6 septembre 2016
Cour d'appel de Versailles
RG n° 15/00601

12e chambre

Texte de la décision

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES



FS

Code nac : 30Z



12e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 06 SEPTEMBRE 2016



R.G. N° 15/00601



AFFAIRE :



SCI IMEFA 131

...



C/

SA BUREAU VERITAS - REGISTRE INTERNATIONAL DE CLASSIFICATION DE NAVIRES ET D'AERONEFS









Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 15 Janvier 2015 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 8

N° Section : 0

N° RG : 12/01393



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

-Me Stéphane CHOUTEAU

-Me Irène FAUGERAS-CARON







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SIX SEPTEMBRE DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :



SCI IMEFA 131

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentant : Me Stéphane CHOUTEAU de l'ASSOCIATION AVOCALYS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire: 620 - N° du dossier 002123

Représentant : Me Salah GUERROUF, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1952



SAS UNIBIENS

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Stéphane CHOUTEAU de l'ASSOCIATION AVOCALYS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire: 620 - N° du dossier 002123

Représentant : Me Salah GUERROUF, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1952



APPELANTES

****************





SA BUREAU VERITAS - REGISTRE INTERNATIONAL DE CLASSIFICATION DE NAVIRES ET D'AERONEFS

N° SIRET : 775 69 0 6 211

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentant : Me Irène FAUGERAS-CARON de la SELARL DES DEUX PALAIS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 068 - N° du dossier 518772

Représentant : Me Patricia COLETTI de la SELAS CPC & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0567



INTIMEE

****************



Composition de la cour :



En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 24 Mai 2016 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller chargé du rapport.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :



Mme Dominique ROSENTHAL, Président,

Monsieur François LEPLAT, Conseiller,

Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller,



Greffier f.f., lors des débats : Monsieur James BOUTEMY,







Par acte sous seing privé en date du 28 septembre 2007, la SCI IMEFA 131 et la société UNIBIENS ont donné un bail à la SA BUREAU VERITAS un immeuble à usage de bureaux, un restaurant interentreprise et des emplacements de stationnement couverts pour une durée de dix ans à compter du 1er octobre 2007 moyennant un loyer avec paliers successifs.



Un litige est apparu entre les parties sur les honoraires du gestionnaire de l'immeuble et la SA BUREAU VERITAS a fait assigner par actes d'huissier des 20 et 23 janvier 2012 la SCI IMEFA 131 et la SAS UNIBIENS devant le tribunal de grande instance de Nanterre en contestation des honoraires de gestion facturés.



Par jugement en date du 12 janvier 2015, le tribunal de grande instance de Nanterre:

- déboute la société UNIBIENS de sa demande de mise hors de cause,

- dit irrecevable comme prescrite la demande de la société BUREAU VERITAS de nullité du mandat de gestion entre la société IMEFA 131 et la société UNIBIENS,

- déboute la société IMEFA 131 de sa demande de paiement des loyers ayant fait l'objet d'une franchise dans le bail,

Avant dire droit sur la nature et le montant des sommes dues au titre des honoraires du gestionnaire et sur le montant des sommes dues au titre des charges:

- ordonne une expertise et commet pour y procéder:

monsieur [W] [O] [Adresse 4]

Tél : XXXXXXXXXX Port. : XXXXXXXXXX Email ;[Courriel 1]

qui aura pour mission de:

*convoquer les parties en cause ainsi que les avocats par lettre recommandée avec accusé de réception,

*se faire remettre sans délai par les parties ou par tout tiers détenteur les documents qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission,

*recueillir les déclarations des parties éventuellement celles de toutes personnes informées,

*déterminer la nature et le coût des prestations fournies à compter du 1 er janvier 2009 et jusqu'au 31 décembre 2013 par la société UNIBIENS en tant que gestionnaire de l'immeuble donné en location par la société IMEFA 131 à la société BUREAU VERITAS,

