ARCHITECTES,

- 15 % a la charge de la société AIA INGENIERIE venant aux droits de la société CERA,- 15 % a la charge de la société INGEROP garantie par la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY ( France) venant aux droits de la société AGF IART en qualité d'assureur de la société INGEROP, dans les limites de sa police ;



- Autorise le recouvrement des dépens par les avocats de la cause dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.













LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.