9 septembre 2016
Cour d'appel de Paris
RG n° 13/04222

Pôle 6 - Chambre 11

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 09 septembre 2016

(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/04222

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 mai 2012 par le Conseil de Prud'hommes de BOBIGNY- RG n° 08/01840



APPELANT

Monsieur [X] [Y] [C]

né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 1]

Chez Madame [F] - [Adresse 1]

représenté par Me Dahbia MESBAHI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0706,

substitué par Me Guillaume DEHAINE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0706



INTIMES

Me [T] [M] ès qualités de mandataire liquidateur de SECURITE INDUSTRIELLE ET RISQUES LOURDS

[Adresse 2]

représenté par Me Floriane BOUST, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque: BOB192,

substitué par Me Patrick ROULETTE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque: 192



La SELARL [A] [O] prise en la personne de Me [O] [I] ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL CROC BLANC SURVEILLANCE

[Adresse 3]

ni comparant ni représenté



SARL MD SECURITE PRIVEE

[Adresse 4]

représentée par Me Philippe RENAUD, avocat au barreau d'ESSONNE,

substitué par Me Bruno BOURGEAT, avocat au barreau d'ESSONNE



UNEDIC-CGEA IDF EST

[Adresse 5]

représenté par Me Vanina FELICI, avocat au barreau de PARIS, toque : C1985,

substitué par Me Garance COURPIED, avocat au barreau de PARIS, toque : C1985





COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 07 Avril 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Luce CAVROIS, Président de chambre

Madame Jacqueline LESBROS, Conseiller

Madame Valérie AMAND, Conseiller

qui en ont délibéré





Greffier : Mme Ulkem YILAR, lors des débats









ARRET :

- réputé contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par Madame Marie-Luce CAVROIS, Président et par Madame Ulkem YILAR, Greffier stagiaire, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.





Monsieur [X] [Y] [C] a été embauché par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er avril 2006 par la société SIRL.



Monsieur [Y] [C] était affecté sur le site de la Tour Rond Point 93 et exerçait la fonction d'agent SSIAP 1er degré.



Sa rémunération mensuelle brute moyenne s'élevait à 1 369,03 €.



La convention collective nationale applicable est celle des entreprises de prévention et de sécurité.



Le 7 janvier 2009, le tribunal de commerce de Bobigny a prononcé la liquidation judiciaire de la SARL SIRL et désigné Maître [M] en qualité de mandataire liquidateur lequel a mis fin à tous les contrats de travail des salariés affectés à la Tour Rond Point 93.



Messieurs [T], [Q] et [Y] ont été licenciés pour motif économique le 20 janvier 2009.



Messieurs [B], [U], [K] et [R] ont accepté la convention de reclassement professionnelle (CRP) le 30 janvier 2009.



Par jugement du 29 mai 2012, le conseil de prud'hommes de Bobigny a:

- mis hors de cause la SARL MD SECURITE PRIVEE,

- débouté Monsieur [Y] [C] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la SARL MD SECURITE PRIVEE de sa demande reconventionnelle,

- condamné Monsieur [Y] [C] aux éventuels dépens.



Le jugement a été notifié le 11 avril 2013, et le salarié en a formé appel le 26 avril 2013.



L'affaire est venue devant la cour, lors de l'audience du 7 avril 2016, date à laquelle les conseils des parties ont soutenu leurs conclusions visées à l'audience par le greffier.



Monsieur [Y] [C] demande à la cour de:

- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Bobigny le 29 mai 2012,

- constater les nombreuses heures supplémentaires accomplies par le salarié,

- constater l'absence d'indemnisation au titre de l'entretien de la tenue,

En conséquence,

- inscrire au passif de la société SIRL les sommes suivantes:

- rappels de salaires au titre des heures supplémentaires : 8 005,53 €,

- congés payés sur rappel de salaires : 800,55 €,

- indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement : 1 563,45 €,

- indemnité d'entretien de la tenue : 502,92 €

- article 700 du code de procédure civile : 1.500 €

En conséquence,

- inscrire au passif de la société SIRL la somme de 12 507,60 €

- juger que ces sommes seront garanties par les AGS, à l'exception de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société SIRL aux entiers dépens.



Maître [T] [M] ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL SECURITE INDUSTRIELLE ET RISQUES LOURDS (SIRL) demande à la cour de:

- confirmer les jugements rendus par le conseil de prud'hommes de Bobigny le 29 mai 2012,

- débouter les salariés de l'ensemble de leurs demandes,

- juger que la décision sera opposable à l'AGS-CGEA dans les conditions et limites de sa garantie,

- condamner les salariés aux dépens.