*en prenant en considération le calcul ainsi réalisé du montant des honoraires du gestionnaire ainsi que de toutes autres sommes dues en exécution du contrat de bail du 28 septembre 2007 faire le compte entre la société IMEFA 131 et la société BUREAU VERITAS à compter du 1er janvier 2009 et jusqu'au 31 décembre 2013 afin de déterminer s'il existe un solde en faveur de l'une ou l'autre des parties au bail au titre des charges en distinguant celles correspondant aux honoraires du gestionnaire de l'immeuble et les autres charges,

*faire toutes observations utiles au règlement du litige,

- dit que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu'il déposera son rapport au greffe du tribunal, Service des expertises - Extension du Palais de Justice [Adresse 5], dans le délai de 8 mois à compter de l'avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle ;

- dit qu'à l'issue de la première réunion, l'expert soumettra au magistrat chargé du contrôle des expertises et communiquera aux parties la liste des pièces nécessaires à sa mission, le calendrier de ses opérations, un état prévisionnel détaillé de ses frais et honoraires et, en cas d'insuffisance manifeste de la provision allouée, sollicitera la consignation d'une provision complémentaire ;

- dit que l'expert devra fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l'article 276 du code de procédure civile et rappelons qu'il ne sera pas tenu de prendre en compte les observations on réclamations tardives ;

- désigne le magistrat chargé du contrôle des expertises pour suivre la mesure d'instruction et statuer sur tous incidents ;

- dit que l'expert devra rendre compte à ce magistrat de l'avancement de ses travaux d'expertise et des diligences accomplies et qu'il devra l'informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l'exécution de sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile ;

- fixe à la somme de 4 000€ la provision à valoir sur la rémunération de l'expert qui devra être consignée par la société BUREAU VERITAS èntre les mains du Régisseur d'avances et de recettes de ce tribunal, dans le délai de 4 semaines à compter de la présente décision, sans autre avis ;

- dit que, faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation de l'expert sera caduque et privée de tout effet ;

- sursoit à statuer sur toutes autres demandes,

- ordonne l'exécution provisoire de la mesure d'instruction,

- renvoie l'affaire à l'audience de mise en état du 13 mars 2015 pour retrait du rôle sauf observations contraires des parties ou radiation dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise,

- réserve les dépens.



Par déclaration du 20 janvier 2015, la SCI IMEFA 131 et la SAS UNIBIENS ont interjeté appel de la décision.



Par dernières conclusions signifiées par RPVA le 29 mars 2016, la SCI IMEFA 131 et la SAS UNIBIENS demandent à la cour,

Vu le bail du 28 septembre 2007,

Vu le mandat de gestion du 1er janvier 2003 et ses avenants successifs

Vu les dispositions de l'article 1134, 1170, 1171 et 1174 du code civil,

Vu les dispositions de la loi du 2 janvier 1970 régissant les agents immobiliers,

Vu les dispositions des articles L.110-4 du code de commerce, de:

- débouter la société BUREAU VERITAS de ses demandes et prétentions,

-confirmer le jugement attaqué ayant jugé prescrite la demande en nullité du mandat des sociétés appelantes formée par la société BUREAU VERITAS et ce, en application des dispositions combinées des articles L.110-4 du code de commerce et 2224 du code civil,

- à titre subsidiaire de juger réguliers le mandat de gestion initial n°81 du 30 décembre 2002 des sociétés appelantes ainsi que de leurs avenants ultérieurs successifs au regard des dispositions de la loi HOGUET du 2 janvier 1970,

- juger que l'immeuble donné à bail à la société BUREAU VERITAS est bien inclus dans la liste des immeubles donnés en gestion à la société UNIBIENS en vertu de l'avenant d'extension d'assiette du 30 avril 2007 du mandat initial n°81 du 1er janvier 2003,

- infirmer le jugement rendu le 15 janvier 2015 par le tribunal de grande instance de Nanterre mais seulement en ce qu'il a débouté la société IMEFA 131 de sa demande de condamnation de la société BUREAU VERITAS à lui payer le montant des honoraires de gestion dont celle-ci est débitrice ainsi que celui de la franchise d'un an de loyer qui lui avait été accordée faute d'avoir justifié dans les délais et formes requises par le bail de la réalisation effective de ses travaux d'aménagements intérieurs,

statuant à nouveau:

Au titre des honoraires de gestion:

- juger que la société BUREAU VERITAS est débitrice des honoraires de gestion qui lui ont été refacturés à concurrence de 2,40 % du montant des loyers hors taxes et hors charges par la société IMEFA 131 sur la période courant du 1er trimestre 2009 jusqu'au 4 ème trimestre 2015 conformément aux stipulations de l'article 19 des conditions générales du bail, - juger que la société BUREAU VERITAS est débitrice de la somme globale de 508.803,85 € HT, soit 610.564,62 € TTC au titre des honoraires de gestion sur la période courant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2015 et ce, ainsi qu'il ressort du tableau du montant des honoraires de gestion figurant dans les deux attestations des 16 avril 2015 et 18 mars 2016 du commissaire aux comptes de la société IMEFA 131 ainsi que du second tableau desdits honoraires établi par la société IMEFA 131, déduction faite du montant desdits honoraires payés par la société BUREAU VERITAS sur la période 2009/2015 au taux de 1 %,

En conséquence :

- condamner la société BUREAU VERITAS à payer à la société IMEFA 131 la somme de 610.564,62 € TTC correspondant au montant des honoraires de gestion dus sur la période courant du 1er trimestre 2009 au 4ème trimestre 2015 et ce, avec intérêts de retard à compter de leur date d'exigibilité et leur capitalisation dans les conditions prévues par l'article 1154 du même code pour lesdits honoraires échus depuis plus d'un an,

Au titre du remboursement de la franchise d'un an de loyer hors taxes et hors

charges:

- constater que la société BUREAU VERITAS n'a pas respecté les obligations mises à sa charge par l'article 5 des conditions particulières du bail du 28 septembre 2007 sur les modalités de réalisation de ses travaux d'aménagements dans les locaux qui lui ont été donnés à bail par la société IMEFA 131,

- condamner la société BUREAU VERITAS à payer à la société IMEFA 131 la somme de 6.518.200 € TTC stipulée dans le bail à titre de franchise de loyer avec intérêts de retard à compter du 1er octobre 2008 et capitalisation des intérêts échus depuis plus d'un an à compter de cette date conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil.

En toute hypothèse:

- condamner la société BUREAU VERITAS à payer à la société IMEFA 131 la somme de 30.000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société BUREAU VERITAS aux dépens lesquels seront recouvrés par Maître Stéphane CHOUTEAU, avocat à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



Par dernières conclusions signifiées par RPVA le 6 avril 2016, le BUREAU VERITAS REGISTRE INTERNATIONAL DE CLASSIFICATION DE NAVIRES ET D'AÉRONEFS prie la cour:

Vu la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et le décret n° 72-678 du 20 juillet 1972,

Vu l'article 1134, alinéa 3, du code civil,

Vu l'abus de droit,

Vu le contrat de bail en date du 28 septembre 2007, de:

A titre principal:

- confirmer le jugement du 15 janvier 2015:

o en ce qu'il a débouté la société UNIBIENS de sa demande de mise hors de cause, o en ce qu'il a débouté la société IMEFA 131 de sa demande de condamnation de la

société BUREAU VERITAS à lui verser la somme de 5 450 000€ HT au titre de la franchise de loyer,

- infirmer le jugement du 15 janvier 2015:

o en ce qu'il a jugé prescrite la demande de nullité du mandat n° 81 formée par la

société BUREAU VERITAS,

o en ce qu'il a jugé que la société IMEFA 131 était fondée sur le principe à imputer

à la société BUREAU VERITAS des honoraires de gestion,

En conséquence et statuant à nouveau,

- dire que les mandats de gestion n° 81 et n° 265 entre la société IMEFA 131 et la société UNIBIENS sont nuls et de nul effet ;

- dire en conséquence que la société UNIBIENS ne peut percevoir quelque somme que ce soit à ce titre et qu'aucun honoraire de gestion ne peut être imputé à la société BUREAU VERITAS,

- ordonner solidairement aux sociétés IMEFA 131 et UNIBIENS le remboursement des sommes versées par la société BUREAU VERITAS au titre des honoraires de gestion depuis la conclusion du bail, avec intérêts capitalisés à compter du 29 septembre 2010 ;

- ordonner aux sociétés UNIBIENS et IMEFA 131 d'émettre les avoirs correspondants,

- débouter les sociétés IMEFA 131 et UNIBIENS de l'ensemble de leurs demandes ;

- condamner solidairement les sociétés UNIBIENS et IMEFA 131 à verser à la société

BUREAU VERITAS la somme de 50 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement les sociétés UNIBIENS et IMEFA 131 aux entiers dépens,

lesquels comprendront l'ensemble des frais d'huissier exposés antérieurement à la présente procédure.