La SARL MAITRISE ET DISSUASION SECURITE PRIVEE (SMDS) demande à la cour de:

- déclarer irrecevables et en tout cas mal fondés les appels interjetés par les 8 appelants,

- constater que les appelants ne forment plus devant la cour aucune demande à l'encontre de la société MDS en dépit du fait que leurs appels aient été dirigés également contre cette société, malgré la mise hors de cause de cette société,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a mis hors de cause la SMDS et débouté les salariés de leurs demandes dirigées contre celle-ci,

- condamner chacun des appelants à verser à la Société MDS une somme de 300 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les appelants en tous les dépens de première instance et d'appel.



Le Centre de gestion et d'études AGS (CGEA) d'Ile de France Est demande à la cour de :

- confirmer les jugements entrepris,

- débouter les salariés de l'ensemble de leurs demandes,

à titre subsidiaire si la cour estime les licenciements dépourvus de cause réelle et sérieuse,

- limiter le quantum de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 9 522 €,

- donner acte à l'AGS de ce que sa garantie n'est pas acquise pour la demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile en application des dispositions de l'article L. 3253-6 du code du travail,

- en tout état de cause, juger que l'AGS ne devra procéder à l'avance des éventuelles créances visées aux articles L.3253-6 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-17 et suivants du code du travail (plafond 6 applicable),

- statuer ce que de droit quant aux dépens sans qu'ils puissent être mis à la charge de l'AGS CGEA IDF EST.



La SELARL [A] [O] ès qualités de mandataire liquidateur de la société CROC BLANC n'a pas comparu, ne s'est pas faite représenter et n'a pas conclu bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception signé de son destinataire.



L'arrêt sera donc réputé contradictoire.



SUR CE LA COUR



Sur la demande de mise hors de cause de la société MDS et les demandes subséquentes de cette société



La société MDS sollicite sa mise hors de cause faisant valoir qu'elle a été mise hors de cause par le conseil de prud'hommes et qu'aucune demande n'est formée contre elle en cause d'appel.



Le salarié ne formule aucune observation et ne s'oppose pas à cette demande, il y est donc fait droit, le jugement est confirmé sur ce point.




Le fait d'avoir formé appel de la totalité du jugement y compris des dispositions de mise hors de cause de la société MDS alors que les premiers juges avaient expressément relevé que la mise dans la cause de cette société n'était pas justifiée et sans d'ailleurs soutenir en appel aucune demande à l'encontre de cette société, a contraint la société MDS à exposer des frais pour se défendre en appel.



Il est donc fait droit dans la limite de 50 € à sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.



Sur les heures supplémentaires



La convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité prévoit que la durée du travail peut être organisée sous forme de cycle de telle sorte que les heures supplémentaires ne sont pas calculées dans un cadre hebdomadaire mais sur la totalité du cycle de travail ; mais le salarié fait valoir que la possibilité d'organiser le travail sous forme de cycle de travail est soumise à la condition que la répartition de la durée du travail à l'intérieur du cycle se répète d'un cycle à l'autre, or il fait valoir que ce n'était pas le cas et que la variation du travail n'intervenait pas dans un cadre légal précis.



Le salarié ajoute que s'il était loisible aux employeurs de conclure un accord de modulation conformément aux article L.3122-9 et suivants du code du travail, une telle modulation ne peut être prévue que par un accord de travail et ne peut être décidée unilatéralement par l'employeur ; il fait observer qu'en l'espèce aucun accord de modulation n'est invoqué et qu'aucun cycle ne peut être détecté au regard des plannings versés aux débats.



En conséquence la cour constate qu'en l'espèce la preuve n'est pas rapportée de l'application d'un cycle ni même de celle d'un accord de modulation.



Aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.



Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.



En l'espèce, Monsieur [Y] [C] produit des bulletins de paye qui portent mention de paiement d'heures supplémentaires.



Il estime toutefois ne pas avoir été payé de toutes les heures accomplies et verse un calcul des heures supplémentaires qu'il réclame.



Cependant, à l'instar du conseil de prud'hommes, la cour relève d'une part que dans sa demande le salarié ne déduit pas les heures supplémentaires déjà payées et d'autre part que les heures supplémentaires réclamées n'ont pas été calculées sur la durée moyenne du cycle de travail, de telles sorte que la cour constate que le salarié n'étaye pas sa demande.

Il s'ensuit qu'il convient de rejeter sa demande et de confirmer le jugement.