A titre subsidiaire:

si par extraordinaire, la cour devait sur le principe juger la société IMEFA 131 fondée à imputer des honoraires de gestion à la société BUREAU VERITAS

- juger abusifs les honoraires du gestionnaire facturés à la société BUREAU VERITAS par la société UNIBIENS ;

A titre plus subsidiaire encore:

Si la cour l'estimait nécessaire, la société BUREAU VERITAS sollicite la désignation de tel expert qu'il lui plaira qui aura pour mission de:

* examiner le bail, le mandat de gestion, les facturations relatives au mandat de gestion et tout autre document qu'il estimerait utile ;

*déterminer la nature des prestations effectivement réalisées et facturées par la société

UNIBIENS à la société BUREAU VERITAS ;

* déterminer si les prestations facturées correspondent à des prestations bénéficiant effectivement au bien loué ou à des prestations participant par nature de la gestion du patrimoine des bailleurs ;

*donner à la cour tous éléments d'appréciation permettant de chiffrer, le cas échéant, le prix des prestations effectivement fournies par la société UNIBIENS à la société BUREAU

VERITAS.



Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions des parties et au jugement déféré conformément à l'article 455 du code de procédure civile.



L'ordonnance de clôture a été prononcée le 12 mai 2016 et l'affaire a été plaidée à l'audience du 24 mai 2016.



MOTIFS



Sur l'existence du mandat de gestion et sa validité:



La facturation de frais de gestion suppose l'existence d'un mandat de gestion stipulant ces frais. En l'espèce la société IMEFA 131 verse aux débats un mandat de gestion n° 81 conclu entre les SCI dénommées IMEFA dont la liste est jointe en annexe et la société UNIBIENS, l'annexe ne comportant cependant pas mention de la SCI IMEFA 131. Cependant ce mandat comporte également un article 18 envisageant de la façon suivante les modifications du patrimoine du mandant: 'en cas d'apport au mandant d'un nouvel immeuble, ce dernier transmettra au mandataire le dossier de gestion de l'immeuble, le mandataire établira un avenant au présent mandat modifiant l'article 2 du mandat à la nouvelle date d'effet', avenant dont l'article 20 stipule qu'il ne pourra être qu'un écrit comportant une date d'effet. Un avenant du 30 avril 2007, inscrit au registre des mandats sous le n° 123, faisant expressément référence au mandat n° 81, a étendu le bénéfice de ce mandat à d'autres sociétés, dont la société IMEFA 131, qui devient dès lors également mandante.



La société BUREAU VERITAS soutient que ce mandat est nul en raison de l'absence de formalisme ayant présidé à la conclusion du mandat avec la société IMEFA 131 et à sa prorogation.



Les sociétés UNIBIENS et IMEFA 131 soutiennent que la demande de nullité du mandat de gestion initial conclu entre elles au regard des dispositions d'ordre public de la loi du 2 janvier 1970 se heurte à la prescription quinquennale édictée par les articles 2224 du code civil et L.110-1 du code de commerce, qui a commencé à courir le 28 septembre 2007 date du contrat de bail et que l'exception de nullité n'est pas perpétuelle s'agissant d'un contrat qui a été exécuté.



La société BUREAU VERITAS réplique que les sociétés UNIBIENS et IMEFA 131 ne justifient pas d'un mandat licite les liant, qu'en effet le mandat n° 81 ne comporte pas la mention de la société IMEFA 131 en qualité de mandant et que l'avenant n° 7 n'est pas un mandat et ne respecte pas les dispositions légales impératives, que le mandat de gestion n° 265 conclu entre les sociétés UNIBIENS et IMEFA 131 à compter du 1er janvier 2014 est illicite, atteint d'une nullité absolue pouvant être invoquée par toute personne y ayant intérêt, que l'exception de nullité est perpétuelle, qu'en tout état de cause le délai de cinq années ne pourrait courir depuis la date du bail qui ne porte aucune mention du mandat de gestion, mandat dont elle n'a eu connaissance que le 20 novembre 2009 et qui ne lui a été communiqué que le 31 mai 2012.



Les conventions conclues avec les personnes physiques ou morales qui, d'une manière habituelle, se livrent ou prêtent leur concours aux opérations portant sur les biens d'autrui, doivent être rédigées par un écrit, lequel doit respecter les conditions de forme prescrites par l'article 72 du décret du 20 juillet 1972. A défaut, ces conventions sont nulles, d'une nullité d'ordre public qui peut être invoquée par toute personne qui y a intérêt, dans un délai de cinq ans, lequel court à compter du jour où celui qui l'invoque a eu ou aurait dû avoir connaissance de la cause de la nullité.



Le contrat de bail signé entre les parties mentionne tant la société IMEFA 131 que la société UNIBIENS en qualité de bailleur sans précision quant à l'existence d'un mandat de gestion, mais avec la précision que la société UNIBIENS, dont le nom n'est pas en caractère gras contrairement à celui de la société IMEFA 131, est titulaire de la carte professionnelle de gestion immobilière G n° 4184 pour son activité de gestion. En page 13 ce contrat mentionne 'la société IMEFA 131 fait bail et donne à loyer à la société BUREAU VERITAS qui accepte les locaux ci-après désignés', et en page 18, sous la mention 'le bailleur' figure le cachet de la seule société UNIBIENS.



Si aucune mention d'un mandat de gestion ne figure donc expressément dans ce bail, celui-ci comporte cependant les précisions ci-dessus rappelées quant à la qualité de gestionnaire de la société UNIBIENS et le bail prévoit en outre en son article 19 parmi les accessoires du loyer que le preneur remboursera au bailleur '(...) les honoraires du gestionnaire de l'immeuble', de sorte que le locataire aurait dû avoir connaissance à cette date de l'existence d'un contrat de gestion.



Cette connaissance est encore attestée par les courriers adressés par la société BUREAU VERITAS à la société UNIBIENS au cours du bail et par le compte rendu d'une réunion du 20 novembre 2009 qui s'est tenue entre bailleur et locataire pour évoquer ces frais de gestion, dans lequel il est écrit: 'entre juillet 2008 et janvier 2009 BUREAU VERITAS a repris en direct la gestion des contrats de maintenance du bâtiment ainsi que les contrats de fluides. De ce fait BUREAU VERITAS estime qu'UNIBIENS n'assumant plus la même charge de travail, le montant des honoraires de gestion 2009 et suivant devrait être révisé à due proportion (...) BUREAU VERITAS convient qu'il est redevable vis à vis du bailleur d'honoraires de gestion mais à due proportion du travail effectué'. Cet écrit caractérise suffisamment la connaissance qu'avait la société BUREAU VERITAS de l'existence d'un mandat de gestion au profit de la société UNIBIENS et ce depuis l'origine du bail et de son accord quant à la mise à sa charge de frais de gestion, quand bien même elle en contestait le montant pour l'avenir. C'est donc à juste titre que les premiers juges ont dit que le point de départ de l'action en nullité du mandat de gestion conclu entre le propriétaire et le gestionnaire des biens courait à compter de la conclusion du contrat de bail, le 28 septembre 2007, l'exception de nullité perpétuelle n'étant pas applicable à un contrat qui a été exécuté, y compris en cas de nullité d'ordre public. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit prescrite l'action en nullité du mandat de gestion. Il sera au contraire infirmé en ce que les dispositions du contrat de mandat de gestion n° 81 n'étaient pas applicables.