Sur la demande de prime d'entretien de la tenue



Le salarié fait valoir qu'il était astreint au port d'une tenue qui lui était fournie par l'employeur et qu'il avait l'obligation d'entretenir cette tenue. Il estime que l'employeur doit assumer le coût d'entretien de cette tenue et lui verser une indemnité à cet effet. Il fait valoir que M. [K], salarié de la société SIRL percevait une indemnité de nettoyage mensuelle de 15,24 euros alors que cette société ne lui a jamais rien versé. Il formule donc une demande de rappel de 15,24 € x 33 = 502,92 €.



Le mandataire liquidateur rétorque que la convention collective prévoit expressément qu'une telle indemnité est de 12,20 € par mois mais n'est réglée que 11 mois par an et sur fourniture d'un justificatif. Il ajoute qu'en l'absence de justificatif versé aux débat, aucune somme ne saurait être due.



La cour constate que le salarié ne verse aucun justificatif ni document permettant de montrer qu'il a exposé des frais d'entretien de son uniforme de telle sorte qu'il ne peut qu'être débouté de sa demande. A cet égard, le fait qu'un autre salarié de l'entreprise ait pu percevoir une telle prime ne suffit pas pour constater qu'il y aurait eu violation du principe d'égalité comme il a été soutenu à l'audience, alors qu'il n'est ni allégué ni prouvé que ce salarié ait perçu une telle prime sans justifier de ses frais.



Le jugement est donc confirmé.



Sur la procédure de licenciement



En application de l'article L.1235-15 du code du travail : «Est irrégulière toute procédure de licenciement pour motif économique dans une entreprise où le comité d'entreprise ou les délégués du personnel n'ont pas été mis en place alors qu'elle est assujettie à cette obligation et qu'aucun procès-verbal de carence n'a été établi.

Le salarié a droit à une indemnité à la charge de l'employeur qui ne peut être inférieure à un mois de salaire brut, sans préjudice des indemnités de licenciement et de préavis».



Le salarié fait valoir que la procédure de licenciement est irrégulière en l'absence de consultation des représentants du personnel. Il indique que la société SIRL comptait plus de 11 salariés mais qu'aucune élection des délégués du personnel n'est intervenue. En l'absence de démarche mise en 'uvre par son employeur pour l'organisation des élections professionnelles, il estime que la procédure n'a pas été régulièrement conduite et sollicite une indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement de 1 563,45 €.



Le mandataire liquidateur et l'AGS font valoir que la production d'un procès-verbal de carence rend inopérants les arguments du salarié et concluent à la confirmation du jugement et au rejet de cette demande.



En l'espèce, au vu de la production du procès-verbal de carence intervenu à l'issue du 2ème tour des élections des délégués du personnel et/ou des membres du comité d'entreprise du 30 décembre 2008 (1er tour 11 décembre 2008) de la société SIRL, signé du gérant et mentionnant qu'aucune liste n'a été présentée ni au premier ni au second tour, il convient de constater l'impossibilité de fait de consulter les délégués du personnel et donc de confirmer le jugement qui a rejeté la demande pour irrégularité de la procédure de licenciement fondée sur la non consultation des délégués du personnel.



Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse



Le salarié fait valoir que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse car l'employeur n'a nullement cherché à le reclasser qu'il ne lui a fait aucune proposition de reclassement et ne justifie pas de l'impossibilité de le reclasser.



Le mandataire liquidateur rétorque que la lettre de licenciement est explicite et motivée puisqu'il y est exposé qu'ensuite de la liquidation judiciaire de la société, la société cesse toute activité, ce qui a pour conséquence de supprimer tous les emplois. Il ajoute que la SIRL n'appartient à aucun groupe et qu'ayant cessé toute activité aucun poste n'était disponible.



En l'espèce, en l'absence de poursuite d'activité et après avoir constaté qu'il n'est pas discuté que tous les emplois ont été supprimés et qu'il n'est pas soutenu que la société SIRL appartienne à un groupe, la cour ne peut que constater l'impossibilité de reclassement au sein de l'entreprise ou d'un groupe et juger que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse.



Le jugement est donc confirmé sur ce point.



Sur les frais irrépétibles et les dépens



La décision du conseil de prud'hommes étant confirmée au fond, il y convient de confirmer aussi les dispositions adoptées en première instance sur les frais irrépétibles et les dépens.

Le salarié succombant en son appel, sa demande au titre des frais irrépétibles est rejetée.







PAR CES MOTIFS



La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,



Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Bobigny du 29 mai 2012 en toutes ses dispositions,



Y ajoutant,



Condamne Monsieur [X] [Y] [C] à payer à la société MD SECURITE PRIVEE la somme de 50 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d'appel,



Rappelle que cet arrêt est opposable à UNEDIC-CGEA IDF EST,



Rejette toute autre demande,



Condamne Monsieur [X] [Y] [C] aux entiers dépens.





Le greffier,Le président,

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