Sur le montant des sommes dues au titre des frais de gestion:



La société BUREAU VERITAS soutient que si des frais de gestion devaient lui être facturés, il y aurait lieu d'en constater le caractère abusif, les stipulations contractuelles caractérisant un abus de droit, qu'en effet la clause de charges imposant le remboursement de ces honoraires est potestative et que le bailleur abuse des dispositions de l'article 19 du bail, en l'absence de tout contrôle réel sur le prix des prestations compte tenu des relations entre les sociétés UNIBIENS et IMEFA 131 et particulièrement depuis que la société BUREAU VERITAS a repris une partie de la gestion des contrats de maintenance.



Les sociétés UNIBIENS et IMEFA 131 répliquent que le montant des honoraires de gestion n'est pas arrêté de façon discrétionnaire mais par négociation entre deux sociétés indépendantes.



Le montant de la rémunération du mandataire a été fixé par le mandat initial n° 81, puis modifié par l'avenant n° 2. Le fait que la société IMEFA 131 ne figure pas dans l'annexe à ce mandat est sans incidence dès lors que l'avenant n° 7, qui lui étend le mandat, fait expressément référence aux modifications intervenues en exécution de 6 avenants successifs. Le taux de 2,40% des loyers hors taxes et hors charges fixé pour la rémunération du mandataire s'agissant des loyers afférents 'aux immeubles tertiaires quelque soit la surface', est donc applicable.



La clause du contrat de bail prévoyant le remboursement des frais de gestion par le locataire n'est pas purement potestative au sens de l'article 1170 du code civil puisqu'elle dépend des frais de gestion facturés par la société UNIBIENS à la société IMEFA 131 en vertu de leurs accords et ne résulte donc pas de la seule volonté du bailleur.




Le fait que la gestion ait pu en partie être reprise par le locataire ne permet pas au juge de modifier unilatéralement les stipulations contractuelles qu'il appartient aux parties de renégocier comme elles ont d'ailleurs tenté de le faire sur ce point en novembre 2009.



La société BUREAU VERITAS sera déboutée de sa demande sur ce point.



Les factures d'honoraires de gestion versées aux débats pour les années 2008 à 2013 font application du taux de 2,40% des loyers hors charges et hors taxes stipulé entre les sociétés UNIBIENS et IMEFA 131.



Il n'est pas contesté que les charges ont été régulièrement payées jusqu'à la fin de l'année 2008, seules les années 2009 à 2015 étant concernées par ce litige. Des honoraires de gestion ont en outre été payés à hauteur de 1% des loyers par la société BUREAU VERITAS pour les années 2009 à 2015.



L'expertise a été ordonnée par les premiers juges en raison de la décision du tribunal de ne pas appliquer le mandat de gestion n° 81, modifié par les avenants successifs, de sorte que le taux de 2,40% a été considéré comme n'étant pas applicable. Dès lors que ce taux est retenu comme constituant le montant des frais de gestion pouvant être refacturés au locataire, il n'y a pas lieu de poursuivre l'expertise, ni de faire droit à la nouvelle demande d'expertise formée par la société BUREAU VERITAS. Il convient de faire application de ce taux sur les loyers hors charges et hors taxes.



Il en résulte que la société BUREAU VERITAS est redevable d'une somme de 508.803,85 € HT soit 610.564,62 € restant due en exécution du contrat de bail, cette somme tenant déjà compte de la déduction des frais de gestion payés à hauteur de 1% par mois par le locataire. Cette somme est justifiée par la production des avis de loyer, dont la base n'est pas contestée, et sur lequel ce pourcentage a été appliqué. La société BUREAU VERITAS a d'ailleurs elle-même appliqué le pourcentage d'1% de frais de gestion sur cette même base. Il sera donc fait droit à la demande sur ce point, sans qu'il y ait lieu de poursuivre l'expertise dont les premiers éléments suffisent à vérifier le décompte des sommes dues.



Les intérêts de retard seront dus sur ces sommes selon les stipulations contractuelles prévues à l'article 21 du contrat de bail soit à compter de l'expiration d'un délai de 8 jours après la date d'exigibilité de chacune des échéances impayées, et ce au taux légal, le bailleur ne demandant pas l'application de la majoration contractuelle, avec capitalisation des intérêts dans les formes de l'article 1154 du code civil, comme sollicité par la société IMEFA 131.



Sur la demande en remboursement de la franchise d'une année de loyer:



Le bailleur demande le remboursement de la franchise de 12 mois de loyer principal consentie au locataire en contrepartie de l'exécution de travaux dont il soutient qu'ils n'ont pas été effectués dans les conditions requises, ce qui justifierait l'application des dispositions de l'article 5 du contrat prévoyant que 'dans le cas où les travaux ne seraient pas réalisés, la franchise de loyer accordée par le bailleur serait annulée, le loyer devant immédiatement exigible'.



La société IMEFA 131 fait en effet valoir que le preneur était contractuellement tenu d'informer le bailleur de la nature et de la configuration des travaux exécutés en lui transmettant un dossier complet d'informations comportant plans et descriptifs 15 jours au moins avant la date du début des travaux et que cette obligation n'a pas été respectée, que les rapports transmis par la locataire sont partiels et incomplets, que l'annulation de la franchise stipulée par le bail concerne tant l'hypothèse de non-respect de la réalisation effective des travaux que le non-respect des modalités de communication et de justification de ces travaux dans les formes et délais convenus et que toute autre interprétation dénaturerait les clauses du contrat.



La société BUREAU VERITAS soutient au contraire qu'elle a réalisé les travaux convenus et que seul le défaut de réalisation de ces travaux pouvait entraîner l'annulation de la franchise qui est justifiée par le manquement du bailleur à son obligation de délivrance. Elle ajoute que cette demande qui survient plus de quatre années après les faits caractérise un manquement du bailleur à l'interdiction de se contredire.



Le chapitre V des conditions particulières prévoit au § 5 'le descriptif des travaux à réaliser par le preneur en contrepartie de la franchise accordée sera fourni par le preneur et sera envoyé au bailleur au plus tard le 31 décembre 2007 le preneur s'engage à réaliser les travaux (...). Dans le cas où les travaux ne seraient pas réalisés, la franchise de loyer accordée par le bailleur serait annulée'. Il ressort clairement de cette stipulation que l'annulation de la franchise de loyer ne vise que la non-réalisation des travaux. Le dispositif des demandes de la bailleresse ne comporte pas de prétentions relatives à la réalisation de travaux, de sorte qu'il peut être admis que ceux-ci ont été réalisés conformément aux accords des parties. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de paiement des loyers ayant fait l'objet d'une franchise dans le bail.



Sur les demandes annexes:



Il y a lieu de condamner la société BUREAU VERITAS à payer à la société IMEFA 131 la somme de 5.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



Les dépens de la première instance et d'appel seront à la charge de la société BUREAU VERITAS.



PAR CES MOTIFS



Statuant publiquement et contradictoirement



Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Nanterre en ce qu'il a:

- débouté la société UNIBIENS de sa demande de mise hors de cause,

- dit irrecevable comme prescrite la demande de la société BUREAU VERITAS de nullité du mandat de gestion entre la société IMEFA 131 et la société UNIBIENS,

- débouté la société IMEFA 131 de sa demande de paiement des loyers ayant fait l'objet d'une franchise dans le bail,



L'infirmant pour le surplus et statuant à nouveau:



Dit les dispositions du contrat de mandat de gestion n° 81, modifiés par ses avenants successifs sont applicables, et notamment en ce qu'ils prévoient des honoraires de gestion s'élevant à 2,40% du loyer hors taxes et hors charges,



Déboute la société BUREAU VERITAS de sa demande en restitution des sommes versées à ce titre et émission d'avoirs correspondants, et de sa demande d'expertise,



Condamne la société BUREAU VERITAS à payer à la société IMEFA 131 la somme de 508.803,86 € HT, soit 610.564,62 € HT au titre des honoraires de gestion restant dus pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2015, avec intérêts au taux légal à compter de chacune des échéances impayées,



Ordonne dans les conditions de l'article 1154 du code civil la capitalisation des intérêts échus depuis plus d'un an,



Y ajoutant,



Condamne la société BUREAU VERITAS à payer à la société IMEFA 131 la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,



Condamne la société BUREAU VERITAS aux dépens de première instance et d'appel et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



Signé par Mme Dominique ROSENTHAL, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.



Le greffier, Le président,

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